Interview de M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, à "BFM/RMC" le 26 juin 2017, sur le revenu agricole, l'utilisation des pesticides, la grippe aviaire.

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Média : BFM - Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité ce matin est Stéphane TRAVERT, ministre de l'Agriculture et de l'alimentation. Merci d'être avec nous. Bonjour.
STEPHANE TRAVERT
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous allons parler évidemment des difficultés rencontrées par les agriculteurs français. Je donne simplement ce chiffre : un agriculteur français sur deux gagne moins, a gagné moins de 350 euros par mois en 2016. Il va falloir améliorer les revenus des agriculteurs, leur donner la possibilité de vivre de leur production, ce sera l'un des objectifs des états-généraux de l'alimentation dont nous parlerons tout à l'heure. Mais je voudrais commencer avec ce document de travail, que vous connaissez, c'est une réunion interministérielle du mercredi 21 juin à 16h, trame du projet de loi relatif à la transformation des relations entre l'administration et le public. Je le montre aux téléspectateurs de BFM TV, vous l'avez évidemment ce document, Stéphane TRAVERT, je vous le donne. Que dit-il ? Eh bien, il dit que le gouvernement a l'intention de revenir par exemple sur l'interdiction de l'épandage aérien, la pulvérisation de pesticides par les airs. Est-ce vrai ?
STEPHANE TRAVERT
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.
STEPHANE TRAVERT
Ce n'est pas vrai.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas vrai.
STEPHANE TRAVERT
Les arbitrages ont été pris, et sur la question de l'épandage par voie aérienne, il faut reconnaître malgré tout qu'une demande de dérogation avait pu être faite, mais cette demande de dérogation n'a pas été acceptée, n'a pas été arbitrée positivement. Et…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui avait fait cette demande de dérogation ? Vous ?
STEPHANE TRAVERT
Non, ce n'est pas moi, non, ce n'est pas moi, ce n'est pas non plus mon prédécesseur, cela fait partie de la vie des services dans le ministère, où on réfléchit les uns et les autres entre les services, pour voir comment nous pouvons améliorer un certain nombre de situations, donc cette dérogation n'a pas été autorisée. Il n'y aura qu'une seule dérogation dans les crises sanitaires graves, et si et seulement si il n'y aucun risque pour les populations environnantes, et les salariés qui travaillent sur les champs, et les salariés qui font l'épandage.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc en cas de situations extrêmes…
STEPHANE TRAVERT
Crises sanitaires graves…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, de crises sanitaires graves, on pourra pulvériser par les airs…
STEPHANE TRAVERT
Exactement. Mais avec des autorisations, bien évidemment, de l'Etat, autorisations préfectorales, donc ce seront des dérogations précises, en cas uniquement de crises sanitaires graves. Et donc à ce moment-là, toutes les autorisations seront mises en place. Les contrôles pour éviter que les populations soient mises en danger, parce que, là aussi, bien évidemment, il ne s'agit pas de faire n'importe quoi, nous savons que les épandages par voie aérienne ont pu permettre, parce que la volatilité de l'épandage, le vent, etc., ont pu connaître un certain nombre de difficultés, mais en cas de crises sanitaires graves, des dérogations pourront être données, sous réserve qu'elles ne mettent pas en danger les populations, et notamment les salariés qui travaillent sur les parcelles concernées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'arbitrage est rendu ?
STEPHANE TRAVERT
L'arbitrage est rendu, les choses sont claires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Autre article dans ce document, l'article 21, et là, on peut lire – je cite – l'interdiction des néonicotinoïdes va plus loin que ce qui est prévu par la réglementation européenne. Je rappelle qu'en France, les néonicotinoïdes sont interdits. Je rappelle que ça représente 40 % du marché mondial des insecticides. Le gouvernement est-il décidé à abroger toutes les dispositions nationales qui excèdent les normes européennes ?
STEPHANE TRAVERT
On se souvient bien de deux néonicotinoïdes, comme le Régent ou le Gaucho, qui avaient été interdits. Et le président de la République avait dit clairement : ce qui est mauvais pour les abeilles est mauvais pour l'homme. Et à partir de là, nous avons… il y a une loi qui a été votée dans le dernier quinquennat, qui se trouve aujourd'hui ne pas être en conformité avec le droit européen. Donc à partir de là…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ?
