Interviews de M. Alain Richard, ministre de la défense, à France 2 le 12, TF1 le 15, BFM le 17, Europe 1 les 17 et 18 et RFI le 18 novembre 2001, sur l'Afghanistan (avancée de l'Alliance du nord, nécessité d'une force internationale de sécurité, envoi de forces françaises) et les mesures pour améliorer les conditions de travail des gendarmes.

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Média : Europe 1 - France 2 - Radio France Internationale - Site web TF1 - Le Monde - Télévision - TF1

Texte intégral

Interview à France 2 le 12 novembre :
F. Laborde Nous allons évidemment évoquer la situation en Afghanistan, où les combats s'intensifient, avec la mort, on l'a appris, ce matin, de trois journalistes, dont deux français, nos confrères de RFI, J. Sutton, et de RTL, P. Billaud, à qui nous rendons hommage ce matin. Monsieur le ministre, un mot sur l'état des lieux : on a le sentiment que les choses vont très vite maintenant et que les forces de l'Alliance du Nord occupent de plus en plus le terrain ?
- "Pardonnez-moi de vous le dire, mais ce sentiment est aussi trompeur que le sentiment qui était très dominant dans les commentaires, la semaine dernière, qu'il ne se passait rien. J'ai eu l'occasion de dire qu'évidemment, les frappes aériennes, d'abord sur les infrastructures des forces des taliban, puis directement sur leurs unités, sur les groupes de combattants, les affaiblissait lentement, que leur réaction politique - qui est une réaction de cohésion - a donné l'impression qu'ils étaient au fond imbattables, mais que le sens de l'évolution était quand même à peu près certain. Donc, ce phénomène d'affaiblissement, dans la zone du front vers le Nord-Ouest de l'Afghanistan, a porté ses effets. Et l'Alliance du Nord qui, elle-même, a des forces armées, des nombres de soldats qui ne sont pas extraordinairement élevés, a pu progresser..."
Et prendre, par exemple, Mazar-i-Sharif...
- "Et les forces des taliban, qui connaissent leurs limites, ont considéré qu'ils ne pouvaient pas user leurs forces dans une défense acharnée de Mazar-i-Sharif. Cela veut dire que Mazar-i-Sharif a été prise par l'Alliance du Nord sans une confrontation très intense."
Donc, cela ne veut pas dire pour autant que la marche sur Kaboul...
- "C'est donc seulement une phase d'un affrontement dans lequel je veux rappeler que l'intérêt de toute la communauté internationale est bien qu'on remplace les taliban par un autre régime qui ne présente, autant que possible, plus les dangers que présentent les taliban pour l'ensemble du monde. Il faut donc les affaiblir, pour faciliter le passage à une autre formule politique. Il n'est pas de l'intérêt de la communauté internationale que l'Alliance du Nord se retrouve seule aux manettes."
Donc, il n'est pas question de remplacer les taliban par les moudjahidines ?
- "Non, cela fait longtemps qu'on l'exprime et que l'ensemble des partenaires le disent aussi, en partie, parce qu'il y a un problème de représentativité - ils ne représentent qu'une partie des communautés de l'Afghanistan, c'est un pays très morcelé -, d'autre part aussi, parce qu'une grande partie des forces qui constituent l'Alliance du Nord, ont été au pouvoir en Afghanistan entre 1992 et 1996, ayant eux-mêmes commis beaucoup d'exactions. Donc, il n'y a pas de garantie qu'à eux seuls, ils seraient une force de paix."
On a quelques dépêches, ce matin, indiquant qu'il y a un certain nombre de soldats de l'Alliance du Nord, appuyés par des chars, qui tentent une percée ou qui marcheraient sur Kaboul. Ce n'est pas de nature à changer fondamentalement les choses ?
- "Ce sont des mouvements qui se produisent tactiquement dans chaque unité géographique. La prise de Kaboul représentera, si elle devait se réaliser, un affrontement beaucoup plus intense. Je ne pense pas que le partenaire américain soit aujourd'hui orienté vers une prise de Kaboul rapide, parce que cela pourrait être une véritable contradiction avec la construction d'une nouvelle formation politique multicommunautaire."
Cela veut dire qu'on attend plutôt que le Roi, Z. Shah, qui pourrait représenter cette synthèse, puisse constituer une coalition ?
