Texte intégral
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Bonjour à tous. Mon invité ce matin est donc le Ministre de l'Intérieur, bonjour Christophe CASTANER.
CHRISTOPHE CASTANER, MINISTRE DE L'INTERIEUR
Bonjour.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Est-ce que vous êtes inquiet à la veille d'une nouvelle mobilisation des gilets jaunes ? Est-ce que vous sentez plus, moins de détermination que samedi dernier ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord, première remarque. Quand vous êtes Ministre de l'Intérieur, il vaut mieux être inquiet naturellement pour mettre en place un certain nombre d'outils de mobilisation pour prévenir les risques. C'est ce que nous aurons fait dès le matin du 17 novembre où nous avons déployé un nombre de forces exceptionnelles sur l'ensemble du territoire français, d'abord pour protéger les manifestants eux-mêmes.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais ça n'a pas suffi. On va reparler du 17 : les Français ont en mémoire ces images que vous voyez.
CHRISTOPHE CASTANER
C'était le 24.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Le 24, pardon.
CHRISTOPHE CASTANER
Voilà. Mais notre idée, c'est d'être omniprésent partout pour protéger les gilets jaunes eux-mêmes pour une raison simple. C'est que quasiment nulle part ils ne font de déclaration de manifestation.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Là, il y a eu deux demandes. Pour le 1er, il y a eu deux demandes de manifestation sur les Champs.
CHRISTOPHE CASTANER
Je vais répondre, mais pour le 24, il n'y avait aucune demande pour les Champs-Elysées. Nous avons proposé le Champ de Mars, c'est à peu près à un kilomètre, vingt minutes de marche. On a mis de la sécurité sur le Champ de Mars, nous savions que le Champ de Mars, il y avait un risque mais qu'on n'aurait pas de casse comme celle qu'on a vue. Ils ont choisi d'aller sur les Champs-Elysées au départ de façon bon enfant, et ils se sont fait infiltrer comme traditionnellement. Vous évoquiez samedi. Samedi, on a eu une demande d'une personne. Donc effectivement, ce n'est pas considéré comme représentatif mais nous savons que les gilets jaunes ont décidé, pour certains, de revenir en faible nombre. La semaine dernière, c'était huit mille personnes quand, au même moment, vous aviez douze mille.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, mais on voit les images.
CHRISTOPHE CASTANER
Bien sûr. Mais quand au même moment, vous aviez douze mille personnes qui manifestaient pour se battre contre les violences faites aux femmes, et donc il nous fallait aussi des forces de sécurité pour protéger là. Et là, vous aviez quelques personnes cinq, six mille - qui ont été infiltrées par des casseurs, qui ont été dépassées par ce que ce sont des professionnels de la manifestation et je ne leur fais pas reproche de cela. Et donc, on a été dans une situation très compliquée où il y avait au milieu de gilets jaunes pacifiques, venus manifester, des casseurs. Et si nous étions intervenus brutalement avec nos forces de sécurité, nous aurions pu blesser des manifestants et aussi même des casseurs. La force de la police c'est de protéger, ce n'est pas de casser.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Les manifestants, les gilets jaunes, ont dit que vous étiez intervenu brutalement à neuf heures et demie du matin quand, effectivement, au rond-point des Champs-Elysées vous avez commencé à repousser la foule.
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, je ne sais pas si on est intervenu brutalement mais ce que je sais, c'est que les blessés sont du côté des forces de l'ordre. Je pense à Teddy, ce jeune homme que j'ai vu à l'hôpital dès le lendemain, sur lequel on a jeté une bombe artisanale pour le tuer et qui peut-être a une menace forte de perdre son œil. Je ne vais pas rentrer dans les détails. Par contre, du côté des manifestants pacifiques qui ne sont pas venus au contact, qui n'ont pas agressé, il n'y a eu aucun blessé. C'est ça l'essentiel pour moi.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
On se projette sur demain. Comment allez-vous faire pour que ce qu'on a vu la semaine dernière, j'imagine que vous ne souhaitez pas que ça se reproduise on va parler évidemment de la province aussi - comment on sécurise les Champs-Elysées qui sont la vitrine de notre pays ? Notamment on voit les conséquences sur le commerce, sur le tourisme. Comment on fait pour éviter ça à nouveau ?
CHRISTOPHE CASTANER
Vous savez quand il y a de la casse, que ce soit sur les Champs-Elysées, que ce soit n'importe où ailleurs à Paris ou que ce soit en province, pour moi c'est le même niveau de gravité.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Bien sûr.
CHRISTOPHE CASTANER
Et donc évidemment même si je sais l'impact des images...
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais l'image des Champs-Elysées...
