Texte intégral
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, l'accord qui vous est soumis aujourd'hui est particulièrement important et novateur. C'est le premier texte signé par la France avec un autre État en vue de permettre la mise en uvre d'un échange automatique d'informations à des fins fiscales sur un très large éventail de données bancaires. Cet accord est d'abord le fruit des négociations menées par la France et ses partenaires européens afin de promouvoir un échange automatique sur une base bilatérale et réciproque avec les États-Unis.
À l'origine, la loi FATCA, Foreign account tax compliance act, votée le 18 mars 2010 par le Congrès américain, impose à toutes les banques étrangères l'obligation de transmettre aux États-Unis des informations sur les comptes des citoyens américains, quelle qu'en soit la localisation. En cas de non-respect de cette obligation, une retenue à la source de 30 % est appliquée aux revenus financiers versés depuis les États-Unis vers les comptes tenus par l'établissement. La France a été à l'origine d'une démarche alternative, avec quatre de ses partenaires : l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni, appelés le « Groupe des 5 » ou G5.
Cette démarche a abouti à un modèle intergouvernemental permettant d'obtenir plusieurs avantages. D'abord, les échanges d'informations se feront d'administration à administration, ce qui offre des garanties en termes de confidentialité, de formats ou de procédures d'échange calquées sur les formats existants. Ensuite, un accord bilatéral permet de considérer que l'ensemble des institutions financières du pays signataire se conforment à FATCA et sont de ce fait dispensées de la retenue à la source, si l'accord est respecté. Enfin, les États européens ont pu négocier avec les États-Unis tant sur les modalités pratiques que sur le champ des établissements concernés. La France et ses partenaires ont surtout obtenu, par ce modèle d'accord, que les États-Unis acceptent le principe de réciprocité, de sorte qu'ils fourniront également des informations à notre administration fiscale sur des comptes bancaires détenus aux États-Unis. Je reviendrai dans un instant sur ce point car je sais que vous y êtes, à juste raison, particulièrement sensibles.
C'est donc ce modèle, proposé par la France et repris depuis par la plupart des États avec lesquels les États-Unis négocient sur ce sujet, qui a servi de cadre de référence à l'accord franco-américain signé en novembre dernier. Concrètement, l'accord fixe le cadre de l'échange automatique d'informations et précise l'ensemble des procédures que les deux États devront mettre en uvre. Les autorités françaises collecteront ainsi des informations sur les citoyens et résidents des États-Unis : identification, soldes des comptes, valeurs de rachat des contrats d'assurance-vie et revenus financiers. En adoptant, il y a un an, les dispositions depuis codifiées à l'article 1649 AC du code général des impôts et modifiées cet été en lois de finances rectificatives, le Parlement a par ailleurs adapté notre droit interne pour créer l'obligation nécessaire et la capacité de l'administration française à collecter ces informations. La première transmission est fixée au 30 septembre 2015. Elle sera ensuite annuelle.
Je souhaite revenir plus en détail sur deux points sur lesquels la présidente de la commission des affaires étrangères, notamment, m'a interrogé à la suite des débats en commission : la réciprocité et la protection des données. En réponse à la demande de la France, les États-Unis ont accepté, comme je le disais, un principe général de réciprocité qui sera mis en uvre dans les domaines, très majoritaires, où leur législation le permet. En outre, ils se sont expressément engagés à promouvoir des réformes pour parvenir à une réciprocité complète. Les États-Unis devront ainsi nous transmettre dès 2015, pour les résidents français disposant d'un compte dans un établissement américain, le numéro de compte ainsi que le montant des intérêts, dividendes et autres revenus versés ou crédités. L'identification des comptes nous permettra ensuite de demander les autres informations, notamment les soldes, au cas par cas, dans le cadre de la convention fiscale bilatérale existante. L'accord confère aussi à la France le droit de disposer de toute clause plus favorable signée par les États-Unis dans un accord de nature identique.
M. Pierre Lellouche. Cela n'a rien à voir !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Enfin, en matière de protection des données, l'accord rappelle bien que les informations échangées sont soumises au secret fiscal et qu'elles ne sont utilisables qu'à des fins fiscales, comme toute information fiscale échangée dans le cadre des conventions classiques. L'administration française échange en profondeur avec la Commission nationale de l'informatique et des libertés sur les modalités de cet accord ; et, par ailleurs, le modèle intergouvernemental FATCA a été jugé compatible avec la directive européenne par le groupe des représentants des autorités nationales et le Contrôleur européen de la protection des données.
