Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames,
Messieurs,
Je vous remercie de m'avoir convié aujourd'hui pour parler des relations Nord-Sud et du développement durable. C'est un sujet difficile, les événements nous le montrent tous les jours, les négociations de l'OMC à Doha l'ont encore rappelé.
Sujet difficile car nous ne parlons pas, au Nord et au Sud, la même langue. Les pays du Sud voient dans notre récente préoccupation pour le développement durable, une entrave à leur développement. Nous croyons y percevoir la chance d'un développement pour le futur. Mais nous reconnaissons difficilement et nos fautes passées et notre responsabilité.
Ceci dans un contexte international où émerge une critique de la mondialisation.
Ceci doit à la fois nous faire réfléchir à ce qu'est le développement durable au sud et à en tirer les conséquences en matière d'aide au développement.
I - Les relations Nord-Sud sont aujourd'hui nécessairement affecter par une conjoncture économique préoccupante et de la configuration politique.
C'est en effet la première fois depuis 30 ans que les trois principales régions développées, l'Union européenne, les Etats-Unis et le Japon connaissent un ralentissement simultané. Le taux de progression du commerce mondial est tombé de 13 à 2,5 % en un an. Les conséquences de ce phénomène sont particulièrement sensibles pour les pays en développement : contraction des débouchés à l'exportation, baisse des cours de l'énergie et des matières premières...
Il en résulte un problème aigu de financement du développement à court terme. Les flux bruts des financements internationaux vers les pays en développement ont baissé de 20 % entre le 1er semestre 2000 et le 1er semestre 2001. Les flux privés de capitaux vers les pays en développement devraient être négatifs en 2001. L'accès aux marchés de capitaux est virtuellement impossible pour le financement des Etats et des entreprises des pays émergents. Les investissements directs tendent à se tarir, notamment ceux du secteur privé sauf pour quelques destinations privilégiées comme la Chine.
Parallèlement et après une baisse importante ces dernières années, l'aide publique au développement s'est tout juste stabilisée en 2001.
Pour les institutions financières, la priorité est surtout d'éviter les crises financières des pays émergents qui comporteraient un risque systémique majeur pour les marchés mondiaux. Le financement du développement est dans ce contexte une préoccupation secondaire. Cette situation ne favorise pas une action en profondeur de réforme des modes de décisions au sein de des institutions de Bretton Woods, qui sont des revendications des pays en développement.
- Dans le même temps la configuration politique est peu favorable, à la suite des événements du 11 septembre 2001. Les conflits d'intérêts entre Nord et Sud sont souvent exacerbés dans les rencontres internationales.
Les confusions entraînées par les événements du 11 septembre 2001 dans les relations entre le Nord et le Sud, d'une part, l'Islam et le terrorisme d'autre part, ne facilitent pas la visibilité des relations qui prévaudront avec nos partenaires du Sud. Il pourrait en résulter un traitement politique des PVD davantage en fonction de leur place dans la coalition "anti-terroriste" et de leur rôle dans la lutte contre le terrorisme plutôt qu'en fonction de leur situation et de leurs besoins en matière de développement.
Doha l'a confirmé, les pays en développement revendiquent une logique redistributive dans les relations économiques et financières internationales. Mais les pays développés ne sont pas véritablement prêts à accepter cette évolution, d'autant qu'ils connaissent eux-mêmes des difficultés conjoncturelles et budgétaires qui les rendent peu disposés à ouvrir leurs marchés.
Cette conjoncture défavorise notamment les filières agricoles exportatrices des pays du Sud. On s'attend ainsi pour 2002 à un déficit de 1 milliard de francs français pour les filières cotonnières de la zone CFA.
II - Dans le même temps, la critique de la mondialisation s'affirme.
Le sommet de Rio en 1992 a été le premier d'une longue série qui se sont tenus sous la tutelle des Nations unies : Pékin, Copenhague, Istanbul, Le Caire... Ceux-ci ont progressivement changé les modes de perception des relations Nord-Sud, convaincu la communauté internationale d'aborder les préoccupations des pays en développement dans une perspective plus transversale associant social, économique et environnemental. En bref, à faire du développement durable sans le dire.