CHRISTOPHE CASTANER
Vous avez raison, je sais l'impact des images. En fait, on a fait un choix simple. Je ne veux pas interdire les Champs-Elysées y compris aux gilets jaunes qui peuvent vouloir manifester. Et donc, on va mettre un périmètre interdit - celui autour de la Place de la Concorde pour les institutions comme samedi dernier on va mettre un périmètre contrôlé. Contrôlé sur tous les accès des Champs-Elysées. Les personnes seront systématiquement fouillées, nous pourrons contrôler les identités aussi. Il y aura de la vidéo-protection qui sera déployée et les manifestants, comme les piétons, comme les touristes, comme celles et ceux qui veulent venir voir les commerces et faire leurs courses, pourront pénétrer sur le site. Il y aura dans le périmètre protégé, périmètre hermétiquement protégé, aussi des forces d'intervention qui interpelleront systématiquement celles et ceux qui commettraient ces actes.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Est-ce qu'on pourra passer les barrages de police avec un gilet jaune ?
CHRISTOPHE CASTANER
Oui, bien sûr.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Sur soi ou dans la poche ?
CHRISTOPHE CASTANER
Un gilet jaune, c'est un outil pour protéger. C'était pour protéger les automobilistes ; aujourd'hui, il est porté comme un signe de reconnaissance dans la manifestation, ce n'est pas une arme. Et donc évidemment ce que je souhaite, c'est qu'on interdise toute arme par destination mais, évidemment, les gilets jaunes ne seront interdits.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Est-ce que c'est un dispositif qui semblera ce qu'on voit le 11 novembre ou le 14 juillet ? C'est-à-dire tous les Champs bouclés, toutes les rues qui accèdent, qui mènent aux Champs bouclées aussi ?
CHRISTOPHE CASTANER
Nous serons proches avec la particularité d'avoir au sein même de cette enceinte, à l'extérieur, des renforts. Mais vous, la difficulté que j'ai comme Ministre de l'Intérieur et qu'a le préfet de police, c'est qu'il y a le risque sur les Champs-Elysées mais il y a aussi un risque sur l'ensemble du territoire parisien, parce qu'on sait bien par exemple que l'ultra-droite a appelé à une mobilisation, à un lieu de rassemblement que je ne vais pas vous donner, et va venir peut-être sur les Champs-Elysées pour tenter de casser. Vous savez samedi soir, ils étaient ravis. Ils étaient très fiers de ce qu'ils avaient fait, ces cent cinquante à deux cents militants d'ultra-droite qui, dès le matin, ont tenté d'emporter le mouvement, n'ont pas réussi heureusement à être suivis par les gilets jaunes qui manifestaient et qui manifestaient pacifiquement.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors justement, on va réécouter ce que vous disiez le samedi matin 24 novembre, parce que ç'a suscité des réactions parmi les gilets jaunes. On vous réécoute.
PROPOS DE CHRISTOPHE CASTANER DU 24 NOVEMBRE :
Les séditieux ont répondu à l'appel notamment de Marine LE PEN et veulent s'en prendre aux institutions comme ils veulent s'en prendre aux parlementaires, aux parlementaires de la majorité. Vous avez pu évoquer, faire état d'un certain nombre d'attaques directes, personnelles, sur celles et ceux qui représentent aussi la République.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il y avait des casseurs, il y a eu des attaques contre des élus, mais il y avait beaucoup de gilets jaunes, et les rapports de police nous disent maintenant que trois quarts des violences sont le fait de vrais gilets jaunes et non pas de casseurs. Est-ce que vous n'avez pas un peu généralisé en disant que c'étaient tous des casseurs ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, non je maintiens ce que j'ai dit. Si vous prenez toute mon intervention, on peut ne la prendre que par petits bouts, je dis qu'on avait des manifestants, j'ai donné le nombre. Vous avez vu que depuis le début du mouvement, j'ai veillé presque heure par heure à donner le nombre de manifestants recensés par nos forces de l'ordre, des gendarmes et la police, de façon systématique. Là, j'ai donné cette info et j'ai indiqué ma crainte, la même qu'aujourd'hui. Ma crainte, je l'avais dit précisément samedi matin, c'est l'infiltration par des militants d'ultra-droite qui viennent pour casser au milieu de gilets jaunes pacifiques. Et j'avais dit : « Et en fin de journée, ils pourraient être rejoints par l'ultra-gauche. » C'est ce qui s'est passé. A peu près cent cinquante à deux cents casseurs d'ultra-droite le matin, beaucoup moins le soir pour l'ultra-gauche, seulement une quinzaine et une vingtaine de personnes. Je n'enlève rien. Je peux même vous dire, quand vous êtes Ministre de l'Intérieur, vous avez un certain nombre d'informations. Je sais pertinemment qui était présent comme représentant de l'ultra-droite. D'ailleurs, eux-mêmes se sont vantés sur les réseaux sociaux. Donc ce que j'ai dit était conforme à la réalité. Le risque était de voir des manifestants pacifiques et l'essentiel, la quasi-totalité des gilets jaunes, sont des manifestants pacifiques. Mais certains parmi eux voire sont récupérés par des mouvements d'ultra-droite, commettent des actes qui ne sont pas acceptables.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais pas seulement. On voit en province des gilets jaunes en colère qui envahissent des préfectures, des bâtiments des impôts, des mairies. Cette nuit encore, la mairie de Pau comme vous le savez a été envahie par des gilets jaunes. François BAYROU, le maire, a dit qu'il les recevrait. Ça, ce n'est pas des militants d'extrême droite tous ces gens-là.
