Interviews des candidats à l'élection présidentielle de 1995, dans "De Particulier à Particulier" d'avril 1995, sur leurs propositions en matière de logement notamment pour le logement social et l'accession à la propriété.

Prononcé le 1er avril 1995

Intervenant(s) : 
  • Édouard Balladur - RPR. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Jacques Chirac - RPR. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Lionel Jospin - Parti socialiste. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Robert Hue - Parti communiste français. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Arlette Laguiller - Lutte ouvrière. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Jean-Marie Le Pen - Front national. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Dominique Voynet - Les verts. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Philippe de Villiers - Mouvement pour la France. Candidat à l'election présidentielle de 1995 ;
  • Jean-François Hory - Parti radical. Candidat à l'election présidentielle de 1995

Média : De particulier à particulier - Le Magazine du logement

Texte intégral

Édouard Balladur

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés ?

Édouard Balladur : Je pense que le problème le plus urgent à résoudre est celui de l'inadéquation alarmante entre la demande de logements modestes et l'offre nouvelle du marché immobilier. Nous héritons d'une situation difficile qui résulte en grande partie de la politique menée depuis quinze ans : les mises en chantier de logements se sont effondrées, et le stock d'immeubles de bureaux s'est accumulé. Face à cette situation, j'ai décidé, dès le mois d'août 1993, un plan de relance du bâtiment. La France a retrouvé en 1994 le rythme de 300 000 mises en chantier ; il faut poursuivre dans cette voie.

Le second problème est la nécessaire adaptation du système des aides au logement. Si le financement du secteur locatif social par le Livret A a démontré dans le passé son efficacité, le dispositif existant en faveur du locatif intermédiaire ne donne pas encore tous les résultats escomptés. Or il existe un vrai besoin de logement des classes moyennes dans les grandes agglomérations, qui ne me paraît pas être aujourd'hui convenablement traité. Enfin, il faut encourager l'accession à la propriété. L'ensemble des charges fiscales qui pèsent sur le logement privé sont aujourd'hui trop lourdes. Elles sont un frein à l'accession à la propriété comme à la mobilité des Français.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Édouard Balladur : J'ai mis l'égalité des chances au centre de mon programme. L'égalité des chances, c'est avant tout un véritable droit au logement. Chaque Français doit disposer d'un logement. Chaque Français doit disposer d'un logement adapté à ses besoins.

Je souhaite donc, tout d'abord, poursuivre l'effort de construction et d'entretien des logements sociaux. A cette fin, je propose de mettre un terme aux méthodes d'ajustement budgétaire qui fixent chaque année un volume financier en fonction de contraintes externes. Je souhaite planifier sur cinq ans un programme de 100 000 constructions de logement HLM très sociaux, c'est-à-dire destinés aux ménages les plus défavorisés. Parallèlement, le programme de réhabilitation de 600 000 logements HLM, décidé conjointement avec l'union des HLM le 17 janvier 1995, sera mené à terme.

En second lieu, je crois essentiel que le gouvernement et la société française reconnaissent le rôle économique et social des bailleurs privés. Des décisions significatives ont déjà été prises dans ce sens : le relèvement de 8 à 10 % de la déduction forfaitaire, la déduction des frais d'assurances pour impayés de loyer, et l'imputation, sous un plafond de 70 000 F, du déficit foncier sur le revenu imposable. Je souhaite que le futur gouvernement continue d'avancer dans cette voie.

Enfin, je veux relancer l'accession à la propriété. Dès mon arrivée au gouvernement, j'ai pris des mesures pour favoriser l'accession sociale à la propriété 50 000 prêts PAP ont été prévus pour les années 1993, 1994 et 1995, contre un rythme inférieur de seulement 25 000 par an. Les résultats obtenus en matière de construction individuelle ont couronné cette politique.

Je vais aller plus loin. Je propose d'instituer une prime de 60 000 F, réservée à chaque Français ou à chaque ménage accédant pour la première fois à la propriété. Cela devrait permettre à beaucoup de réunir l'apport personnel minimal. Associée aux plan d'épargne-logement, dont je ne souhaite pas revoir la fiscalité, cette aide renforcer la solvabilité des emprunteurs et consolidera leur rapport personnel.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élu ?

Édouard Balladur : Je prendrai deux mesures immédiates. Tout d'abord, la prime de 60 000 F que je viens d'évoquer ci-dessus sera mise en place dès le mois de juin.

