Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire,
Chers collègues,
Je voudrais faire part à mon tour aussi brièvement que possible des mesures mises en oeuvre par le gouvernement français, suite à cette contamination par la dioxine de graisses en provenance de Belgique.
Le jour de l'alerte communautaire lancée par les autorités belges, les autorités françaises ont publié un communiqué recommandant de ne pas consommer d'oeufs ou de poulets en provenance de Belgique et demandant le retrait du marché de l'ensemble des viandes de poulets , oeufs et ovoproduits originaires de Belgique, dans l'attente de résultats d'analyses.
Les services de contrôle ont aussitôt mené une enquête approfondie dans l'entreprise française d'aliments pour animaux qui, selon les informations transmises par les autorités belges, se fournissait en graisses animales auprès de l'entreprise belge incriminée. Cela a permis d'identifier les élevages qui auraient pu recevoir, en provenance de cette entreprise, des aliments ayant incorporé la graisse contaminée. Des prélèvements ont été effectués sur les aliments pour animaux, les animaux et leurs produits. Tout a été mis en oeuvre pour identifier et consigner les animaux et les produits déjà sortis de ces élevages et qui pourraient être contaminés.
Une procédure similaire a été appliquée vis à vis des élevages qui avaient reçu de Belgique des aliments complets susceptibles d'être contaminés et dont les listes ont été transmises par les autorité belges.
Par ailleurs les services de contrôles ont procédé sur l'ensemble de la filière au contrôle de retrait effectif, pour vérification , des oeufs, volailles et produits dérivés d'origine belge. Simultanément, les services de douanes mettaient en place un dispositif de contrôle dans le nord de le France permettant de s'assurer que les produits interdits de commercialisation en Belgique n'étaient pas introduits en France.
Enfin et à la suite de la décision adoptée par la Commission, un texte réglementaire (arrêté ministériel) a été pris afin de donner une base juridique nationale appropriée au dispositif d'urgence et pour l'étendre à tous les animaux et produits issus d'animaux élevés en Belgique après le 15 janvier 1999.
Cet arrêté interdit l'introduction d'animaux et de produits animaux originaires de Belgique, dans l'attente d'informations plus précises sur la source de contamination et d'assurances quant à l'identification de tous les élevages ayant reçu de la graisse contaminée.
Pour les animaux et les produits introduits en France avant l'adoption de cet arrêté, les opérateurs doivent s'assurer par des certificats ou des analyses de l'absence de contamination avant leur mise sur le marché.
Il s'agit là bien entendu d'un arrêté tout à fait transitoire dans l'attente des dernières décisions communautaires qui seront prises en comité vétérinaire permanent cette semaine.
Enfin , nous avons saisi nos instances scientifiques compétentes afin que le recours à des recherches analytiques de PCB (poly chloro biphényl) en vue de gérer cet accident sanitaire au mieux de la protection de la santé publique, soit expertisé. Cette expertise vient d'être rendue dans un sens positif par l'agence française de sécurité sanitaire des aliments. La France sera bien sur très attentive aux résultats des expertises également engagées par la Commission.
La situation est grave et exceptionnelle. Elle appelle des décisions d'aides financières rapides de la part de l'Union européenne, à l'instar de celles prises ici même, en d'autres situations de crise majeure. Il s'agit d'éviter l'effondrement d'un secteur entier de l'économie agricole européenne, de surcroît dynamique et particulièrement générateur d'emplois.
Le dernier point sur lequel je souhaite intervenir, c'est celui de la qualité et tout particulièrement celui de la qualité sanitaire de l'alimentation animale. Le fait qu'une telle contamination puisse survenir, les difficultés rencontrées pour disposer de listes d'élevages destinataires des aliments à risque, la perte de confiance extrêmement rapide du consommateur, doivent nous conduire à une réflexion de fond sur les points critiques de la filière de l'alimentation animale.
Tel est l'objet du Memorandum qui vous a été distribué, et qui détaille les arguments et les orientations qui paraissent à la France devoir être poursuivis.
Le souci de protection du consommateur doit rester notre priorité. Il doit nous pousser à avancer rapidement dans le sens d'un renforcement de la réglementation communautaire. Il nous faut également prendre en compte la demande pressante des consommateurs de disposer de produits à la fois sains et de qualité.
Or, je dois constater que malgré les enjeux sanitaires majeurs que représente la maîtrise sanitaire de la production des farines animales, malgré tous les efforts déployés par la Commission et M. le Commissaire Fischler, efforts que je voudrais saluer, l'Union européenne n'a pas su se doter d'une réglementation sanitaire harmonisée dans ce domaine.
La question de l'utilisation des farines animales est une question récurrente. Face au risque de propagation de l'encéphalopathie spongiforme bovine, des incertitudes scientifiques perdurent. Le traitement appliqué en équarrissage est il suffisamment efficace ? Toutes les mesures préventives ont elles été prises notamment en matière de sélection des sous produits et déchets valorisables pour l'alimentation animale ?.La protection du consommateur européen est elle réellement assurée alors que les matériaux à risques spécifiés, les cadavres et les saisies d'abattoirs sont encore autorisés dans plusieurs Etats membres ?.Enfin ces réglementations même imparfaites sont elles correctement appliquées?
Je suis convaincu que d'une façon générale, la production de farines animales et plus largement la production d'aliments pour animaux doit être sécurisée davantage. Pour ce faire, et à très court terme, la réglementation animale doit être totalement harmonisée et appliquée avec rigueur.
Mais au delà de ces mesures, il est indispensable que l'Union européenne prenne une orientation claire quant à l'utilisation de ces farines et graisses animales pour l'alimentation des animaux, en réponse aux interrogations croissantes et à la perte de confiance du consommateur européen. L'interdiction des farines animales me parait devoir être envisagée à ce stade.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que notre Conseil invite la Commission à examiner la question d'un abandon progressif de l'utilisation des farines animales pour l'alimentation des animaux.
Des études sur la faisabilité de débouchés alternatifs, sur les modes de destruction des déchets mais aussi sur la nécessaire évolution des productions végétales sur le territoire de l'Union devraient être conduites sans tarder.
Une telle réflexion est en effet indissociable d'une réflexion de fond sur l'évolution des productions végétales. Elle doit nous inciter à réexaminer dans les meilleurs délais, y compris en prenant en compte le prochain cycle de négociations multilatérales, l'Organisation commune de marché des oléoprotéagineux, pour prévenir l'aggravation du déficit communautaire.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 16 juin 1999)