Texte intégral
Mesdames,
Messieurs,
Je me réjouis tout particulièrement de clore les travaux des journées nationales du comité national de coordination de l'action en faveur des personnes handicapées.
Au printemps prochain, le Gouvernement présentera au Parlement, un rapport sur la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes. Les mois qui viennent permettront de préciser nos axes d'action mais je souhaite aujourd'hui, dans le cadre de ma responsabilité ministérielle, vous faire part de mes orientations et de mes interrogations.
Quelle évolution pouvons-nous offrir aux familles ?
Quelles solutions pour celles qui ont fait le choix, il y a quelques décennies, de garder auprès d'elles leur enfant lourdement handicapé ? Que pouvons-nous faire pour celles qui ont attendu trop longtemps la possibilité d'un placement en institution, et faute de places ou par manque d'information sur les nouveaux dispositifs, se sont résignées ?
Soixante années plus tard, ce fils ou cette fille est toujours près d'eux. Leurs journées restent scandées par les tâches de la vie quotidienne, les sorties et les distractions sont toujours rares. A cela s'ajoute parfois la précarité, et cette angoisse croissante au fur et à mesure de l'avancée en âge.
Si presque toutes ces familles reçoivent une aide financière, moins du quart d'entre elles bénéficient d'une aide à domicile. Le plus souvent, elles ne réclament pas de soutien extérieur.
Vous le savez, au-delà de toutes les tâches matérielles, c'est la charge psychologique qui pèse lourdement avec la lancinante interrogation sur le devenir de cet adulte, après leur disparition.
Que se passera-t-il après leur décès ? Les parents, d'après une étude de la Fondation de France, optent en majorité pour le maintien dans la famille. L'aide des frères et surs reste souvent évoqué, mais ils ne sont pas toujours en mesure d'assurer le relais. Certaines familles acceptent l'idée d'un placement dans une structure pour personnes âgées, tandis que d'autres choisiraient un établissement spécialisé pour personnes handicapées.
Que pouvons-nous faire pour accompagner le vieillissement des personnes hébergées en institution et pour adapter leurs lieux de vie aux problèmes liés à l'âge ?
Des solutions diversifiées sont d'ores et déjà mises en uvre par les associations, dans un grand nombre de départements, le plus souvent avec l'aide des Conseils généraux. Il s'agit d'unités spécifiques pour personnes handicapées âgées dans les établissements pour adultes handicapés, ou en maisons de retraite, ou encore d'accueil conjoint de parents âgés avec leur enfant handicapé vieillissant.
Est-il nécessaire de créer de nouvelles catégories d'établissements ou de services spécifiques ? Je ne le pense pas. Des solutions adaptées aux besoins des personnes peuvent être trouvées aussi bien dans le cadre des EHPAD que dans celui de foyers de vie pour personnes handicapées.
Il n'y a pas de réponse simple aux problèmes posés par les modes de prises en charge les plus adaptés aux personnes handicapées vieillissantes. Mais nous devons nous donner les moyens de construire des réponses personnalisées et fondées sur le seul principe du respect du projet de vie, qu'il ait pour cadre le domicile ou l'établissement.
Pour atteindre nos objectifs, il faut soutenir les promoteurs et mieux aider les personnes handicapées.
Soutenir les promoteurs en leur apportant de nouveaux moyens de financement : c'est l'objet du plan pluriannuel de médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, à hauteur de 6 milliards financés par l'assurance maladie. Ces 6 milliards, qui majorent de près de 30% les moyens actuellement alloués aux structures, correspondent au financement d'environ 20.000 postes soignants.
C'est aussi l'objet de mesures spécifiques du plan pluriannuel pour l'autonomie des personnes handicapées, qui favorisent l'innovation en matière de prise en charge dans les établissements et en matière de soins à domicile.
Soutenir les promoteurs en leur offrant aussi de nouveaux instruments juridiques. A cet égard, le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale nous permettra d'avancer, en donnant enfin une base légale aux foyers d'accueil médicalisés. Ils sont beaucoup mieux adaptés au vieillissement des personnes handicapées que les simples foyers de vie ou que les maisons d'accueil spécialisées. La réglementation de ces structures devrait ménager leur évolution et éviter les couperets liés à l'âge. Par ailleurs la même loi confortera l'existence des structures d'accueil de jour et d'accueil temporaire, qui offrent aux aidants un véritable droit au répit, et contribuent à améliorer et à professionnaliser la prise en charge des personnes.
