Déclaration de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, sur le renforcement de la coopération entre la France et le Liban dans le domaine de la modernisation de l'État et de la formation des fonctionnaires, à Beyrouth le 26 septembre 2014.

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Circonstance : Voyage officiel au Liban : participation aux Rencontres des cadres dirigeants de la fonction publique, à l'institut des finances Basil Fuleiham, à Beyrouth (Liban) le 26 septembre 2014

Texte intégral

Monsieur le Ministre des Finances, M. Ali Hassan Al Khalil,
Monsieur le Ministre, Président directeur général du groupe Fransabank, M. Adnan Kassar,
Madame la Directrice de l'Institut des finances Basil Fuleihan, Mme Lamia Moubayed Bissat,
Madame la Présidente du Conseil de la Fonction Publique au Liban, Mme Fatmeh Oueidat,
Mesdames et Messieurs,
C'est un honneur pour moi de pouvoir assister aujourd'hui - avec la délégation qui m'accompagne au Liban - à cette cérémonie.
Permettez-moi pour commencer de saluer chaleureusement Monsieur Ali Hassan Al Khalil. Monsieur le Ministre, votre ministère est l'un des grands partenaires de la France. C'est sous l'impulsion des ministères des finances libanais et français et, avec l'appui de l'ADETEF, que l'Institut des finances Basil Fuleihan a été créé en 1996. Il constitue aujourd'hui encore un vecteur essentiel de coopération entre nos deux pays.
Permettez-moi également de remercier la directrice de l'Institut des Finances, Madame Lamia Moubayed, pour son invitation à participer à ce moment symbolique pour la coopération franco-libanaise.
Nous allons en effet clôturer aujourd'hui, l'un des programmes centraux mis en place par nos deux pays en matière de formation des cadres de l'administration. Co-organisées par l'Institut des finances et l'Ecole Nationale d'Administration, l'ENA française, ces rencontres permettent de fédérer des échanges entre institutions libanaises, de générer un partage d'expériences, et d'apporter à chacun de nouvelles connaissances.
Il s'agit d'un programme important qui a permis la formation de 5 promotions de cadres dirigeants de la fonction publique depuis 2010, soit plus d'une centaine de cadres et d'experts.
Je me réjouis de pouvoir saluer en ce jour, les fonctionnaires de la cinquième promotion : la promotion Jean Monnet. De pouvoir rencontrer quelques-uns de ceux qui les ont précédés ainsi que des juges, des magistrats, des diplomates, des membres des corps de contrôle et d'inspection, tous engagés pour la construction d'un Etat et d'institutions respectées de leurs concitoyens. De pouvoir échanger avec tous ces talents qui ont fait le choix de servir la puissance publique et – je reprends là les termes mêmes de votre charte – de « faire vivre les valeurs du service public ».
Dans les épreuves traversées par le Liban depuis de trop nombreuses années, dans les difficultés d'une période toute récente, vous êtes les garants de la République, du bien commun et de l'intérêt général. Car comme l'a si bien dit le parrain de votre promotion : « rien n'est possible sans les hommes, rien n'est durable sans les institutions ».
Crise politique, crise des refugiés, menace terroriste, soutenabilité des finances publiques, crise sociale… tous ces défis auxquels le Liban doit aujourd'hui faire face, sont la preuve au quotidien que l'État n'est pas le problème, mais bien la solution. C'est d'ailleurs en temps de crise que le « besoin d'État » devient plus nécessaire encore. Car ce sont les services publics que vous portez qui constituent les moteurs du progrès économique et social ainsi que les garants de la cohésion nationale et territoriale.
Mesdames et Messieurs, votre pays est actuellement confronté à des enjeux inédits, qui sont bien souvent difficiles. Pour les affronter, il vous faut innover, expérimenter, travailler autrement. Il vous faut jouer un rôle à la fois de régulation, d'anticipation et de protection.
Ces Rencontres sont pour vous, je l'espère, un moment privilégié d'ouverture, d'inspiration et de réflexion mais aussi une occasion de tisser des liens de confiance et d'engager un dialogue profond entre vos administrations. Car en tant que cadres dirigeants, c'est à vous que revient la lourde tâche d'assurer la cohérence et de conduire la modernisation de l'action publique.