- "Notre diplomatie, comme celle de quelques autres pays, travaille très activement à la construction d'une alternative politique. Le Roi en fait partie, mais il n'a quand même pas de forces énormes derrière lui, c'est un homme très âgé. Et donc il est aussi vraisemblable qu'il peut jouer un rôle en quelque sorte..."
D'autorité morale ?
- "Oui, un peu d'ombrelle... Le problème est d'assembler les forces et de les faire se tolérer mutuellement, de les faire accepter de coopérer, ce qui prend du temps. Mon sentiment est que l'évolution sur le terrain devrait plutôt se porter vers unes avancée de l'Alliance du Nord vers d'autres secteurs, pour couvrir plus de territoire, plutôt que vers Kaboul."
Aujourd'hui, que font les Français dans cette région ? On sait qu'il y en a à peu près 2.000 ? Pour la plupart, ils font du renseignement, mais certains sont-ils au contact?
- "Pour la plupart, ce sont des marins, puisqu'évidemment, une bonne partie du soutien apporté par les Etats-Unis à cette action se fait depuis la mer. Il y a aussi une action de reconnaissance de situation par plusieurs avions qui font des rotations chaque jour. Ils sont donc intégrés dans le dispositif coalisé. Et puis, il y a par ailleurs, comme on en a déjà parlé, une minimum de moyens de renseignements."
Y aura-t-il davantage de forces françaises qui seront engagées dans les jours qui viennent ?
- "C'est la question des forces spéciales, c'est-à-dire la possibilité d'aller faire "des coups de main", directement contre des sites des taliban ou des sites d'Al-Qaida. C'est en discussion avec le partenaire américain. Les Etats-Unis n'ont fait eux-mêmes que très peu d'opérations de forces spéciales jusqu'à présent, car il faut avoir accumulé beaucoup de renseignements, beaucoup d'informations sur les sites avant de se jeter sur un centre de commandement ou sur un centre d'entraînement. Nous sommes en réflexion avec les Etats-Unis sur ce que pourrait être la contribution des forces françaises."
La décision pourra être prise cette semaine ?
- "Pas forcément de façon imminente."
De toute façon, on n'imagine pas que l'Alliance du Nord avance de cette sorte, sans avoir un soutien logistique des Américains et de l'Alliance.
- "Et en armement, oui."
Et il est important ?
- "Il est dosé."
Vous ne voulez pas nous en dire plus ?
- "De toute façon, leurs effectifs ne sont pas considérables et ils n'ont pas à augmenté leur armée, qui se compte en quelques dizaines de milliers d'hommes, du jour au lendemain. D'autre part, nous ne souhaitons pas qu'ils aient, seuls, la maîtrise du territoire afghan. Donc, ce soutien leur permet d'avancer, ne leur permet pas de conquérir l'Afghanistan."
Vous avez aussi un autre front qui est compliqué, même si c'est moins spectaculaire, si je puis dire : la grogne des gendarmes qui considèrent aujourd'hui que leurs tâches sont absolument disproportionnées entre le plan Vigipirate, la montée de l'insécurité, la délinquance, les rapports, la paperasserie... On entend un certain nombre de choses et de grogne à la gendarmerie. Le conseil supérieur de la fonction militaire va se réunir. Vous devriez annoncer un certain nombre de mesures pour que la charge de travail soit un peu moins forte sur les gendarmes français ?
- "C'est exactement cela. J'entends bien l'expression de la grogne. Il faut bien résumer les choses, quand on fait un journal. J'ai tenu à ce que ce soit visible pour la presse justement : il y a un système de représentation - les gendarmes ont des élus comme représentants dans les départements - et ensuite, ils ont un conseil de représentation au niveau national, qui lui-même dialogue avec les élus de terrain pour préciser leurs demandes et exprimer leurs insatisfactions. Ce travail se fait normalement. Il s'est étalé dans le temps. Pourquoi ? Parce que le principe qu'on avait choisi était que les conséquences de la réduction de la durée de travail pour les civils seraient tirées en fin d'année. Il est vrai qu'on a appelé les organismes représentatifs de la gendarmerie à y travailler depuis assez longtemps. Maintenant, on est en fin de parcours et les signes d'impatience sont logiques, puisqu'on a appelé les représentants professionnels des gendarmes. C'est pour cela que j'ai trouvé un peu singulier que certains évoquent la levée du devoir de réserve, parce que le système de représentation et d'expression collective existe et est visible de l'extérieur. J'ai tenu à ce que les comptes-rendus des conseils représentatifs soient dans la presse. Après, à la presse de les exploiter à sa façon. Cette partie de discussion ouverte et normale sur des demandes sociales et professionnelle existe. On va la conclure partiellement cette semaine, puisque je réunis le conseil spécifique à la gendarmerie - partiellement, dans quinze jours, parce que je réunis à ce moment-là le conseil interarmées. Les solutions que je veux apporter aux problèmes de charge de travail et de compensation de charges de travail doivent être aussi homogènes que possible, aussi équitables que possible, entre la gendarmerie et les autres forces armées."
