Texte intégral
Paris-Normandie : Certains élus accusent le gouvernement de mettre en oeuvre une « recentralisation insidieuse ». Qu'en pensez-vous ?
Emile Zuccarelli : « Cette critique est révélatrice d'une certaine confusion qui règne actuellement dans les esprits. Le gouvernement auquel j'appartiens à tout de suite défini quatre priorités pour approfondir la décentralisation : préciser les compétences, revivifier la démocratie locale, renforcer les solidarités locales et améliorer la transparence de la gestion publique. La décentralisation n'est donc nullement remise en cause, bien au contraire. L'heure est à l'approfondissement, qui passe par un examen lucide de ce qui a été fait, des nombreuses réussites bien identifiées. Mais on constate aussi quelques dysfonctionnements, quelques carences auxquelles il faut remédier. Surtout, il y a nécessité de compléter un dispositif qui approche de l'âge de sa majorité qui coïncidera avec l'an 2000. Nous savons bien, en ces temps de bouleversements accélérés des technologies, des économies et des mentalités, que toute construction juridique ne saurait, au-delà d'une décennie, être dispensée de quelques retouches. C'est dans cet esprit que le gouvernement prépare un ensemble de réformes cohérentes contenues dans des textes complémentaires. Les élus n'ont aucune inquiétude à avoir. »
Paris-Normandie : Vous préparez un projet de loi sur l'intervention économique des collectivités. Quand sera-t-il présenté et quelle en est la teneur ?
Emile Zuccarelli : « J'espère le faire passer en Conseil des ministres avant la fin de l'année, et le faire voter à l'Assemblée en 1999. Je souhaite avant tout que les décideurs – de qui l'on exige une priorité absolue -, puissent opérer dans un cadre de sécurité juridique. Nous devons pour cela simplifier un système très compliqué, faire en sorte que les collectivités locales jouent à plein leur rôle en matière d'action économique, de création d'emplois. Il s'agit donc de leur trouver un dénominateur commun, d'inventer un « équivalent aide » qui évite à la fois les confusions et les chevauchements de compétences. Il s'agit aussi que les collectivités ne fassent pas d'interventions qui dépassent leur capacité. Cela dit, rien ne doit par exemple interdire à un département, à un groupement de communes ou à une commune d'agir si la région ne s'est pas engagée en amont. Je souhaite également apporter une clarification dans le fonctionnement des sociétés d'économie mixte (SEM), dont tout le monde dit qu'elles sont en même temps facteurs de risques et incontournables ».
Paris-Normandie : Comment s'exprime votre sensibilité radicale au sein de la majorité plurielle ?
Emile Zuccarelli : « Nous sommes une sensibilité très ancienne de la gauche, le plus ancien parti de France. Notre idéologie, c'est la République ; un mot presque disparu du discours politique il y a peu, et qui fait aujourd'hui un retour fulgurant. Notre différence, c'est que nous considérons qu'il s'agit toujours d'une idée révolutionnaire et d'un combat permanent. En tant que ministre de la fonction publique, je suis heureux d'occuper un poste essentiel pour défendre le service public, qui me semble constituer une des clés de la République ».