Texte intégral
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ma question, qui s'adresse à M. le Premier ministre, porte sur l'emploi. Voilà quelques jours, en commission des affaires sociales, j'ai interrogé M. Raoult, ministre chargé de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion, sur la situation des jeunes en matière d'emploi, qui est source d'exclusion. Il m'a alors conseillé de m'adresser au Premier ministre, ce que je fais aujourd'hui, en séance publique, sous forme d'une question d'actualité.
Ma question initiale porte sur l'évolution du nombre de chômeurs. Osez-vous confirmer, monsieur le Premier ministre, que ce nombre est en recul, alors que se développent de nouvelles vagues de licenciements, de privatisations, de restructurations chez Chausson, à Air France, au Crédit Lyonnais, chez GEC-Alsthom, chez Renault et chez bien d'autres - mon temps de parole ne suffirait pas pour les citer tous ! - avec des plans sociaux organisant le traitement du chômage et ne s'opposant nullement aux plans de licenciement, qui sont, vous le savez, très destructeurs d'emplois ?
Pensez-vous qu'en septembre prochain le chômage pourra continuer à reculer avec la venue sur le marché du travail des jeunes, diplômés ou non, ayant achevé ou arrêté leurs études ?
Vous déclarez vouloir créer 700 000 emplois. S'agit-il vraiment d'emplois ou de simples contrats ne débouchant pas forcément sur un emploi ?
Vous envisagez de ponctionner 70 milliards de francs d'un côté, 55 milliards de francs de TVA de l'autre, ce qui réduira d'autant la consommation, donc la production.
Comment pouvez-vous créer des emplois stables, fondés sur la production de richesses nationales nouvelles, alors que le pouvoir d'achat diminuera ?
Pourquoi, monsieur le Premier ministre, refusez-vous de réduire le temps de travail à trente-cinq heures, alors qu'une telle mesure pourrait aboutir à la création de 500 000 à 600 000 emplois ?
Mme Hélène Luc. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Pensez-vous vraiment que les contrats initiative-emploi, les CIE, se mettront en place durant la période des congés ?
Porteront-ils sur des activités nouvelles. Ne seront-ils pas, en fait, un nouveau moyen pour le patronat...
M. le président. Madame, je vous demande de conclure. Veuillez poser votre question.
Mme Marie-Claude Beaudeau. J'en ai déjà posé plusieurs, monsieur le président. (Sourires.)
M. le président. Posez-les tout de suite !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce sont des questions importantes, car elles concernent l'emploi.
M. le président. Le sujet qu'elles concernent n'a rien à voir avec le règlement, que je vous demande de respecter.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je ne pense pas avoir utilisé les deux minutes et demie qui me sont imparties, monsieur le président !
M. le président. Posez votre question, je vous prie !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Combien d'emplois nouveaux les 14 milliards de francs que donnera l'Etat permettront-ils de créer ?
Les jeunes, mais surtout les chômeurs, qui restent en moyenne sans emploi durant 416 jours - plus d'un an à souffrir, impuissant, c'est long, monsieur le Premier ministre ! - ne veulent plus de déclarations, de faux-fuyants ; ils attendent de nouvelles promesses, maintenant que la campagne pour l'élection présidentielle est terminée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées communistes et socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Alain Juppé, Premier ministre. Madame le sénateur, répondre à une dizaine de questions en deux minutes trente est une gageure. Je veux bien essayer, toutefois, de vous apporter quelques éléments d'information.
Vous me dites que les jeunes ont besoin de nouvelles promesses. Non, ils ont besoin d'engagements, et les engagements, le Gouvernement les a pris : les mesures, il les a décidées - elles vous seront soumises dans les prochains jours.
Permettez-moi, maintenant, de reprendre quelques-unes de vos questions.
Le nombre des chômeurs diminue-t-il ? Oui, personne ne peut le nier ; les chiffres se succèdent, mois après mois. Nous aurons très prochainement ceux du mois de mai, qui montrent que la tendance amorcée depuis le début de l'année se confirme. Mon objectif, c'est de l'amplifier.
