Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Président, de votre accueil et de l'amabilité de vos propos.
Lorsque vous m'aviez invité, lors de notre entrevue du 10 novembre dernier, à participer à votre Congrès, la présentation des thèmes que vous comptiez aborder avait retenu toute mon attention. Les débats d'aujourd'hui auxquels vous avez associé des personnalités très éminentes, que je sache, ont été d'une grande richesse.
Grâce à l'ensemble des contributions, l'UNAPL a pu effectivement demeurer ce "laboratoire de droit social" dont notre pays a besoin s'il veut retrouver son dynamisme.
Ma présence parmi vous traduit mon attachement à ce que vous représentez. Elle ne résulte pas du seul désir d'exposer la politique du Gouvernement devant un auditoire de qualité.
Les cabinets, les études, les bureaux ou les officines des professionnels libéraux que vous êtes sont des entreprises.
Ces entreprises sont originales, du fait des caractéristiques de l'exercice libéral que sont l'indépendance intellectuelle, la déontologie professionnelle, la compétence garantie par un titre protégé dans l'intérêt du consommateur, la responsabilité totale, l'engagement personnel, enfin le libre choix tant du praticien que du client. Ces caractéristiques plus encore que le statut de travailleur indépendant, définissent le professionnel libéral.
Dans la mesure où elles sont compatibles avec le statut de salarié, comme l'ont montré les avocats, ces caractéristiques n'interdisent pas de mettre au point des formes de salariat d'exercice libéral qui permettraient de tirer pleinement partie de l'évolution des structures de groupement. Pour autant, le travail indépendant garde toute sa valeur sociale et demeure adapté à de très nombreuses situations professionnelles. Il est bien vrai, en effet, que ce qui fonde l'activité libérale, c'est l'idée de l'indépendance intellectuelle de celui qui l'exerce. Cette indépendance donne aux professions libérales leur rôle irremplaçable dans une société de liberté et de responsabilité.
Ce qui se passe aujourd'hui dans les pays d'Europe centrale et orientale en offre la démonstration. La construction d'une démocratie, d'une économie de marché et d'entreprises privées, sur les ruines d'une économie centralisée, y est inséparable de la fondation d'un état de droit reposant sur un parlement, sur une magistrature et une fonction publique au service du droit et de l'intérêt général et non d'une idéologie partisane et, enfin, sur un réseau dense de professionnels libéraux réellement indépendants et dont les compétences et les responsabilités soient reconnues.
En Pologne, en Hongrie, en République Tchèque, dans les pays baltes et même en Russie réapparaissent aujourd'hui des avocats uniquement soucieux de défendre les droits de leurs clients, des médecins et des paramédicaux travaillant en dehors des structures hospitalières, proches des patients, des experts-comptables responsables uniquement de l'établissement de comptes objectifs donnant une image fidèle de la situation des entreprises, des conseils en gestion compétents et indépendants et même des officiers ministériels. Cette renaissance est l'un des gages les plus sûrs de la réussite de ces nations, dans leur retour à la liberté.
Je sais que l'UNAPL et plusieurs ordres professionnels y apportent leur concours, au titre de la coopération et de l'assistance technique. Je ne saurais trop les y encourager.
Les professions libérales, par tout ce qu'elles représentent et qu'elles permettent, constituent à mes yeux l'un des éléments clés de la société humaniste et solidaire dont je souhaite que notre pays offre l'exemple.
Les professions libérales ne vivent pas à l'abri du monde extérieur. Elles ne s'épanouissent que si elles démontrent leur capacité à répondre aux besoins de la société et à servir des causes qui les dépassent : le respect du droit, l'exigence de la santé publique, l'efficacité d'une économie décentralisée. Vous avez développé ces thèmes lors de votre Congrès. Dans la situation difficile que traverse notre pays, je souhaite appeler chacune de vos professions à se mobiliser au service de deux priorités : la création d'emplois et l'exportation des services.
Il est inutile d'insister longuement sur l'urgence qui s'attache à la lutte pour l'emploi. Le chômage atteint dans notre pays un niveau qui constitue une menace pour son équilibre moral et social et qui compromet notre système de protection sociale, qu'il s'agisse de l'indemnisation du chômage ou de l'assurance-maladie. La situation ne s'améliorera qu'avec la reprise de la consommation et de l'investissement, c'est-à-dire grâce au retour à une croissance positive et régulières de l'économie. J'ai de bonnes raisons de penser que nous n'en sommes plus très éloignés : l'environnement international est meilleur, notamment en Amérique du Nord, le secteur du logement se redresse, les carnets de commande à l'exportation se garnissent à nouveau.
