Déclaration de Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires, sur le plan d'action pour améliorer l'accès au logement des bénéficiaires du droit au logement opposable (DALO), à Paris le 20 octobre 2014.

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Circonstance : 6e journée nationale d'échanges sur le droit au logement opposable (DALO), à Paris le 20 octobre 2014

Texte intégral

Mesdames et messieurs les représentants des associations,
Mesdames et messieurs,
Je suis très heureuse de participer à cette journée annuelle sur le Droit au logement opposable.
La mise en place du DALO, qui a aujourd'hui plus de sept ans, est une avancée incontestable de notre droit.
C'est avec beaucoup de plaisir que je suis aujourd'hui à vos côtés pour clôturer cette journée de travail et d'échanges sur la mise en oeuvre du DALO que j'ai voulu la plus mobilisatrice possible.
Permettez-moi tout d'abord avant de débuter mon propos, de saluer et de remercier chacun d'entre vous pour le travail réalisé au service de cette belle cause qu'est le droit au logement. La tache est compliquée, je le sais et la mobilisation de tous est nécessaire.
Je veux saluer mesdames et messieurs les préfets qui dans chaque territoire mettent en place la politique du logement et d'accès au logement.
Je veux également m'adresser aux élus qui agissent en faveur du DALO pour leur dire ma reconnaissance et insister sur l'importance de leur engagement dans cette politique.
Je veux aussi remercier les services déconcentrés de l'Etat qui oeuvrent, non seulement pour le bon fonctionnement de la procédure, mais aussi pour que les relogements et les hébergements soient effectués.
Je tiens à remercier également les présidents et présidentes de commission qui sont la clé de voute du fonctionnement du dispositif.
Enfin je veux saluer le secteur associatif présent aujourd'hui ainsi que le comité de suivi DALO dont la force de proposition est essentielle pour notre action commune.
C'est grâce à votre expérience de terrain, grâce à la volonté dont vous faites preuve que le droit au logement peut progresser dans nos territoires.
La mise en place du DALO nous renvoie à un combat long d'une vingtaine d'années en faveur de la reconnaissance du droit au logement comme droit fondamental.
Initiée et déclenchée par les associations qui agissent pour les mal-logés, la loi du 5 mars 2007 a été votée très largement, au-delà des clivages politiques, porte le changement de nature du droit au logement.
Mais nous savons tous ici que la mise en application de ce droit reste difficile et c'est en cela qu'il nous faut profiter de moments comme celui qui nous réunit aujourd'hui, pour réfléchir collectivement aux avancées réalisées et aux efforts qui restent à déployer pour faire mieux appliquer la loi DALO.
Pour progresser dans l'application de ce droit, il faut tout d'abord en dresser un constat réaliste et sans complaisance.
Tout d'abord, le nombre de recours déposés chaque année continue d'augmenter et des dizaines de milliers de requérants restent à reloger parmi les personnes reconnues prioritaires et devant être logées d'urgence depuis la publication de la loi.
En effet, si le nombre de relogement est aujourd'hui en progression, avec plus de 20 000 relogements effectués en 2013 (contre 10 800 en 2009), il reste à ce jour plus de 54 000 ménages à reloger, dont plus de 40 000 ménages en Ile-de-France.
L'Etat, garant du droit au logement, doit user de tous les moyens à sa disposition pour que ce droit soit effectivement appliqué.
A travers le Plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, adopté le 21 janvier 2013, le Gouvernement a pris l'engagement de remédier à l'effectivité partielle du DALO par la mise en place d'un plan d'action volontariste et mobilisateur.
Vous le savez, l'un des objectifs fixés par le plan contre la pauvreté consiste à mieux structurer l'offre d'hébergement, afin d'améliorer la prise en charge des personnes sans domicile et de favoriser leur accès ou leur maintien dans un logement.
Le plan met également au coeur des priorités du Gouvernement la prévention des ruptures, qui nécessite notamment une meilleure coordination des acteurs et un renforcement de la cohérence des réponses en matière de logement et d'hébergement, afin de donner la priorité à l'accès au logement.