Enfin, nous allons ouvrir aux personnes handicapées de moins de 60 ans les services de soins à domicile aux personnes âgées. Le programme pluriannuel de création de 20 000 places de SSIAD (4000 par an) nous permettra de réaliser cette ouverture sans restriction des prises en charge des personnes âgées.
Mieux aider les personnes handicapées, en organisant et en professionnalisant les métiers de l'accompagnement pour améliorer la qualité de prise en charge.
Ce travail est bien avancé dans le secteur de l'aide à domicile, dont le domaine d'intervention concerne tant les personnes handicapées que les personnes âgées.
Les textes réglementaires instituant le diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie sociale seront publiés dans les jours qui viennent.
Résultat d'une large concertation, associant tous les partenaires de la filière professionnelle, ce nouveau diplôme réforme en profondeur le certificat d'aptitude aux fonctions de l'aide à domicile (CAFAD). Il constitue un outil majeur de la politique de professionnalisation de l'aide à domicile que j'entends développer.
Par ailleurs, j'ai souhaité que soit recherchée une meilleure articulation des diverses formations niveau V, ainsi que la mise en place de passerelles et de transversalités entre le champ sanitaire et le champ social (aide médico-psychologique, aide soignante), pour assurer une prise en charge globale et continue de la personne aidée.
Mon expérience m'a enseigné à quel point les métiers du handicap pouvaient être utiles aux personnes âgées en perte d'autonomie.
Nous devons aussi mieux aider les personnes en leur donnant les moyens financiers de l'autonomie.
Vous le savez, la loi instituant l'allocation personnalisée d'autonomie entrera en vigueur au 1er janvier prochain. Les décrets d'application viennent d'être publiés.
La loi instaurant l'allocation personnalisée d'autonomie innove en créant un droit universel, égal, objectif et personnalisé :
- un droit universel car le montant de l'aide sera déterminé en fonction du degré de dépendance et des revenus des personnes âgées ;
- un droit égal et objectif car il y aura un barème national garantissant une égalité sur tout le territoire. La participation des bénéficiaires étant déterminée en fonction de leurs ressources ;
- un droit personnalisé car les modalités d'aide seront déterminées en fonction du degré de dépendance de la personne âgée et des besoins qu'elle ou son entourage exprimera.
Pour toutes ces raisons, je suis persuadée que cette loi trace, dans un champ d'application particulier, les grandes lignes du " droit à compensation " que vous appelez de vos vux.
Cette loi met en question notre approche d'ensemble du handicap et de la perte d'autonomie des personnes âgées.
Nous n'avons pas pu, dans le cadre de la loi APA, supprimer les critères d'âges que la loi PSD avait introduits, créant de ce fait une coupure contestable entre l'aide à l'autonomie pour les personnes âgées et l'aide à l'autonomie pour les personnes âgées. Vous le savez, il nous fallait traiter en urgence la réforme de la PSD, la création d'un droit nouveau se substituant à une prestation marquée par trop d'insuffisances, d'incohérences et d'inégalités. Mais la problématique reste ouverte : voulez-vous la convergence des législations ? Voulez-vous par exemple aller vers une prestation en nature liée à un plan d'aide personnalisé ?
En ce point de mon propos, je voudrais en tout cas souligner quelques avancées majeures que l'APA concrétise, pour les personnes handicapées de plus de 60 ans.
L'APA permet des niveaux d'aide généralement plus substantiels que ceux de la PSD, et souvent plus intéressants que ceux de l'ACTP. Les personnes handicapées âgées bénéficiaires de l'ACTP avant 60 ans, ont une option, garantie par l'article 3 de la loi, entre ces 2 prestations. L'APA peut être plus favorable dans de nombreux cas, pour les handicaps les plus lourds, ou pour les personnes dont les revenus se situaient près du plafond de l'ACTP. Pour certaines personnes handicapées vieillissantes ayant besoin d'aide dans les actes de la vie courante, mais ne répondant pas aux conditions minimales de taux d'invalidité pour prétendre à l'ACTP, l'APA est même la seule solution.
Par ailleurs, la loi abandonne le recours sur succession sur le légataire et sur le donataire, pour les bénéficiaires de l'APA. Ce qui n'est pas sans m'interroger sur l'harmonisation des règles de récupération ou de recours à l'obligation alimentaire dans l'ensemble des dispositifs sociaux. Par exemple, le recours aux obligés alimentaires pèse de manière inégale selon que l'on se situe dans le champ de l'aide sociale aux personnes handicapées ou dans celui de l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées.
