Déclaration de M. Yves Cochet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, sur l'aménagement du territoire et le développement local, les systèmes productifs locaux, la recomposition des territoires et les relations entre l'environnement, les entreprises et les territoires, Paris le 29 janvier 2002.

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Circonstance : Entretiens internationaux de l'aménagement et du développement du territoire à Paris le 29 janvier 2002

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous accueillir aujourd'hui aux entretiens internationaux de l'aménagement et de développement du territoire.
Tout d'abord permettez moi de vous présenter les excuses de Monsieur Le Premier Ministre. Pour des raisons impératives, il ne peut être avec nous ce matin. A son profond regret, car il m'a demandé de vous dire qu'il mesure tout l'intérêt d'une telle rencontre, l'importance qu'il y a à réfléchir ensemble sur l'interaction entre grands équilibres et dynamiques territoriales.
Aujourd'hui, devant cette assemblée nombreuse, je voudrais souligner la diversité et la qualité des participants :
De nombreux représentants gouvernementaux côtoient les représentants élus, de régions, de villes et de ces nouveaux espaces " recomposés " que l'on appelle en France les " pays ",des représentants du tissu associatif, du secteur des PME/TPE. Pas moins de douze ministres sont présents, de nombreux présidents de Régions : d'Italie, du Sénégal, de France, des maires de grandes villes comme Recife... et pour la France, Rennes, Perpignan,...
Plusieurs organisations internationales publiques et agences spécialisées des Nations-Unies ont également répondu à notre invitation ainsi que la Commission européenne. Et aux côtés de ces représentants publics, des entreprises, notamment des systèmes productifs locaux, des ONG, des experts et des praticiens du développement régional.
Ces entretiens prennent chaque année un peu plus d'ampleur et je suis particulièrement satisfait de constater que plus de 50 pays des cinq continents sont représentés dans cette rencontre. C'est un signe très encourageant pour la coopération entre Etats, mais aussi entre régions, collectivités locales, entreprises et associations. Evidemment l'étude des systèmes productifs locaux occupera une large place dans ces entretiens, dans le prolongement du Congrès mondial qui se tenait dans ce même lieu l'année dernière. Mais ce n'est pas tout... cette rencontre est avant tout motivée par la recherche de la subtile combinaison entre dynamique des territoires, développement durable, démocratie locale, solidarité et cohésion sociale.
Les pays représentés aujourd'hui sont aussi bien des pays du Nord, membres de l'Union Européenne et de l'OCDE, que des pays du sud. Cette représentation nous la devons pour partie à l'engagement de mon collègue M. Charles JOSSELIN, ministre de la coopération absent aujourd'hui car il est en déplacement sur le lieu d'une grande manifestation : le forum social mondial de Porto Alegre. Parmi les pays du sud, nous sommes heureux de pouvoir compter sur la présence de plusieurs personnalités du continent africain (Tunisie, Ghana, Guinée, Egypte, Burkina Faso , Mauritanie, Tchad, ...).
Ces entretiens ont également vu le jour grâce au concours des ministères de l'emploi et solidarité et des Affaires étrangères mais aussi à la coopération entre l'OCDE, la Caisse des dépôts et consignations et la Datar. E. Guigou interviendra dans une des tables rondes et je la remercie.
L'OCDE avec sa compétence internationale et son rôle d'expertise et de conseil des politiques économiques et sociales dans plus de 30 pays. Je salue Donald Johnston présent ici aujourd'hui.
La Caisse des dépôts et consignations comme accompagnateur du développement durable par son soutien à l'investissement dans les projets de territoires et les outils locaux. Merci à Daniel Lebègue, directeur général.
La DATAR, chargée de la mise en cohérence et de la réflexion prospective sur les politiques des ministères en matière d'aménagement et de développement du territoire. Merci également à J.L Guigou qui a mobilisé toute son équipe pour la réussite de ces Entretiens.
Pour concevoir ces journées, pas moins de 50 institutions et organismes ont pris part au Comité de pilotage des Entretiens : Organisation des Nations unies, Association des chambres de commerce et d'industrie, Assemblée des districts et des communautés de France, ADEME, Association des maires de France, UNADEL, Centre français du commerce extérieur, ETD, de très nombreux ministères... Ils ont activement participé aux choix des thèmes des tables rondes, des ateliers, des intervenants. Ces Entretiens sont donc vraiment le fruit d'un travail collectif. Le travail de réflexion a déjà largement été engagé.