STEPHANE TRAVERT
Elle n'est pas conforme avec le droit européen, et des dérogations peuvent être aujourd'hui accordées jusqu'en juillet 2020 pour l'utilisation d'un certain nombre de néonicotinoïdes, et je dirais que là-dessus, nous avons la volonté de faire en sorte que nous puissions gérer aussi les impasses techniques, parce que nous avons un certain nombre de produits aujourd'hui qui sont utilisés qui ont été estimés dangereux, et qui sotn au fur et à mesure retirés du marché. Mais d'autres produits où nous avons des impasses techniques qui n'ont pas de substitution, qui ne connaissent pas de produits de substitution, nous devons pouvoir autoriser des dérogations pour leur permettre l'utilisation afin que nos producteurs puissent continuer à travailler dans de bonnes conditions…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, c'est-à-dire que vous revenez, est-ce que vous revenez sur le texte voté il y a un an ?
STEPHANE TRAVERT
Non, nous ne revenons pas dessus, mais comme il n'est pas conforme au droit européen, il va falloir…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous vous alignez sur le droit européen, vous alignez la France sur le droit européen ?
STEPHANE TRAVERT
Il va falloir regarder avec nos partenaires européens pour faire en sorte que ce texte rentre dans le cadre européen, et que nous puissions mettre en place un régime de dérogations sur un certain nombre de produits qui sont dans ce que l'on appelle les impasses techniques, et pour que l'on puisse les utiliser tout en garantissant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que l'arbitrage est rendu, là ?
STEPHANE TRAVERT
Non, l'arbitrage n'est pas rendu, mais je veux dire là-dessus…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est votre position, c'est votre position ?
STEPHANE TRAVERT
C'est ma position, mais moi, vous savez, je suis un homme de compromis, moi, je suis un homme de compromis, et je suis là pour bâtir ces compromis, et un compromis n'est pas une compromission, et un compromis n'est pas non plus, je dirais, un consensus ou ce que l'on pourrait appeler un consensus mou. Et moi, je veux travailler sur ce sujet avec mon collègue de l'Environnement et du développement durable, Nicolas HULOT. Et nous nous voyons prochainement, pour que nous soyons en phase, et que nous puissions mettre sur la table une proposition qui fera que, eh bien, nous pourrons aller devant le Parlement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une proposition va être faite, un nouveau texte…
STEPHANE TRAVERT
Une proposition va être faite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un nouveau texte, qui revient tout de même sur al loi votée il y a un an ! Pardon !
STEPHANE TRAVERT
Oui, mais parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Stéphane TRAVERT !
STEPHANE TRAVERT
Mais bien sûr, mais parce que, il n'est pas conforme au droit européen, donc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que la France s'aligne sur le droit européen ! La France qui était en pointe sur cette question-là, qui avait pris de l'avance sur ses partenaires européens, sur cette question-là, s'aligne sur le droit européen, s'aligne sur l'Europe, on est bien d'accord ? Ça veut dire que…
STEPHANE TRAVERT
S'aligne sur l'Europe, mais en ayant à l'esprit que ce que nous souhaitons, c'est que nous puissions continuer à bénéficier de l'utilisation d'un certain nombre de produits dont le caractère de dangerosité n'est pas affirmé, et qui sont dans des impasses techniques, pour que nous puissions continuer à les utiliser, et pour que, bien évidemment, avec toutes les garanties qui doivent être prises… vous savez, moi, je suis ministre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, mais Stéphane TRAVERT, je veux être très clair, vous revenez sur l'interdiction, d'une certaine manière, mais pardon, mais c'est une façon de revenir sur l'interdiction ?
STEPHANE TRAVERT
On peut le prendre comme ça, revenir sur l'interdiction, sur la loi qui a été votée…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, vous revenez sur la loi…
STEPHANE TRAVERT
Mais parce qu'elle n'est pas conforme au droit européen…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais peut-être !
STEPHANE TRAVERT
Il s'agit maintenant d'entamer un nouveau road de négociations…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais n'est-ce pas l'odeur de la France d'être en avance sur ces questions-là ?
STEPHANE TRAVERT
Vous savez, l'honneur de la France aujourd'hui, c'est de permettre à tout un chacun de pouvoir assurer sa sécurité, la sécurité de nos producteurs, la sécurité alimentaire de nos concitoyens.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nicolas HULOT dit : il n'est pas question de revenir, il n'est pas question de revenir sur cette loi.
STEPHANE TRAVERT
C'est une discussion que nous devons avoir, et là, encore, je vous dis…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui va arbitrer ? Qui va arbitrer et quand ?