CHRISTOPHE CASTANER
Non mais attendez, il y a deux choses. Il y a une grande masse de gilets jaunes qui ne sont pas violents mais l'essentiel. Ensuite, il y a des ultras dont on a parlé. Je vous en parle pour Paris, je ne vous en parle pas pour Pau. Et l'envahissement d'un conseil municipal - j'ai été maire, ça m'est arrivé aussi - est assez classique. Hélas, je ne sais pas, mais c'est assez classique.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous le regrettez où ça fait partie de cette colère qu'il faut laisser vivre ?
CHRISTOPHE CASTANER
Il faut entendre la colère, il faut débattre, il faut rencontrer les gilets jaunes. Le Premier ministre le fera tout à l'heure s'ils sont capables de s'organiser et de venir à la discussion.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous êtes sûr qu'il y aura des gilets jaunes ? Parce qu'ils déclinent les uns après les autres cette invitation de voir Edouard PHILIPPE.
CHRISTOPHE CASTANER
C'est là où c'est compliqué de leur part. C'est que si on veut débattre avec l'exécutif, il faut accepter cela, il faut s'organiser. Nous allons avoir trois mois de débats partout en France. Ils ont une place essentielle dans ces débats et nous les invitons à le faire. Mais je finis juste. L'essentiel des gilets jaunes sont des gens pacifiques qui expriment une colère que j'entends, que nous connaissons. Le Président de la République, encore cette nuit avec le décalage horaire, a eu l'occasion de dire que nous l'entendons, cette colère-là. Ensuite, il y a des casseurs mais c'est une ultra minorité, et puis il y a une colère et une violence qui montent chez certains. J'étais en Gironde, j'ai passé la nuit avec les BAC et les gendarmes
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Cette nuit ? La nuit dernière ?
CHRISTOPHE CASTANER
Avant-hier, avant de rencontrer les forces de sécurité pour les remercier de leur engagement. A ce moment-là, il y a une cinquantaine de personnes non pas en gilet jaune mais en tenue commando qui ont voulu prendre d'assaut un point d'approvisionnement pétrolier. Ceux-là ne sont pas des gilets jaunes pacifiques, je vous le dis, mais ils sont une minorité dans le mouvement. Mais le mouvement aujourd'hui, c'est au maximum hier treize mille personnes mobilisées dans toute la France, c'est-à-dire un habitant pour trois communes en moyenne de France. Pour vous dire qu'aujourd'hui on n'est pas sur un phénomène de masse même s'il y a un soutien.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous le minimisez mais vous avez vu les sondages où les trois quarts des Français soutiennent ce mouvement des gilets jaunes.
CHRISTOPHE CASTANER
C'est exactement ce que je viens de vous dire : il y a un soutien. Mais vous savez, moi je suis juste en responsabilité, mais sinon je suis pour la baisse des impôts, pour la baisse des taxes, pour l'augmentation des services publics, pour plus de policiers
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est compatible tout ça ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais ça n'est pas compatible, c'est tout le problème. Je suis pour une augmentation du budget du ministère de l'Intérieur. Ça tombe bien, c'est ce que je porte. Je serai ce soir au Sénat pour porter un budget qui en un an, sur deux exercices budgétaires, aura augmenté de plus d'un milliard d'euros.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Contrairement à Gérald DARMANIN, vous nous dites : « Tout ça, ça veut dire qu'il faut plus d'impôts. »
CHRISTOPHE CASTANER
Non, ce n'est pas du tout ce que je vous dis.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Parce que lui dit : « Si vous voulez moins d'impôts, il faut moins de dépenses. »
CHRISTOPHE CASTANER
Ça, c'est assez logique. C'est assez logique. D'un côté, c'est un peu comme...
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais vous, vous défendez la dépense.
CHRISTOPHE CASTANER
Mais moi, je défends aussi le besoin de service public mais je dépends des choix, des priorités. Oui, il faut accepter de baisser la dépense publique.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Est-ce qu'il n'y a pas la même contradiction au sein du Gouvernement ? Des anciens élus de droite qui disent : « Si vous voulez baisser les impôts, on va baisser les dépenses » ; d'anciens socialistes comme vous qui disent : « Non mais attendez, l'impôt sert à la dépense. »
CHRISTOPHE CASTANER
Pas du tout. Je vais vous dire, ce n'est pas parce qu'on a été socialiste qu'on pense qu'il faut dépenser plus d'argent que ce qu'on a à la fin du mois. Vous comme moi, je ne connais pas vos opinions politiques, je connais les miennes, en général on veille à ne pas dépenser plus que ce que l'on a. Ça fait trente ans dans ce pays qu'on a pris l'habitude chaque fois qu'il y avait un problème de donner plus d'argent, de l'argent qu'on n'avait pas, et aujourd'hui on le paye. La désespérance qui est portée par les gilets jaunes, personne et vous le savez ne croit que c'est lié à ces dix-huit derniers mois. Au contraire sur le pouvoir d'achat, toutes les indications données par l'INSEE
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ils vous en veulent particulièrement d'avoir fait des promesses il y a dix-huit mois et que ça ne se soit pas traduit peut-être dans les réformes mais pas dans les faits aujourd'hui.