Parallèlement, j'engagerai immédiatement la réforme des droits de mutation à titre onéreux. Je constate en effet que la fiscalité locale sur l'immobilier est devenue beaucoup trop lourde. Elle pèse sur la rentabilité locative, entrave la mobilité des Français et réduit la fluidité du marché. Les droits sont actuellement de l'ordre de 8 % ; je suis partisan de les abaisser immédiatement à 5 %. Le futur gouvernement devra s'engager dans cette voie après concertation avec les collectivités territoriales sur la compensation des pertes de recettes correspondantes. Ce sont là deux mesures de justice sociale et d'efficacité économique.

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Édouard Balladur : Le premier grand chantier, c'est celui du logement social sur l'ensemble du territoire. J'emploie les mots grand chantier à dessein, car il s'agit d'une priorité nationale forte, même si les réalisations ne sont pas spectaculaires.

Il existe en outre de grands chantiers d'aménagement. Je tiens beaucoup à celui d'Euroméditerranée à Marseille. Il peut y en avoir d'autres, en fonction notamment des projets de régions.


Jacques Chirac

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés ?

Jacques Chirac : Que les secteurs de l'immobilier et du logement rencontrent de grandes difficultés, cela ne fait aucun doute. La situation actuelle est manifestement préoccupante. Un grand nombre de nos concitoyens ne parviennent plus à se loger dans des conditions décentes ; plus grave encore, un nombre croissant de Français ne disposent même plus d'un toit. J'ajouterai enfin l'insécurité des bailleurs devant les risques d'impayés. Notre système d'aide au logement est dépassé, c'est une évidence. Il a été conçu dans une période de croissance soutenue, d'inflation forte et de chômage faible. Il n'a pas su intégrer l'évolution de la situation économique et sociale intervenue depuis le milieu des années 1970. Il n'est plus adapté et doit donc être réformé.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Jacques Chirac : Je voudrais tout d'abord préciser que le logement est une des préoccupations majeures des Français ; il constitue un facteur essentiel d'épanouissement individuel et de cohésion sociale. C'est pourquoi le logement figure au centre de mes priorités et j'ai très clairement pour ambition de relancer l'accession à la propriété, de restaurer la confiance des investisseurs et de favoriser la mobilité dans le parc locatif.

Pour relancer l'accession à la propriété, il faut redonner confiance aux ménages, dont je constate qu'un grand nombre souhaitent devenir propriétaire. C'est dans ce but que je propose la création d'un nouveau type de prêt, variable dans le neuf comme dans l'ancien, accessible aux ménages à revenus moyens. Ce nouveau « prêt sécurisé » bénéficiera d'une garantie financière pour faire face aux difficulté de remboursement, notamment en cas de chômage. Pour ce qui est de l'accession dans le neuf, ce prêt pourra être accompagné, pour les ménages à revenus faibles, d'une aide à l'apport personnel, sous forme d'un prêt à taux d'intérêt nul.

Il faudrait parallèlement redonner confiance aux bailleurs. Il est anormal que l'investissement dans le logement ne bénéfice pas du même traitement économique que les autres secteurs, et que les charges qu'il entraîne, je pense notamment à l'amortissement, ne soient pas bien prises en compte fiscalement. Sans doute faudra-t-il envisager à terme la création d'un régime professionnel du bailleur. Mais sans attendre, il est indispensable de relever sensiblement le taux de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers.

Parallèlement, nous devons aborder le délicat problème des impayés. La collectivité publique a mis en place des moyens d'accompagnement des locataires en difficulté. Je constate que ces moyens sont mal utilisés et que les propriétaires se retrouvent souvent en situation de victimes.

Mon objectif est de faire en sorte que les engagements contractuels entre bailleurs et locataires soient clairement définis, et suffisamment garantis par l'État. Alors, les portes du parc privé pourront à nouveau s'ouvrir pour les locataires, y compris pour ceux qui ne disposent que de faibles ressources.

Enfin, nous devons poser le problème de la fiscalité locale. Les impôts locaux progressent plus vite que les loyers. Les droits de mutation sont trop élevés et constituent un frein à la mobilité et un handicap pour notre économie. Il faudra donc les alléger.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élu ?

Jacques Chirac : Comme vous le voyez, c'est bien d'une réforme d'ensemble dont il s'agit. L'urgence nous fait trop souvent oublier que la vitalité du secteur du logement dépend de l'équilibre général du marché.

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Jacques Chirac : Telle n'est pas aujourd'hui ma priorité. L'objectif que j'assignerai au gouvernement, si je suis élu président de la République, sera de faire en sorte que chaque Français puisse disposer d'un toit décent, et que le marché du logement retrouve son équilibre.