I. L'INTERET DES ENTRETIENS : CROISER DES APPROCHES COMPLEMENTAIRES DU DEVELOPPEMENT, APPREHENDER DE NOUVEAUX MODES DE GOUVERNANCE, S'ENRICHIR DE L'EXPERIENCE DES AUTRES
L'aménagement du territoire qui, depuis quelques années a intégré la dimension du développement économique local a désormais partie liée avec l'environnement. Ces trois thématiques seront explorées au cours des trois jours sous les appellations suivantes :
· Systèmes productifs locaux
· Recomposition des territoires
· Environnement-entreprises-territoires
Promue il y a 10 ans au sommet de Rio, la notion de développement durable est devenue une référence universelle. Cette notion est en particulier à l'origine de la prise de conscience de l'interdépendance des grands problèmes, à l'échelle planétaire.
La seule croissance, ne peut désormais faire l'économie d'une réflexion sur le plus long terme intégrant les dimensions de cohésion sociale et d'environnement. Aujourd'hui, la planète compte 6 milliards d'habitants ; à la fin du XXIe siècle ; elle en aura 10.
Le mode de vie des pays riches n'est pas viable dans la durée. Faute d'énergie, d'espaces et d'eau, il n'est pas reproductible à l'échelle planétaire.
Sur ce sujet, comme sur les autres thèmes de ces Entretiens, on sait que les progrès seront conditionnés par une nouvelle forme d'implication des acteurs et à de nouvelles échelles :
- au niveau régional et local,
- et dans le cadre de concertations, de négociations et de contrats auxquels devront s'associer les grands types d'acteurs :
- les entreprises
- les élus
- la société civile (syndicats, association...)
- l'Etat
CES NOUVEAUX ENTRETIENS ONT ETE ELABORES SUR LES PRINCIPAUX ENSEIGNEMENTS DU CONGRES DES SYSTEMES PRODUCTIFS LOCAUX DE L'AN DERNIER :
Premier enseignement : l'universalité des systèmes productifs locaux ou clusters comme approche du développement économique régional
Une journée d'exposés en réunions plénières avec d'éminents intervenants et 16 ateliers très fréquentés et très débattus ont permis de dégager l'existence d'une approche à la fois efficace et alternative aux tendances spontanées de marchés globalisés qui ignorent les territoires et les êtres humains qui y vivent.
Les SPL, ces " grappes " d'entreprises très ancrées dans leurs territoires savent renforcer leurs activités grâce à des formes variées de coopération. Moyennant une adaptation des méthodes, les SPL paraissent trouver leur place dans tous les dispositifs de politique économique. En dépassant des rivalités parfois ancestrales - souvent par le seul fait de rencontres décloisonnées - ces groupements d'entreprises contribuent au développement régional, tant dans les pays industrialisés que dans les économies du sud ou dans les régions à faible potentiel économique.
Les SPL sont apparus comme l'un des modèles, sinon le modèle permettant d'appréhender intelligemment le développement durable.
Je pense en particulier à l'expérience pionnière suédoise de Kalundborg qui vous sera à nouveau présentée. Elle est représentative de la rencontre possible, au niveau d'un territoire, entre des objectifs économiques et environnementaux.
Deuxième enseignement : le développement endogène se nourrit d'une nécessaire ouverture sur l'extérieur
Dans le cadre des journées 2001 de la Villette, des échanges et des partenariats, à vocation économique ou simplement culturelle, de connaissance et de savoir faire, ont été initialisés. Tout au long de l'année 2001, des accords entre responsables élus et entreprises de différents pays se sont concrétisés. Par exemple entre le pôle verrier de la Vallée de la Bresle en Haute-Normandie et la région de Marinha Grande au Portugal.
Je me félicite que l'appel à projet sur les partenariats transnationaux entre SPL français et ceux de régions du sud lancé, à l'ouverture du Congrès mondial SPL, par Mme Voynet ait été suivi de réalisations concrètes.
Le lancement d'un tel programme pilote d'incitation à la création de relations entre SPL français et SPL de régions du sud avait plusieurs justifications, notamment :
· Donner l'occasion à nos entreprises de comprendre les transformations de leur secteur d'activité induites par la mondialisation,
· Permettre des transferts d'expériences vers les pays du sud et de l'est en appuyant la structuration des SPL dans ces pays et participer aussi à la consolidation de l'économie territoriale de ces pays, notamment les pays de Zone de Solidarité prioritaire (ZSP) et des PECO,
· Enfin, susciter de nouvelles opportunités de marché qui profiteraient aux entreprises des deux pays.