Les échéances à venir, le sommet de Monterrey en mars 2002 sur le financement du développement et celui de Johannesbourg en septembre 2002 pourraient largement refonder l'aide publique au développement.
La mondialisation est devenu un thème en soi. Or c'est justement la critique de la mondialisation qui "refonde" la notion de développement durable abordée lors du Sommet de Rio en 1992. Plusieurs effets de cette mondialisation plaident en effet pour un développement durable :
1 - Les inégalités engendrées par la mondialisation peuvent affecter des pays entiers soumis au jugement sans appel des marchés ; l'écart des conditions de vie s'accroît et est encore aggravé par le sida, les conflits...
2 - La dégradation de la planète, l'inégalité de l'accès aux ressources, le rejet d'un mode de consommation et de production économiquement destructeurs sont une deuxième source de critique de cette mondialisation. Cette préoccupation était déjà celle de Rio, mais Rio n'a été que le déclenchement d'une vaste sensibilisation.
3 - Enfin, le spectre d'un modèle universel de mondialisation pose problème aux démocraties. Le marché a besoin de contrepoids, de régulations. L'échec de Seattle, et les dernières grandes conférences internationales montrent bien la nécessité de reconstruire un dialogue plus fructueux avec l'ensemble des partenaires de la société. A ce propos, et pour être précis, les arguments d'autorité dans les relations avec le monde en développement appartiennent désormais à une époque révolue, et ce quelque soit la nature des arguments.
III - Qu'est ce que le développement durable pour les pays du Sud ?
1 - C'est d'abord du développement.
Très légitimement, les pays du Sud ne souhaitent pas être liés par des engagements qui leur paraissent contraires aux exigences de leur développement. Cela est vrai dans le domaine de l'environnement et du climat et dans bien d'autres domaines, comme celui des normes sociales.
Il faut désormais imaginer une meilleure cohérence dans le fonctionnement du village planétaire qui soit soutenu par des règles et des contrats plus équitables. Les négociations commerciales, la protection de la propriété intellectuelle, l'introduction de règles sur l'investissement protégeant des droits acquis par les firmes du nord ne peuvent seules fonder ces nouvelles relations qu'il convient de construire.
L'organisation du village planétaire impose à la fois des enjeux globaux et des solutions locales. C'est la problématique du développement durable. S'il est bien quelque chose dont la mondialisation a besoin, ce sont des valeurs collectives, de biens publics reconnus mondialement. La solidarité, les Droits de l'Homme et le développement durable en font partie.
2 - C'est ensuite la lutte contre les obstacles au développement que sont les fléaux qui affligent une bonne moitié de l'humanité : malnutrition, absence d'accès à de l'eau potable, sous-éducation et toutes les pandémies, au premier rang le sida qui détruit 40 ans d'aide au développement. Il n'y aura pas de développement durable sans réduction de la pauvreté.
IV - Quelques éléments nous permettent de redéfinir les contours de notre coopération
Nous devons tirer les leçons des événements récents mais aussi et surtout des pas importants qui ont somme toute été franchis depuis 1992. Le développement durable, l'amélioration de la gestion des ressources naturelles, la bonne gouvernance et la meilleure implication de la société civile au sud comme au nord dans les processus de décision, la solidarité et la recherche de nouvelles formes de financement de l'aide publique et d'alternatives pour faciliter la "redistribution", la prise en compte simultanée des besoins sociaux, économiques et environnementaux sont autant d'acquis conceptuels depuis Rio, même si leur mise en oeuvre tarde...
Il faut poursuivre la réflexion, la recherche pour un développement durable. C'est pourquoi le gouvernement a décidé de créer l'Institut international du développement durable. Il faut trouver des solutions pour prévoir des discriminations positives en faveur des pays pauvres dans les règles commerciales. Il faut sensibiliser, expliquer et mobiliser des financements sur ce que l'on appelle maintenant les "biens publics mondiaux". Les accords de Marrakech sur le climat et la création du fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en sont les premiers pas.
L'allégement de la dette, nos initiatives en faveur des pays pauvres très endettés relèvent également de cette dynamique et de notre souhait de définir des mécanismes financiers nouveaux pour associer développement durable et réduction de la pauvreté. Le coût pour la France de l'annulation de la dette bi et multilatérale sera d'environ 10 milliards d'euros.
