Lettres, communiqués et déclaration de la FSU adressées au ministère de l'intérieur et aux présidents de conseils régionaux, parues dans "Pour Info" des 30 mars, 14 et 20 avril 1998, sur le projet de loi sur la lutte contre l'exclusion.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Table ronde sur l'enseignement technologique et professionnel, le 9 avril 1998

Média : Pour info

Texte intégral

POUR INFO - 30 mars 1998

Le Conseil des Ministres vient d'adopter le projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions.

La question de l'exclusion est aujourd'hui, avec celle du chômage - qui constitue souvent une première étape dans les processus d'exclusion - au cœur des revendications d'une partie importante de la population. Mettre fin à l'exclusion suppose des choix économiques autres que ceux qui sont faits aujourd'hui. Cela suppose aussi une politique de répartition des richesses radicalement différente de celle qui fait qu'aujourd'hui, en France comme dans les autres pays européens, la, pauvreté touche de plus en plus de femmes, d'hommes et d'enfants.

Dans ce contexte, le projet de loi confirme l'accent mis sur la reconnaissance d'un certain nombre de droits fondamentaux en matière de logement, de santé, d'accès à la citoyenneté ainsi que la recherche d'une individualisation des parcours d'insertion sociale et professionnelle. Mais il laisse de nombreuses interrogations, quant à la cohérence globale d'un ensemble de mesures parfois disparates, et surtout quant aux moyens financiers engagés.

La FSU constate que la place finalement accordée au droit à l'éducation et au droit à la culture est en retrait par rapport au programme de prévention et de lutte contre les exclusions présenté début mars. Les mesures réellement nouvelles se réduisent au rétablissement des bourses - ce qui est positif - et à un amendement à la loi d'orientation de 1989, - qui l'est beaucoup moins - puisqu'il revient à donner un fondement législatif au redéploiement des moyens.

Le projet de loi continue donc à esquiver les questions majeures de la prévention de l'échec scolaire à tous les niveaux et de l'accès de tous les jeunes à un niveau réel de formation générale et de qualification professionnelle à la sortie du système. La modestie de l'objectif de ramener les sorties sans qualification de 53 000 à 45 000 en trois ans est révélatrice, de ce point de vue.

Sur l'ensemble du projet de loi, l'absence de moyens nouveaux à travers un collectif budgétaire interdirait d'atteindre la plupart des objectifs affichés.

La FSU continuera à intervenir sur l'ensemble de ces questions pour améliorer le contenu du projet et lutter contre toutes les formes d'exclusion.

Paris, le 25 mars 1998


POUR INFO : 14 avril 1998

Lettre adressée à tous les Présidents de Conseils Régionaux. Paris, le 09 avril 1998

Monsieur le Président du Conseil Régional
Monsieur le Président,


Je m'adresse à vous au nom de la principale fédération syndicale de l'enseignement, de la recherche et de la culture pour vous informer solennellement de notre opposition à toute décision ayant pour conséquence de désigner des élus du Front National pour représenter votre Assemblée dans les Conseils d' Administration des collèges de et lycées de votre Région.

Les plus hautes autorités de l'Etat viennent de rappeler le caractère xénophobe et raciste de cette formation politique. Les idées d'exclusion et de haine qu'elle défend sont l'exact contraire des valeurs de libertés, d'égalité et de solidarité qui sont un des fondements de l'acte éducatif en général et l'éducation citoyenne en particulier.

Il nous paraîtrait donc inconcevable et contraire aux valeurs républicaines que les porte-parole du Front National puissent trouver dans les établissements de formation de la jeunesse un terrain d'action pour la propagation de leurs idées.

Nous demandons à nos collègues de réagir fermement le cas échéant. Les conflits que la désignation d'élus du Front National ne manqueront pas de susciter ne pourraient que porter préjudice aux bonne relations nécessaires dans l'intérêt de la jeunesse entre votre Assemblée et les établissements scolaires concernés.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de mes remerciements.


POUR INFO : 14/17 avril 1998

C'est Bernard Pabot. Secrétaire Général du Snetaa qui fera, dans le cadre de la délégation FSU, l'intervention principale mais je voudrais avant de lui passer la parole réagir en quelques phrases à l'intervention du Ministre.

- Oui à travers cette table ronde, nous attendons du Ministère et du Ministre qu'ils affirment une volonté politique, forte, de valorisation des formations technologiques et professionnelles.

Il n'y a pas besoin. M. Le Recteur, de « redynamiser l'enseignement technique » - La dynamique est là : dans les établissements et leurs personnels, dans les choix, les attentes et les demandes des familles, dans l'engagement des jeunes - Il s'agit que l'institution se mette à la hauteur de ces dynamismes. Le Ministère de l'Education nationale doit assumer totalement sa responsabilité : il est, pour la masse des jeunes de ce pays, le ministère de la découverte des connaissances technologiques, le ministère de la découverte des réalités professionnelles, le ministère de la formation au métier.

Le Ministère de l'Education Nationale doit donc assumer sa responsabilité à la fois à travers la valorisation des acquis, le développement des potentiels (l'offre institutionnelle est en retard sur la demande) mais aussi les évolutions, les adaptations, les transformations dont nos enseignements ont besoin : nous sommes fiers des acquis mais nous ne nous satisfaisons pas du statu quo.