CHRISTOPHE CASTANER
On a fait quoi comme promesse ? Celle d'augmenter les salaires en France.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous avez dit que le travail paierait.
CHRISTOPHE CASTANER
A la fin du mois d'octobre
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Or, les gens qui sont dans la rue sont des salariés souvent.
CHRISTOPHE CASTANER
Non. D'abord, il y a toutes sortes de personnes dans la rue.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, il y a beaucoup de personnes. Il y a des retraités, il y a des salariés qui disent qu'ils gagnent un salaire qui ne leur permet pas de vivre décemment.
CHRISTOPHE CASTANER
Mais oui. Mais ce que je sais, c'est qu'on peut déclarer : « Il faut un coup de pouce au SMIC. » Ç'a été fait en 2012, j'étais député de la majorité. Le coup de pouce au SMIC en 2002 a été inférieur à l'augmentation obtenue cette année par l'ensemble des smicards, qui à la fois avec l'augmentation par la baisse des charges ont gagné vingt euros par mois, et avec l'augmentation de la prime pour l'emploi ont gagné vingt euros, ça fait quarante euros. C'est beaucoup plus qu'un coup de pouce mais ça ne suffit pas.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Cette année, le SMIC va augmenter de combien ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, le Premier ministre s'est prononcé il y a deux jours. Ne cherchez pas à voir une contradiction entre moi et lui. A la fin de l'année, on aura tous les indicateurs qui prennent en compte notamment l'inflation et qui génèrent une augmentation du SMIC de façon naturelle.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Peut-être près de 2 % ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ce que je veux vous dire, c'est qu'on peut parfaitement se faire plaisir et dire : « On va augmenter le SMIC. » Ça tombe bien, ça tombe bien : c'est ni vous ni moi qui payons le SMIC. Ce sont des entreprises. Et au bout du compte, ce sont les salariés à qui il faut une augmentation mais les clients qui doivent aussi la payer. C'est ça la réalité. Le boulanger qui décide d'augmenter ses salariés, il le fait mais à un moment donné, il augmente sa marge donc tout ça est un système global. Mais je pense que le travail ne paye pas assez dans ce pays et c'est pour ça que depuis dix-huit mois, nous mobilisons tous les moyens possibles pour privilégier le travail. Vous savez, on peut passer du temps sur les mauvaises nouvelles mais le fait que cette année, pour la première fois depuis dix ans, le chômage baisse. Pas assez mais il baisse. Le fait que cette année pour la première fois depuis dix ans, on crée des emplois industriels dans ce pays. Pas assez mais on en crée. C'est aussi ça dont on doit parler et ça, c'est du pouvoir d'achat pour celles et ceux qui sont embauchés.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors on va reparler de la manifestation, de la mobilisation de demain. Tout à l'heure, vous nous avez dit : « Les casseurs ont infiltré les gilets jaunes. » Ce n'est pas ce que pensent certains de vos opposants politiques. Avant-hier à votre place, il y avait Louis ALIOT, député Rassemblement national. Ecoutez sa lecture des événements du 24 novembre.
LOUIS ALIOT, DEPUTE RASSEMBLEMENT NATIONAL
Une fois qu'on a autorisé, on met les moyens précisément pour empêcher les casseurs. On sait aujourd'hui, j'ai vu le communiqué d'un syndicat de police qui dit : « On n'a pas reçu d'ordre pendant une heure et les casseurs se sont installés sur les Champs-Elysées. Pourquoi ? » Il faudrait peut-être répondre à ces questions. J'ai l'impression que l'Etat a laissé faire un peu l'anarchie sur les Champs-Elysées pour pointer
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous dites que c'est volontaire ?
LOUIS ALIOT
Non mais à un moment donné, moi je vous dis
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Pour décrédibiliser le mouvement ? Vous avez un doute là-dessus ?
LOUIS ALIOT
Oui, j'ai un doute Je n'accuse personne mais ça mériterait une commission d'enquête parlementaire pour savoir la manière dont s'est déroulée le scénario.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ce sont des accusations fortes.