C'est dans ce contexte que seront négociés les contrats désendettement-développement. En effet la France a choisi de financer l'allégement de la dette latérale des pays pauvres très endettés sous forme de refinancement par dons : les Etats continuent de rembourser leur dette à chaque échéance, et, une fois chaque remboursement constaté, la France reverse aux Etats la même somme sur un compte spécifique de la Banque centrale du pays. L'utilisation de ces flux pour le compte du trésor public de l'Etat pourra être ainsi contrôlée par la France.
Cette procédure permet de sécuriser l'affectation des marges de manuvre budgétaires dégagées au profit de programmes de lutte contre la pauvreté et pour le développement durable.
Les contrats de désendettement développement seront affectés à :
- l'éducation de base et la formation professionnelle,
- les soins de santé primaires et la lutte contre les grandes endémies,
- les équipements et infrastructures des collectivités locales,
- l'aménagement du territoire et la gestion des ressources naturelles.
Il nous faut également réfléchir au financement international des biens publics mondiaux
L'approche du développement par les "biens publics mondiaux" permet de constater que le marché ne sait pas fournir la qualité de l'environnement, l'équité sociale nationale et internationale, la stabilité financière internationale, la paix et la sécurité.
Cette approche renouvelle le concept d'APD en proposant de mettre en place des mécanismes institutionnels et financiers permettant d'assurer la production de ces biens sur une base durable.
Le lien de cette approche avec le développement durable est fort. Ainsi, par exemple, si l'on considère que le respect des normes sociales doit être inclus dans les règles de l'OMC, la communauté internationale porte de ce fait l'obligation de financer la mise en place de ces normes dans les pays en développement.
La France s'engage résolument dans la promotion de cette approche, avec une double difficulté : vaincre les réticences des Etats-Unis et convaincre les pays du Sud de l'intérêt réel pour eux de cette approche.
S'agissant proprement dit de la préparation de Johannesburg, il a été décidé de préparer un projet FSP de 3,5 millions d'euros qui permettra d'aider nos partenaires à s'organiser et à s'informer en vue du sommet. Le projet portera sur la production et la diffusion au Sud d'éléments de doctrine sur le développement durable sous 4 rubriques :
- développement économique et ressources naturelles (eau, biodiversité, énergie),
- services sociaux et réduction de la pauvreté,
- amélioration de la gouvernance et meilleure implication de la société civile au sud,
- et enfin renforcement des capacités de recherche au sud pour un développement durable.
Il s'agira également de faire la synthèse des recommandations sectorielles qui ont pu être faites dans le cadre des conférences successives (Rio, Pékin, Copenhague, Le Caire, ...) et de définir l'ensemble des lignes directrices qui fondent la notion de développement durable et qui sont communes à de nombreuses conférences internationales actuelles.
Ce projet facilitera, pour partie, l'organisation du sommet à Johannesbourg, la participation de nos partenaires africains au sommet et la tenue d'initiatives régionales (forum d'ONG en Afrique, ....).
Enfin, il permettra de communiquer sur une approche francophone dans un monde essentiellement "anglo-saxon" et de soutenir la traduction en français en temps réel des actes et des documents des diverses conférences préparatoires et du Sommet. Ce projet s'inscrit donc dans la préparation et surtout dans le suivi des recommandations du Sommet.
Mon objectif est de faire émerger dans les pays de la zone de solidarité prioritaire, des politiques concertées en faveur de la mise en oeuvre du développement durable et de soutenir une démarche propre au caractère africain du sommet sur le développement durable. Ce projet contribuera, avec l'appui de l'Institut "relations internationales et développement durable" à poursuivre la réflexion et la recherche sur l'adéquation entre les enjeux et les débats dans les enceintes internationales et la décision publique et les actions concrètes de terrain qui en découlent auprès de nos partenaires. Ce projet doit permettre de contribuer à produire de la doctrine partagée avec les pays de la ZSP et nourrir un débat qui permette aux pays de la ZSP de formuler les grandes lignes de leur politique de développement durable
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 novembre 2001)
Mesdames,
Messieurs,
Je vous remercie de m'avoir convié aujourd'hui pour parler des relations Nord-Sud et du développement durable. C'est un sujet difficile, les événements nous le montrent tous les jours, les négociations de l'OMC à Doha l'ont encore rappelé.