STEPHANE TRAVERT
L'arbitrage, c'est celui du Premier ministre, toujours, mais nous devons avoir une discussion…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc demain, après-demain, on est bien d'accord ?
STEPHANE TRAVERT
Nous devons avoir une discussion avec mon collègue Nicolas HULOT. Moi, je suis totalement ouvert à cette discussion, je n'ai pas de difficultés à avoir ces discussions avec lui sur la manière dont nous devons sortir de ce sujet, puisque nous ne sommes pas conformes au droit européen…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais, Stéphane TRAVERT…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi…
STEPHANE TRAVERT
Trouvons les sorties qui vont nous permettre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le droit européen, vous avez vu que le Parlement européen avait voté l'interdiction de 3 néonicotinoïdes…
STEPHANE TRAVERT
Oui, oui, tout à fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, c'est-à-dire que si l'Europe interdit les néonicotinoïdes dans trois mois ou dans six mois, eh bien nous reviendrons à la situation actuelle, nous, la France !
STEPHANE TRAVERT
Non, il s'agit aujourd'hui de trouver les moyens…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que, clairement, vous donnez la possibilité à des agriculteurs…
STEPHANE TRAVERT
Parce que, comment est-ce que nous gérons les impasses techniques…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Clairement, vous donnez la possibilité à des agriculteurs d'utiliser certains néonicotinoïdes, on est bien d'accord, parce que vous n'avez pas de solution de remplacement ?
STEPHANE TRAVERT
Mais parce qu'il n'y a pas de substitution. Il n'y a pas de produit de substitution.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que les choses soient claires.
STEPHANE TRAVERT
Il faut que les choses soient claires. Moi je suis quelqu'un de pragmatique, je viens d'un département très rural…
JEAN-JACQUES BOURDIN
La Manche.
STEPHANE TRAVERT
La Manche, et par exemple, je vais prendre un exemple concret. Dans la Manche, ou dans les Landes, vous avez une production de carottes, la carotte des sables, qui bénéficie, dans certains endroits, de label rouge, et vous avez un produit qui s'appelle le dichlopropylène (sic), qui est utilisé pour la pousse des carottes. C'est un produit, aujourd'hui, tous les ans, on remet en cause son utilisation, elle est soumise à l'avis de la Direction générale de l'alimentation, elle est soumise à l'avis d'un certain nombre d'organismes de santé, et, tous les ans, sur un régime dérogatoire, les producteurs ont la capacité à pouvoir utiliser ce produit. Pourquoi est-ce qu'on fait la demande d'utiliser ce produit ? Tout simplement parce qu'il n'y en a pas d'autre aujourd'hui. Il faut laisser le temps pour que la recherche, l'innovation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sauf qu'on laisse le temps, parce que c'est en enrobage de semence, le néonicotinoïde …
STEPHANE TRAVERT
Tout à fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et, que se passe-t-il ? Eh bien il se passe que la terre, quand on utilise un néonicotinoïde, la terre est polluée pendant des dizaines d'années. Vous le savez bien.
STEPHANE TRAVERT
Je l'entends bien, mais il y a un certain nombre de produits aujourd'hui qui sont utilisés parce qu'ils ne présentent pas, non plus, de danger particulier pour nos populations et pour les sols…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Toutes les enquêtes montrent que les néonicotinoïdes sont mauvais pour l'homme.
STEPHANE TRAVERT
Mais à partir du moment où nous avons les, je dirais, nécessité une position des différentes agences pour pouvoir utiliser ces produits, laissons aussi la recherche travailler, laissons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais la recherche, l'INRA.
STEPHANE TRAVERT
L'INRA…
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'INRA a dit que c'était un produit dangereux, que c'était des produits dangereux, l'INRA.
STEPHANE TRAVERT
Il n'existe pas aujourd'hui de produit de substitution…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas une raison, non ?
STEPHANE TRAVERT
Ce n'est peut-être pas une raison, mais aujourd'hui il y a la nécessité de pouvoir l'utiliser parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quel que soit le risque il faut donner… ?
STEPHANE TRAVERT
Non, non, je ne dis pas ça.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'espère.