En France, nous nous efforçons de relever ce défi permanent en mobilisant l'ensemble de nos agents publics. C'est pourquoi le gouvernement a engagé, depuis 2012, un vaste mouvement de réformes afin de repenser les moyens d'agir de la puissance publique et de renforcer le modèle français du service public. Notre objectif ce sont des administrations simples, transparentes et proches des citoyens ; des administrations exemplaires qui associent les agents et valorisent leurs parcours ; des administrations évolutives, capables d'anticiper l'avenir et de porter l'action publique de demain.
Pour ce faire, l'ensemble des politiques publiques sont évaluées et les cadres de l'action publique territoriale redéfini. De plus, car les agents publics sont le premier levier d'intervention de la puissance publique, j'ai engagé - avec les organisations syndicales et les employeurs publics – des négociations pour une réforme structurelle de la fonction publique. Pour la protéger, la renforcer et la moderniser.
Cette réforme de grande ampleur a vocation à traiter, conjointement, de l'ensemble des questions relatives à l'avenir de la fonction publique et à ses valeurs. Elle s'attachera notamment à mener une réflexion sur la formation des cadres de la fonction publique. Car la formation est essentielle pour accompagner le renforcement des capacités de notre action publique.
Au Liban aussi, les initiatives novatrices se multiplient. J'avais pris connaissance l'année dernière du rayonnement régional de l'Institut des Finances Basil Fuleihan à travers son réseau GIFT-MENA, auquel j'ai décidé de renouveler le soutien de la France, en janvier dernier au Koweït. Un réseau similaire, regroupant à ce jour 24 acteurs de la fonction publique libanaise, a maintenant vu le jour dans votre pays. Je tiens donc à saluer ce réseau national de formation, ses instigateurs et ses membres pour la réflexion et l'action collaborative qu'ils mènent. Nul doute que ce réseau, grâce aux savoir-faire et à l'expertise de chaque institution constituera un formidable levier afin d'améliorer l'offre nationale de formation et de promouvoir des approches concertées.
La modernisation de l'action publique est un objectif partagé par nos deux pays. C'est pourquoi j'entends réaffirmer ici la volonté qui est la mienne d'accompagner le Liban dans cette période difficile. La France, à travers l'action de ses institutions administratives, est aux côtés du Liban pour appuyer les efforts que mène votre pays en matière de réforme de son action publique et notamment de modernisation de sa fonction publique.
Ce matin, j'ai ainsi pu signer un arrangement administratif avec le ministre d'Etat de la réforme administrative, M. Nabil de Freige, et le ministre de l'Intérieur et des collectivités, M. Nouhad Machnouk.
Cet accord a pour objet de développer notre coopération autour de trois priorités communes.
1. La formation des agents de l'Etat tout d'abord. Celle-ci passe par les rencontres que nous clôturons aujourd'hui. J'en ai parlé déjà.
Le soutien de la France au Liban se manifestera également par l'appui que nous apporterons au réseau national de modernisation de la formation dans le secteur public que je viens d'évoquer. A travers le ministère dont j'ai la responsabilité, nous soutiendrons les actions conduites par ce réseau. C'est la raison pour laquelle Marie-Anne Lévêque, la directrice générale de l'administration et de la fonction publique ainsi que Nathalie Loiseau, la directrice de l'ENA, m'accompagnent aujourd'hui. L'ADETEF viendra également en appui à ce réseau national. Et, grâce à ce réseau, nous pourrons améliorer la cohérence et la mutualisation de nos échanges. Un plan d'action conjoint a pour ce faire été élaboré. Il convient désormais d'assurer rapidement sa mise en oeuvre : la France s'y est d'ores et déjà préparée.
En parallèle, l'action de l'ENA au Liban, qui est ancienne et appréciée, se poursuivra. Ce sont en effet chaque année plusieurs fonctionnaires libanais qui participent à des formations organisées par l'ENA.
Enfin, la France continuera d'accompagner ces actions de formation par un volet linguistique. Dans le cadre du pacte linguistique signé en 2010 par le Liban et l'Organisation internationale de la francophonie, la France a mobilisé un million d'euros. Depuis 2012, 483 agents de la fonction publique et 39 formateurs libanais ont ainsi pu bénéficier d'un perfectionnement en français assuré par l'Institut français du Liban. Il s'agit là d'une action au service de toutes les autres, comme le sont les actions linguistiques qui bénéficient par ailleurs à l'Institut d'Etudes judiciaires, aux forces armées libanaises, aux Forces de sécurité intérieure, à la Sûreté Générale et aux douanes.