Sujet difficile car nous ne parlons pas, au Nord et au Sud, la même langue. Les pays du Sud voient dans notre récente préoccupation pour le développement durable, une entrave à leur développement. Nous croyons y percevoir la chance d'un développement pour le futur. Mais nous reconnaissons difficilement et nos fautes passées et notre responsabilité.
Ceci dans un contexte international où émerge une critique de la mondialisation.
Ceci doit à la fois nous faire réfléchir à ce qu'est le développement durable au sud et à en tirer les conséquences en matière d'aide au développement.
I - Les relations Nord-Sud sont aujourd'hui nécessairement affecter par une conjoncture économique préoccupante et de la configuration politique.
C'est en effet la première fois depuis 30 ans que les trois principales régions développées, l'Union européenne, les Etats-Unis et le Japon connaissent un ralentissement simultané. Le taux de progression du commerce mondial est tombé de 13 à 2,5 % en un an. Les conséquences de ce phénomène sont particulièrement sensibles pour les pays en développement : contraction des débouchés à l'exportation, baisse des cours de l'énergie et des matières premières...
Il en résulte un problème aigu de financement du développement à court terme. Les flux bruts des financements internationaux vers les pays en développement ont baissé de 20 % entre le 1er semestre 2000 et le 1er semestre 2001. Les flux privés de capitaux vers les pays en développement devraient être négatifs en 2001. L'accès aux marchés de capitaux est virtuellement impossible pour le financement des Etats et des entreprises des pays émergents. Les investissements directs tendent à se tarir, notamment ceux du secteur privé sauf pour quelques destinations privilégiées comme la Chine.
Parallèlement et après une baisse importante ces dernières années, l'aide publique au développement s'est tout juste stabilisée en 2001.
Pour les institutions financières, la priorité est surtout d'éviter les crises financières des pays émergents qui comporteraient un risque systémique majeur pour les marchés mondiaux. Le financement du développement est dans ce contexte une préoccupation secondaire. Cette situation ne favorise pas une action en profondeur de réforme des modes de décisions au sein de des institutions de Bretton Woods, qui sont des revendications des pays en développement.
- Dans le même temps la configuration politique est peu favorable, à la suite des événements du 11 septembre 2001. Les conflits d'intérêts entre Nord et Sud sont souvent exacerbés dans les rencontres internationales.
Les confusions entraînées par les événements du 11 septembre 2001 dans les relations entre le Nord et le Sud, d'une part, l'Islam et le terrorisme d'autre part, ne facilitent pas la visibilité des relations qui prévaudront avec nos partenaires du Sud. Il pourrait en résulter un traitement politique des PVD davantage en fonction de leur place dans la coalition "anti-terroriste" et de leur rôle dans la lutte contre le terrorisme plutôt qu'en fonction de leur situation et de leurs besoins en matière de développement.
Doha l'a confirmé, les pays en développement revendiquent une logique redistributive dans les relations économiques et financières internationales. Mais les pays développés ne sont pas véritablement prêts à accepter cette évolution, d'autant qu'ils connaissent eux-mêmes des difficultés conjoncturelles et budgétaires qui les rendent peu disposés à ouvrir leurs marchés.
Cette conjoncture défavorise notamment les filières agricoles exportatrices des pays du Sud. On s'attend ainsi pour 2002 à un déficit de 1 milliard de francs français pour les filières cotonnières de la zone CFA.
II - Dans le même temps, la critique de la mondialisation s'affirme.
Le sommet de Rio en 1992 a été le premier d'une longue série qui se sont tenus sous la tutelle des Nations unies : Pékin, Copenhague, Istanbul, Le Caire... Ceux-ci ont progressivement changé les modes de perception des relations Nord-Sud, convaincu la communauté internationale d'aborder les préoccupations des pays en développement dans une perspective plus transversale associant social, économique et environnemental. En bref, à faire du développement durable sans le dire.