Devons-nous être vigilants sur les plans sociaux qui sont annoncés ici ou là dans quelques grandes entreprises ? Oui ! Nous le serons de plus en plus. D'ailleurs, tout à l'heure, M. le ministre de l'industrie, dans sa réponse à une question posée sur la situation de GEC-Alsthom, sera, lui aussi, sans ambiguïté.
Je l'ai dit moi-même, je comprends parfaitement que les entreprises doivent s'adapter aux nécessités de la concurrence internationale. Mais lorsqu'un marché disparaît, l'emploi n'est pas la seule variable d'ajustement ; on peut procéder autrement qu'en agissant sur les effectifs ; il y a d'autres méthodes. Je pense, en particulier, à tout ce qui concerne l'organisation du travail, l'aménagement du temps de travail, notamment la réduction du temps de travail.
Vous avez prétendu que nous ponctionnions 70 milliards de francs .d'un côté, 50 milliards de francs de l'autre. Je crains que vous n'additionniez là des choses qui ne s'additionnent pas ! Ces chiffres ne figurent nulle part dans les textes du Gouvernement. Mais j'y reviendrai !
Sur le temps de travail, je viens de le dire, il y a beaucoup à faire, et j'invite les partenaires sociaux à faire preuve de plus d'audace dans ce domaine. Je suis convaincu que ce n'est pas par la voie législative que nous y parviendrons. Quelques expériences menées ces dernières décennies ont montré que cette voie était celle de l'échec ; je n'ai pas l'intention de l'emprunter de nouveau.
En ce qui concerne le dispositif du Gouvernement, je ne vais pas, ici, l'évoquer de nouveau dans toute son ampleur. Je veux simplement insister sur sa logique et sur sa cohérence.
Nous sommes, je crois, un très grand nombre à être convaincus que l'emploi sera créé dans les prochains mois et dans les prochaines années par les petites et moyennes entreprises. C'est la raison pour laquelle nous avons mis l'accent sur les PME, d'abord au travers de l'allégement des charges, puis avec le contrat initiative-emploi, enfin avec l'allégement de 10 p. 100 pour tous les travailleurs payés au SMIC et jusqu'à 1,2 fois le SMIC. Je citerai également les mesures en faveur des jeunes, qu'il s'agisse de l'apprentissage ou de l'insertion dans l'entreprise des jeunes,en difficulté.
Au total, en année pleine, cela représente un effort de l'ordre de 45 milliards de francs. D'où ma surprise, je le dis à la Haute Assemblée, lorsque j'entends le président du patronat français déclarer qu'il s'agit là d'une première mesure encore très faible. C'est, au contraire, une première mesure extrêmement massive et, je le dis avec beaucoup de solennité et de fermeté, si elle ne devait pas déboucher sur des créations d'emplois, il n'y aurait pas de deuxième mesure. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDE.) A ce moment-là, nous ferions le bilan, l'évaluation et nous verrions, si cela n'est pas efficace, ce qu'il faut faire à la place.
J'ajoute que le plan du Gouvernement comporte d'autres volets que l'on n'a pas suffisamment mis en exergue, peut-être par notre propre faute. Je pense, notamment, au volet logement.
J'ai été heureux de voir la Fédération du bâtiment constater, ce matin même, que 8 milliards de francs de crédits allaient être injectés par le collectif budgétaire dans le secteur du logement : il s'agit, en réalité, de 5 milliards de francs de crédits budgétaires auxquels s'ajoutent 2 milliards de francs venant de la Caisse des dépôts, qui a consenti un nouvel effort en faveur du logement intermédiaire.
S'y ajoutent des mesures fiscales largement réclamées, qu'il s'agisse de l'augmentation de la déduction forfaitaire sur les loyers ou de la réduction des droits de mutation, qui, je le dis ici devant les présidents de conseils généraux ou de conseils régionaux, sera, le moment venu, compensée au profit des collectivités concernées s'il s'avérait que le produit des droits de mutation est en baisse. Je l'ai dit dès le premier jour dans ma déclaration de politique générale, et je le confirme ici.