Mais il serait illusoire d'attendre un redressement durable de l'emploi des seuls effets mécaniques d'une nouvelle expansion. Il faut aussi que tous les entrepreneurs se mobilisent au service de la création d'emplois. Vos professions sont bien placées pour tenir un rôle important dans ce combat. Elles ont su résister efficacement à la récession.
Certaines professions ont vu le nombre de leurs membres s'accroître. Le nombre de salariés, de collaborateurs a augmenté. Ce mouvement doit être encouragé.
Je mesure combien un appel à la mobilisation pour l'emploi peut sembler incantatoire à certains d'entre vous, aux architectes qui trouvent que les effets du plan de relance du bâtiment et des travaux publics tardent à se faire sentir, aux médecins, aux pharmaciens et aux professions para-médicales auxquels nous demandons de contribuer à la maîtrise des dépenses de santé. Mais je souhaite que chacun se demande ce qu'il serait possible de faire en s'attachant les services de collaborateurs, fut-ce à temps partiel ou partagé, pour améliorer les conditions d'exercice professionnel ou accroître la qualité des prestations.
Le gain en qualité de vie du praticien et la satisfaction de la clientèle requièrent souvent un service aux personnes que seul peut procurer l'emploi d'un ou de plusieurs collaborateurs.
De tout ceci l'UNAPL a montré qu'elle était consciente. Le thème de ce congrès en témoigne. Vous avez signé le 8 juillet dernier la Charte Nationale de Mobilisation en faveur des contrats d'apprentissage et d'insertion en alternance. Une étude a été engagée pour déterminer les moyens de faciliter l'embauche de jeunes par les professions libérales. Je vous demande d'accroître encore ces efforts, de relancer les organisations que vous regroupez dans ce qui doit devenir une véritable mobilisation pour la création d'emplois. Si, notre pays perdait définitivement confiance dans les capacités de l'initiative individuelle et dans le dynamisme de la libre entreprise, son avenir serait compromis.
Bien sûr, vous êtes en droit d'attendre des pouvoirs publics qu'ils soutiennent vos efforts. Votre Président a bien voulu rappeler que vous avez bénéficié en priorité de la suppression du décalage d'un mois de la TVA. Le projet de loi relatif à l'initiative et à l'entreprise individuelle actuellement en cours d'examen au Parlement, et dont le rapport présenté au Conseil Economique et Social par M. BARTHELEMY a été l'une des sources, comporte plusieurs dispositions qui intéressent aussi les professions libérales et qui devraient inciter à la création d'emplois. Je pense notamment à l'exonération partielle des cotisations d'assurance-maladie et maternité pour les travailleurs non salariés non agricoles créant ou reprenant une entreprise ou encore aux mesures concernant le statut du conjoint collaborateur.
L'emploi n'est pas le seul défi auquel se trouvent confrontées les professions libérales. Elles doivent désormais préparer leur avenir dans le cadre d'une économie ouverte sur le monde extérieur. Les mesures d'harmonisation et de libre circulation au sein de l'union européenne n'étaient pas encore achevées que vous avez dû suivre les négociations du GATT sur les services, négociations qui n'ont pas manqué de provoquer dans vos rangs émotion et inquiétude. Aussi voudrais-je faire le point sur cette question.
L'accord sur le commerce des services établit un cadre multilatéral de principes et de règles conçu pour l'expansion de ce commerce dans des conditions de transparence et de libéralisation progressive. L'accord conclu le 15 décembre dernier est globalement satisfaisant pour la France. Le principe posé est la clause de la nation la plus favorisée. En application de cette règle chaque partie à l'accord, c'est-à-dire pour ce qui nous concerne l'Europe des 12, accordera immédiatement et sans condition aux fournisseurs de services des autres Etats membres un traitement identique à celui qu'elle accorde à tout autre.
Ceci, comprenons le bien, permet de préserver l'ensemble de la réglementation européenne existante et exclut toute déréglementation qui serait contraire à nos souhaits.