Les échéances à venir, le sommet de Monterrey en mars 2002 sur le financement du développement et celui de Johannesbourg en septembre 2002 pourraient largement refonder l'aide publique au développement.
La mondialisation est devenu un thème en soi. Or c'est justement la critique de la mondialisation qui "refonde" la notion de développement durable abordée lors du Sommet de Rio en 1992. Plusieurs effets de cette mondialisation plaident en effet pour un développement durable :
1 - Les inégalités engendrées par la mondialisation peuvent affecter des pays entiers soumis au jugement sans appel des marchés ; l'écart des conditions de vie s'accroît et est encore aggravé par le sida, les conflits...
2 - La dégradation de la planète, l'inégalité de l'accès aux ressources, le rejet d'un mode de consommation et de production économiquement destructeurs sont une deuxième source de critique de cette mondialisation. Cette préoccupation était déjà celle de Rio, mais Rio n'a été que le déclenchement d'une vaste sensibilisation.
3 - Enfin, le spectre d'un modèle universel de mondialisation pose problème aux démocraties. Le marché a besoin de contrepoids, de régulations. L'échec de Seattle, et les dernières grandes conférences internationales montrent bien la nécessité de reconstruire un dialogue plus fructueux avec l'ensemble des partenaires de la société. A ce propos, et pour être précis, les arguments d'autorité dans les relations avec le monde en développement appartiennent désormais à une époque révolue, et ce quelque soit la nature des arguments.
III - Qu'est ce que le développement durable pour les pays du Sud ?
1 - C'est d'abord du développement.
Très légitimement, les pays du Sud ne souhaitent pas être liés par des engagements qui leur paraissent contraires aux exigences de leur développement. Cela est vrai dans le domaine de l'environnement et du climat et dans bien d'autres domaines, comme celui des normes sociales.
Il faut désormais imaginer une meilleure cohérence dans le fonctionnement du village planétaire qui soit soutenu par des règles et des contrats plus équitables. Les négociations commerciales, la protection de la propriété intellectuelle, l'introduction de règles sur l'investissement protégeant des droits acquis par les firmes du nord ne peuvent seules fonder ces nouvelles relations qu'il convient de construire.
L'organisation du village planétaire impose à la fois des enjeux globaux et des solutions locales. C'est la problématique du développement durable. S'il est bien quelque chose dont la mondialisation a besoin, ce sont des valeurs collectives, de biens publics reconnus mondialement. La solidarité, les Droits de l'Homme et le développement durable en font partie.
2 - C'est ensuite la lutte contre les obstacles au développement que sont les fléaux qui affligent une bonne moitié de l'humanité : malnutrition, absence d'accès à de l'eau potable, sous-éducation et toutes les pandémies, au premier rang le sida qui détruit 40 ans d'aide au développement. Il n'y aura pas de développement durable sans réduction de la pauvreté.
IV - Quelques éléments nous permettent de redéfinir les contours de notre coopération
Nous devons tirer les leçons des événements récents mais aussi et surtout des pas importants qui ont somme toute été franchis depuis 1992. Le développement durable, l'amélioration de la gestion des ressources naturelles, la bonne gouvernance et la meilleure implication de la société civile au sud comme au nord dans les processus de décision, la solidarité et la recherche de nouvelles formes de financement de l'aide publique et d'alternatives pour faciliter la "redistribution", la prise en compte simultanée des besoins sociaux, économiques et environnementaux sont autant d'acquis conceptuels depuis Rio, même si leur mise en oeuvre tarde...
Il faut poursuivre la réflexion, la recherche pour un développement durable. C'est pourquoi le gouvernement a décidé de créer l'Institut international du développement durable. Il faut trouver des solutions pour prévoir des discriminations positives en faveur des pays pauvres dans les règles commerciales. Il faut sensibiliser, expliquer et mobiliser des financements sur ce que l'on appelle maintenant les "biens publics mondiaux". Les accords de Marrakech sur le climat et la création du fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en sont les premiers pas.
L'allégement de la dette, nos initiatives en faveur des pays pauvres très endettés relèvent également de cette dynamique et de notre souhait de définir des mécanismes financiers nouveaux pour associer développement durable et réduction de la pauvreté. Le coût pour la France de l'annulation de la dette bi et multilatérale sera d'environ 10 milliards d'euros.