STEPHANE TRAVERT
Je ne dis pas ça. Moi je suis le ministre, aujourd'hui, de l'Agriculture, c'est-à-dire de ceux qui produisent, mais aussi de ceux qui consomment, et jamais, jamais, je ne pourrai prendre le risque, bien évidemment, ou une décision qui soit contraire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nicolas HULOT est contre, les arbitrages seront rendus par le Premier ministre, moi je voudrais vous rappeler…
STEPHANE TRAVERT
Mais si…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pardon Stéphane TRAVERT, je voudrais vous rappeler que, pendant sa campagne, Emmanuel MACRON avait pris l'engagement de ne pas revenir sur cette interdiction. Vous voulez qu'on le réécoute ? Moi j'ai le document si vous voulez. Vous le savez, il l'avait dit.
STEPHANE TRAVERT
Il avait dit « ce qui est mauvais pour les abeilles est mauvais pour l'homme », c'est ce qu'il avait dit sur ce dossier-là.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, donc les néonicotinoïdes sont mauvais pour les abeilles, donc mauvais pour l'homme.
STEPHANE TRAVERT
Il y a des dérogations qui sont accordées, aujourd'hui, jusqu'en 2020, pour l'utilisation d'un certain nombre de produits, et ces dérogations elles devront s'appuyer sur des bilans qui seront mis en place par l'ANSES, qui compareront les bénéfices et les risques liés aux usages de ces différents produits. Et à partir de là, ce que je veux dire c'est que, moi je veux mettre sur la table, avec mes collègues, avec le gouvernement, la possibilité d'avoir un certain nombre de dérogations, tant que nous n'avons pas trouvé les produits de substitution qui permettent de maintenir…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous demandez des dérogations à l'utilisation de ces néonicotinoïdes, vous demandez à ce que la France s'aligne sur ce que fait l'Europe aujourd'hui…
STEPHANE TRAVERT
Je demande du temps parce que la recherche doit… avancer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous revenez en arrière par rapport au texte qui a été voté, admettez-le.
STEPHANE TRAVERT
Je demande du temps pour avoir des produits plus vertueux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais vous revenez en arrière par rapport au texte qui a été voté, admettez-le.
STEPHANE TRAVERT
Mais je peux l'admettre, oui, si vous voulez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est clair, c'est franc, c'est direct, c'est ce qu'on aime.
STEPHANE TRAVERT
Oui, mais moi j'ai l'habitude d'être franc, mais comme je vous l'ai dit tout à l'heure, je suis un homme pragmatique, je veux trouver des solutions, et ces solutions ne peuvent pas se faire au détriment…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et si Nicolas HULOT dit non, c'est le Premier ministre qui tranchera ?
STEPHANE TRAVERT
C'est le Premier ministre qui tranche sur ces dossiers-là, et moi je m'y soumets, et il n'y a aucune cour d'appel derrière, donc les résultats seront clairs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parlons des agriculteurs, parce que la situation des agriculteurs est souvent catastrophique. Je regardais ce que disait la MSA, qui est la Mutuelle Sociale Agricole, plus de la moitié des agriculteurs ont gagné moins de 350 euros par mois en 2016, explosion du nombre d'agriculteurs qui demandent la prime d'activité, c'est l'ancien RSA Activité, la prime d'activité. Alors que faire ? Je sais que vous allez… d'abord la sécheresse. Il y a beaucoup d'agriculteurs qui ont souffert de la sécheresse, des fortes chaleurs, est-ce qu'il est prévu quelque chose pour eux ou pas, Stéphane TRAVERT ?
STEPHANE TRAVERT
Alors, je vois aujourd'hui, je réunis ce matin les directions centrales de mon ministère et je souhaite, à partir de là, que l'on puisse examiner les conditions que nous pourrions mettre sur la table pour venir en aide à ces agriculteurs qui souffrent de la sécheresse, quels types d'aides, comment est-ce que nous pouvons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Classement en catastrophe naturelle, par exemple, pourquoi pas, certaines…
STEPHANE TRAVERT
Catastrophe naturelle, il faut regarder selon les cas. Je sais que, les agriculteurs me le disent souvent, nous manquons d'eau, il faut aussi connaître à gérer les nappes phréatiques, comment est-ce que l'on traite aussi cette question-là, parce qu'aujourd'hui je sais qu'elles sont basses, donc il faut regarder ça, et moi je vais réunir cette semaine tous nos services pour permettre de trouver des solutions et nous en trouverons.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les états généraux de l'alimentation, à partir de quand ?
STEPHANE TRAVERT
Là, à partir du mois de juillet…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mois de juillet, c'est-à-dire ?
STEPHANE TRAVERT
C'est un rendez-vous important.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez fixé les dates ?
STEPHANE TRAVERT
Nous attendons la date. Moi j'ai proposé une date, j'attends de savoir si elle est conforme à celle du président de la République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laquelle ?