2. Le deuxième axe de coopération, c'est la décentralisation dans laquelle s'est récemment engagé le Liban. La France, qui - je l'ai dit – conduit une réforme territoriale d'ampleur, souhaite pouvoir accompagner votre pays dans cette démarche. C'est pourquoi nous renforcerons la coopération décentralisée comme axe majeur de nos échanges bilatéraux.
Les premières Assises de la coopération décentralisée franco-libanaise qui se sont tenues en 2012 ont permis de définir - en lien avec le Comité des Maires libanais, le Bureau Technique des Villes Libanaises, le Ministère de l'Intérieur et des municipalités et le CNFPT - les contours d'un projet de formation des élus et des agents municipaux. La phase de diagnostic engagée par le CNFPT s'achèvera en 2014. Cela nous permettra en 2015 et 2016 de dessiner un projet d'élaboration de référentiels des métiers et de définir des offres de formation, selon un programme concerté avec les élus, les techniciens et les ministères concernés.
Il me semble d'ailleurs aujourd'hui, compte tenu de la transversalité des thématiques et des besoins, que les formations prévues pour ces agents municipaux pourraient être agrégées aux programmes qui seront mis en oeuvre par le Réseau national. Cela permettrait de renforcer la cohérence de l'ensemble des actions menées.
3. Enfin, notre troisième priorité commune, c'est la modernisation de l'Etat : simplification des procédures, administration numérique, programmation stratégique, promotion de la diversité et de l'égalité femme/homme, tous ces sujets sur lesquels vous avez engagé des réformes feront l'objet de nos échanges.
En vous observant, je ne peux que noter la présence marquante de la gente féminine au sein de la fonction publique libanaise. Je m'en réjouis car le renforcement du rôle des femmes dans la société est une orientation particulièrement importante. Et car l'Etat se doit d'être exemplaire aussi en matière d'égalité professionnelle. C'est la raison pour laquelle en France, nous avons signé le 8 mars 2013 - avec l'ensemble des organisations syndicales et des employeurs – un protocole d'accord historique sur cette question.
Je sais que le Liban s'est également engagé dans cette voie dès 1998, lorsqu'a été créée la Commission nationale de la femme libanaise. Votre pays a ainsi fait de l'égalité femme/homme, un axe important de la stratégie nationale libanaise. C'est là encore un des points sur lequel nos pays partagent des valeurs communes. C'est là donc, un élément majeur de notre coopération.
Ainsi, la France soutient le projet « mixité et gouvernance » lancé par l'Union pour la Méditerranée et auquel le Liban participe. Le fond engagé par la France dans ce projet cible les femmes en position de responsabilité dans les administrations. Il s'agit d'aborder les questions d'égalité dans l'administration, à la fois sous l'angle de la parité dans les hautes sphères de décision mais également sous l'angle de la prise en compte du genre dans les politiques publiques.
Mesdames et Messieurs, vous le constatez donc, sur tous ces volets, l'arrangement administratif que nous avons signé ce matin - Monsieur Nabil de Freige, Monsieur Nouhad Machnouk et moi-même - se traduira par des actions concrètes ainsi que des échanges d'expériences et de bonnes pratiques. Cet arrangement constitue ainsi un outil fédérateur. Il nous permettra de mettre en relation l'ensemble des actions menées et, au travers de ces actions, toutes les institutions qui les conduisent.
La coopération, j'en suis persuadée, est source de solidarité et de progrès. Car échanger est la meilleure façon de s'évaluer, de s'adapter et de s'améliorer. C'est pourquoi le Liban constituait pour moi - qui suis la ministre française de la décentralisation et de la fonction publique - une étape indispensable.
Aujourd'hui plus que jamais la France se doit d'être solidaire du Liban pour que l'Etat libanais, ses administrations et ses institutions puissent affronter une situation particulièrement difficile. Aujourd'hui, plus que jamais, parce que les attentes des citoyens vis à vis des administrations sont fortes, parce que les contraintes économiques sont pressantes, la France et le Liban doivent conforter leur collaboration afin de faire progresser leurs administrations. Et aujourd'hui plus que jamais, l'accord que nous avons signé témoigne de la force des liens qui unissent nos deux pays.
Je vous remercie.Source http://www.institutdesfinances.gov.lb, le 20 octobre 2014