C'est dans ce contexte que seront négociés les contrats désendettement-développement. En effet la France a choisi de financer l'allégement de la dette latérale des pays pauvres très endettés sous forme de refinancement par dons : les Etats continuent de rembourser leur dette à chaque échéance, et, une fois chaque remboursement constaté, la France reverse aux Etats la même somme sur un compte spécifique de la Banque centrale du pays. L'utilisation de ces flux pour le compte du trésor public de l'Etat pourra être ainsi contrôlée par la France.
Cette procédure permet de sécuriser l'affectation des marges de manuvre budgétaires dégagées au profit de programmes de lutte contre la pauvreté et pour le développement durable.
Les contrats de désendettement développement seront affectés à :
- l'éducation de base et la formation professionnelle,
- les soins de santé primaires et la lutte contre les grandes endémies,
- les équipements et infrastructures des collectivités locales,
- l'aménagement du territoire et la gestion des ressources naturelles.
Il nous faut également réfléchir au financement international des biens publics mondiaux
L'approche du développement par les "biens publics mondiaux" permet de constater que le marché ne sait pas fournir la qualité de l'environnement, l'équité sociale nationale et internationale, la stabilité financière internationale, la paix et la sécurité.
Cette approche renouvelle le concept d'APD en proposant de mettre en place des mécanismes institutionnels et financiers permettant d'assurer la production de ces biens sur une base durable.
Le lien de cette approche avec le développement durable est fort. Ainsi, par exemple, si l'on considère que le respect des normes sociales doit être inclus dans les règles de l'OMC, la communauté internationale porte de ce fait l'obligation de financer la mise en place de ces normes dans les pays en développement.
La France s'engage résolument dans la promotion de cette approche, avec une double difficulté : vaincre les réticences des Etats-Unis et convaincre les pays du Sud de l'intérêt réel pour eux de cette approche.
S'agissant proprement dit de la préparation de Johannesburg, il a été décidé de préparer un projet FSP de 3,5 millions d'euros qui permettra d'aider nos partenaires à s'organiser et à s'informer en vue du sommet. Le projet portera sur la production et la diffusion au Sud d'éléments de doctrine sur le développement durable sous 4 rubriques :
- développement économique et ressources naturelles (eau, biodiversité, énergie),
- services sociaux et réduction de la pauvreté,
- amélioration de la gouvernance et meilleure implication de la société civile au sud,
- et enfin renforcement des capacités de recherche au sud pour un développement durable.
Il s'agira également de faire la synthèse des recommandations sectorielles qui ont pu être faites dans le cadre des conférences successives (Rio, Pékin, Copenhague, Le Caire, ...) et de définir l'ensemble des lignes directrices qui fondent la notion de développement durable et qui sont communes à de nombreuses conférences internationales actuelles.
Ce projet facilitera, pour partie, l'organisation du sommet à Johannesbourg, la participation de nos partenaires africains au sommet et la tenue d'initiatives régionales (forum d'ONG en Afrique, ....).
Enfin, il permettra de communiquer sur une approche francophone dans un monde essentiellement "anglo-saxon" et de soutenir la traduction en français en temps réel des actes et des documents des diverses conférences préparatoires et du Sommet. Ce projet s'inscrit donc dans la préparation et surtout dans le suivi des recommandations du Sommet.
Mon objectif est de faire émerger dans les pays de la zone de solidarité prioritaire, des politiques concertées en faveur de la mise en oeuvre du développement durable et de soutenir une démarche propre au caractère africain du sommet sur le développement durable. Ce projet contribuera, avec l'appui de l'Institut "relations internationales et développement durable" à poursuivre la réflexion et la recherche sur l'adéquation entre les enjeux et les débats dans les enceintes internationales et la décision publique et les actions concrètes de terrain qui en découlent auprès de nos partenaires. Ce projet doit permettre de contribuer à produire de la doctrine partagée avec les pays de la ZSP et nourrir un débat qui permette aux pays de la ZSP de formuler les grandes lignes de leur politique de développement durable
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 novembre 2001)