Il est essentiel d'affirmer que le DALO doit avant tout permettre aux ménages d'obtenir un logement pérenne et adapté à leurs besoins. L'orientation vers des solutions d'hébergement est bien entendu incontournable pour répondre à l'urgence des situations des personnes.
Néanmoins, mon action est tournée vers la priorité à l'accès au logement pour tous.
Je suis bien consciente d'une chose : la première des entraves à l'application de la loi DALO, c'est bien l'insuffisance de l'offre de logements, et en particulier de logements abordables.
Vous le savez, le développement de l'offre de logement social et très social est une priorité du Gouvernement.
Le logement est le dernier rempart contre l'exclusion sociale. C'est le noyau de vie, qui permet de se construire personnellement et collectivement.
La crise du logement rend donc indispensable l'intervention de l'Etat, aux côtés des collectivités territoriales, pour renforcer la solidarité que notre République doit aux plus démunis.
Le « logement pour tous », c'est un logement adapté à chaque territoire, en fonction des besoins des habitants.
Il est indispensable de renforcer la production de logements sociaux mais surtout de logements très sociaux car trop de ménages n'ont pas de revenus suffisants pour accéder aux logements PLAI qui sont, comme vous le savez les logements aux loyers les plus bas.
C'est pourquoi, j'ai annoncé au congrès HLM de septembre dernier plusieurs mesures allant dans ce sens.
C'est notamment la création de 15 000 logements (5 000 par an) destinés à créer des loyers PLAI au-dessous du niveau actuel. Cette production spécifique s'ajoute à la production PLAI traditionnelle de l'Etat.
Elle s'ajoute par ailleurs au programme de PLAI adaptés dont j'ai lancé le deuxième appel à projets en mai dernier et dont j'attends des résultats positifs.
Je rappelle que cet appel à projets vise à créer dès 2014 2 000 supers PLAI et 3 000 par an à partir de 2015.
Mais c'est aussi le développement d'une offre de logement accompagné.
Un appel à projet a été lancé le 1er avril 2014 pour réaliser 10 000 logements sociaux accompagnés sur trois ans.
L'enjeu est de favoriser la coopération entre bailleurs sociaux et associations afin de faciliter l'accès au logement social de ménages cumulant des difficultés économiques et sociales. 3 millions d'euros ont été dédiés à cette action.
Au vu des résultats très encourageants de cette première session, j'ai décidé en concertation avec vous, de lancer deuxième session de l'appel à projets afin de transformer l'essai et permettre le développement de ce produit innovant.
Ce que je souhaite aujourd'hui, c'est renforcer l'implication de tous les acteurs pour mettre en place concrètement ce plan d'action DALO avec :
- La mobilisation déterminée et exemplaire de l'Etat pour porter une action plus rigoureuse
- Mais aussi la mobilisation de l'ensemble des partenaires du logement social, considérant que si l'Etat est le garant de la mise en oeuvre du droit au logement et le principal contributeur en termes de logements dédiés, il n'est pas pour autant le seul à devoir contribuer à la prise en charge du logement des personnes défavorisées, dont le DALO n'est que la manifestation la plus évidente.
Ainsi, le plan d'action contient des mesures afin de :
- Renforcer le suivi et l'implication des services de l'Etat au travers une mobilisation accrue du contingent préfectoral pour atteindre ce qui est prévu dans la loi
- Renforcer la mobilisation de nos partenaires au premier rang desquels se trouve Action Logement qui doit contribuer au relogement des ménages DALO via son contingent ainsi que les maires et les bailleurs sociaux
- Renforcer l'accompagnement des ménages.
Je veux tout d'abord que soit amélioré l'identification et le suivi des ménages bénéficiant du DALO pour que notre action soit la plus efficace possible et pour pouvoir leur proposer des candidatures en temps réel à un logement.
La mise en place de l'outil informatique SYPLO est une grande avancée et je souhaite sa généralisation.
Je veux également passer un discours de fermeté vis-à-vis de l'application de la loi.