La loi ouvre aussi la possibilité d'améliorer de la grille AGGIR. Largement perfectible, cet outil prend insuffisamment en compte les problèmes liés aux maladies neuro-dégénératives, à la cécité et à l'environnement. Dans les jours qui viennent, j'installerai un comité scientifique au sein duquel les personnes handicapées seront représentées. Celui-ci devra présenter ses conclusions au Parlement dans un délai de 18 mois. Là encore, nous manifesterons notre volonté d'une convergence entre politique du handicap et politique de soutien à l'autonomie des personnes âgées, convergence aussi des outils d'évaluation. Etes-vous prêts à progresser dans ce sens, pour une approche unifiée de la détermination des besoins de la personne en situation de handicap, quel que soit son âge ?
La loi nous donne, par ailleurs, les moyens d'assurer la professionnalisation des métiers de tous ceux qui accompagnent les personnes âgées en instaurant un fonds de modernisation de l'aide à domicile. Ce fonds répond clairement au souci de soutenir des actions de formation, des projets innovants, et toute mesure susceptible de favoriser la professionnalisation des services d'aide à domicile. Nous favoriserons une approche globale et décloisonnée.
Parce qu'elle réaffirme le rôle majeur des services d'aide à domicile dans la prise en charge des personnes en perte d'autonomie, parce qu'elle va obliger les responsables nationaux et départementaux à accompagner la professionnalisation du secteur, la loi APA est également une loi phare pour les personnes handicapées qui bénéficieront aussi de leurs prestations, notamment en milieu rural.
Mais les moyens supplémentaires apportés par l'APA ne seraient rien si un effort de cohérence n'était pas mené parallèlement pour organiser la complémentarité entre les différentes prestations, les multiples acteurs.
Voilà pourquoi, les outils de la coordination gérontologique, et j'en suis convaincue les outils de coordination pour les personnes handicapées, doivent délibérément s'inscrire dans une perspective d'aménagement du territoire et de développement local durable ; le maintien à domicile des personnes âgées, comme l'ensemble des politiques de santé ou en direction des personnes handicapées, peuvent contribuer fortement à la cohésion sociale, au maintien des activités et à l'essor de l'emploi.
De même, je suis convaincue qu'il faut progresser sur la planification des soins infirmiers, partagés entre des acteurs multiples, soumis à des tutelles différentes. Il faut les inscrire dans les territoires, en même temps qu'on les ouvre et qu'on développe leur polyvalence. Là aussi, c'est un enjeu de développement local et d'aménagement du territoire.
Notre volonté de développer une coordination gérontologique proche du terrain et d'abord attentive aux besoins des personnes trouvera une traduction pratique par la mise en place de Centres Locaux d'Information et de Coordination gérontologique (CLIC), que j'avais appelés de mes vux dans mon rapport au Premier Ministre. Après une phase d'expérimentation conduite à partir de 25 sites pilotes désignés en 2000, l'année 2001 a inauguré la phase opérationnelle de développement, avec la création de 140 nouveaux centres. En 2002, nous en installerons 160 autres et un maillage du territoire, assuré par 1000 CLIC, sera opérationnel d'ici 2005.
Parce qu'ils assurent des missions largement semblables en matière d'aides techniques et d'aménagement du logement, j'ai souhaité qu'une dynamique de coopération s'instaure entre les CLIC et les sites pour la vie autonome. A cet effet, j'organiserai, fin janvier, une journée technique " CLIC et territoires " au cours de laquelle un premier travail pourra être mené sur ce thème. Au-delà du renforcement des liens entre les CLIC, les sites pour la vie autonome et les réseaux de santé, n'est-il pas temps d'aller vers une harmonisation des missions, vers une approche plus globale et unifiée ?
Pour terminer, je voudrais vous dire que nous avons enfin l'opportunité de faire avancer concrètement le problème qui vous a réuni pendant ces deux jours.
Il s'agit du grand chantier interministériel de réforme de la loi d'orientation de 1975, récemment lancé par Ségolène ROYAL. Je souhaite qu'il permette de mener à son terme notre réflexion sur la reconnaissance d'un droit à la compensation des incapacités des personnes handicapées, quels que soient leur âge et l'origine de leur handicap. On ne peut le faire qu'avec vous.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 13 décembre 2001)
Messieurs,
Je me réjouis tout particulièrement de clore les travaux des journées nationales du comité national de coordination de l'action en faveur des personnes handicapées.