Mais cet accord se situe dans un cadre plus large et prometteur encore. Grâce aux efforts de la France et de ses partenaires, nous pourrons bientôt instituer un système multilatéral d'échange automatique, copié sur FATCA, qui représente une chance historique de faire enfin reculer le secret bancaire. FATCA a permis de promouvoir l'échange automatique au niveau international en impliquant de nombreux États, dont des centres financiers, désormais privés d'arguments qui leur permettraient de ne pas mettre en uvre ce nouveau standard.
Dans une lettre commune datée du 9 avril 2013 et envoyée à la Commission européenne, la France et ses partenaires du G5 ont signifié leur volonté de développer un projet pilote multilatéral reposant sur un format d'échange inspiré de celui prévu dans les accords FATCA américains. Parallèlement, lors du sommet de Saint-Pétersbourg de septembre 2013, ces cinq États ont convaincu le G20 de confier à l'OCDE la réalisation d'un standard mondial, qui aurait vocation à s'appliquer aussi bien en Europe que dans le reste du monde. Le standard unique est désormais adopté par l'OCDE et sera présenté au prochain G20, auquel participera le ministre Michel Sapin, demain en Australie. Il reprend lui aussi le champ et les procédures de FATCA.
La France et ses partenaires ont parallèlement rassemblé une masse critique de quarante-sept États et territoires partenaires qui s'engagent à mettre en uvre le standard le plus tôt possible, pour un premier échange en 2017. Au moins neuf autres États devraient les rejoindre en 2018. Ils signeront des accords d'échange automatique d'informations entre eux à la fin du mois d'octobre, à l'occasion de la prochaine réunion plénière du Forum mondial pour la transparence fiscale. Bien sûr, nous espérons que ce cercle s'élargisse encore.
Enfin, l'initiative du G5 a été soutenue et reprise par le Conseil européen en vue d'une mise en uvre rapide de l'échange automatique d'informations au sein de l'Union européenne, grâce à la révision de la directive relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, qui permettra d'intégrer le standard d'échange de l'OCDE dans la législation communautaire. Le Conseil a appelé à une adoption rapide de la directive à la fin de cette année 2014.
Ce mouvement, que nous soutenons par tous les moyens, est désormais en marche. Il est irrémédiable, comme en témoigne le ralliement de plusieurs centres financier importants. Nous vous proposons aujourd'hui de franchir ensemble une nouvelle étape en ratifiant cet accord, comme l'a déjà fait cet été le Sénat.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 19 septembre 2014
M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, l'accord qui vous est soumis aujourd'hui est particulièrement important et novateur. C'est le premier texte signé par la France avec un autre État en vue de permettre la mise en uvre d'un échange automatique d'informations à des fins fiscales sur un très large éventail de données bancaires. Cet accord est d'abord le fruit des négociations menées par la France et ses partenaires européens afin de promouvoir un échange automatique sur une base bilatérale et réciproque avec les États-Unis.
À l'origine, la loi FATCA, Foreign account tax compliance act, votée le 18 mars 2010 par le Congrès américain, impose à toutes les banques étrangères l'obligation de transmettre aux États-Unis des informations sur les comptes des citoyens américains, quelle qu'en soit la localisation. En cas de non-respect de cette obligation, une retenue à la source de 30 % est appliquée aux revenus financiers versés depuis les États-Unis vers les comptes tenus par l'établissement. La France a été à l'origine d'une démarche alternative, avec quatre de ses partenaires : l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Royaume-Uni, appelés le « Groupe des 5 » ou G5.
Cette démarche a abouti à un modèle intergouvernemental permettant d'obtenir plusieurs avantages. D'abord, les échanges d'informations se feront d'administration à administration, ce qui offre des garanties en termes de confidentialité, de formats ou de procédures d'échange calquées sur les formats existants. Ensuite, un accord bilatéral permet de considérer que l'ensemble des institutions financières du pays signataire se conforment à FATCA et sont de ce fait dispensées de la retenue à la source, si l'accord est respecté. Enfin, les États européens ont pu négocier avec les États-Unis tant sur les modalités pratiques que sur le champ des établissements concernés. La France et ses partenaires ont surtout obtenu, par ce modèle d'accord, que les États-Unis acceptent le principe de réciprocité, de sorte qu'ils fourniront également des informations à notre administration fiscale sur des comptes bancaires détenus aux États-Unis. Je reviendrai dans un instant sur ce point car je sais que vous y êtes, à juste raison, particulièrement sensibles.