Mais j'assortis cette affirmation de la responsabilité centrale du MEN de deux remarques :

• La création d'un Secrétariat d'Etat à la Formation professionnelle ne va a priori dans le sens de l'éclairement, de la lisibilité et d'un renversement des responsabilités, même à identité de compétence avec les missions traditionnelles du Ministère du Travail tant sont fortes les effets de structure. Nous avons besoin de connaître au plus vite les compétences, les modes de relations, l'harmonisation des partenariats.

• Deuxième remarque : le Ministère de l'Education Nationale a engagé une réflexion sur le lycée, ses contenus, la notion de « culture commune », l'éventuelle évolution du baccalauréat... Nous avons besoin de savoir si les choix opérés iront bien dans le sens de la validation et de la valorisation des voies technologiques et professionnelles plutôt que de les remettre en cause.

- S'agissant du « partenariat », il est effectivement indispensable. Nous avons besoin que nos partenaires professionnels nous fassent part de l'appréciation qu'ils portent sur les qualifications produites par le système éducatif, des propositions qu'ils font pour les améliorer et améliorer leur prise en compte par les entreprises. C'est une question décisive parce qu'elle concerne l'insertion professionnelle des jeunes.

- Comme le Ministre, nous souhaitons que ce débat soit serein mais ne sommes pas inquiets : nous sommes habitués à débattre ensemble, par contre il faut que ce débat soit précis et sans formalisme.

Il faut que nous parlions des questions clés. La question de la certification des formateurs est une de celles-là.

Vous avez eu raison, Monsieur le Recteur de rappeler que les diplômes n'obéissaient pas à une logique maison fondée sur des critère internes. Les partenaires sociaux sont partie prenante de celle validation. C'est indispensable. Cela peut et doit être amélioré pas seulement par goût de l'échange partenarial mais pour répondre à la double finalité de la certification : à la fois fournir un repère social pour les jeunes, les familles, l'ensemble des acteurs sociaux et répondre aux besoins sectoriels des entreprises : validation sociale élargie et validation ponctuelle. Il faut certainement rappeler le monopole de la collection des grades et améliorer les contributions des partenaires sociaux qu'il implique. Mais attention à partir de la réflexion sur les compétences de ne pas en revenir à une vision étriquée de la relation formation-emploi, attention à ne pas prôner le retour à une définition unilatérale de la qualification, attention à ne pas banaliser le diplôme, en le vidant de sa légitimité sociale, en le contournant par l'approche compétence.

Nous aurons à débattre de cette question décisive. Nous souhaitons que le débat ait lieu ici et implique l'ensemble des acteurs concernés. Le « partenariat » se viderait de contenu s'il tendait à écouter un des quatre « partenaires » légitimes :

• les pouvoirs publics (État et Région) ;
• les représentants patronaux ;
• les organisations de salariés ;
• les enseignants et les formateurs, à travers les organisations syndicales représentatives qu'ils se sont donnés.

Le Ministère de l'Education Nationale doit aussi être l'un des lieux privilégiés d'un tel débat.
 

C'est sur ces différentes questions qu'interviendra la FSU et ses syndicats nationaux tout au long du travail aujourd'hui engagé avec le souci que les enseignements technologiques et professionnels continuent à porter et à améliorer une dynamique de réussite.


POUR INFO : 20 avril 1998 - Courrier adressé par la FSU au ministre de l'Intérieur

Monsieur le Ministre,

La FSU a eu très souvent l'occasion au cours des derniers mois de vous faire part de ses préoccupations relatives à la politique menée par le gouvernement en matière d'immigration.

C'est ainsi que nous avons condamné avec l'ensemble des organisations de défense des droits de l'Homme les reculs successifs du gouvernement par rapport à l'engagement initial d'abroger les lois Pasqua-Debré afin d'indiquer clairement la volonté de rompre avec une logique qui crée autour des immigrés et de leurs familles un climat permanent de suspicion, pour ne pas dire d'hostilité. Nos collègues, qui ont quotidiennement en charge les enfants issus de l'immigration dans leurs classes, peuvent témoigner des nombreuses conséquences négatives d'une telle situation.

Nous continuons à demander la mise en œuvre d'une démarche plus ouverte et plus généreuse, respectueuse des droits de l'Homme, notamment pour la régularisation de la situation des nombreuses personnes dont la législation précédente a fait des clandestins alors qu'elles vivent et sont intégrées en France depuis de nombreuses années.

Les lacunes et les insuffisances de la circulaire du 24 juin dernier apparaissent clairement aujourd'hui, renforcées par les conditions concrètes de son application dans de nombreuses Préfectures. Tous les témoignages confirment que la situation s'est même dégradée de ce point de vue au cours des dernières semaines.

Le report annoncé de l'échéance du 30 avril confirme d'ailleurs qu'il est nécessaire d'ouvrir de nouveaux délais et d'en profiter pour réexaminer dans un sens plus ouvert les critères de la circulaire d'origine. Nous demandons qu'une négociation s'ouvre à cette fin avec les associations concernées, dont les syndicats. Cette négociation devrait associer les diverses organisations que les sans-papiers se sont données.

Nous demandons de la même façon que pendant toute cette période, un moratoire sur les expulsions soit prononcé.
 
Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de nos remerciements.