Je tiens avant toute chose à rappeler que la circulaire du 26 octobre 2012 qui prévoit de procéder au relogement des ménages bénéficiant du DALO menacés d'expulsion avant d'octroyer le concours de la force publique doit être pleinement appliquée, en fournissant aux préfets la possibilité prévue de proposer des mesures d'accompagnement des ménages.
Je veux également parler du contingent préfectoral et de la priorité suivant laquelle le contingent de l'Etat doit être mobilisé pleinement pour les ménages prioritaires.
Je rappelle ainsi que le contingent de l'Etat doit être affecté uniquement aux personnes dites prioritaires et que la part de ces affectations dédiée aux ménages bénéficiant du DALO doit être fortement accrue dans tous les territoires où la totalité de ces ménages n'est pas relogée dans les délais réglementaires.
Accroître la proportion des ménages DALO relogés dans le contingent de l'Etat, cela passe par la signature des conventions de réservation Etat/bailleurs.
Les préfets sont tenus de désigner à chaque demandeur de logement reconnu prioritaire par la Commission de médiation, un organisme bailleur disposant de logements correspondants à la demande, en lui fixant un délai impératif de relogement.
De plus, en cas de refus du bailleur, le préfet peut attribuer un logement au ménage par arrêté.
Mais après avoir rappelé cette exigence de l'Etat, je souhaite m'adresser à nos partenaires dont le rôle est aussi fondamental.
Je veux parler du contingent d'Action Logement qui doit être mobilisé à hauteur de ce qui est prévu par la loi, c'est-à-dire 25% des attributions de logements effectuées sur leur contingent de logement réservé.
Je souhaite que soit généralisée la passation d'accords locaux avec les principaux collecteurs d'Action Logement présents dans les territoires.
L'enjeu est de mettre en place un pilotage national afin d'instaurer un lien de suivi et d'évaluation avec l'Union des entreprises et des salariés pour le logement L'efficacité du relogement des ménages DALO nécessite aussi une meilleure mobilisation des autres partenaires de l'Etat.
Ainsi, je souhaite engager une concertation avec les maires pour aborder le relogement des ménages DALO sur le territoire de leur commune.
Vous le savez comme moi, les ménages concernés ne sont pas majoritairement différents des publics déjà logés dans le parc social.
Je tiens à rappeler qu'être reconnu prioritaire et urgent dans le cadre du DALO n'est pas nécessairement lié à un niveau de ressources très faible ; cela signifie que les personnes sont mal logées au regard des critères retenus par la loi.
C'est l'unique élément qui les différencie de l'ensemble des demandeurs de logement social.
Je comprends les positions des élus qui rencontrent de réelles difficultés en fonction des problématiques internes à leurs territoires.
Néanmoins, j'ai trop entendu ces derniers temps des discours qui glissent vers une forme de stigmatisation à l'encontre des personnes reconnues DALO.
C'est pourquoi, je veux associer les élus à la procédure afin de prendre en compte leurs préoccupations légitimes en termes d'équilibre sociologique.
Je veux travailler avec eux, dans un esprit de dialogue constructif pour trouver les meilleures solutions possibles pour le plus grand nombre.
Je veux également travailler avec les bailleurs sociaux sur une meilleure politique d'attribution des logements sociaux.
Le nombre de ménages à reloger bénéficiant du DALO sera désormais inscrit dans le cadre de la gestion de la demande et de l'attribution des logements sociaux afin de faciliter les relogements.
L'attribution d'un logement à un ménage bénéficiant du DALO s'imputera en priorité sur les droits à réservation des communes faisant l'objet d'un arrêté de carence au titre de la loi SRU.
De plus, je souhaite que s'engagent des négociations sur la participation des bailleurs, au travers leurs logements non réservés, via la passation d'accords collectifs d'attribution qui incluraient les ménages DALO dans les publics cibles.
Au-delà de la mobilisation des contingents et des logements de l'ensemble des partenaires, la troisième priorité du plan d'action vise à sécuriser et à accompagner les ménages.