Enfin, notre plan comporte un troisième volet, celui des emplois de proximité, secteur dans lequel il y a beaucoup à faire.
Ce matin même, dans une entreprise lyonnaise, j'ai pu entendre, sur le terrain, le témoignage de- plusieurs expériences réalisées par des entrepreneurs, des collectivités ou des associations dans ce domaine.
L'allocation dépendance, qui fera l'objet d'un projet de loi présenté au Parlement en septembre ou en octobre prochain, ira dans cette voie, car l'emploi associatif, l'emploi de proximité est un gisement important.
Je voudrais dire, en terminant, que je suis frappé du décalage entre les commentaires que j'entends à la télévision et ce que je vois sur le terrain. (Murmures sur les travées socialistes.)
J'aurais été heureux que vous m'accompagniez ce matin, messieurs ! Si vous ne me croyez pas, la presse ainsi que de nombreux élus du Rhône pourront témoigner.
Ce matin, donc, j'ai été le témoin, dans une entreprise de 700 personnes, d'une manifestation d'optimisme, de confiance, de volonté de se battre pour créer des emplois.
Alors, sortons du scepticisme, tirons parti des mesures qui sont proposées ! Ce faisant, j'en suis sûr, nous pourrons déclencher une embauche qui rééquilibrera parce que c'est aussi notre souci - les comptes fondamentaux de l'économie française. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDE.)
Mme Hélène Luc. Nous verrons !
* M. le président. La parole est à M. François.
M. Philippe François. Monsieur le Premier ministre, vous venez de répondre en partie à, la question que je vais vous poser.
Dans la conjoncture économique actuelle, le débouché vers un avenir meilleur n'est pas aussi palpable qu'on le souhaiterait.
Les petites et moyennes entreprises, qui, vous venez de le dire, sont les plus créatrices d'emplois, attendent du Gouvernement le signe qui leur permettra de reprendre confiance pour chercher des débouchés nouveaux et, par conséquent, pour créer des emplois nouveaux.
Chacun sait que ce sont les artisans, les petits entrepreneurs qui, de tout temps; ont créé des emplois dans notre pays. Chacun sait aussi que la France excelle dans ce genre d'activités.
Vous venez de dire, monsieur le Premier ministre, que vous étiez particulièrement sensible à cet état de fait. Vous avez énuméré, la semaine dernière, un certain nombre de mesures que vous aviez prises ou qui étaient en cours d'adoption. Vous les avez rappelées, hier soir, à la télévision.
Pourriez-vous dire haut et fort devant le Sénat les encouragements que vous pouvez apporter à ces petites et moyennes entreprises, à ces artisans pour que, par-delà le développement de notre pays, ils participent aussi et surtout à la reprise de l'emploi. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Alain Juppé, Premier ministre. Monsieur François, m'adressant à un sénateur de la majorité, je me permettrai de lui demander son aide !
Vous me dites que les petites et moyennes entreprises attendent un signal. Le signal, il est donné ! On ne peut pas attendre indéfiniment qu'un signal qui vient d être donné le soit de nouveau.
Le signal, il a été donné au travers des mesures d'allégement des charges, qui sont sans précédent. D'ailleurs, le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises et d'autres encore ont qualifié le plan que j'ai présenté de cohérent et d'ambitieux. Ils ont donc bien vu ce que nous faisions !
Je rappelle que le contrat initiative-emploi se traduit par un allégement du coût du travail de 40 p. 100, dans les conditions que vous savez, pour les chômeurs de longue durée.
A cela s'ajoute une mesure qui n'avait pas été annoncée et qui consiste à alléger de 10 p. 100 le coût du travail pour tous les salariés de toutes les entreprises déjà embauchés. Ce n'est pas rien !
Il est d'autres éléments fondamentaux qui permettent aux petites et moyennes entreprises de répondre à l'attente qui est la nôtre.
Il y a, tout d'abord, l'accès au crédit. Nous savons tous, depuis très longtemps, qu'une grande entreprise et nous avons, bien sûr, besoin des grandes entreprises ! - et une petite entreprise ne sont pas égales devant le banquier. La petite entreprise soit n'obtient pas de crédit, soit l'obtient à des taux beaucoup plus élevés.
