Texte intégral
Madame la Présidente, Messieurs les Présidents,
Messieurs les Maires,
Mesdames et Messieurs,
Je tiens d'abord à remercier chacun d'entre vous pour cette passionnante après-midi sur le site de la Génopole d'Evry, cur battant de l'industrie et de la recherche de demain. Vous le savez, pour le gouvernement, pour moi-même le développement des biotechnologies est un enjeu stratégique. Chacun a conscience qu'il y a là, pour notre pays, un défi à relever et un rendez-vous à ne pas manquer.
La réussite de Génopole Evry et l'action de l'AFM sont exemplaires. 20 laboratoires, 39 entreprises, plus de 1500 emplois créés : à eux seuls, ces chiffres témoignent du succès, trois ans après sa création, de Génopole. Outre l'action de Pierre Tambourin, les raisons de ce succès sont l'esprit d'initiative et le sens du partenariat : partenariat entre chercheurs et industriels, entre État et collectivités locales, entre l'AFM et la communauté scientifique. Dès l'origine, le soutien du gouvernement vous a été acquis. Il a récemment été réaffirmé par la décision de doter Génopole d'un cadre plus propice à son développement, en le constituant en GIP. L'État contribuera à hauteur de 4,5 M au fonctionnement de cette nouvelle structure.
Je le rappelais à l'instant, l'AFM a été à l'origine du projet Génopole. Grâce à la volonté des familles de malades qui l'animent, grâce aux moyens du Téléthon, l'AFM est devenue un acteur majeur de la recherche génétique en France et dans le monde. Nous sommes particulièrement fiers que son action récente ait permis au Professeur Alain Fisher de l'hôpital Cochin de réussir cette première mondiale en thérapie génique qui permet aux enfants bulle d'avoir une vie plus normale.
Voilà un exemple, parmi d'autres, des potentialités des biotechnologies. Grâce au séquençage du génome humain, il devient possible d'identifier les gênes impliqués dans diverses maladies, y compris les plus fréquentes. Cette connaissance sera exploitée pour concevoir des médicaments d'une grande précision. En améliorant la résistance des plantes, en réduisant le recours aux engrais, en adaptant les végétaux à des conditions climatiques extrêmes, les biotechnologies pourraient aussi contribuer à satisfaire les besoins alimentaires d'une population toujours plus nombreuse. Les biotechnologies sont porteuses de croissance et d'emploi. En 2005, le marché des biotechnologies en Europe pourrait représenter 250 milliards d'euros et 3 millions d'emplois.
Grâce à l'alliance du chercheur et de l'industriel, de la biologie et de la technologie, de la médecine et de l'économie, une nouvelle révolution donc se précise. Cette révolution n'est pas sans menaces. Menaces éthiques, avec le clonage humain remettant en cause l'idée même que nous nous faisons de la singularité, de l'unité et donc de la dignité de l'être humain. Menaces sur la sécurité alimentaire, si le développement des OGM ne fait pas l'objet d'une véritable veille sanitaire. Menaces de privatisation de pans entiers du patrimoine commun de l'humanité. Menaces d'un fossé croissant entre le Nord et le Sud, même si, de ce point de vue, les négociations de Doha ont permis certains progrès. Identifier les risques ne doit pas nous mener à un contresens : c'est un appel à la transparence et à la régulation publique, pas une remise en cause de l'innovation. C'est un appel à sceller un nouveau pacte civique avec la communauté scientifique, pas à brider son dynamisme ni à entraver sa capacité d'invention. Comme pour les nouvelles technologies, ce qui compte, ce qui est nécessaire, c'est d'utiliser au mieux l'outil et de libérer son potentiel créateur. En un mot, faire du progrès scientifique un progrès pour l'ensemble de l'humanité.
Fort de cette conviction, Nous nous sommes mobilisés depuis le début de la législature pour l'innovation et pour la création d'entreprises, notamment pour les biotechnologies.
La loi sur l'innovation du 12 juillet 1999 a permis un rapprochement entre la communauté des chercheurs et les entreprises. Plus d'une centaine d'entreprises ont été créées l'an dernier par des chercheurs, contre 20 seulement en moyenne pour les années précédentes.
En 3 années, le concours national d'aide à la création d'entreprises de technologies innovantes a permis la sélection de plus de 750 projets qui se sont traduits par la création d'environ 280 entreprises.
Afin de favoriser les partenariats public/privé, 16 réseaux de recherche et d'innovation technologique ont été mis en place. Quatre sont dédiés aux sciences du vivant.
L'appel à projet " incubation d'entreprises " a permis la création de 31 incubateurs publics dont une dizaine se consacrent, en totalité ou en partie, aux biotechnologies. Nous avons également mobilisé 25 M pour encourager la création de fonds d'amorçage. Trois fonds nationaux et sept fonds régionaux ont ainsi été créés, dont " BioAm " dédié au financement des entreprises de biotechnologies et dont le capital dépasse aujourd'hui 40 M . Les engagements que j'avais pris l'année passée lors des États généraux de la création d'entreprises ont été tenus.