CHRISTOPHE CASTANER
Est-ce que le Front national fait autre chose que des accusations ? Non. Par contre ce que je peux noter, c'est qu'il y a une responsable politique et une celle qui a invité les manifestants sous forme de question - parce qu'elle est prudente, elle sait bien qu'il ne faut pas prendre trop de risques juridiques et pourtant pousser le mouvement - à venir sur les Champs-Elysées : c'est Marine LE PEN. C'est ça la réalité. Alors ensuite, monsieur ALIOT est manifestement un spécialiste des questions de sécurité. Vous savez, moi je suis un garçon modeste. Je fais confiance aux hommes de l'art, je fais confiance aux policiers, aux gendarmes dont c'est le métier, et c'est eux qui me font des propositions que je valide. Je prends mes responsabilités mais une chose est sûre, c'est que les commentaires sur les plateaux télé de quelqu'un comme Monsieur ALIOT : quand je me suis rendu il y a quelques semaines à la frontière franco-espagnole pour traiter du sujet migratoire, je l'ai invité. On s'est croisé mais lui remontait à Paris, il avait passé son week-end de député dans sa circonscription. C'est ça la réalité. Vous savez, je crois que les « y'a qu'à faut qu'on », surtout sur des sujets de gestion de sécurité, devraient apprendre un peu la modestie. Mais s'il veut une commission d'enquête, il n'y a pas de difficulté. Moi, j'ai la liste des cent cinquante à deux cents casseurs d'ultra-droite qui ont répondu à cette invitation, entre guillemets, de madame LE PEN de venir sur les Champs-Elysées.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, on va parler de la récupération politique ou pas des gilets jaunes. Vous disiez que la semaine dernière effectivement Marine LE PEN avait sous-entendu qu'il fallait aller sur les Champs. Cette fois-ci, c'est bien plus : Jean-Luc MELENCHON.
CHRISTOPHE CASTANER
Ça, c'est votre commentaire de penser que c'est bien plus que Marine LE PEN.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Non, non. Bien plus de politiques qui s'inviteront sur les Champs-Elysées. D'abord Marion MARECHAL a dit qu'elle était sur les Champs la semaine dernière.
CHRISTOPHE CASTANER
Madame LE PEN mère était sur les Champs, Marion MARECHAL-LE PEN était sur les Champs, mais on nous explique qu'ils n'étaient pas au courant qu'il se passait quelque chose sur les Champs.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais Jean-Luc MELENCHON, lui, sera sur les Champs-Elysées également ce samedi. Vous laisserez passer les politiques dans les barrages filtrants ?
CHRISTOPHE CASTANER
Bien sûr que nous les laisserons passer. J'espère juste qu'il ne bousculera pas les policiers qui lui demanderont, comme tout le monde d'ouvrir son sac pour vérifier et qu'il n'opposera pas son immunité parlementaire comme madame LE PEN le fait, par exemple, pour refuser de répondre aux convocations des juges.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il devra, Jean-Luc MELENCHON, ouvrir son sac ?
CHRISTOPHE CASTANER
Moi, je pense que les politiques sont des citoyens comme les autres et je pense que si on demande à monsieur ou madame Lambda qui viennent de province pour manifester d'ouvrir leur sac, je pense qu'un politique, je pense que le Ministre de l'Intérieur, doit le faire aussi.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Jean-Luc MELENCHON qui a appelé hier à une insurrection citoyenne ; ce sont ses mots.
CHRISTOPHE CASTANER
Ça fait combien de temps que monsieur MELENCHON appelle à des insurrections, à des grandes manifestations, à un raz-de-marée ? Il en rêve. Monsieur MELENCHON n'a toujours pas accepté d'avoir perdu l'élection présidentielle, d'être arrivé en quatrième position et, à chaque occasion, il essaie de profiter du mouvement social. Moi ce que je sais, c'est que ce mouvement des gilets jaunes n'est pas un mouvement politique, même si on retrouve à l'intérieur des gens qui sont engagés au Rassemblement national, chez monsieur DUPONT-AIGNAN ou à France insoumise. Mais comme citoyen, et je pense que la récupération politique se retournera contre celles et ceux qui veulent instrumentaliser les choses.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors il y a des gilets jaunes et maintenant des politiques qui réclament la dissolution de l'Assemblée nationale si la crise s'enlise. Marine LE PEN hier a dit : « La dissolution, ce n'est pas ce que je demande, c'est que je pense que c'est la seule solution. » Voilà ce que dit Marine LE PEN. Est-ce que vous pensez qu'effectivement la dissolution peut être la seule solution ?
CHRISTOPHE CASTANER
Vous savez, il y a dix-huit mois on l'a dissous l'Assemblée nationale en faisant en sorte qu'arrivent en responsabilité des femmes et des hommes qui n'avaient jamais été en politique. C'est l'essentiel des députés de la République en Marche. Et puis très vite, on leur a reproché de ne pas être des professionnels de la politique. Celles et ceux qui sont en responsabilité viennent du terrain, viennent de l'entreprise, viennent du monde agricole, viennent du chômage pour certains, sont aujourd'hui les représentants de la nation. Vous savez, la démocratie elle a du bon ; il faut juste accepter quand on perd. Madame LE PEN a perdu les élections présidentielles, je crois qu'il faut qu'elle l'accepte. Maintenant, le sujet posé par les gilets jaunes ne relève pas de ces commentaires de professionnels de la politique. Il relève d'un cri qu'il nous faut entendre. Il y a trois mois de débats devant nous, trois mois de discussions au plus près du terrain, où les gilets jaunes devront rencontrer les parlementaires de la majorité qui devront aider à animer ces débats. C'est cela l'essentiel. Le Premier ministre propose un premier rendez-vous cet après-midi, c'est une main tendue.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
S'il y a des gilets jaunes, on l'a dit à l'heure
CHRISTOPHE CASTANER
J'espère qu'elle sera saisie.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Peut-être deux, trois ?