C'est la raison pour laquelle, dans le projet que le Parlement va examiner dans les prochains jours, j'ai prévu un élargissement très important des interventions de la Société française pour l'assurance du capital-risque, la SOFARIS, qui garantit, vous le savez, les crédits bancaires accordés à un certain nombre d'entreprises. J'ai prévu également un élargissement important des CODEVI vers les PME, notamment dans le secteur du commerce, et des mesures fiscales de grande ampleur pour favoriser la constitution des fonds propres des entreprises.
Voilà donc un deuxième volet qui s'ajoute à celui de l'allégement des charges, qui concerne très directement les PME.
Le troisième volet - il y a, en ce domaine, je le reconnais, encore beaucoup à faire - c'est la simplification administrative. Le poids des formalités administratives est insupportable pour les PME. Je pense notamment aux artisans ou aux toutes petites entreprises de moins de dix salariés.
J'ai annoncé que seraient mises en place, au 1er janvier 1996, trois simplifications importantes c'est un début, mais ce n'est pas négligeable : une déclaration d'embauche unique, qui se substituera aux onze formalités actuellement existantes ; une déclaration sociale unique, qui prendra la place de toute une série de liasses et de formulaires existants ; enfin, un contrat d'apprentissage, unique lui aussi, qui sera simplifié par rapport au contrat actuel.
Voilà quelques-unes des décisions que je voulais rappeler.
Je terminerai en indiquant que j'ai demandé au ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, M. Raffarin, ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances, bien entendu, de compléter ce dispositif pour l'automne avec, notamment, des réformes fiscales concernant la transmission des entreprises ou la réforme de la taxe professionnelle, de façon que nous puissions aller au rendez-vous que j'ai pris moi-même avec les PME pour octobre ou novembre avec un plan amplifié et complété.
Voilà qui me paraît de nature à débloquer l'embauche dans les PME, et donc à contribuer à la bataille pour l'emploi que nous menons. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDE.)
source http://www.senat.fr, le 21 juillet 2014
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ma question, qui s'adresse à M. le Premier ministre, porte sur l'emploi. Voilà quelques jours, en commission des affaires sociales, j'ai interrogé M. Raoult, ministre chargé de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion, sur la situation des jeunes en matière d'emploi, qui est source d'exclusion. Il m'a alors conseillé de m'adresser au Premier ministre, ce que je fais aujourd'hui, en séance publique, sous forme d'une question d'actualité.
Ma question initiale porte sur l'évolution du nombre de chômeurs. Osez-vous confirmer, monsieur le Premier ministre, que ce nombre est en recul, alors que se développent de nouvelles vagues de licenciements, de privatisations, de restructurations chez Chausson, à Air France, au Crédit Lyonnais, chez GEC-Alsthom, chez Renault et chez bien d'autres - mon temps de parole ne suffirait pas pour les citer tous ! - avec des plans sociaux organisant le traitement du chômage et ne s'opposant nullement aux plans de licenciement, qui sont, vous le savez, très destructeurs d'emplois ?
Pensez-vous qu'en septembre prochain le chômage pourra continuer à reculer avec la venue sur le marché du travail des jeunes, diplômés ou non, ayant achevé ou arrêté leurs études ?
Vous déclarez vouloir créer 700 000 emplois. S'agit-il vraiment d'emplois ou de simples contrats ne débouchant pas forcément sur un emploi ?
Vous envisagez de ponctionner 70 milliards de francs d'un côté, 55 milliards de francs de TVA de l'autre, ce qui réduira d'autant la consommation, donc la production.
Comment pouvez-vous créer des emplois stables, fondés sur la production de richesses nationales nouvelles, alors que le pouvoir d'achat diminuera ?
Pourquoi, monsieur le Premier ministre, refusez-vous de réduire le temps de travail à trente-cinq heures, alors qu'une telle mesure pourrait aboutir à la création de 500 000 à 600 000 emplois ?
Mme Hélène Luc. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Pensez-vous vraiment que les contrats initiative-emploi, les CIE, se mettront en place durant la période des congés ?