Il convient, dès à présent, d'être attentif aux conditions dans lesquelles vos professions vont affronter cette concurrence élargie et de les doter des moyens qui pourraient leur faire défaut. A cet effet le ministre chargé du commerce extérieur, M. Gérard LONGUET, vient de confier, avec mon accord, une mission d'étude et de proposition à un professionnel réputé, Me Jean-Bernard THOMAS, coprésident de l'Association française des avocats conseils d'entreprises. Cette mission, à laquelle la Délégation interministérielle aux professions libérales est pleinement associée, doit analyser les intérêts des professionnels français et voir concrètement comment les exportations des professionnels libéraux peuvent être facilitées.
Nous ne devons entretenir aucune illusion.
Les données de la balance des paiements montrent que les soldes des transactions courantes ont été négatifs ces dernières années pour les services de santé, pour les services juridiques et pour les expertises-comptables. Seules les études techniques liées aux grands projets de constructions et de travaux publics dégagent des soldes positifs. De même, pour les services juridiques et l'expertise comptable les investissements étrangers en France sont nettement supérieurs aux investissements français à l'étranger. C'est dire que la pénétration des étrangers sur notre marché progresse plus vite, dans ces domaines, que celle de nos entreprises ou cabinets de conseils et d'audit dans les pays étrangers. Ces résultats ne doivent pas nous étonner. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, notre pays n'est pas protectionniste et il ne faut pas regretter que Paris soit devenue une capitale juridique et financière qui attire les compétences étrangères. Mais comment ne pas y voir également la conséquence d'un dynamisme insuffisant à l'exportation ? L'enjeu est pourtant décisif. Il y va non seulement de vos chiffres d'affaires et de vos emplois mais aussi de l'influence de notre culture juridique et scientifique dans le monde. Là encore, je ne peux que vous appeler à redoubler d'efforts. L'exportation des services des professionnels libéraux français est une ambition à la mesure du syndicalisme constructif que vous avez appelé de vos voeux.
Vous avez évoqué, Monsieur le Président, les préoccupations ou revendications des organisations que vous regroupez. Certaines sont classiques, d'autres plus neuves. Certaines touchent à la fiscalité ou à la protection sociale, d'autres à des réformes de nature statutaire ou juridique. Vous êtes attaché à l'égalité de traitement fiscal et social entre les professions indépendantes et les salariés. Vous souhaitez que soit étudié un important aménagement de la taxe sur les salaires afin de ne pas décourager l'emploi de collaborateurs. Vous préconisez une extension sous une forme ou une autre des institutions ordinales. Vous admettez qu'il est nécessaire de repenser le système de formation professionnelle continue des libéraux eux-mêmes, dont votre Confédération défend le principe. Votre congrès a émis l'idée de mesures législatives visant à instituer le salariat d'exercice libéral.
Nous savons tous qu'il faut ajuster et réformer certains des textes concernant les sociétés d'exercice libéral et faire aboutir le dossier de la complémentarité entre professions. Le garde des sceaux et le ministre du budget ont eu, ces derniers mois, l'occasion de dire comment le gouvernement comptait aborder le sujet des relations entre les professions juridiques et comptables. Vous savez qu'ils l'ont fait en termes identiques. Je souhaite que ce dossier soit conduit à son terme.
Beaucoup de sujets restent à débattre. Je comprends la plupart de vos préoccupations et je suis prêt à les prendre en compte ; je souhaite que, de votre côté, vous sachiez répondre aux deux priorités que je viens d'évoquer : l'emploi et notre présence sur les marchés étrangers. Je demande aux membres du Gouvernement et au délégué interministériel aux professions libérales d'étudier vos demandes en ayant présentes à l'esprit ces deux préoccupations.Je réunirai avant l'été le comité interministériel prévu par le décret du 2 juin 1983 afin d'adopter les mesures destinées à doter les professions libérales d'un cadre rénové et à contribuer à leur dynamisme. Je souhaite que les professions libérales disposent des mêmes moyens que les autres, ce qui n'est pas encore le cas, et que la spécificité de vos professions soit prise en compte au moyen de dispositions originales. Nous aurons donc l'occasion de nous revoir prochainement afin de préparer ensemble ces mesures. Nous nous efforcerons d'être concrets et efficaces. "Les meilleures lois, disait Chateaubriand, sont inutiles lorsqu'elles ne sont pas exécutées ; elles deviennent dangereuses lorsqu'elles le sont mal" . Gardons nous de projets qui se révéleraient vains à l'expérience mais sachons que, plus que jamais, nous devons progresser ensemble dans la voie de la réforme.