Cela veut dire qu'il y aura plus de gendarmes, un peu plus de moyens financiers ? Un peu des deux ?
- "Compte tenu que le problème particulier pour la gendarmerie est la surcharge - une partie est temporaire, car elle est due au plan Vigipirate renforcé et à l'euro - et que les effectifs ne l'ont pas complètement compensée, nous avons déjà créé 1.500 postes entre 2000 et 2001. Et nous allons augmenter ce chiffre pour 2002 et pour l'année suivante."
(Source http://Sig.premier-ministre.gouv.fr, le 22 novembre 2001)
Interview à TF1 le 15 novembre :
L'envoi d'une force internationale en Afghanistan se prépare. Les Américains n'ont pas l'air de vouloir en être, a dit le secrétaire d'Etat à la Défense, Donald Rumsfeld ; la France y participera en revanche, notamment pour sécuriser la région de Mazar-e-Charif, afin d'assurer l'acheminement de l'aide humanitaire.
Il y aura très bientôt des soldats français sur le sol afghan, la décision est désormais acquise. Leur mission : assurer la sécurité de l'aide humanitaire dans la ville de Mazar-e-Charif et dans sa région au nord du pays.
Alain RICHARD, ministre de la Défense
Nous sommes en train de travailler, en effet, à une contribution de la France, en association, sans doute, avec d'autres pays de la coalition, pour établir une base de sécurité pour l'ensemble du rétablissement des infrastructures et des conditions de vie normales sur la zone nord, c'est-à-dire à partir d'une base à Mazar-e-Charif.
Donc est-ce que cela veut dire envoyer des militaires ?
Oui, ce sera une question de jours.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
Interview à BFM le 17 novembre :
Monsieur le Ministre, merci d'avoir accepté mon invitation pour nous donner des précisions sur le renforcement de l'engagement de la France en Afghanistan, qui a été annoncé hier soir par le président de la République. Jeudi, vous disiez encore que ce n'était plus qu'une question de jours. En fait, c'est une question d'heures. Pourquoi cela arrive-t-il aussi vite ? Est-ce que tout d'un coup, l'histoire s'accélère ?
Alain RICHARD
Un changement très profond de situation s'est réalisé au cours des dix derniers jours en Afghanistan. Les différentes composantes de l'Alliance du Nord ont pu se rendre maîtres des trois quarts environ des régions d'Afghanistan. Les moyens militaires, les logistiques avec lesquelles ils l'ont fait, sont très limitées. Il y a probablement entre 20 000 et 25 000 soldats qui assurent le " contrôle " d'une surface qui est pratiquement l'équivalent de celle de la France. Et il y a des poches de résistance où des groupes de combattants, soit talibans, soit associés aux talibans, qui défendent maintenant leur vie.
Nous partons leur prêter main forte ?
Non, je vous décris simplement une situation. L'Alliance du Nord n'est pas du tout organisée, n'a pas les moyens pour rétablir les conditions de vie élémentaires dans l'ensemble de ces territoires. Donc, se pose maintenant un défi qui est de rétablir des conditions de vie normales élémentaires pour les 18 ou 19 millions d'habitants concernés. Cela suppose une aide internationale très importante de plusieurs natures. Cette aide internationale ne peut vraiment s'organiser que dans des conditions de sécurité.
Quand exactement nos soldats seront-ils à pied d'uvre à Mazar e Charif, et pour y faire quoi exactement ?
Les premiers éléments seront à Mazar e Charif demain, et l'ensemble de l'unité qui dépassera un peu les 200 militaires y sera sans doute mardi.
Ils ne seront jamais plus de 200 ?