Porteront-ils sur des activités nouvelles. Ne seront-ils pas, en fait, un nouveau moyen pour le patronat...
M. le président. Madame, je vous demande de conclure. Veuillez poser votre question.
Mme Marie-Claude Beaudeau. J'en ai déjà posé plusieurs, monsieur le président. (Sourires.)
M. le président. Posez-les tout de suite !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce sont des questions importantes, car elles concernent l'emploi.
M. le président. Le sujet qu'elles concernent n'a rien à voir avec le règlement, que je vous demande de respecter.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je ne pense pas avoir utilisé les deux minutes et demie qui me sont imparties, monsieur le président !
M. le président. Posez votre question, je vous prie !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Combien d'emplois nouveaux les 14 milliards de francs que donnera l'Etat permettront-ils de créer ?
Les jeunes, mais surtout les chômeurs, qui restent en moyenne sans emploi durant 416 jours - plus d'un an à souffrir, impuissant, c'est long, monsieur le Premier ministre ! - ne veulent plus de déclarations, de faux-fuyants ; ils attendent de nouvelles promesses, maintenant que la campagne pour l'élection présidentielle est terminée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées communistes et socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Alain Juppé, Premier ministre. Madame le sénateur, répondre à une dizaine de questions en deux minutes trente est une gageure. Je veux bien essayer, toutefois, de vous apporter quelques éléments d'information.
Vous me dites que les jeunes ont besoin de nouvelles promesses. Non, ils ont besoin d'engagements, et les engagements, le Gouvernement les a pris : les mesures, il les a décidées - elles vous seront soumises dans les prochains jours.
Permettez-moi, maintenant, de reprendre quelques-unes de vos questions.
Le nombre des chômeurs diminue-t-il ? Oui, personne ne peut le nier ; les chiffres se succèdent, mois après mois. Nous aurons très prochainement ceux du mois de mai, qui montrent que la tendance amorcée depuis le début de l'année se confirme. Mon objectif, c'est de l'amplifier.
Devons-nous être vigilants sur les plans sociaux qui sont annoncés ici ou là dans quelques grandes entreprises ? Oui ! Nous le serons de plus en plus. D'ailleurs, tout à l'heure, M. le ministre de l'industrie, dans sa réponse à une question posée sur la situation de GEC-Alsthom, sera, lui aussi, sans ambiguïté.
Je l'ai dit moi-même, je comprends parfaitement que les entreprises doivent s'adapter aux nécessités de la concurrence internationale. Mais lorsqu'un marché disparaît, l'emploi n'est pas la seule variable d'ajustement ; on peut procéder autrement qu'en agissant sur les effectifs ; il y a d'autres méthodes. Je pense, en particulier, à tout ce qui concerne l'organisation du travail, l'aménagement du temps de travail, notamment la réduction du temps de travail.
Vous avez prétendu que nous ponctionnions 70 milliards de francs .d'un côté, 50 milliards de francs de l'autre. Je crains que vous n'additionniez là des choses qui ne s'additionnent pas ! Ces chiffres ne figurent nulle part dans les textes du Gouvernement. Mais j'y reviendrai !
Sur le temps de travail, je viens de le dire, il y a beaucoup à faire, et j'invite les partenaires sociaux à faire preuve de plus d'audace dans ce domaine. Je suis convaincu que ce n'est pas par la voie législative que nous y parviendrons. Quelques expériences menées ces dernières décennies ont montré que cette voie était celle de l'échec ; je n'ai pas l'intention de l'emprunter de nouveau.
En ce qui concerne le dispositif du Gouvernement, je ne vais pas, ici, l'évoquer de nouveau dans toute son ampleur. Je veux simplement insister sur sa logique et sur sa cohérence.
Nous sommes, je crois, un très grand nombre à être convaincus que l'emploi sera créé dans les prochains mois et dans les prochaines années par les petites et moyennes entreprises. C'est la raison pour laquelle nous avons mis l'accent sur les PME, d'abord au travers de l'allégement des charges, puis avec le contrat initiative-emploi, enfin avec l'allégement de 10 p. 100 pour tous les travailleurs payés au SMIC et jusqu'à 1,2 fois le SMIC. Je citerai également les mesures en faveur des jeunes, qu'il s'agisse de l'apprentissage ou de l'insertion dans l'entreprise des jeunes,en difficulté.