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Président, de votre accueil et de l'amabilité de vos propos.
Lorsque vous m'aviez invité, lors de notre entrevue du 10 novembre dernier, à participer à votre Congrès, la présentation des thèmes que vous comptiez aborder avait retenu toute mon attention. Les débats d'aujourd'hui auxquels vous avez associé des personnalités très éminentes, que je sache, ont été d'une grande richesse.
Grâce à l'ensemble des contributions, l'UNAPL a pu effectivement demeurer ce "laboratoire de droit social" dont notre pays a besoin s'il veut retrouver son dynamisme.
Ma présence parmi vous traduit mon attachement à ce que vous représentez. Elle ne résulte pas du seul désir d'exposer la politique du Gouvernement devant un auditoire de qualité.
Les cabinets, les études, les bureaux ou les officines des professionnels libéraux que vous êtes sont des entreprises.
Ces entreprises sont originales, du fait des caractéristiques de l'exercice libéral que sont l'indépendance intellectuelle, la déontologie professionnelle, la compétence garantie par un titre protégé dans l'intérêt du consommateur, la responsabilité totale, l'engagement personnel, enfin le libre choix tant du praticien que du client. Ces caractéristiques plus encore que le statut de travailleur indépendant, définissent le professionnel libéral.
Dans la mesure où elles sont compatibles avec le statut de salarié, comme l'ont montré les avocats, ces caractéristiques n'interdisent pas de mettre au point des formes de salariat d'exercice libéral qui permettraient de tirer pleinement partie de l'évolution des structures de groupement. Pour autant, le travail indépendant garde toute sa valeur sociale et demeure adapté à de très nombreuses situations professionnelles. Il est bien vrai, en effet, que ce qui fonde l'activité libérale, c'est l'idée de l'indépendance intellectuelle de celui qui l'exerce. Cette indépendance donne aux professions libérales leur rôle irremplaçable dans une société de liberté et de responsabilité.
Ce qui se passe aujourd'hui dans les pays d'Europe centrale et orientale en offre la démonstration. La construction d'une démocratie, d'une économie de marché et d'entreprises privées, sur les ruines d'une économie centralisée, y est inséparable de la fondation d'un état de droit reposant sur un parlement, sur une magistrature et une fonction publique au service du droit et de l'intérêt général et non d'une idéologie partisane et, enfin, sur un réseau dense de professionnels libéraux réellement indépendants et dont les compétences et les responsabilités soient reconnues.
En Pologne, en Hongrie, en République Tchèque, dans les pays baltes et même en Russie réapparaissent aujourd'hui des avocats uniquement soucieux de défendre les droits de leurs clients, des médecins et des paramédicaux travaillant en dehors des structures hospitalières, proches des patients, des experts-comptables responsables uniquement de l'établissement de comptes objectifs donnant une image fidèle de la situation des entreprises, des conseils en gestion compétents et indépendants et même des officiers ministériels. Cette renaissance est l'un des gages les plus sûrs de la réussite de ces nations, dans leur retour à la liberté.
Je sais que l'UNAPL et plusieurs ordres professionnels y apportent leur concours, au titre de la coopération et de l'assistance technique. Je ne saurais trop les y encourager.
Les professions libérales, par tout ce qu'elles représentent et qu'elles permettent, constituent à mes yeux l'un des éléments clés de la société humaniste et solidaire dont je souhaite que notre pays offre l'exemple.
Les professions libérales ne vivent pas à l'abri du monde extérieur. Elles ne s'épanouissent que si elles démontrent leur capacité à répondre aux besoins de la société et à servir des causes qui les dépassent : le respect du droit, l'exigence de la santé publique, l'efficacité d'une économie décentralisée. Vous avez développé ces thèmes lors de votre Congrès. Dans la situation difficile que traverse notre pays, je souhaite appeler chacune de vos professions à se mobiliser au service de deux priorités : la création d'emplois et l'exportation des services.
Il est inutile d'insister longuement sur l'urgence qui s'attache à la lutte pour l'emploi. Le chômage atteint dans notre pays un niveau qui constitue une menace pour son équilibre moral et social et qui compromet notre système de protection sociale, qu'il s'agisse de l'indemnisation du chômage ou de l'assurance-maladie. La situation ne s'améliorera qu'avec la reprise de la consommation et de l'investissement, c'est-à-dire grâce au retour à une croissance positive et régulières de l'économie. J'ai de bonnes raisons de penser que nous n'en sommes plus très éloignés : l'environnement international est meilleur, notamment en Amérique du Nord, le secteur du logement se redresse, les carnets de commande à l'exportation se garnissent à nouveau.
