Déclaration de M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, sur l'introduction des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans l'administration, Paris le 8 juin 1999.

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  • Émile Zuccarelli - Ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation

Circonstance : Journée d'étude DGAFP-DIRE sur le thème "Internet-Intranet : des leviers pour moderniser l'administration", à la Maison de la Mutualité, le 8 juin 1999

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
En ouvrant avec vous cette journée détude sur lusage par les administrations des nouvelles et prometteuses technologies de linformation et de la communication (les NTIC), jai souhaité souligner limportance que jattache à cette question.
Votre présence ici, nombreux, venant des services centraux et déconcentrés des différents ministères, démontre que vous attachez à ce thème la même importance que moi ; je nen suis pas surpris. Jai constaté, au long de ces deux ans, la prise de conscience enthousiaste qui sest généralisée parmi les agents publics en faveur dune utilisation intelligente des NTIC, qui bénéficie autant aux intérêts des usagers quà la modernisation des administrations. Je vois aussi, bien sûr, dans votre engagement, un gage de la qualité des témoignages et des débats qui rythmeront votre journée.
En faisant le point sur lavancement du chantier de ladministration électronique, lun des six volets du «programme daction gouvernemental pour la société de linformation» (PAGSI), vous constaterez le foisonnement dinitiatives qui améliorent à la fois la qualité du service public et les modes de fonctionnement interne, et vous réfléchirez sur les nouvelles organisations du travail que ces innovations amènent à développer dans les services.
Sans vouloir anticiper sur ces discussions dont je ne doute pas de la richesse, jinsisterai sur labsolue nécessité davancer collectivement, concrètement, dans ce domaine.
Dans notre tradition, ladministration est un pilier du « pacte républicain » qui structure la société française. Cette vision, à laquelle je suis comme vous attaché, nous impose un effort rigoureux et permanent de réforme et de modernisation des services publics, au même rythme que la société qui nous entoure. Utilisées au mieux, les technologies de linformation et de la communication peuvent jouer un rôle considérable dans cette modernisation.
Cest sur la base de ces convictions que je me propose de dresser brièvement un bilan des actions entreprises depuis 18 mois, de préciser la contribution que jattends des NTIC à la réforme de lÉtat et dévoquer les changements quelles vont apporter dans lorganisation et la culture de ladministration.
1 Ladministration sest engagée résolument dans la société de linformation.
A lété 1997, notre pays connaissait des retards en matière de taux déquipement des ménages en micro-ordinateurs, notamment en micro-ordinateurs connectés à linternet, ainsi quen matière denseignement et de formation dans les technologies de linformation, et de contenus et de services français sur linternet.
La France disposait toutefois datouts indiscutables : des industriels, et des opérateurs présents sur le marché, une infrastructure de communication moderne, un réseau de recherche et denseignement supérieur de grande qualité, une population et des entreprises familiarisées, grâce au minitel, avec la logique de service en ligne et le commerce électronique.
Le discours du Premier ministre à Hourtin, en août 1997, a annoncé lambition du gouvernement et deux CISI, tenus en janvier 1998 et janvier 1999, ont précisé le contenu du PAGSI, le programme daction gouvernemental pour la société de linformation, destiné à surmonter les retards et aborder une nouvelle étape.
En matière de modernisation de ladministration, le PAGSI visait à faciliter laccès de ladministration au public par internet, et aussi à accroître lefficacité du fonctionnement interne de ladministration.
Dix-huit mois plus tard, quel bilan pouvons-nous tirer de ce programme gouvernemental ?
En France en général, lannée 1998 a largement permis de résorber le retard. Ainsi, le taux déquipement des ménages et le taux de branchement sur Internet croissent plus vite quen moyenne en Europe et la quasi totalité des lycées français est maintenant connectée à linternet.
Dans ladministration, lensemble des ministères a réagi avec rapidité et a très vite mis en uvre des mesures dont chacun ressentait limportance. Les agents, dans leur ensemble, ont fait preuve de beaucoup de volonté, et leur engagement a largement facilité les actuelles réussites. Je ne vous en citerai que quelques exemples :
- lenrichissement régulier des sites internet des différents ministères, avec le développement progressif de services nouveaux et lapparition des premiers sites de services déconcentrés,
- louverture des sites interministériels, Admifrance et Légifrance, qui sont aujourdhui largement utilisés,
- le transfert sur linternet des services minitel,
- la mise en ligne denviron 300 formulaires, couvrant 50% du volume des procédures, sur le site Admifrance,