Par définition, quand une opération militaire se déroule - et c'est une opération militaire, puisqu'il y a un enjeu de sécurité de l'ensemble de la population et de l'ensemble des intervenants internationaux - les forces mises par les uns et par les autres varient en fonction du besoin de sécurité. Ce qui compte, c'est d'assurer la sécurité dans ces espaces pour que le rétablissement des conditions de vie normale, avec une aide internationale massive, puisse se développer. Il y aura pour l'instant 200 à 250 militaires français, associés à 200 militaires jordaniens, qui tiendront un hôpital, et à une ou deux compagnies de sapeurs américains chargés de la dépollution, c'est-à-dire du déminage de l'environnement de cette zone. L'objectif est de créer une plate-forme d'appui logistique pour l'ensemble de l'aide internationale à Mazar e Charif, qui desservira toute la zone nord de l'Afghanistan. D'autres pays feront la même chose.
A quoi cela sert-il de sécuriser un aéroport si, tout autour, les routes ne sont pas libres ?
La réponse est d'un bon sens élémentaire : il faut bien commencer par quelque part.
Mais nos soldats s'occuperont-ils aussi du reste ?
Non. Quand l'objectif est de faire repartir les conditions de vie normales d'une population, il faut évidemment avoir un premier point d'appui. Ensuite, on progresse. Mais la fonction de dépollution devra notamment se développer. Et les membres de la coalition se concerteront pour savoir qui s'en charge.
Pour combien de temps nos soldats partent-ils là-bas ?
L'objectif est d'assurer le rétablissement. La durée de la mission sera donc proportionnée à la réalisation de cet objectif.
Pourquoi des avions de combat supplémentaires ?
Parce qu'il reste des combats, parce qu'il y a des possibilités de menaces de contre-attaque et parce que nous n'avons pas localisé et intercepté les éléments du noyau d'Al Qaïda. Cette mission se poursuit. Le dialogue avec les Etats-Unis a fait que c'est maintenant dans deux semaines environ que nos avions vont entrer en mission.
Contrairement aux précédents, ceux-là ne vont pas servir uniquement à la surveillance ?
Exactement.
Est-ce que la France n'est pas en train de participer à ce dont vous ne vouliez précisément pas, une conquête militaire aux fins de contrôler l'Afghanistan ?
Non. Je viens de vous dire que l'objectif était d'éviter une reprise des combats, à l'initiative de groupes talibans qui menaceraient la population dans certaines régions, et d'autre part de poursuivre l'autre but que nous partageons depuis le début, c'est-à-dire se rendre maîtres des capacités agressives d'Al Qaida.
Mais est-ce qu'il s'agit, pour être simple, d'une opération humanitaire, d'une opération militaire, d'une opération politique ou des trois à la fois ?
Je viens de vous décrire ce dont il s'agit. Les adjectifs, c'est vous qui les ajoutez.
Pourquoi vous ne voulez pas donner d'adjectifs ?
Ma mission est de décrire des faits, et non de faire des commentaires.
Ce que vous avez dit, c'est que nos troupes pourront maintenant être engagées directement dans des opérations contre les talibans. C'est cela le fait nouveau, le fait le plus important.
Contre des talibans qui attaqueraient.
Pour l'instant, ils se défendent en attaquant.
Dans l'ensemble, non. Ils se replient. Mais il y aura des reprises de combat et il faut éviter qu'elles menacent la population afghane.
Monsieur le Ministre, est-ce qu'en Afghanistan les armes n'ont pas parlé et agi trop vite par rapport à la politique ?
Bien sûr que non.
Est-ce que l'Afghanistan n'est pas libérée des talibans sans qu'on sache quoi mettre à la place ?
Aurait-il fallu laisser les talibans ? Je pense que l'Afghanistan a une vie politique sous-développée. Il n'a jamais connu d'institutions stables avec des formations politiques représentatives. Poser la question dans les termes de " quand est-ce que l'Afghanistan ressemblera à la Suisse ? " est une absurdité. On aura de toute façon un dispositif politique qui sera imparfait. Aujourd'hui, la réalité de base de la représentation politique de l'Afghanistan, ce sont des groupes tribaux, des groupes d'autorité traditionnelle, qui sont en perpétuelle confrontation entre eux. Si le jeu avait consisté à attendre que ces gens se mettent d'accord par bonne volonté en laissant les talibans continuer à exercer leur violence, cela aurait été une faute. Aujourd'hui, les différentes factions afghanes sont devant leurs responsabilités et vont être mises de plus en plus sous pression. Mais en attendant, l'homme et la femme afghans sont débarrassés des talibans et je pense qu'aucune critique ne résiste contre cela.