CHRISTOPHE CASTANER
Ecoutez, moi j'espère que
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il y en a beaucoup qui ont refusé.
CHRISTOPHE CASTANER
Mais oui, c'est toute la difficulté. Donc j'espère que cette main sera saisie. On ne peut pas d'un côté revendiquer, bloquer, empêcher, quelque fois combattre les forces de l'ordre et, de l'autre côté, refuser de discuter.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors je vous parlais de quelqu'un que vous connaissez bien, l'ancien président de la République François HOLLANDE. Lui aussi commente. Il a rencontré des gilets jaunes hier et voilà ce qu'il leur a dit, c'était en Ardèche. Il leur a dit aux gilets jaunes : « Il faut continuer à prendre la parole et faire que ça puisse déboucher parce qu'il faut que ça débouche. »
CHRISTOPHE CASTANER
Il a raison. Peut-être qu'il nous faudra revenir sur les vingt milliards d'augmentations d'impôts que monsieur HOLLANDE - et j'ai été député de sa majorité et j'assume cela
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et vous l'avez voté.
CHRISTOPHE CASTANER
C'est ce que je dis, j'ai l'honnêteté de le préciser, que monsieur HOLLANDE a fait porter sur les classes moyennes. Quand nous supprimons la taxe d'habitation, nous visons justement un impôt injuste qui vise les classes moyennes. Et les classes moyennes ont vu il y a un mois leur taxe d'habitation baisser de 30 %, alors que les mairies n'ont pas vu la baisse parce que c'est l'Etat qui la prend en charge. Ils verront l'année prochaine le deuxième tiers et l'année suivante la suppression totale de la taxe d'habitation. Mais j'ai quand même en tête que vingt milliards d'euros d'augmentation des impôts sous le mandat de François HOLLANDE, et j'ai été membre de la majorité et je le rajoute, devrait nous appeler à un peu de modestie. Ce que je sais, c'est que l'année prochaine les impôts des particuliers en France vont baisser fortement.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc vous dites : « On n'a pas de leçon à recevoir de l'ancien président. »
CHRISTOPHE CASTANER
Je pense effectivement que quelqu'un qui a été empêché de se présenter parce que son bilan ne le lui permettait pas devrait aujourd'hui avoir un comportement différent. Mais c'est son choix, il a décidé d'être un militant politique, il a décidé d'être un militant amnésique. C'est comme ça.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Amnésique François HOLLANDE ?
CHRISTOPHE CASTANER
Il a manifestement oublié son bilan, ça c'est sûr. Parce qu'on ne peut pas aujourd'hui avoir été président sortant, qui n'a pas pu se représenter il y a quinze mois, et venir dire aux gilets jaunes : « Je suis de tout cœur avec vous. » Vous savez, le cynisme en politique c'est peut-être la chose qui tue justement la parole politique.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Amnésique, cynique, vous n'êtes pas tendre avec l'ancien président.
CHRISTOPHE CASTANER
Enfin, vous êtes observateur comme moi et je suis sûr que vous n'êtes pas surpris par mes commentaires. Ils correspondent à une réalité. L'amnésie, c'est celle de penser qu'il ne s'est rien passé en 2012-2017 qui ait dégradé les conditions de vie des Français. La réalité, c'est celle-ci et je ne fais pas porter la situation des gilets jaunes ni à ce Gouvernement - et je n'exclus pas notre responsabilité - ni seulement au gouvernement d'avant. Mais depuis trente ans dans ce pays, on ne produit plus assez de richesses. On n'a pas privilégié le travail. On a surchargé en fiscalité les Français, les entreprises et aujourd'hui, il faut donner de l'air. Il faut sortir de la dépendance fiscale. Nous sommes drogués à la dépense publique et à l'impôt.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors on a parlé du Rassemblement national, on a parlé de la France insoumise, on a parlé de l'ancien président François HOLLANDE, Les Républicains aussi. Le maire d'Evreux, président de la fédération départementale de l'Eure pour Les Républicains, a conseillé hier à des gilets jaunes de bloquer la préfecture et le centre des impôts et voilà ce qu'il a dit : « Si vous êtes à cinq pour bloquer la police municipale, mes gars ne sortiront pas. Si vous le faites, je ferai semblant de ne rien voir. »
CHRISTOPHE CASTANER
J'ai honte. J'ai été maire seize ans et quand je lis ce genre de comportement - je ne parle pas de l'expression politique, elle est légitime - mais quand j'appelle à bloquer mes propres services publics, là franchement j'ai honte de l'image que j'ai de cet engagement de maire qui est un engagement formidable, qui gagne à ne pas tomber dans ces postures politiques.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Autre soutien aux gilets jaunes, beaucoup de célébrités se sont manifestées. On a vu Brigitte BARDOT qui elle-même fait revêtir à son chien un gilet jaune. Franck DUBOSC, Michel POLNAREFF, Philippe LELLOUCHE. Cette mobilisation de personnalités populaires, est-ce que ça vous inquiète quand même qu'il y ait ce soutien par ce qu'on appelle les people des Français qui sont en colère ?