STEPHANE TRAVERT
Moi j'ai proposé la date du 10 et du 11 juillet, clairement, et j'attends de savoir si elle est conforme avec l'agenda du président de la République, mais je me soumettrai à l'agenda du président de la République, bien évidemment. Mais les états généraux de l'alimentation c'est un rendez-vous très important, c'est un rendez-vous qui est attendu, et qui met en lumière un certain nombre de ministères, le ministère de la Santé, le ministère du Développement durable et solidaire, le ministère de l'Agriculture qui porte les états généraux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que les producteurs puissent vivre de leur travail…
STEPHANE TRAVERT
Dignement de leur métier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dignement de leur travail.
STEPHANE TRAVERT
C'est exactement ça.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment leur redonner une partie du pouvoir face aux collecteurs et aux industriels, c'est la grande question qui est posée, le droit au revenu des agriculteurs. Est-ce que vous allez inscrire, dans la Constitution par exemple, le droit au revenu des agriculteurs ?
STEPHANE TRAVERT
Je ne sais pas si c'est quelque chose qui peut s'inscrire dans la Constitution, parce que le droit au revenu des agriculteurs, derrière on pourrait comprendre le droit au revenu sur d'autres filières, d'autres professions, c'est assez compliqué.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais les agriculteurs souffrent particulièrement. Le droit au revenu ?
STEPHANE TRAVERT
Le droit au revenu c'est, là-dessus, bien évidemment que nous devons travailler. Je ne sais pas si le mettre dans la Constitution est de nature…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors oublions la Constitution.
STEPHANE TRAVERT
Il faut être pragmatique, une fois de plus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oublions la Constitution. Comment assurer le droit au revenu aux agriculteurs ?
STEPHANE TRAVERT
Compétitivité, innovation, et simplification, voilà comment nous souhaitons travailler.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais, ce sont des mots…
STEPHANE TRAVERT
Oui, ce sont des mots.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi je veux concrètement, je me mets à la place de l'agriculteur qui nous regarde.
STEPHANE TRAVERT
Ce sont des mots, mais, à travers ces mots c'est la méthode que nous souhaitons développer avec les agriculteurs, c'est redonner du pouvoir aux agriculteurs. Les organisations de producteurs, nous devons redonner plus de force aux organisations de producteurs, pour permettre au triptyque producteurs, distributeurs et transformateurs, de bien fonctionner, faire en sorte que les producteurs aient une assise beaucoup plus forte dans les négociations.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On revient sur la loi LME ?
STEPHANE TRAVERT
On revient sur la loi LME si c'est nécessaire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous reviendrez sur la loi si c'est nécessaire ?
STEPHANE TRAVERT
Nous reviendrons sur la loi si c'est nécessaire, c'était un engagement du président de la République, il l'avait dit à ce micro, vous vous en souvenez certainement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, exactement.
STEPHANE TRAVERT
Et, ce que nous souhaitons aujourd'hui c'est faire en sorte que, à travers ce triptyque producteurs, transformateurs, distributeurs, nous puissions trouver un équilibre, mais aussi, au niveau européen, redonner de l'harmonisation sur les négociations commerciales, et là, c'est un autre cheval de bataille, qui va faire partie de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelle part, de la valeur d'un produit, doit revenir à l'agriculteur producteur ?
STEPHANE TRAVERT
La part de la valeur produit c'est justement la répartition de la valeur, c'est le sujet des états généraux de l'alimentation que nous allons mettre en place. C'est, à partir du moment où un prix de revient est défini, comment ce prix de revient…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on peut imposer un prix ?
STEPHANE TRAVERT
Toujours difficile, vous savez, nous sommes dans une économie…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça que je vous poser la question…
STEPHANE TRAVERT
La concurrence libre et non faussée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on devrait imposer à 34, 35, 38 centimes le litre, le prix du lait ?