Mais vous redoutez qu'après l'Afghanistan des talibans, on connaisse l'Afghanistan des seigneurs de guerre ?
Oui. C'est la raison principale pour laquelle beaucoup de nations, dont la nôtre, pensent qu'il faut une force internationale de sécurité en Afghanistan, afin de dissuader toute remontée de violence à l'initiative soit des talibans qui contre-attaqueraient, soit de rivalités entre les chefs de guerre.
Avant d'envoyer nos soldats à Mazar e Charif, vous avez obtenu le feu vert d'Abdul Rachid Dostom, le seigneur de guerre qui, paraît-il, règne déjà dans la région ?
Je pense que la question ne se pose pas dans ces termes-là. Les nations de la coalition ont décidé de le faire avec des raisons qui tombent sous le sens. Le général Dostom a indiqué officiellement qu'il souhaitait rétablir une vie normale dans la zone dont il s'est rendu maître. Donc, il n'a aucune raison de s'y opposer et ma conviction est qu'il ne s'y opposera pas.
Et si l'Alliance du Nord confirme qu'elle ne veut pas globalement des Nations-Unies et de notre présence, qu'est-ce qui se passe, Monsieur le Ministre ?
Il y aura un rapport de forces politique et peut-être un peu plus.
On ne négociera pas là dessus ?
Non. Mais, comme à chaque fois, les Nations-Unies ne peuvent exercer leur pression et leur autorité que si elles sont unies. C'est-à-dire qu'il faut une stratégie et un plan d'opération clairs aux Nations-Unies, ce qui est en train de se nouer.
Est-ce que les Français participent directement à la chasse de Ben Laden ?
Tout dépend ce que vous appelez " directement ". Non, au sens où nous n'avons pas d'unités au sol qui sont en train de chercher à repérer des éléments armés d'Al Qaïda. Oui, au sens où nous mettons en uvre tous les dispositifs de renseignement à notre disposition pour localiser et le groupe central d'Al Qaïda, et les éléments d'appui de son réseau.
Vous avez vous-même dit qu'il y a déjà en Afghanistan des Français qui s'occupent du renseignement. Ils y sont pour Ben Laden ou pas, en ce moment ?
Cela fait des années que les services de renseignement français ont parmi leurs priorités la recherche du risque du terrorisme islamiste. Nous sommes donc dans la continuité d'une action que nous avons menée de façon prioritaire par rapport à nos principaux partenaires. Et c'est la raison pour laquelle aujourd'hui ils nous écoutent. Ce n'est pas faute de les avoir prévenus de nombreuses fois au cours des dernières années, en leur disant : " ceci est un danger, vous devriez être plus attentifs ". Et pas seulement en Afghanistan.
On ne sait pas tout sur ce que fait la France en Afghanistan. Pour le moment, vous ne pouvez pas tout nous dire. C'est ce que vous nous faites comprendre ?
C'est une question simple : il y a des informations protégées.
Est-ce que, comme ministre de Lionel Jospin, vous êtes d'accord avec l'analyse politique du président de la République, qui dit qu'aucune cause ne justifie le terrorisme, mais que la misère, le désespoir, l'humiliation peuvent lui offrir un terrain propice ?
C'est une évidence.
Et vous êtes d'accord avec la proposition d'une table de paix sur le Proche-Orient ?
Oui. C'est une proposition ancienne de la France, exprimée à plusieurs reprises par le ministre des Affaires Etrangères.
Il n'y a toujours aucune divergence sur la guerre en Afghanistan ?
Non, et je rappelle que tout le travail de préparation des décisions est fait par ce gouvernement.

(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
Interview à Europe 1 le 17 novembre :
Nous en savons donc un peu plus sur les appareils de combat que doit envoyer notre pays dans les prochaines semaines. Il s'agira de huit Mirage 2000, qui assisteront les forces de combat américaines et britanniques, mais uniquement contre des cibles talibanes ou contre des cibles d'Al Qaïda, le réseau financé par Ben Laden.