CHRISTOPHE CASTANER
Attendez, on peut être people et avoir un cœur, une émotion comme je l'ai moi en faveur des gilets jaunes.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous avez un cœur, vous aussi vous pourriez donc comme - vous pourriez faire une vidéo pour soutenir les Gilets jaunes ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je ne vais pas faire une vidéo pour soutenir les Gilets jaunes, mais vous savez, j'ai été maire, je vous l'ai dit il n'y a pas longtemps encore, pendant 16 ans, et la difficulté, la misère, je l'ai côtoyée en permanence, et donc je ne veux pas la nier. Ensuite, juste, dans ceux que vous avez cités, si ce n'était pas quelqu'un, par exemple qui avait quitté la France pour ne pas payer ses impôts
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Michel POLNAREFF.
CHRISTOPHE CASTANER
Voilà, qui vient aujourd'hui nous expliquer qu'il faut soutenir les gilets jaunes, je pense que ce serait plus cohérent.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est intéressant parce que, quand même, comme le président d'ailleurs, vous dites on les comprend, on les entend, on pourrait presque être avec eux, on va écouter, c'était dans la nuit, à Buenos Aires, ce que dit le président des prochains gestes qu'il va faire. On écoute Emmanuel MACRON.
EMMANUEL MACRON (A BUENOS AIRES)
Il m'appartiendra de prendre des décisions supplémentaires dans les semaines, les mois qui viennent, mais elles ne seront jamais des reculs, elles seront une intensité plus grande encore, offerte pour ce mouvement.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, on ne comprend pas, « je vais prendre des décisions, elles ne seront jamais des reculs, mais elles seront une intensité supplémentaires », qu'est-ce que c'est une intensité supplémentaire ?
CHRISTOPHE CASTANER
Je vais prendre un exemple simple. Aujourd'hui il y a un choix politique, soit on dit va revenir sur les 4 centimes d'euros de taxe sur les produits pétroliers
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
6 centimes sur le gasoil et 3,5 sur l'essence.
CHRISTOPHE CASTANER
C'est pour ça que je fais une moyenne, je fais une moyenne entre les deux parce qu'on a 50 % du parc ; et soit on va revenir là-dessus et, au fond, on envoie un très mauvais signal...
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais vous n'auriez pas pu dire « coutez, on discute pendant 3 mois », il y a beaucoup de députés de La République en marche qui vous le demandent, « on discute pendant 3 mois, on fait un moratoire de 3 mois. »
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, vous savez, sur le mois qui vient de s'écouler l'essence a baissé, chacun peut le constater, est-ce que ça a baissé la colère ? Non, parce qu'effectivement c'est une étincelle, c'est une étincelle, et un problème la question du prix de l'essence, mais c'est un problème plus global, et ce que nous voulons faire c'est discuter pendant 3 mois. Mais sur la question de l'essence, sur la question du fioul, moi, effectivement, je pense que sortir de la dépendance, de la dépendance financière, de la dépense en termes de souveraineté du pétrole, est un vrai enjeu, et donc quand on donne les moyens aux gens de changer leur chaudière au fioul
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais les gilets jaunes vous disent « pourquoi on doit payer nous, alors que le kérosène sur les avions est beaucoup moins taxé, que le kérosène des bateaux de croisière est beaucoup moins taxé, pourquoi les efforts doivent être portés sur les plus modestes, ceux qui ont besoin de leur voiture pour se déplacer, pour aller travailler ?
CHRISTOPHE CASTANER
D'abord, y compris les compagnies aériennes payent des taxes sur ces sujets-là
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais beaucoup moins.
CHRISTOPHE CASTANER
Non, mais moi je ne suis pas du tout hostile à avoir une convergence fiscale, comme on la pratique sur le diesel, on avait un système qui favorisait le diesel, alors qu'on sait que le diesel, depuis de longues années, tue, tue chaque année près de 50.000 Français, et donc oui il faut faire en sorte qu'on se batte contre la production de particules, on fait de la convergence
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et donc vous êtes d'accord pour qu'on propose, au niveau international, une hausse des taxes sur le kérosène, dans le cadre de la transition écologique ?