Mais il serait illusoire d'attendre un redressement durable de l'emploi des seuls effets mécaniques d'une nouvelle expansion. Il faut aussi que tous les entrepreneurs se mobilisent au service de la création d'emplois. Vos professions sont bien placées pour tenir un rôle important dans ce combat. Elles ont su résister efficacement à la récession.
Certaines professions ont vu le nombre de leurs membres s'accroître. Le nombre de salariés, de collaborateurs a augmenté. Ce mouvement doit être encouragé.
Je mesure combien un appel à la mobilisation pour l'emploi peut sembler incantatoire à certains d'entre vous, aux architectes qui trouvent que les effets du plan de relance du bâtiment et des travaux publics tardent à se faire sentir, aux médecins, aux pharmaciens et aux professions para-médicales auxquels nous demandons de contribuer à la maîtrise des dépenses de santé. Mais je souhaite que chacun se demande ce qu'il serait possible de faire en s'attachant les services de collaborateurs, fut-ce à temps partiel ou partagé, pour améliorer les conditions d'exercice professionnel ou accroître la qualité des prestations.
Le gain en qualité de vie du praticien et la satisfaction de la clientèle requièrent souvent un service aux personnes que seul peut procurer l'emploi d'un ou de plusieurs collaborateurs.
De tout ceci l'UNAPL a montré qu'elle était consciente. Le thème de ce congrès en témoigne. Vous avez signé le 8 juillet dernier la Charte Nationale de Mobilisation en faveur des contrats d'apprentissage et d'insertion en alternance. Une étude a été engagée pour déterminer les moyens de faciliter l'embauche de jeunes par les professions libérales. Je vous demande d'accroître encore ces efforts, de relancer les organisations que vous regroupez dans ce qui doit devenir une véritable mobilisation pour la création d'emplois. Si, notre pays perdait définitivement confiance dans les capacités de l'initiative individuelle et dans le dynamisme de la libre entreprise, son avenir serait compromis.
Bien sûr, vous êtes en droit d'attendre des pouvoirs publics qu'ils soutiennent vos efforts. Votre Président a bien voulu rappeler que vous avez bénéficié en priorité de la suppression du décalage d'un mois de la TVA. Le projet de loi relatif à l'initiative et à l'entreprise individuelle actuellement en cours d'examen au Parlement, et dont le rapport présenté au Conseil Economique et Social par M. BARTHELEMY a été l'une des sources, comporte plusieurs dispositions qui intéressent aussi les professions libérales et qui devraient inciter à la création d'emplois. Je pense notamment à l'exonération partielle des cotisations d'assurance-maladie et maternité pour les travailleurs non salariés non agricoles créant ou reprenant une entreprise ou encore aux mesures concernant le statut du conjoint collaborateur.
L'emploi n'est pas le seul défi auquel se trouvent confrontées les professions libérales. Elles doivent désormais préparer leur avenir dans le cadre d'une économie ouverte sur le monde extérieur. Les mesures d'harmonisation et de libre circulation au sein de l'union européenne n'étaient pas encore achevées que vous avez dû suivre les négociations du GATT sur les services, négociations qui n'ont pas manqué de provoquer dans vos rangs émotion et inquiétude. Aussi voudrais-je faire le point sur cette question.
L'accord sur le commerce des services établit un cadre multilatéral de principes et de règles conçu pour l'expansion de ce commerce dans des conditions de transparence et de libéralisation progressive. L'accord conclu le 15 décembre dernier est globalement satisfaisant pour la France. Le principe posé est la clause de la nation la plus favorisée. En application de cette règle chaque partie à l'accord, c'est-à-dire pour ce qui nous concerne l'Europe des 12, accordera immédiatement et sans condition aux fournisseurs de services des autres Etats membres un traitement identique à celui qu'elle accorde à tout autre.
Ceci, comprenons le bien, permet de préserver l'ensemble de la réglementation européenne existante et exclut toute déréglementation qui serait contraire à nos souhaits.
