Texte intégral
La volonté du Premier ministre de travailler avec les syndicats vous surprend-elle ?
J'en attends encore la démonstration ! Nous avons rencontré le Premier ministre (le 18 juin), nous lui avons expliqué notre regret de ne pas avoir été consulté sur des sujets comme la prime pour l'emploi (PPE), ou les prélèvements sur la sécurité sociale... Et quelques jour plus tard, il annonçait l'ouverture du capital de la Snecma, sans nous en avoir parlé.
Comment expliquer cette attitude ?
Le gouvernement agit sous la pression des événements politiques, la rapidité des décisions prime souvent sur la qualité. Il est dommage qu'il adopte une attitude qui laisse croire que sa légitimité remplace la concertation. La majorité qui compose ce gouvernement est " plurielle ", mais le débat normal entre partis sur la nature des mesures gouvernementales à mettre en uvre ne peut pas se substituer à la concertation avec les organisations syndicales.
Jacques Chirac parle, comme Lionel Jospin, de "démocratie sociale". N'êtes vous pas simplement des pions dans la course présidentielle ?
La CGT a été la première à réclamer de nouvelles règles en matière de démocratie sociale.
Contre son gré, le MEDEF, par son attitude sur les questions sociales, a favorisé de nouvelles prises de conscience sur l'urgence de définir de nouvelles règles en matière de représentativité syndicale et de négociation.
Je ne vais donc pas me plaindre de l'intérêt des politiques pour ces questions. Ceci dit, nous ne sommes pas naïfs. La meilleure preuve qu'il ne s'agit pas d'une simple manuvre électorale serait, pour l'équipe en place, de procéder à un début de réforme montrant qu'on est bien dans une logique réelle de refondation.
Par exemple ?
Dans le domaine de la sécurité sociale. Ou bien on colle des rustines sur le système paritaire actuel, de plus en plus artificiel, en cédant au chantage du Medef. Ou bien le gouvernement ouvre vraiment le chantier de la rénovation de la protection sociale, en s'interrogeant sur ses structures, ses objectifs et ses sources de financement. Nous en aurons une première indication le 12 juillet (NDLR : lors d'un "Grenelle de la santé" convoqué par le gouvernement).
Le Parti socialiste propose d'imposer des salariés dans les conseils d¹administration des entreprises...
C'est encore une suggestion de la CGT. Ce n'est pas parce que des représentants salariés seront présents, de manière minoritaire dans les conseils d'administration, qu'ils pourront décider de la conduite des entreprises. Mais on reconnaîtra ainsi le droit aux salariés d'intervenir dans la stratégie de l'entreprise, ils permettront la confrontation des points de vue. Cette démarche nous paraît plus efficace que celle poussant les salariés à devenir actionnaire de l'entreprise.
Vous pensez aux positions de la CFDT ?
Oui, mais aussi de nombreux responsables politiques. L'actualité nous en montre les limites : il y a beaucoup de salariés actionnaires chez Alcatel, mais ça n'a pas empêché le PDG d'annoncer sans concertation l'abandon de ses usines...
Pourquoi revoir les règles de la représentativité : pour évincer les "petits" syndicats ?
Non. Il existe un problème de légitimité des négociateurs sociaux, du côté patronal comme du côté des organisations de salariés. Cela donne un système très artificiel, où les accords manquent de légitimité : comment prétendre réformer les retraites ou l'indemnisation du chômage sur des bases aussi peu démocratiques ?... Nous proposons de maintenir le pluralisme syndical, d'organiser la défense des intérêts des salariés des PME-PMI et de fixer des seuils de représentativité : dans l'entreprise, dans une branche professionnelle, ou dans plusieurs branches à partir des élections professionnelles pour être reconnu comme confédération. Dans le même temps, nous réclamons que soit appliqué le principe de l'accord majoritaire.
Dans une démocratie, les minorités ont des droits, mais ce n'est pas une minorité qui peut décider à la place de la majorité. Nous sommes une mauvaise exception européenne de ce point de vue là.
Vous allez déclencher une grande bagarre entre syndicats...
Soyons clairs : il n'y aura pas de consensus sur ce sujet, même si toutes les organisations syndicales reconnaissent la nécessité d'évoluer. Il faudra donc que le législateur prenne ses responsabilités. Notre but n'est pas d'éliminer quiconque de la table de négociation, mais de permettre aux salariés de décider qui doit être à la table, et avec quel pouvoir de négociation.
Et sur le plein emploi, dernier thème de discussion envisagé par le gouvernement, quelles seraient vos priorités ?
La politique fiscale, qui peut être plus ou moins favorable à l'emploi. Ou la politique industrielle : on a du mal à percevoir quelle politique industrielle mène le gouvernement, on se demande même s'il en a une. Il paraît plutôt à la remorque des groupes qui réduisent leurs effectifs, en se contentant de colmater les brèches là où ça fuit.
Et l'offensive italienne d'EDF ?
On peut se demander si la priorité d'EDF est d'investir en Italie, ou de développer la qualité de service en France. D'autant que son offensive affaiblit la position française dans le débat européen sur la mise en concurrence des entreprises publiques.