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, comme vous le dits, il faut le faire au niveau international, pour une raison simple, c'est que si vous voulez qu'il n'y ait plus aucun avion qui ait sa base en France, et comme ils volent, ils l'auront plutôt dans un pays étranger, il faut ces convergences-là.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais vous comprenez bien que les efforts, que les Français ont l'impression que les efforts on les fait porter à ceux qu'on peut taxer ?
CHRISTOPHE CASTANER
Oui, vous savez, je serais venu il y a quelques mois vous voir, et vous m'auriez expliqué que c'est les entreprises qui pensent qu'elles font trop de contribution fiscale et qu'elles en ont payé trop, il faut trouver ce point d'équilibre. L'exercice n'est pas simple, mais une chose est sûre, c'est que, pour financer la dépense publique dont on a besoin, et je suis un ministre qui a un budget qui augmente de 1 milliard d'euros, il faut effectivement assumer qu'il y ait l'impôt, le problème c'est qu'aujourd'hui il y a la mise en cause de l'impôt. La mise en cause de l'impôt c'est la mise en cause du collectif, parce que globalement, ces 20 dernières années, et je mets les 18 derniers mois dans notre responsabilité, dans cette période-là, on a été globalement irresponsable.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous avez été irresponsable au cours des 18 derniers mois ?
CHRISTOPHE CASTANER
Non, aussi, mais globalement
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
En quoi vous avez été irresponsable ce gouvernement ?
CHRISTOPHE CASTANER
Parce que globalement la classe politique n'a pas su communiquer, expliquer, faire la pédagogie, et je mets ma part de responsabilité
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais là vous nous annoncez un
on va tout remettre à plat, c'est-à-dire qu'on va dire qu'est-ce qu'on doit financer, avec quels impôts
CHRISTOPHE CASTANER
Mais, pendant ces 3 mois de débats il faut qu'il n'y ait aucun sujet qui ne soit pas discuté, c'est aussi ce que nous voulons. Je pense qu'il est essentiel, quand on est un acteur public, de défendre l'impôt, parce que l'impôt c'est ce qui fait le collectif, et l'impôt doit être juste, il doit être efficace. On ne revient pas sur la question de l'impôt sur les sociétés ou sur l'ISF. Un sujet, on va en parler sans cesse, si l'ISF, ces 30 dernières années, avait réglé le problème de la pauvreté en France, ça se saurait, si l'ISF est un impôt qui marche, je pense que tous les pays européens l'auraient.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc vous ne regrettez pas d'avoir supprimé l'ISF en début de quinquennat ?
CHRISTOPHE CASTANER
Voyez, j'en parle volontairement, parce que je sais que c'est un sujet dont on parle, mais ces 20 dernières années, est-ce que l'ISF a réglé les problèmes ? La réponse est non. Si ça marchait, pourquoi seule la France, avec un autre pays européen, aurait eu ce type d'impôt, on sait que ça produisait un effet d'éviction et que celles et ceux qui payaient l'ISF, ne le payaient pas, faisaient de l'optimisation fiscale, partaient à l'étranger, c'est ça aussi la réalité dans laquelle nous sommes. Alors, on peut chercher des totems, et se jeter des totems, j'ai fait ça pendant 20 ans de mon engagement politique, on peut se jeter des totems à la figure, ou on peut, ensemble, discuter, avancer et réhabiliter l'impôt, parce que l'impôt c'est l'action publique, c'est l'école, c'est l'armée, c'est l'hôpital, c'est aussi la sécurité routière.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc vous êtes prêt, pendant les 3 mois qui vont venir, à parler de tout, à parler de tous les impôts et de la manière dont ils sont répartis ?
CHRISTOPHE CASTANER
Bien sûr, il faut parler de tout pendant ces 3 mois-là, mais parce que je suis un acteur public, je défends l'impôt, mais j'accepte l'idée, parce que c'est un fait, qu'aujourd'hui il y a trop d'impôts, et on a une dépense publique qui s'est emballée et qu'on n'a pas maîtrisée ces dernières années.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Dernière question. Samedi vous allez sécuriser les Champs-Elysées, mais vous nous confirmez, vous n'allez pas interdire aux gilets jaunes d'être sur les Champs-Elysées.
CHRISTOPHE CASTANER
Je vous le confirme, et je tente, avec les forces de l'ordre, près de 65.000 personnes mobilisées au plus fort des manifestations sur ces 12 derniers jours, on va tenter de sécuriser l'ensemble de...
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Avec 4000 policiers, 5000 policiers, sur les Champs, combien de policiers sur les Champs ?
CHRISTOPHE CASTANER
Globalement beaucoup plus, et je ne vais pas rentrer dans les détails du dispositif de sécurité, vous comprendrez pourquoi, mais surtout, la première des responsabilités, elle est à celles et ceux qui manifestent, et j'invite celles et ceux qui manifestent, en particulier en province, à prendre contact avec la préfecture pour informer, pour qu'on mette de la sécurité, et à celles et ceux qui veulent organiser sur les Champs-Elysées, à prendre contact avec nous, la responsabilité elle se partage.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Merci beaucoup Christophe CASTANER.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 décembre 2018