STEPHANE TRAVERT
Mais, ce que je crois, moi, c'est qu'il faut bâtir, là aussi, des compromis. Vous avez des industriels, des transformateurs laitiers, qui, aujourd'hui, payent bien le lait à leurs producteurs, c'est le modèle, quelques modèles de coopératives qui fonctionnent très bien là-dessus. Mais aujourd'hui nous savons qu'il y a des industries qui payent en dessous de 300 euros la tonne, le litre, enfin en dessous de 300 euros la tonne de lait, là aussi, quand je vous dis qu'il faut mettre autour de la table le triptyque transformateurs, distributeurs, producteurs, c'est remettre en avant les organisations de producteurs. Moi j'ai des exemples sur mon territoire, où des organisations de producteurs, qui se sont mises à travailler ensemble, qui ont fait des efforts et qui savent négocier avec leurs transformateurs, ont réussi à obtenir des résultats, donc je crois que nous pouvons essayer d'essaimer ce modèle, et c'est ce que permettra de mettre en place les états généraux de l'alimentation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai trois questions, réponses courtes si vous pouvez Stéphane TRAVERT. Je crois que vous avez répondu à cette question, pour la grippe aviaire, en ce qui concerne les élevages, les producteurs de canards. Là j'ai un auditeur, Lionel, qui nous dit « ça fait 200 jours que les producteurs ne peuvent pas se verser de salaire, quand est-ce que nous serons indemnisés ? » Tout le monde n'a pas été indemnisé.
STEPHANE TRAVERT
J'ai eu au téléphone les responsables de l'interpro foie gras la semaine dernière, nous avons mis en place un deuxième régime d'aides, un deuxième régime d'avances, nécessaire, parce que je sais qu'il y a des attentes qui sont énormes. Nous avons vidé des couvoirs, vidé des élevages de canards, et puis, derrière, il y a eu ce vide sanitaire pendant une centaine de jours, je sais la détresse que peuvent connaître un certain nombre de producteurs, et les effets de cette grippe aviaire, mais nous avons mis en place un deuxième régime d'avances pour permettre de pallier au plus urgent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, deux questions encore, la première, qui est une question de votre circonscription l'EPR de Flamanville, il faut absolument que l'EPR fonctionne, il n'est pas question de venir malgré toutes les incertitudes concernant la cuve de l'un des réacteurs, on est bien d'accord ?
STEPHANE TRAVERT
Aujourd'hui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça ne vous inquiète pas ça ?
STEPHANE TRAVERT
Non, je ne suis pas inquiet parce que moi, je fais confiance dans celles et ceux qui travaillent sur ces sujets. Il y a des défauts qui ont été constatés aujourd'hui, mais c'est l'ASN…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça ne remet pas en cause…
STEPHANE TRAVERT
L'Autorité de Sûreté Nucléaire, qui donnera son avis, et l'Autorité de Sûreté Nucléaire est libre et indépendante, moi, je souhaite que ce chantier de l'EPR…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aille au bout…
STEPHANE TRAVERT
C'est 60 % d'emploi local sur Flamanville, aille au bout, que l'on puisse le mettre en route, que l'on puisse démarrer cet EPR, qui, je le rappelle, est une tête de série, et enfin, nous pourrons ensuite, conformément à l'engagement du président de la République, fermer ensuite Fessenheim, faire monter aussi les énergies marines renouvelables, l'éolien offshore ou l'hydrolien, et arriver à cet objectif de diminuer la part du nucléaire au profit des énergies renouvelables.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Deux candidates à la présidence de l'Assemblée nationale pour la République En Marche, on est bien d'accord, Brigitte BOURGUIGNON et Sophie ERRANTE.
STEPHANE TRAVERT
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'une des deux sera présidente de l'Assemblée nationale ?
STEPHANE TRAVERT
Oui. Et j'en suis très heureux parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous voteriez pour qui, vous ?
STEPHANE TRAVERT
Que ce soit l'une ou l'autre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour qui voteriez-vous ?
STEPHANE TRAVERT
Eh bien écoutez, j'ai de l'amitié pour les deux, je ne connais pas, je n'ai pas lu leurs propositions…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les connaissez toutes les deux…
STEPHANE TRAVERT
Mais je les connais bien toutes les deux, je sais que ce sont deux femmes de valeur, qui ont un engagement fort, des convictions chevillées au corps, et que ce soit l'une ou l'autre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sophie ERRANTE sera élue ?
STEPHANE TRAVERT
Nous verrons si Sophie ERRANTE est élue, je sais que c'est quelqu'un qui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pensez qu'elle le sera…
STEPHANE TRAVERT
Qui connaît bien les sujets économiques, qui aura l'autorité, je pense nécessaire pour diriger cette belle et noble assemblée, mais nous avons deux candidates d'excellente valeur aujourd'hui pour le perchoir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci beaucoup Stéphane TRAVERT d'être venu nous voir.
STEPHANE TRAVERT
Merci de votre invitation.
Source : Service d'information du gouvernement, le 11 juillet 2017