Au total, en année pleine, cela représente un effort de l'ordre de 45 milliards de francs. D'où ma surprise, je le dis à la Haute Assemblée, lorsque j'entends le président du patronat français déclarer qu'il s'agit là d'une première mesure encore très faible. C'est, au contraire, une première mesure extrêmement massive et, je le dis avec beaucoup de solennité et de fermeté, si elle ne devait pas déboucher sur des créations d'emplois, il n'y aurait pas de deuxième mesure. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDE.) A ce moment-là, nous ferions le bilan, l'évaluation et nous verrions, si cela n'est pas efficace, ce qu'il faut faire à la place.
J'ajoute que le plan du Gouvernement comporte d'autres volets que l'on n'a pas suffisamment mis en exergue, peut-être par notre propre faute. Je pense, notamment, au volet logement.
J'ai été heureux de voir la Fédération du bâtiment constater, ce matin même, que 8 milliards de francs de crédits allaient être injectés par le collectif budgétaire dans le secteur du logement : il s'agit, en réalité, de 5 milliards de francs de crédits budgétaires auxquels s'ajoutent 2 milliards de francs venant de la Caisse des dépôts, qui a consenti un nouvel effort en faveur du logement intermédiaire.
S'y ajoutent des mesures fiscales largement réclamées, qu'il s'agisse de l'augmentation de la déduction forfaitaire sur les loyers ou de la réduction des droits de mutation, qui, je le dis ici devant les présidents de conseils généraux ou de conseils régionaux, sera, le moment venu, compensée au profit des collectivités concernées s'il s'avérait que le produit des droits de mutation est en baisse. Je l'ai dit dès le premier jour dans ma déclaration de politique générale, et je le confirme ici.
Enfin, notre plan comporte un troisième volet, celui des emplois de proximité, secteur dans lequel il y a beaucoup à faire.
Ce matin même, dans une entreprise lyonnaise, j'ai pu entendre, sur le terrain, le témoignage de- plusieurs expériences réalisées par des entrepreneurs, des collectivités ou des associations dans ce domaine.
L'allocation dépendance, qui fera l'objet d'un projet de loi présenté au Parlement en septembre ou en octobre prochain, ira dans cette voie, car l'emploi associatif, l'emploi de proximité est un gisement important.
Je voudrais dire, en terminant, que je suis frappé du décalage entre les commentaires que j'entends à la télévision et ce que je vois sur le terrain. (Murmures sur les travées socialistes.)
J'aurais été heureux que vous m'accompagniez ce matin, messieurs ! Si vous ne me croyez pas, la presse ainsi que de nombreux élus du Rhône pourront témoigner.
Ce matin, donc, j'ai été le témoin, dans une entreprise de 700 personnes, d'une manifestation d'optimisme, de confiance, de volonté de se battre pour créer des emplois.
Alors, sortons du scepticisme, tirons parti des mesures qui sont proposées ! Ce faisant, j'en suis sûr, nous pourrons déclencher une embauche qui rééquilibrera parce que c'est aussi notre souci - les comptes fondamentaux de l'économie française. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDE.)
Mme Hélène Luc. Nous verrons !
* M. le président. La parole est à M. François.
M. Philippe François. Monsieur le Premier ministre, vous venez de répondre en partie à, la question que je vais vous poser.
Dans la conjoncture économique actuelle, le débouché vers un avenir meilleur n'est pas aussi palpable qu'on le souhaiterait.
Les petites et moyennes entreprises, qui, vous venez de le dire, sont les plus créatrices d'emplois, attendent du Gouvernement le signe qui leur permettra de reprendre confiance pour chercher des débouchés nouveaux et, par conséquent, pour créer des emplois nouveaux.
Chacun sait que ce sont les artisans, les petits entrepreneurs qui, de tout temps; ont créé des emplois dans notre pays. Chacun sait aussi que la France excelle dans ce genre d'activités.