Ce programme a été lancé, à titre expérimental, durant l'été 2001 : 14 projets de partenariats transnationaux ont été sélectionnés et subventionnés par la Commission Nationale SPL. Ce programme a mobilisé un budget de près de 2 millions de francs, soit 305 000 Euros.
Les relations nouées s'annoncent durables et fructueuses : je citerais SPL Adour avec le Maroc sur la filière mécanique ; la Cité de l'Initiative avec l'Ile Maurice et Madagascar sur la filière textile, le SPL Alliage (Orne) avec la Slovaquie, le Sentier (Paris) avec le Liban...
Une table ronde, cet après-midi sera consacrée à ces partenariats prometteurs pour nos entreprises et celles des pays tiers et le bilan de cet appel à proposition pilote vous sera présenté.
Je profite de cette plénière d'ouverture pour remercier tous les institutions et organismes qui ont apporté leur concours à cette expérience dans sa phase d'initiation : la Banque mondiale, les ministères techniques français et celui des affaires étrangères, les Ambassades de France, les Postes d'expansion économique, les conseillers du commerce extérieur, sans oublier ces chefs d'entreprises qui bénévolement travaillent à rapprocher des pays sur le plan économique...
Ce bilan positif et prometteur justifie une poursuite en 2002 par le Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement et la DATAR de cette politique de rapprochement entre pays. Mais pour consolider ces résultats sur l'international, il importe de poursuivre aussi le travail de fond engagés sur nos propres territoires.
Avec l'engagement récent du ministère de l'emploi et de la solidarité et celui du ministère de la recherche qui vient renforcer les appuis déjà apportés par la DATAR et ceux du ministère de l'industrie et de l'agriculture, les territoires abritant des systèmes productifs locaux sont assurés d'une aide complète et diversifiée de la part de l'Etat.
Troisième enseignement : une convergence au sein de l'Europe
Comme en témoigne la composition de la table ronde sur les politiques publiques à l'égard des SPL, vous avez pris conscience, depuis votre précédente rencontre, de la grande convergence des analyses et des pratiques en faveur de politiques de cluster dans les pays européens. " L'entrée dans l'économie par le territoire " a des adeptes dans tous les pays. Je me félicite de la présence de la Commission Européenne à ces Entretiens. Je souhaite qu'elle s'exprime sur la nécessaire adaptation de ses outils d'intervention induite par le souhait des pays membres de renforcer la territorialisation des politiques économiques.
II DEUX NOUVEAUX SUJETS TRES INTERDEPENDANTS DANS CES ENTRETIENS.
D'abord recomposition des territoires et aménagement du territoire
Pour que les participants à cette rencontre disposent des éléments de compréhension, apportons quelques éclairages sur la politique d'aménagement du territoire en France.
Ces Entretiens sont l'occasion d'affirmer notre conception renouvelée de " l'aménagement et du développement durable du territoire ", selon les termes de la dernière loi d'orientation en la matière du 25 juin 1999.
De l'aménagement du territoire d'après guerre conçu comme une politique de redistribution et une planification centralisée des grands équipements, nous sommes passés aujourd'hui à un encouragement fort aux dynamiques endogènes de développement local.
C'est " à la base ", au plus proche des citoyens, que l'élan du développement a le plus de force et que le contrôle démocratique est le plus fin.
L'aménagement du territoire est désormais une conjugaison complexe et subtile d'approches " top-down " et " bottom-up ", un mélange d'impulsion donnée aux initiatives locales mais aussi d'affirmation de la responsabilité de l'Etat vis-à-vis des territoires les plus démunis, avec en conséquence un pouvoir et un devoir de répartition et d'arbitrage.
Cette articulation entre des approches décentralisées et leur mise en cohérence dans une perspective d'équité s'appuie sur des instruments de planification thématiques et sectorielles : les " schémas de services collectifs ". Ces schémas ont été élaborés au cours des deux dernières années dans le cadre d'une large concertation au niveau régional. Ils devraient constituer le cadre de référence " partagé " pour l'émergence et la conduite de projets
Un fil conducteur de vos échanges sur l'aménagement du territoire sera la concertation et plus fondamentalement, la démocratie et la participation citoyenne. Elle est constamment à réinventer.
Nombreux sont les exemples de formes renouvelées de démocratie qui seront présentés au cours de ces trois journées d'Entretiens. Contrastant avec les conflits dont notre planète est le théâtre, des situations qui témoignent de la capacité de communautés traditionnellement divisées à se rassembler sur des projets partagés seront analysés. Celui de Mindanao aux Philippines par exemple. Merci à ces acteurs venus de loin expliquer les chemins qui peuvent mener de la décomposition à la re-composition d'un territoire.