Au printemps prochain, le Gouvernement présentera au Parlement, un rapport sur la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes. Les mois qui viennent permettront de préciser nos axes d'action mais je souhaite aujourd'hui, dans le cadre de ma responsabilité ministérielle, vous faire part de mes orientations et de mes interrogations.
Quelle évolution pouvons-nous offrir aux familles ?
Quelles solutions pour celles qui ont fait le choix, il y a quelques décennies, de garder auprès d'elles leur enfant lourdement handicapé ? Que pouvons-nous faire pour celles qui ont attendu trop longtemps la possibilité d'un placement en institution, et faute de places ou par manque d'information sur les nouveaux dispositifs, se sont résignées ?
Soixante années plus tard, ce fils ou cette fille est toujours près d'eux. Leurs journées restent scandées par les tâches de la vie quotidienne, les sorties et les distractions sont toujours rares. A cela s'ajoute parfois la précarité, et cette angoisse croissante au fur et à mesure de l'avancée en âge.
Si presque toutes ces familles reçoivent une aide financière, moins du quart d'entre elles bénéficient d'une aide à domicile. Le plus souvent, elles ne réclament pas de soutien extérieur.
Vous le savez, au-delà de toutes les tâches matérielles, c'est la charge psychologique qui pèse lourdement avec la lancinante interrogation sur le devenir de cet adulte, après leur disparition.
Que se passera-t-il après leur décès ? Les parents, d'après une étude de la Fondation de France, optent en majorité pour le maintien dans la famille. L'aide des frères et surs reste souvent évoqué, mais ils ne sont pas toujours en mesure d'assurer le relais. Certaines familles acceptent l'idée d'un placement dans une structure pour personnes âgées, tandis que d'autres choisiraient un établissement spécialisé pour personnes handicapées.
Que pouvons-nous faire pour accompagner le vieillissement des personnes hébergées en institution et pour adapter leurs lieux de vie aux problèmes liés à l'âge ?
Des solutions diversifiées sont d'ores et déjà mises en uvre par les associations, dans un grand nombre de départements, le plus souvent avec l'aide des Conseils généraux. Il s'agit d'unités spécifiques pour personnes handicapées âgées dans les établissements pour adultes handicapés, ou en maisons de retraite, ou encore d'accueil conjoint de parents âgés avec leur enfant handicapé vieillissant.
Est-il nécessaire de créer de nouvelles catégories d'établissements ou de services spécifiques ? Je ne le pense pas. Des solutions adaptées aux besoins des personnes peuvent être trouvées aussi bien dans le cadre des EHPAD que dans celui de foyers de vie pour personnes handicapées.
Il n'y a pas de réponse simple aux problèmes posés par les modes de prises en charge les plus adaptés aux personnes handicapées vieillissantes. Mais nous devons nous donner les moyens de construire des réponses personnalisées et fondées sur le seul principe du respect du projet de vie, qu'il ait pour cadre le domicile ou l'établissement.
Pour atteindre nos objectifs, il faut soutenir les promoteurs et mieux aider les personnes handicapées.
Soutenir les promoteurs en leur apportant de nouveaux moyens de financement : c'est l'objet du plan pluriannuel de médicalisation des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, à hauteur de 6 milliards financés par l'assurance maladie. Ces 6 milliards, qui majorent de près de 30% les moyens actuellement alloués aux structures, correspondent au financement d'environ 20.000 postes soignants.
C'est aussi l'objet de mesures spécifiques du plan pluriannuel pour l'autonomie des personnes handicapées, qui favorisent l'innovation en matière de prise en charge dans les établissements et en matière de soins à domicile.
Soutenir les promoteurs en leur offrant aussi de nouveaux instruments juridiques. A cet égard, le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale nous permettra d'avancer, en donnant enfin une base légale aux foyers d'accueil médicalisés. Ils sont beaucoup mieux adaptés au vieillissement des personnes handicapées que les simples foyers de vie ou que les maisons d'accueil spécialisées. La réglementation de ces structures devrait ménager leur évolution et éviter les couperets liés à l'âge. Par ailleurs la même loi confortera l'existence des structures d'accueil de jour et d'accueil temporaire, qui offrent aux aidants un véritable droit au répit, et contribuent à améliorer et à professionnaliser la prise en charge des personnes.