Vous venez de dire, monsieur le Premier ministre, que vous étiez particulièrement sensible à cet état de fait. Vous avez énuméré, la semaine dernière, un certain nombre de mesures que vous aviez prises ou qui étaient en cours d'adoption. Vous les avez rappelées, hier soir, à la télévision.
Pourriez-vous dire haut et fort devant le Sénat les encouragements que vous pouvez apporter à ces petites et moyennes entreprises, à ces artisans pour que, par-delà le développement de notre pays, ils participent aussi et surtout à la reprise de l'emploi. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Alain Juppé, Premier ministre. Monsieur François, m'adressant à un sénateur de la majorité, je me permettrai de lui demander son aide !
Vous me dites que les petites et moyennes entreprises attendent un signal. Le signal, il est donné ! On ne peut pas attendre indéfiniment qu'un signal qui vient d être donné le soit de nouveau.
Le signal, il a été donné au travers des mesures d'allégement des charges, qui sont sans précédent. D'ailleurs, le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises et d'autres encore ont qualifié le plan que j'ai présenté de cohérent et d'ambitieux. Ils ont donc bien vu ce que nous faisions !
Je rappelle que le contrat initiative-emploi se traduit par un allégement du coût du travail de 40 p. 100, dans les conditions que vous savez, pour les chômeurs de longue durée.
A cela s'ajoute une mesure qui n'avait pas été annoncée et qui consiste à alléger de 10 p. 100 le coût du travail pour tous les salariés de toutes les entreprises déjà embauchés. Ce n'est pas rien !
Il est d'autres éléments fondamentaux qui permettent aux petites et moyennes entreprises de répondre à l'attente qui est la nôtre.
Il y a, tout d'abord, l'accès au crédit. Nous savons tous, depuis très longtemps, qu'une grande entreprise et nous avons, bien sûr, besoin des grandes entreprises ! - et une petite entreprise ne sont pas égales devant le banquier. La petite entreprise soit n'obtient pas de crédit, soit l'obtient à des taux beaucoup plus élevés.
C'est la raison pour laquelle, dans le projet que le Parlement va examiner dans les prochains jours, j'ai prévu un élargissement très important des interventions de la Société française pour l'assurance du capital-risque, la SOFARIS, qui garantit, vous le savez, les crédits bancaires accordés à un certain nombre d'entreprises. J'ai prévu également un élargissement important des CODEVI vers les PME, notamment dans le secteur du commerce, et des mesures fiscales de grande ampleur pour favoriser la constitution des fonds propres des entreprises.
Voilà donc un deuxième volet qui s'ajoute à celui de l'allégement des charges, qui concerne très directement les PME.
Le troisième volet - il y a, en ce domaine, je le reconnais, encore beaucoup à faire - c'est la simplification administrative. Le poids des formalités administratives est insupportable pour les PME. Je pense notamment aux artisans ou aux toutes petites entreprises de moins de dix salariés.
J'ai annoncé que seraient mises en place, au 1er janvier 1996, trois simplifications importantes c'est un début, mais ce n'est pas négligeable : une déclaration d'embauche unique, qui se substituera aux onze formalités actuellement existantes ; une déclaration sociale unique, qui prendra la place de toute une série de liasses et de formulaires existants ; enfin, un contrat d'apprentissage, unique lui aussi, qui sera simplifié par rapport au contrat actuel.
Voilà quelques-unes des décisions que je voulais rappeler.
Je terminerai en indiquant que j'ai demandé au ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, M. Raffarin, ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances, bien entendu, de compléter ce dispositif pour l'automne avec, notamment, des réformes fiscales concernant la transmission des entreprises ou la réforme de la taxe professionnelle, de façon que nous puissions aller au rendez-vous que j'ai pris moi-même avec les PME pour octobre ou novembre avec un plan amplifié et complété.
Voilà qui me paraît de nature à débloquer l'embauche dans les PME, et donc à contribuer à la bataille pour l'emploi que nous menons. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDE.)
source http://www.senat.fr, le 21 juillet 2014