Il convient, dès à présent, d'être attentif aux conditions dans lesquelles vos professions vont affronter cette concurrence élargie et de les doter des moyens qui pourraient leur faire défaut. A cet effet le ministre chargé du commerce extérieur, M. Gérard LONGUET, vient de confier, avec mon accord, une mission d'étude et de proposition à un professionnel réputé, Me Jean-Bernard THOMAS, coprésident de l'Association française des avocats conseils d'entreprises. Cette mission, à laquelle la Délégation interministérielle aux professions libérales est pleinement associée, doit analyser les intérêts des professionnels français et voir concrètement comment les exportations des professionnels libéraux peuvent être facilitées.
Nous ne devons entretenir aucune illusion.
Les données de la balance des paiements montrent que les soldes des transactions courantes ont été négatifs ces dernières années pour les services de santé, pour les services juridiques et pour les expertises-comptables. Seules les études techniques liées aux grands projets de constructions et de travaux publics dégagent des soldes positifs. De même, pour les services juridiques et l'expertise comptable les investissements étrangers en France sont nettement supérieurs aux investissements français à l'étranger. C'est dire que la pénétration des étrangers sur notre marché progresse plus vite, dans ces domaines, que celle de nos entreprises ou cabinets de conseils et d'audit dans les pays étrangers. Ces résultats ne doivent pas nous étonner. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, notre pays n'est pas protectionniste et il ne faut pas regretter que Paris soit devenue une capitale juridique et financière qui attire les compétences étrangères. Mais comment ne pas y voir également la conséquence d'un dynamisme insuffisant à l'exportation ? L'enjeu est pourtant décisif. Il y va non seulement de vos chiffres d'affaires et de vos emplois mais aussi de l'influence de notre culture juridique et scientifique dans le monde. Là encore, je ne peux que vous appeler à redoubler d'efforts. L'exportation des services des professionnels libéraux français est une ambition à la mesure du syndicalisme constructif que vous avez appelé de vos voeux.
Vous avez évoqué, Monsieur le Président, les préoccupations ou revendications des organisations que vous regroupez. Certaines sont classiques, d'autres plus neuves. Certaines touchent à la fiscalité ou à la protection sociale, d'autres à des réformes de nature statutaire ou juridique. Vous êtes attaché à l'égalité de traitement fiscal et social entre les professions indépendantes et les salariés. Vous souhaitez que soit étudié un important aménagement de la taxe sur les salaires afin de ne pas décourager l'emploi de collaborateurs. Vous préconisez une extension sous une forme ou une autre des institutions ordinales. Vous admettez qu'il est nécessaire de repenser le système de formation professionnelle continue des libéraux eux-mêmes, dont votre Confédération défend le principe. Votre congrès a émis l'idée de mesures législatives visant à instituer le salariat d'exercice libéral.
Nous savons tous qu'il faut ajuster et réformer certains des textes concernant les sociétés d'exercice libéral et faire aboutir le dossier de la complémentarité entre professions. Le garde des sceaux et le ministre du budget ont eu, ces derniers mois, l'occasion de dire comment le gouvernement comptait aborder le sujet des relations entre les professions juridiques et comptables. Vous savez qu'ils l'ont fait en termes identiques. Je souhaite que ce dossier soit conduit à son terme.
Beaucoup de sujets restent à débattre. Je comprends la plupart de vos préoccupations et je suis prêt à les prendre en compte ; je souhaite que, de votre côté, vous sachiez répondre aux deux priorités que je viens d'évoquer : l'emploi et notre présence sur les marchés étrangers. Je demande aux membres du Gouvernement et au délégué interministériel aux professions libérales d'étudier vos demandes en ayant présentes à l'esprit ces deux préoccupations.Je réunirai avant l'été le comité interministériel prévu par le décret du 2 juin 1983 afin d'adopter les mesures destinées à doter les professions libérales d'un cadre rénové et à contribuer à leur dynamisme. Je souhaite que les professions libérales disposent des mêmes moyens que les autres, ce qui n'est pas encore le cas, et que la spécificité de vos professions soit prise en compte au moyen de dispositions originales. Nous aurons donc l'occasion de nous revoir prochainement afin de préparer ensemble ces mesures. Nous nous efforcerons d'être concrets et efficaces. "Les meilleures lois, disait Chateaubriand, sont inutiles lorsqu'elles ne sont pas exécutées ; elles deviennent dangereuses lorsqu'elles le sont mal" . Gardons nous de projets qui se révéleraient vains à l'expérience mais sachons que, plus que jamais, nous devons progresser ensemble dans la voie de la réforme.