Enfin, nous allons ouvrir aux personnes handicapées de moins de 60 ans les services de soins à domicile aux personnes âgées. Le programme pluriannuel de création de 20 000 places de SSIAD (4000 par an) nous permettra de réaliser cette ouverture sans restriction des prises en charge des personnes âgées.
Mieux aider les personnes handicapées, en organisant et en professionnalisant les métiers de l'accompagnement pour améliorer la qualité de prise en charge.
Ce travail est bien avancé dans le secteur de l'aide à domicile, dont le domaine d'intervention concerne tant les personnes handicapées que les personnes âgées.
Les textes réglementaires instituant le diplôme d'Etat d'auxiliaire de vie sociale seront publiés dans les jours qui viennent.
Résultat d'une large concertation, associant tous les partenaires de la filière professionnelle, ce nouveau diplôme réforme en profondeur le certificat d'aptitude aux fonctions de l'aide à domicile (CAFAD). Il constitue un outil majeur de la politique de professionnalisation de l'aide à domicile que j'entends développer.
Par ailleurs, j'ai souhaité que soit recherchée une meilleure articulation des diverses formations niveau V, ainsi que la mise en place de passerelles et de transversalités entre le champ sanitaire et le champ social (aide médico-psychologique, aide soignante), pour assurer une prise en charge globale et continue de la personne aidée.
Mon expérience m'a enseigné à quel point les métiers du handicap pouvaient être utiles aux personnes âgées en perte d'autonomie.
Nous devons aussi mieux aider les personnes en leur donnant les moyens financiers de l'autonomie.
Vous le savez, la loi instituant l'allocation personnalisée d'autonomie entrera en vigueur au 1er janvier prochain. Les décrets d'application viennent d'être publiés.
La loi instaurant l'allocation personnalisée d'autonomie innove en créant un droit universel, égal, objectif et personnalisé :
- un droit universel car le montant de l'aide sera déterminé en fonction du degré de dépendance et des revenus des personnes âgées ;
- un droit égal et objectif car il y aura un barème national garantissant une égalité sur tout le territoire. La participation des bénéficiaires étant déterminée en fonction de leurs ressources ;
- un droit personnalisé car les modalités d'aide seront déterminées en fonction du degré de dépendance de la personne âgée et des besoins qu'elle ou son entourage exprimera.
Pour toutes ces raisons, je suis persuadée que cette loi trace, dans un champ d'application particulier, les grandes lignes du " droit à compensation " que vous appelez de vos vux.
Cette loi met en question notre approche d'ensemble du handicap et de la perte d'autonomie des personnes âgées.
Nous n'avons pas pu, dans le cadre de la loi APA, supprimer les critères d'âges que la loi PSD avait introduits, créant de ce fait une coupure contestable entre l'aide à l'autonomie pour les personnes âgées et l'aide à l'autonomie pour les personnes âgées. Vous le savez, il nous fallait traiter en urgence la réforme de la PSD, la création d'un droit nouveau se substituant à une prestation marquée par trop d'insuffisances, d'incohérences et d'inégalités. Mais la problématique reste ouverte : voulez-vous la convergence des législations ? Voulez-vous par exemple aller vers une prestation en nature liée à un plan d'aide personnalisé ?
En ce point de mon propos, je voudrais en tout cas souligner quelques avancées majeures que l'APA concrétise, pour les personnes handicapées de plus de 60 ans.
L'APA permet des niveaux d'aide généralement plus substantiels que ceux de la PSD, et souvent plus intéressants que ceux de l'ACTP. Les personnes handicapées âgées bénéficiaires de l'ACTP avant 60 ans, ont une option, garantie par l'article 3 de la loi, entre ces 2 prestations. L'APA peut être plus favorable dans de nombreux cas, pour les handicaps les plus lourds, ou pour les personnes dont les revenus se situaient près du plafond de l'ACTP. Pour certaines personnes handicapées vieillissantes ayant besoin d'aide dans les actes de la vie courante, mais ne répondant pas aux conditions minimales de taux d'invalidité pour prétendre à l'ACTP, l'APA est même la seule solution.
Par ailleurs, la loi abandonne le recours sur succession sur le légataire et sur le donataire, pour les bénéficiaires de l'APA. Ce qui n'est pas sans m'interroger sur l'harmonisation des règles de récupération ou de recours à l'obligation alimentaire dans l'ensemble des dispositifs sociaux. Par exemple, le recours aux obligés alimentaires pèse de manière inégale selon que l'on se situe dans le champ de l'aide sociale aux personnes handicapées ou dans celui de l'aide sociale à l'hébergement des personnes âgées.