Alain Richard
Les combats se poursuivent et l'objectif d'établir la sécurité et d'empêcher le risque d'une contre-attaque des Talibans, est maintenu. D'autre part, nous partageons l'objectif d'attaquer les infrastructures, les zones de repli restantes d'Al Qaïda en Afghanistan. La concertation avec les Etats-Unis s'était poursuivie et a abouti à cette décision. C'est une question de circonstance qui a fait que cette décision a été prise maintenant. Elle va s'appliquer au cours des deux prochaines semaines. La position du gouvernement sur ce point n'a pas changé, elle a été exprimée par le Premier ministre dès le début de l'action militaire. Le Parlement sera consulté à chaque étape, il y a donc un débat qui est proposé au Parlement dès le début de la semaine.
Quant aux 58 premiers soldats partis hier de la base d'Istres, ils arriveront demain à Mazar e Charif, ils seront rejoints par environ 200 autres militaires français à partir de mardi. Leur mission, comme l'a précisé hier soir Jacques Chirac, consistera notamment à sécuriser le secteur et à établir un pont aérien humanitaire en faveur de la population afghane.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
Interview à Europe 1 le 18 novembre :
La France va envoyer huit Mirage 2000, pour participer cette fois à la poursuite des frappes contre les objectifs d'Al-Qaïda. Il s'agit d'appareils qui seront opérationnels d'ici deux semaines.
Alain RICHARD
Nous partageons l'objectif d'attaquer les infrastructures, les zones de repli restantes d'Al-Qaïda en Afghanistan. La concertation avec les Etats-Unis s'était poursuivie et a abouti à cette décision. Cela avait été discuté dès le départ, et c'est une question de circonstance qui a fait que cette décision a été prise maintenant. Elle va s'appliquer au cours des deux prochaines semaines. La position du gouvernement sur ce point n'a pas changé, elle a été exprimée par le Premier ministre dès le début de l'action militaire, et le Parlement sera consulté à chaque étape. Il y a donc un débat qui est proposé au Parlement dès le début de la semaine. C'est la règle constitutionnelle. De toute manière, à chaque fois, et cela s'est produit plusieurs fois, les parlementaires ont été effectivement consultés. Les représentants d'une très large majorité ont donné leur assentiment au choix qui avait été fait par le Président et le Gouvernement.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)
Interview à RFI le 18 novembre :
La France va s'impliquer directement sur le terrain en Afghanistan avec le déploiement à partir d'aujourd'hui de troupes à Mazar e Charif pour sécuriser l'acheminement de l'aide humanitaire dans le Nord du pays et par l'envoi, d'ici à deux semaines, d'avions d'attaques au sol. Il s'agit de huit Mirage 2000, ces appareils pourront être engagés dans des opérations de bombardements de cibles du réseau Al Qaïda.
Alain RICHARD
Nous partageons l'objectif d'attaquer les infrastructures, les zones de repli restantes d'Al Qaïda en Afghanistan. La concertation avec les Etats-Unis s'était poursuivie et a abouti à cette décision. Cela avait été discuté dès le départ, et c'est une question de circonstance, qui a fait que cette décision a été prise maintenant. Elle va s'appliquer au cours des deux prochaines semaines. La position du gouvernement sur ce point n'a pas changé, elle a été exprimée par le Premier ministre dès le début de l'action militaire. Le Parlement sera consulté à chaque étape, il y a donc un débat qui est proposé au Parlement dès le début de la semaine prochaine ; c'est la règle constitutionnelle. De toute manière, à chaque fois, et cela s'est produit plusieurs fois, les parlementaires ont été effectivement consultés, les représentants d'une très large majorité ont donné leur assentiment aux choix qui avaient été faits par le Président et le Gouvernement.
Jusqu'à présent, Paris s'était contenté de fournir essentiellement un appui logistique aux Américains. Aujourd'hui un détachement précurseur, d'une soixantaine de soldats du 21ème Régiment d'infanterie de marine, doit être héliporté à Mazar e Charif pour préparer l'arrivée d'autres militaires, prévue mardi. Le contingent français, 200 à 250 hommes selon le ministre de la Défense, devra sécuriser la zone de l'aéroport pour permettre l'atterrissage des gros porteurs apportant l'aide humanitaire. Les soldats pourront être engagés au combat contre des troupes talibanes qui les attaqueraient.

(Source http://www.defense.gouv.fr, le 21 novembre 2001)