C'est donc ce modèle, proposé par la France et repris depuis par la plupart des États avec lesquels les États-Unis négocient sur ce sujet, qui a servi de cadre de référence à l'accord franco-américain signé en novembre dernier. Concrètement, l'accord fixe le cadre de l'échange automatique d'informations et précise l'ensemble des procédures que les deux États devront mettre en uvre. Les autorités françaises collecteront ainsi des informations sur les citoyens et résidents des États-Unis : identification, soldes des comptes, valeurs de rachat des contrats d'assurance-vie et revenus financiers. En adoptant, il y a un an, les dispositions depuis codifiées à l'article 1649 AC du code général des impôts et modifiées cet été en lois de finances rectificatives, le Parlement a par ailleurs adapté notre droit interne pour créer l'obligation nécessaire et la capacité de l'administration française à collecter ces informations. La première transmission est fixée au 30 septembre 2015. Elle sera ensuite annuelle.
Je souhaite revenir plus en détail sur deux points sur lesquels la présidente de la commission des affaires étrangères, notamment, m'a interrogé à la suite des débats en commission : la réciprocité et la protection des données. En réponse à la demande de la France, les États-Unis ont accepté, comme je le disais, un principe général de réciprocité qui sera mis en uvre dans les domaines, très majoritaires, où leur législation le permet. En outre, ils se sont expressément engagés à promouvoir des réformes pour parvenir à une réciprocité complète. Les États-Unis devront ainsi nous transmettre dès 2015, pour les résidents français disposant d'un compte dans un établissement américain, le numéro de compte ainsi que le montant des intérêts, dividendes et autres revenus versés ou crédités. L'identification des comptes nous permettra ensuite de demander les autres informations, notamment les soldes, au cas par cas, dans le cadre de la convention fiscale bilatérale existante. L'accord confère aussi à la France le droit de disposer de toute clause plus favorable signée par les États-Unis dans un accord de nature identique.
M. Pierre Lellouche. Cela n'a rien à voir !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Enfin, en matière de protection des données, l'accord rappelle bien que les informations échangées sont soumises au secret fiscal et qu'elles ne sont utilisables qu'à des fins fiscales, comme toute information fiscale échangée dans le cadre des conventions classiques. L'administration française échange en profondeur avec la Commission nationale de l'informatique et des libertés sur les modalités de cet accord ; et, par ailleurs, le modèle intergouvernemental FATCA a été jugé compatible avec la directive européenne par le groupe des représentants des autorités nationales et le Contrôleur européen de la protection des données.
Mais cet accord se situe dans un cadre plus large et prometteur encore. Grâce aux efforts de la France et de ses partenaires, nous pourrons bientôt instituer un système multilatéral d'échange automatique, copié sur FATCA, qui représente une chance historique de faire enfin reculer le secret bancaire. FATCA a permis de promouvoir l'échange automatique au niveau international en impliquant de nombreux États, dont des centres financiers, désormais privés d'arguments qui leur permettraient de ne pas mettre en uvre ce nouveau standard.
Dans une lettre commune datée du 9 avril 2013 et envoyée à la Commission européenne, la France et ses partenaires du G5 ont signifié leur volonté de développer un projet pilote multilatéral reposant sur un format d'échange inspiré de celui prévu dans les accords FATCA américains. Parallèlement, lors du sommet de Saint-Pétersbourg de septembre 2013, ces cinq États ont convaincu le G20 de confier à l'OCDE la réalisation d'un standard mondial, qui aurait vocation à s'appliquer aussi bien en Europe que dans le reste du monde. Le standard unique est désormais adopté par l'OCDE et sera présenté au prochain G20, auquel participera le ministre Michel Sapin, demain en Australie. Il reprend lui aussi le champ et les procédures de FATCA.
La France et ses partenaires ont parallèlement rassemblé une masse critique de quarante-sept États et territoires partenaires qui s'engagent à mettre en uvre le standard le plus tôt possible, pour un premier échange en 2017. Au moins neuf autres États devraient les rejoindre en 2018. Ils signeront des accords d'échange automatique d'informations entre eux à la fin du mois d'octobre, à l'occasion de la prochaine réunion plénière du Forum mondial pour la transparence fiscale. Bien sûr, nous espérons que ce cercle s'élargisse encore.
Enfin, l'initiative du G5 a été soutenue et reprise par le Conseil européen en vue d'une mise en uvre rapide de l'échange automatique d'informations au sein de l'Union européenne, grâce à la révision de la directive relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, qui permettra d'intégrer le standard d'échange de l'OCDE dans la législation communautaire. Le Conseil a appelé à une adoption rapide de la directive à la fin de cette année 2014.
Ce mouvement, que nous soutenons par tous les moyens, est désormais en marche. Il est irrémédiable, comme en témoigne le ralliement de plusieurs centres financier importants. Nous vous proposons aujourd'hui de franchir ensemble une nouvelle étape en ratifiant cet accord, comme l'a déjà fait cet été le Sénat.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 19 septembre 2014