La loi ouvre aussi la possibilité d'améliorer de la grille AGGIR. Largement perfectible, cet outil prend insuffisamment en compte les problèmes liés aux maladies neuro-dégénératives, à la cécité et à l'environnement. Dans les jours qui viennent, j'installerai un comité scientifique au sein duquel les personnes handicapées seront représentées. Celui-ci devra présenter ses conclusions au Parlement dans un délai de 18 mois. Là encore, nous manifesterons notre volonté d'une convergence entre politique du handicap et politique de soutien à l'autonomie des personnes âgées, convergence aussi des outils d'évaluation. Etes-vous prêts à progresser dans ce sens, pour une approche unifiée de la détermination des besoins de la personne en situation de handicap, quel que soit son âge ?
La loi nous donne, par ailleurs, les moyens d'assurer la professionnalisation des métiers de tous ceux qui accompagnent les personnes âgées en instaurant un fonds de modernisation de l'aide à domicile. Ce fonds répond clairement au souci de soutenir des actions de formation, des projets innovants, et toute mesure susceptible de favoriser la professionnalisation des services d'aide à domicile. Nous favoriserons une approche globale et décloisonnée.
Parce qu'elle réaffirme le rôle majeur des services d'aide à domicile dans la prise en charge des personnes en perte d'autonomie, parce qu'elle va obliger les responsables nationaux et départementaux à accompagner la professionnalisation du secteur, la loi APA est également une loi phare pour les personnes handicapées qui bénéficieront aussi de leurs prestations, notamment en milieu rural.
Mais les moyens supplémentaires apportés par l'APA ne seraient rien si un effort de cohérence n'était pas mené parallèlement pour organiser la complémentarité entre les différentes prestations, les multiples acteurs.
Voilà pourquoi, les outils de la coordination gérontologique, et j'en suis convaincue les outils de coordination pour les personnes handicapées, doivent délibérément s'inscrire dans une perspective d'aménagement du territoire et de développement local durable ; le maintien à domicile des personnes âgées, comme l'ensemble des politiques de santé ou en direction des personnes handicapées, peuvent contribuer fortement à la cohésion sociale, au maintien des activités et à l'essor de l'emploi.
De même, je suis convaincue qu'il faut progresser sur la planification des soins infirmiers, partagés entre des acteurs multiples, soumis à des tutelles différentes. Il faut les inscrire dans les territoires, en même temps qu'on les ouvre et qu'on développe leur polyvalence. Là aussi, c'est un enjeu de développement local et d'aménagement du territoire.
Notre volonté de développer une coordination gérontologique proche du terrain et d'abord attentive aux besoins des personnes trouvera une traduction pratique par la mise en place de Centres Locaux d'Information et de Coordination gérontologique (CLIC), que j'avais appelés de mes vux dans mon rapport au Premier Ministre. Après une phase d'expérimentation conduite à partir de 25 sites pilotes désignés en 2000, l'année 2001 a inauguré la phase opérationnelle de développement, avec la création de 140 nouveaux centres. En 2002, nous en installerons 160 autres et un maillage du territoire, assuré par 1000 CLIC, sera opérationnel d'ici 2005.
Parce qu'ils assurent des missions largement semblables en matière d'aides techniques et d'aménagement du logement, j'ai souhaité qu'une dynamique de coopération s'instaure entre les CLIC et les sites pour la vie autonome. A cet effet, j'organiserai, fin janvier, une journée technique " CLIC et territoires " au cours de laquelle un premier travail pourra être mené sur ce thème. Au-delà du renforcement des liens entre les CLIC, les sites pour la vie autonome et les réseaux de santé, n'est-il pas temps d'aller vers une harmonisation des missions, vers une approche plus globale et unifiée ?
Pour terminer, je voudrais vous dire que nous avons enfin l'opportunité de faire avancer concrètement le problème qui vous a réuni pendant ces deux jours.
Il s'agit du grand chantier interministériel de réforme de la loi d'orientation de 1975, récemment lancé par Ségolène ROYAL. Je souhaite qu'il permette de mener à son terme notre réflexion sur la reconnaissance d'un droit à la compensation des incapacités des personnes handicapées, quels que soient leur âge et l'origine de leur handicap. On ne peut le faire qu'avec vous.
(Source http://www.social.gouv.fr, le 13 décembre 2001)