Tout d'abord, je sais que le manque de connaissance de la procédure du DALO pour les ménages, peut entraver son efficacité et à terme le relogement des personnes.
Je souhaite que les ménages soient mieux informés d'une part, sur la portée de la décision de la commission et notamment sur le fait que celle-ci ne les dispense pas de renouveler leur demande de logement social et, d'autre part, sur le risque de perte de chance qu'ils prennent en ne faisant pas les démarches nécessaires pour obtenir effectivement un logement social ou en refusant des propositions de logement adaptées qui leur sont faites.
Je sais par ailleurs, qu'une part importante des difficultés de la mise en oeuvre du DALO tient aussi à un déficit d'accompagnement des personnes.
Les ménages en difficulté doivent pouvoir trouver des solutions adaptée à leur situation et doivent bénéficier d'un accompagnement personnalisé.
Je veux ainsi mettre en place à chaque fois que c'est nécessaire un accompagnement et, le cas échéant, un bail glissant afin d'accélérer le relogement en combinant accompagnement et sécurisation du rapport locatif.
C'est l'objectif des crédits du Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), qui financent les diagnostics sociaux, de la gestion locative adaptée et de l'accompagnement vers et dans le logement et dont la part relative consacrée au relogement des ménages bénéficiant du DALO est accrue en 2014.
Je souhaite qu'ils soient pleinement utilisés pour donner aux ménages un soutien, que ce soit dans la phase de relogement, que dans celle du maintien dans le logement afin de stabiliser le ménage dans son nouvel environnement.
Les baux glissants dans le parc social sont un formidable moyen d'accélérer l'accès au logement des ménages bénéficiant du DALO pour ceux qui ont besoin d'une étape transitoire dans leur parcours vers le logement pérenne avec un bail classique.
Aller encore plus loin pour la sécurisation des ménages, c'est aller vers la mobilisation du parc privé.
Je veux relancer le recours à l'intermédiation locative dans le parc privé, ce dispositif étant un facteur de mixité sociale indéniable dans la mesure où il permet de diversifier la localisation des logements.
Utilisée jusqu'alors comme une alternative à l'hébergement, ces dispositifs pourront également servir à loger des ménages bénéficiant du DALO.
Enfin, j'aimerai dire un mot sur la région Ile-de-France, qui au regard du nombre de situations à examiner, de la multiplicité et des charges de travail des commissions d'attribution de logement existantes, revêt d'un enjeu tout spécifique.
L'enjeu pour cette région réside pour beaucoup à une coordination accrue et à un pilotage politique fort.
A cet égard, une commission spécifique dédiée aux relogements des ménages bénéficiant du DALO sera mis en place afin d'associer l'ensemble des acteurs du logement dans le cadre du Comité régional de l'habitat et de l'hébergement (CRHH)
Cette « cellule de suivi » ad hoc sera notamment chargée d'examiner les cas difficiles ou bloqués en associant l'ensemble des acteurs concernés afin de proposer une solution aux ménages ayant obtenu il y a longtemps une décision favorable de la commission de médiation.
De grands progrès restent à faire, c'est ce que prouvent chaque année les rapports du Comité de suivi DALO, qui insistent pour que la mise en oeuvre du droit au logement mobilise l'ensemble de la société. Je tiens, à nouveau, à vous dire combien je suis déterminée à le faire respecter.
Mesdames et Messieurs, je le répète, la loi DALO est une avancée du droit français qui mérite que l'on se mobilise.
Nous devons encore accentuer notre action pour rendre effectif sur l'ensemble du territoire ce dispositif.
Vous le savez aussi bien que moi, les personnes les plus démunies sont les plus durement touchées par la crise que nous traversons. Aussi, je veux proposer des solutions concrètes pour favoriser l'accès au logement pour tous et agir avec vous pour répondre aux attentes des personnes les plus fragiles car cela correspond à une exigence sociale et humaine que nous partageons.
Je tiens à vous remercier une nouvelle fois pour votre travail et les efforts réalisés au service de nos concitoyens.Source http://www.territoires.gouv.fr, le 23 octobre 2014