Deuxième nouveau sujet : environnement, entreprises, territoires
Ministre à la fois de l'aménagement du territoire et de l'environnement, je suis particulièrement sensible à la place accordée au thème de l'environnement dans ces Entretiens. La protection de l'environnement, c'est l'économie du long terme qui doit s'articuler sur l'économie du court terme et le bien-être social pour fonder un développement durable.
Au travers des thèmes comme l'écologie industrielle, les systèmes de gestion environnementale, les agendas 21, qui seront débattus, c'est autant de solutions qui seront esquissées et dont il me reviendra la responsabilité de faire la synthèse.
2002, un tournant dans les débats ?
L'année 2002 est une année capitale : le sommet de Johannesburg se tiendra en septembre pour faire le point sur la mise en place des agenda 21 depuis Rio et sur l'adoption de stratégies nationales pour encourager le développement soutenable. Les réunions préparatoires à Johannesburg se tiennent en ce moment à New York.
Le rendez-vous de Johannesburg doit nous permettre de faire un bilan de ce qui a été accompli depuis le Sommet de la Terre, et qui doit aussi être l'occasion d'ouvrir de nouveaux chantiers. Ce Sommet du Développement Durable devrait redonner un nouveau souffle à ce concept, en insistant sur la nécessaire intégration des préoccupations économiques, sociales et environnementales.
Il faut que les pays du nord soient ouverts aux difficultés que rencontrent les pays du sud dans la mise en oeuvre des objectifs du développement durable. En particulier, il faut oeuvrer pour faciliter les transferts de technologie, et pour bien cibler l'aide au développement.
Mais il faut aussi que les pays du nord prennent des engagements pour modifier leurs modes de production et de consommation et promouvoir l'éco-efficacité en consommant moins de ressources naturelles. Si le volet social du développement durable concerne en premier lieu l'éradication de la pauvreté, la justice sociale, il ne faut pas oublier d'aborder d'autres questions comme la santé, l'emploi, les conditions de vie et de travail, l'égalité homme-femme. Il conviendra de veiller en tout état de cause à un bon équilibre dans le traitement des trois piliers du développement durable, de manière à répondre aux attentes des différents acteurs.
Le Sommet de Göteborg a adopté une stratégie européenne de développement durable. A cette occasion, l'Union a réaffirmé qu'elle s'engageait à atteindre dans les meilleurs délais l'objectif convenu au sein des Nations Unies pour l'aide au développement, à savoir 0,7% du PIB. Il importe à présent de travailler à l'élaboration du volet externe de cette stratégie, qui doit être adopté au Conseil européen de Barcelone afin que l'Union européenne soit en mesure de faire des propositions dans le cadre d'un pacte planétaire.
C'est à travers les débats sur le développement durable que s'exprime la recherche de nouvelles régulations face au mouvement de mondialisation. Les équilibres entre les critères de justice et de solidarité sociale, de gestion raisonnée des ressources naturelles et de l'environnement, des préférences collectives en matière de santé et d'éducation sont au coeur des controverses sur la mondialisation. Le besoin de règles encadrant l'intégration des économies et des sociétés s'affirme de façon croissante et ce sujet devra être au coeur du débat à Johannesburg.
Enfin, le Sommet Mondial du Développement Durable devra débattre de la question de l'amélioration de la gouvernance internationale de l'environnement, et de l'émergence d'une organisation mondiale de l'environnement. Vous savez que ce sujet est une priorité majeure de la France depuis que l'idée en a été lancée pendant notre dernière présidence de l'Union européenne.
Le secrétaire général des Nations-Unies, M. Kofi Annan, a proposé il y a quelques jours que le sommet de Johannesburg traite en priorité dix thèmes qui couvrent les principaux enjeux du développement durable. Sans en négliger aucun, car le développement durable n'est pas divisible même si, chez certains, la tentation en est toujours forte, la France souhaite se focaliser sur quatre d'entre eux : l'accès à l'eau, l'accès à l'énergie, la protection des ressources naturelles et de la diversité biologique, la gouvernance environnementale mondiale.
L'articulation local / global
La démarche des Entretiens en est complémentaire. Johannesburg, comme Rio, implique en effet la participation de représentants des régions. L'articulation entre le débat international - au sens de débat seulement entre pays - et débat ouvert au local est à renforcer, notamment sur ces thèmes. Vous le savez, les avancées environnementales se gagnent et se mesurent aussi au niveau des territoires.
