Texte intégral
Le débat national pour l'aménagement du territoire décidé par le comité interministériel de Mende, le 12 juillet 1993, s'est déroulé dans l'ensemble des régions de France d'octobre 1993 à mars 1994.
Lancer un tel débat dans une période de crise économique, constituait sans nul doute un pari.
Ce débat n'allait-il pas renforcer les crispations ou, à l'inverse, faire naître des illusions ?
Ni l'un, ni l'autre ne s'est produit.
Au contraire, une forte prise de conscience s'est dégagée au fur et à mesure que le débat s'est approfondi. La confrontation des idées dans un esprit de concertation a révélé combien le changement est à la fois nécessaire et urgent.
Dans la situation d'aujourd'hui, réformer suppose de dialoguer.
C'est parce que le Gouvernement prépare l'avenir de la France que des consultations ont été organisées sur les grands sujets. Puis- je en rappeler les principaux exemples ?
Le système de santé : la situation est aujourd'hui suffisamment grave pour menacer la pérennité de l'assurance maladie. Le Gouvernement a donc souhaité que soit rédigé par MM. SOUBIE, PORTHOS et PRIEUR un Livre Blanc sur l'avenir de la santé et de l'assurance maladie.
L'éducation : des tables-rondes sur l'avenir de notre système éducatif ont été mises en place. Elles permettront de faire le point sur les aspirations des Français.
Le même esprit anime la préparation des "états généraux" de la jeunesse.
De ces dernières semaines, je retiens la détresse qu'ont exprimée des milliers de jeunes filles et de jeunes gens devant une société qui ne parvient pas suffisamment à les accueillir.
Que faut-il attendre de la consultation sur la jeunesse que nous avons lancée ?
Avant tout, c'est l'expression des intéressés qui devra être favorisée : ce débat, "assises", "états généraux", quel qu'en soit le nom, ce doit être leur débat. La puissance publique l'accompagnera, puis nous verrons quelles mesures peuvent être prises et à quel rythme.
Le redressement économique est également une action de longue haleine. Pour être efficace et accepté, elle suppose que soit identifiés suffisamment à l'avance les problèmes de notre société, qui exigent une adaptation des hommes et des structures. Elle doit en outre avoir été nourrie par un débat public.
J'ai chargé le Commissaire général au plan d'une étude sur les grands défis économiques et sociaux que notre pays devra relever d'ici la fin du siècle.
La reprise économique qui s'amorce offre une occasion pour régler certaines insuffisances structurelles de l'économie française et notamment pour que le retour de la croissance soit synonyme de baisse du chômage.
Enfin, et c'est le sujet de notre réunion d'aujourd'hui, il y a l'aménagement du territoire. Débat voulu, organisé par Charles PASQUA, le Ministre d'Etat, Ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire qui a eu le grand mérite d'une intuition juste : mettre fin à la coupure de la France en deux, reconstituer une unité nationale forte.
Une nouvelle phase de ce grand débat national s'engage. Elle est destinée à examiner les propositions qui ont été formulées ces six derniers mois.
La première partie du débat a rencontré un grand succès.
Les Français se sont rendus compte que leur était donnée l'occasion de participer à un exercice de démocratie directe.
Des millions de citoyens se sont exprimés, des milliers de contributions ont été rédigées. Les élus locaux, le corps préfectoral, les étudiants, la presse écrite ont permis cette mobilisation. Je les en remercie.
L'essentiel des propositions a été regroupé, ordonné, synthétisé dans le document qui vous est présenté aujourd'hui.
C'est un document d'étape. Il révèle combien nos concitoyens souhaitent une France plus équilibrée, plus prospère, plus compétitive. Placer l'homme au coeur du développement par la mise en valeur de l'endroit où il vit, voilà sans doute l'aspiration du plus grand nombre.
Le document d'étape dessine des moyens susceptibles d'être mis en oeuvre. Leur variété, leur originalité sont de bon augure.
Les règles de la vie publique font l'objet de plusieurs suggestions. La coopération entre collectivités, la répartition des compétences, l'organisation de l'Etat, le rôle du Parlement sont les voies d'une clarification souhaitée.
A l'évidence, l'approfondissement de la démocratie est une condition pour un meilleur aménagement du territoire. Il s'agit notamment de renforcer le rôle du citoyen et de prendre plus directement en considération les aspirations des Français.
Le développement d'un emploi socialement et géographiquement mieux réparti est une priorité pour tous. L'environnement administratif et financier des entreprises, la mobilité des salariés - surtout des cadres supérieurs -, la fiscalité, sont quelques uns des sujets à explorer.
De nombreuses propositions visent à améliorer l'équipement du pays, dans le respect du cadre de vie. Certes il y a les infrastructures de communication, mais il y a aussi la santé, la culture, l'enseignement, autant de services que les Français estiment nécessaires au respect de l'égalité des chances, quelque soit leur lieu d'habitation.
L'expression de ces besoins s'accompagne de propositions pour leur financement. Une plus grande péréquation entre les disponibilités financières du pays et le retour à la croissance sont les voies à suivre.
En fait, il s'agit de renforcer le processus du développement local et de doter la France des équipements nécessaires pour la mettre au niveau de ses concurrents internationaux. Faire de l'espace une richesse et de l'équité une obligation, voilà les deux objectifs.
J'avais appelé avec le Ministre les Français à faire preuve d'imagination et de raison. L'équilibre de ce document d'étape témoigne du fait que cet appel a été entendu. Nos concitoyens ont été novateurs et réalistes. Ils veulent des réformes et ils ont conscience que tout n'est pas possible dans l'instant.
Je me réjouis que les contraintes n'aient pas été négligées. Mais je me réjouis plus encore que ceci n'ait pas bridé l'expression d'une grande ambition pour la France.
Il y a un an, j'avais annoncé dans ma déclaration de politique générale que le Gouvernement engagerait une politique d'aménagement du territoire rénovée et énergique. De nombreuses décisions à effet immédiat ont déjà été prises. Parallèlement, avec l'engagement du débat national, une méthode originale a été utilisée.
Préparer la France de l'an 2015 suppose que les Français dessinent eux-mêmes le pays qu'ils veulent. L'enjeu est clair : l'immobilisme ou le mouvement.
C'est le mouvement que les Français ont choisi. Au-delà des corporatismes et des habitudes, au-delà des tentatives souvent stériles d'une politisation soucieuse seulement de court terme, le Gouvernement ne se laissera pas arrêter dans la voie du changement.
Il faut à présent passer à l'acte.
La concertation se poursuivra dans cet esprit. Elle portera sur les orientations retenues par le document d'étape. C'est à la lumière de cette concertation que le Gouvernement préparera un projet de loi d'orientation. Je souhaite que le débat reste aussi riche et fécond qu'il l'a été ces six derniers mois.
L'objectif est de soumettre le texte au Parlement avant la fin du mois de juin.
Les choix qui seront adoptés pour l'aménagement du territoire marqueront une étape importante dans l'action du Gouvernement.
La loi d'orientation fixera la cohérence de toutes les politiques à mettre en oeuvre et esquissera quelques grandes réformes nationales.
Les choix ainsi arrêtés engageront les institutions nationales pour plusieurs années. Ils contribueront à une France plus juste et plus prospère.