Cette politique se traduit également dans le projet de budget civil de recherche et de développement technologique (BCRD) pour 2002 : accroissement du budget de l'INSERM et de l'INRA, création de 180 emplois, augmentation de 13 % du Fonds national de la science au profit notamment des actions concertées incitatives dans les domaines de la génomique, des maladies à prions, des recherches sur le Sida et le paludisme pour les pays en développement. Les sciences du vivant qui représentent désormais un quart du BCRD, auront augmenté leurs moyens de 27 % de 1997 à 2002, contre 2,6 % dans la période comparable précédente.
Ces différentes actions ont été utiles. La France compte désormais près de 300 PME de biotechnologies qui emploient 7 000 personnes et génèrent un chiffre d'affaires de 2 Md , dans un secteur dont le rythme de croissance annuelle dépasse déjà 20 %. Malgré cette dynamique, nous devons être objectifs : notre pays connaît encore un certain retard. Les financements privés (capital risque et marché boursier) restent insuffisants. Au niveau européen, nous ne nous situons qu'au troisième rang, derrière l'Allemagne et le Royaume-Uni.
En outre, considérée globalement, l'Union Européenne reste à la traîne des États-Unis. La dépense en recherche/développement privée ne dépasse pas 1,2 % du PIB des 15 quand elle atteint 2 % outre-Atlantique. Dans le secteur des biotechnologies, les entreprises américaines emploient 4 fois plus de personnes que les entreprises européennes pour un chiffre d'affaire 5 fois supérieur. Ce déficit est plus manifeste encore lorsqu'il s'évalue en termes de brevets déposés. Pourtant, si le premier marché biotechnologique mondial se situe aux États-Unis et le second au Japon, la somme des marchés des États membres, actuellement fragmentés, dépasse le marché américain. Là aussi, l'Union pourrait faire la force. C'est pourquoi, avec mon collègue Roger-Gérard Schwartzenberg, nous appelons de nos vux la création d'un véritable espace européen de la recherche. Les propositions de la Commission pour le 6e Programme Cadre de Recherche et Développement, qui entrera en vigueur en janvier 2003, permettront des avancées.
En France, j'ai souhaité et agi pour que de nouvelles actions de soutien soient mises en uvre. Dans le cadre du plan de consolidation de la croissance du PLF 2002, deux dispositifs concernent particulièrement celles évoluant dans le domaine des biotechnologies :
Un fonds de soutien aux entreprises de biotechnologies est donc créé. Géré par la SOFARIS au sein d'une filiale dédiée, il apportera aux investisseurs une garantie sur 50 à 70 % de leurs apports en capital à des entreprises de biotechnologie. Il participera à la garantie de prêts à moyen et long terme à ces entreprises. La garantie sera ouverte à tous les investisseurs en capital possédant une expertise ou une spécialisation dans le secteur des biotechnologies. Seront éligibles les entreprises soit financées par un fonds ayant une activité reconnue dans les biotechnologies, soit issues d'un laboratoire de recherche en biotechnologie, soit reconnues par l'ANVAR comme relevant du secteur des biotechnologies. Ce dispositif permettra de garantir de l'ordre de 400 M de fonds propres ou de concours à long terme.
Un fonds de co-investissement pour les jeunes entreprises est mis en place. Doté par l'État et la Caisse des Dépôts et Consignations de 60 M et ouvert à la participation d'autres investisseurs comme la Banque Européenne d'investissement, il a pour vocation d'investir directement dans de jeunes entreprises aux cotés de leurs actionnaires initiaux. Il permettra aux fonds d'investissements spécialisés dans les très jeunes entreprises de trouver un relais de financement. Compte tenu de ses règles d'investissement, ce fonds devrait drainer au moins 120 M en faveur des entreprises concernées. Dans ce cadre, j'ai demandé qu'une attention particulière soit portée aux entreprises du secteur des biotechnologies.
J'ai tenu à ce que ces dispositifs soient opérationnels dès janvier prochain. Au total, les entreprises de biotechnologies bénéficieront ainsi de plus de 400 M . Le Président de France Biotech, Philippe Pouletty, que je tiens à remercier pour sa contribution à nos réflexions, pourra donc dire, je crois, aux membres de son association qu'ils ont été entendus. Au delà du secteur prioritaire des biotechnologies, j'aurai d'ailleurs l'occasion de m'exprimer prochainement sur la mise en uvre de l'ensemble des mesures du plan de soutien à la croissance destinées aux petites ou aux moyennes entreprises.
Avant de conclure, je tiens à revenir sur l'action de l'AFM. Le succès pour les " enfants-bulle " est un encouragement donné à l'AFM afin d'investir davantage encore dans le secteur des biotechnologies, dans le cadre de la recherche sur les maladies orphelines. Je souhaite - et je prendrai les mesures nécessaires en ce sens - que l'AFM puisse, sans remettre en cause son statut associatif, investir dans toute société biotech susceptible de s'intéresser à ces maladies. J'adresse aussi à l'AFM tous mes voeux de succès pour le très prochain Téléthon.
Mesdames, et Messieurs,
Alliance d'acteurs publics et privés, coopération entre l'État et les collectivités locales, consolidation de la recherche par l'industrie et de l'industrie par la recherche, innovation au service de la croissance, formation des générations de demain, Génopole Evry est exemplaire parce que c'est un espace de partage, de progrès et de responsabilité. Partage, progrès et responsabilité, voilà des valeurs qui doivent nous guider pour affirmer à l'échelle de l'Europe un modèle résolument humaniste du progrès scientifique et des avancées technologiques.
Merci
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 23 novembre 2001)