Les Entretiens ouvrent sur les perspectives d'un dialogue nord / sud qui est encore bien insuffisant. L'interdépendance entre pays ne donne pas le droit aux pays du Nord de dicter unilatéralement leurs règles aux pays du Sud. Un autre lien essentiel reste à effectuer entre espaces. Les pays d'Afrique, d'Asie, d'Amérique Latine ne peuvent être ignorés dans la réflexion et la prévision sur l'usage des ressources naturelles. La solidarité entre pays, mais aussi entre régions est essentielle. Elle peut commencer par des partenariats comme celui qui se met en place aujourd'hui entre la région Nord Pas de Calais en France et Rio Grande du Sul (lire " dou Soul ") au Brésil.
Le développement durable est une notion qui figure dans la Loi d'orientation d'aménagement et de développement durable du territoire . Est-il pour autant bien compris ? Dispose-t-on des modes opératoires qui en permettent son intégration dans le champ de l'aménagement et du développement du territoire ?
Des événements récents tels que l'explosion de l'usine AZF à Toulouse sont là pour rappeler que le territoire n'est pas seulement un espace idéal qui répond à des besoins d'identité et d'affirmation des différences.
Le territoire, c'est aussi un espace réel, avec des ressources qui s'épuisent, des menaces naturelles ou industrielles pour les populations, un espace qu'il faut ménager. Un espace qui exige mobilisation et anticipation.
La catastrophe de Toulouse a été la plus grave catastrophe en France et en Europe de ces 50 dernières années. Elle a reposé avec acuité la question de la place du risque industriel dans nos sociétés, non seulement en France, en Europe, mais dans tous les pays.
Pour construire un programme d'ensemble en réponse, le Gouvernement a utilisé une méthode novatrice et participative. En l'espace d'un mois, du 15 novembre au 11 décembre, 26 tables rondes régionales et une table ronde nationale ont été organisées afin de faire s'exprimer largement et sans tabous tous les points de vue sur la question du risque industriel. Plus de 7000 personnes ont participé à ces débats. Et, le Gouvernement prépare sur la base des propositions faites un projet de loi sur le risque industriel.
Dans le même temps, j'ai présenté à mes collègues européens lors du Conseil environnement du 29 octobre 2001 un mémorandum sur la catastrophe de Toulouse avec plusieurs pistes, à la fois réglementaires, techniques, de recherche, mais également de coopération renforcée entre les Etats pour globalement améliorer la sécurité industrielle. J'estime en effet que ces questions ne peuvent pas se traiter dans un cadre purement national. Outre la spécificité technique des problèmes rencontrés qui nécessitent de pouvoir mobiliser une expertise forcément internationale, le choix de dispositions réglementaires trop variables d'un pays à l'autre aurait inévitablement comme effet d'orienter les industries dangereuses vers les pays ayant des règles en matière de sécurité moins strictes. Ce que j'exprime pour l'Europe vaut pour la terre entière, ces activités peuvent être indifféremment exercées sur l'une quelconque des parties du globe.
La question de l'urbanisation est dans ce contexte au centre des préoccupations.
Quel rôle les territoires pourront-ils ou sauront-ils jouer dans les mutations à entreprendre ? Comment encourager l'adoption de mesures préventives, alors que les connaissances scientifiques laissent des zones d'ombre et que priment encore trop souvent les impératifs économiques ?
A ces questions je répondrais que la solution passera par la mobilisation de tous les acteurs :
- l'Etat et les élus locaux
- Les entreprises qui, face à la pression de l'opinion publique, ébauchent stratégies plus respectueuses de l'environnement.
- Les acteurs syndicaux également concernés par ce volet écologique.
- Les ONG et les associations intégrés de façon croissante à ces débats
Il nous faut donc tous promouvoir une conception plus durable du développement qui tienne compte de l'environnement et considère l'espace comme un " bien collectif ", c'est-à-dire un bien dont l'usage individuel ne doit pas de façon irréversible affecter l'usage que peut en faire autrui et notamment les générations futures.
Mesdames et Messieurs, je laisse le champ libre à la parole, aux échanges et débats, j'ai demandé qu'une synthèse me soit rapidement livrée, j'en prendrai connaissance avec toute l'attention que je porte au dossier et en rendrai compte fidèlement à Monsieur Le Premier Ministre et à l'ensemble du gouvernement.
Je vous souhaite d'excellents travaux placés sous le signe de l'innovation, de l'écoute et de l'ouverture.
Je vous remercie.
(Source http://www.datar.gouv.fr, le 8 février 2002)