- le développement des messageries et des intranets dans tous les ministères,
- la création des premiers systèmes dinformation territoriaux (SIT) qui favorisent la modernisation des modes de travail interministériel.
- les travaux en vue du lancement de la messagerie interministérielle AdER (pour « Administration en réseau »).
Dune manière générale, la prise en compte de la réflexion sur lusage des nouvelles technologies a été introduite à tous les niveaux de fonctionnement de ladministration. Au niveau ministériel, la plupart des programmes pluriannuels de modernisation (PPM), récemment achevés, abordent ce thème avec des perspectives ambitieuses
Par ailleurs, de plus en plus souvent, les réflexions sur ce thème associent les services déconcentrés, soit avec les services centraux, soit entre eux sur un même territoire, et sont prometteuses de nouvelles habitudes de travail.
2 La contribution des NTIC à la politique de réforme de lÉtat
Puisquaujourdhui ladministration électronique nest plus un simple souhait, mais que nous commençons à en voir la réalisation, il est temps à présent dentreprendre une nécessaire mutation organisationnelle et culturelle, qui sinscrit pleinement dans la réforme de lÉtat que je conduis.
Sur ce thème, je souhaiterais ici insister sur trois points.
1) Lun des objectifs majeurs de la réforme est lamélioration des relations entre ladministration et son public.
Cette ambition est au cur du PAGSI ; elle se concrétise par la mise en ligne dinformations nouvelles et pertinentes, par la recherche de nouveaux services ou par le développement de téléprocédures. Dans ce domaine, je dirais que nous avons tous un « devoir dimagination » et un « devoir de réalisation de ces nouveaux services ». Tous les ministères y ont contribué. Les prochains mois seront marqués par le développement de sites internet des services déconcentrés de lÉtat qui offriront des informations et services de proximité, et, au niveau interministériel, par lenrichissement du site Admifrance qui offrira aux usagers un portail de ladministration française.
2) Ces actions de modernisation nécessitent la participation de tous les fonctionnaires.
Tous les agents doivent être informés des actions menées, associés à leur mise en uvre, formés à la maîtrise des outils, doivent voir valorisé leur engagement. Car sils ressentent, en général, beaucoup de satisfaction et despoir, ils conservent quelques inquiétudes. Leur fierté de travailler sur un outil moderne saccompagne de questions sur les modes de travail, dinquiétudes sur les compétences à acquérir. Cela nous oblige à accompagner les projets techniques, notamment par des actions de formation et une réflexion sur les procédures de travail : mes services et moi-même vous y aiderons.
3) Ladministration doit passer dune organisation verticale, cloisonnée, à une organisation en réseau, ouverte sur les besoins de la société.
LÉtat est de plus en plus multiple dans ses attributions et dans ses modes daction. Il mène ses politiques en liaison avec la commission européenne, les collectivités locales, les associations, les partenaires sociaux. En son sein, la déconcentration et le travail interministériel saccroissent dans des domaines essentiels comme lenvironnement, la politique de la ville, les questions sociales.
Dans cette perspective, les technologies de linformation et de la communication offrent des opportunités quil vous appartient de concrétiser par un management et un accompagnement appropriés.
Cest sur limportance de ce point que je souhaite conclure mon propos.
3 Ladministration doit sorganiser pour accompagner ces changements
Les NTIC sont un outil efficace. Reste au public et aux agents de lÉtat à le diffuser, car il ne faut pas compter sur une progression automatique. Dans cette progression, il nous appartient de veiller à laccès de tous à la société de linformation, qui ne doit pas devenir un système à deux vitesses.
Cela signifie que les acteurs politiques et les responsables administratifs auront à la fois à simpliquer eux-mêmes, à favoriser linitiative des services de terrain, à faire confiance à leurs collaborateurs par de nouvelles habitudes de travail, bref, bien plus quaccepter, organiser et favoriser le changement.
Mesdames, Messieurs,
En 1998 nous avons franchi une étape clé pour lentrée de ladministration dans la société de linformation, avec une large prise de conscience, une sensibilisation des acteurs et le lancement dactions exemplaires.
Létape suivante qui a commencé comporte une réflexion sur de nouvelles pratiques de travail, une appropriation des outils et des méthodes par les acteurs et une généralisation des actions lancées lors de létape précédente.
A présent il nous faut nous préparer à la troisième étape, qui se fera dans la conduite du changement, avec la banalisation de lutilisation des outils et laide à lappropriation des nouveaux usages par le public.
Ce séminaire sinscrit parfaitement dans ces perspectives. Il me reste à remercier tous les conférenciers pour leurs contributions, et à vous souhaiter à tous une excellente et productive journée de travail.
(Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 9 juin 1999)