(Source http://www.cgt.fr, le 25 juillet 2001)
J'en attends encore la démonstration ! Nous avons rencontré le Premier ministre (le 18 juin), nous lui avons expliqué notre regret de ne pas avoir été consulté sur des sujets comme la prime pour l'emploi (PPE), ou les prélèvements sur la sécurité sociale... Et quelques jour plus tard, il annonçait l'ouverture du capital de la Snecma, sans nous en avoir parlé.
Comment expliquer cette attitude ?
Le gouvernement agit sous la pression des événements politiques, la rapidité des décisions prime souvent sur la qualité. Il est dommage qu'il adopte une attitude qui laisse croire que sa légitimité remplace la concertation. La majorité qui compose ce gouvernement est " plurielle ", mais le débat normal entre partis sur la nature des mesures gouvernementales à mettre en uvre ne peut pas se substituer à la concertation avec les organisations syndicales.
Jacques Chirac parle, comme Lionel Jospin, de "démocratie sociale". N'êtes vous pas simplement des pions dans la course présidentielle ?
La CGT a été la première à réclamer de nouvelles règles en matière de démocratie sociale.
Contre son gré, le MEDEF, par son attitude sur les questions sociales, a favorisé de nouvelles prises de conscience sur l'urgence de définir de nouvelles règles en matière de représentativité syndicale et de négociation.
Je ne vais donc pas me plaindre de l'intérêt des politiques pour ces questions. Ceci dit, nous ne sommes pas naïfs. La meilleure preuve qu'il ne s'agit pas d'une simple manuvre électorale serait, pour l'équipe en place, de procéder à un début de réforme montrant qu'on est bien dans une logique réelle de refondation.
Par exemple ?
Dans le domaine de la sécurité sociale. Ou bien on colle des rustines sur le système paritaire actuel, de plus en plus artificiel, en cédant au chantage du Medef. Ou bien le gouvernement ouvre vraiment le chantier de la rénovation de la protection sociale, en s'interrogeant sur ses structures, ses objectifs et ses sources de financement. Nous en aurons une première indication le 12 juillet (NDLR : lors d'un "Grenelle de la santé" convoqué par le gouvernement).
Le Parti socialiste propose d'imposer des salariés dans les conseils d¹administration des entreprises...
C'est encore une suggestion de la CGT. Ce n'est pas parce que des représentants salariés seront présents, de manière minoritaire dans les conseils d'administration, qu'ils pourront décider de la conduite des entreprises. Mais on reconnaîtra ainsi le droit aux salariés d'intervenir dans la stratégie de l'entreprise, ils permettront la confrontation des points de vue. Cette démarche nous paraît plus efficace que celle poussant les salariés à devenir actionnaire de l'entreprise.
Vous pensez aux positions de la CFDT ?
Oui, mais aussi de nombreux responsables politiques. L'actualité nous en montre les limites : il y a beaucoup de salariés actionnaires chez Alcatel, mais ça n'a pas empêché le PDG d'annoncer sans concertation l'abandon de ses usines...
Pourquoi revoir les règles de la représentativité : pour évincer les "petits" syndicats ?
Non. Il existe un problème de légitimité des négociateurs sociaux, du côté patronal comme du côté des organisations de salariés. Cela donne un système très artificiel, où les accords manquent de légitimité : comment prétendre réformer les retraites ou l'indemnisation du chômage sur des bases aussi peu démocratiques ?... Nous proposons de maintenir le pluralisme syndical, d'organiser la défense des intérêts des salariés des PME-PMI et de fixer des seuils de représentativité : dans l'entreprise, dans une branche professionnelle, ou dans plusieurs branches à partir des élections professionnelles pour être reconnu comme confédération. Dans le même temps, nous réclamons que soit appliqué le principe de l'accord majoritaire.
Dans une démocratie, les minorités ont des droits, mais ce n'est pas une minorité qui peut décider à la place de la majorité. Nous sommes une mauvaise exception européenne de ce point de vue là.
Vous allez déclencher une grande bagarre entre syndicats...
Soyons clairs : il n'y aura pas de consensus sur ce sujet, même si toutes les organisations syndicales reconnaissent la nécessité d'évoluer. Il faudra donc que le législateur prenne ses responsabilités. Notre but n'est pas d'éliminer quiconque de la table de négociation, mais de permettre aux salariés de décider qui doit être à la table, et avec quel pouvoir de négociation.
Et sur le plein emploi, dernier thème de discussion envisagé par le gouvernement, quelles seraient vos priorités ?
La politique fiscale, qui peut être plus ou moins favorable à l'emploi. Ou la politique industrielle : on a du mal à percevoir quelle politique industrielle mène le gouvernement, on se demande même s'il en a une. Il paraît plutôt à la remorque des groupes qui réduisent leurs effectifs, en se contentant de colmater les brèches là où ça fuit.
Et l'offensive italienne d'EDF ?
On peut se demander si la priorité d'EDF est d'investir en Italie, ou de développer la qualité de service en France. D'autant que son offensive affaiblit la position française dans le débat européen sur la mise en concurrence des entreprises publiques.
(Source http://www.cgt.fr, le 25 juillet 2001)