Cela ne signifie pas, pour autant, qu'aucun grand projet d'infrastructure ne sera entrepris.

Bien au contraire, ils sont d'autant plus nécessaires qu'ils sont générateurs d'activité, créateurs d'emplois, et s'inscrivent dans la logique d'aménagement du territoire. Pour peu, naturellement, qu'ils correspondent à des critères d'utilité publique.


Lionel Jospin

Le Magazine : Selon vous quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés ?

Lionel Jospin : Les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés à plusieurs problèmes.

Le premier concerne le niveau très élevé atteint par les taux d'intérêts réels aujourd'hui. Les distorsions qui existent entre les rémunérations des placements financiers et des placements immobiliers ne sont pas favorables à ces derniers.

En outre, le développement de situations de plus grande précarité de l'emploi dissuade nombre de décisions d'investissement. Tous ces éléments contribuent à raréfier l'offre de logements locatifs sur le marché.

Enfin dans le domaine des financements publics, la politique en dents de scie, que traduit la forte diminution des crédits budgétaires au logement social dans la loi de Finances 1995, contribue à des à-coups qui contredisent la nécessité d'efforts élevés et constants pour résoudre dans notre pays la question du logement.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Lionel Jospin : Je suis résolu à réaliser le droit au logement pour tous. J'ai affirmé la nécessité de consacrer des moyens budgétaires conséquents au logement.

Dans mon esprit, il faut assurer un toit pour chacun en offrant à tous une possibilité de logement choisi.

Cela nécessite une offre diversifiée de logements comprenant du locatif privé, du locatif HLM, de l'accession sociale à la propriété, et cela dans la neuf et dans l'ancien, collectif ou individuel, de manière à ce que le plus grand nombre trouve ce qui correspond à ses besoins.

Les propositions qui sont les miennes pour l'emploi et pour la politique salariale sont évidemment fondamentales, tant en matière de développement du logement que de reconstruction des banlieues.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élu ?

Lionel Jospin : Chronologiquement, la première mesure que je prendrai est celle que j'ai annoncée et qui consister à rassembler les compétences relatives au logement, à l'aménagement du territoire, à l'environnement et aux transports dans un même ministère fort, disposant de l'ensemble des moyens de ces secteurs, et qui s'appuiera sur une volonté politique déterminée pour agir efficacement. Trop de décisions ou de bonnes idées se perdent en effet dans l'opposition stérile de logiques contradictoires.

On surmontera cette situation par un regroupement de tous les moyens au service d'une ferme volonté d'efficacité maximale.

Je demanderai au gouvernement de prendre sans retard un train de mesures pour le logement, assorti de moyens budgétaires accrus.

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Lionel Jospin : J'ai proposé quatre grands programmes qui auront pour effet à la fois de développer l'emploi et d'améliorer les conditions de vie des Français.

Celui que je peux citer pour m'inscrire dans les préoccupations de votre publication est bien évidemment celui de la reconstruction des banlieues. J'ai sur ce point indiqué combien la ségrégation urbaine, contraire à nos valeurs, est dangereuse pour la démocratie en même temps qu'elle affaiblit notre économie.

Il faut donc appliquer simultanément les principes de solidarité d'urbanisme durable, de mixité sociale et de qualité architecturale qui sont ceux de la loi d'Orientation de la Ville et j'entends demander au gouvernement que je constituerai d'engager sur quelques dizaines de quartiers prioritaires un vaste programme comprenant, outre un renforcement des services publics et privés offerts à la population, des opérations massives de restructuration. Ce programme bénéficiera d'une importante aide financière de l'État et de la mobilisation de tous les services impliqués.


Jean-François Hory 

La relance de l'habitat et de l'emploi.

« Cette relance est une priorité pour Radical. Le rythme de construction annuel ne représente pas 75 % des besoins des Français et le retard s'accentue depuis vingt ans. Que ce soit pour le logement individuel ou collectif, un logement nouveau représente une embauche directe dans l'entreprise de construction et une embauche dans les entreprises de matériaux et les prestataires de services. 100 000 logements supplémentaires représentent 200 000 emplois nouveaux.

D'autre part, les travaux d'entretien et d'amélioration de l'habitat existant représentent à eux seuls un chiffre d'affaires égal à l'ensemble des constructions neuves de toute nature.

Ce sont les deux secteurs prioritaires de créations d'emplois qui concernent pour la plus grande part la main-d'oeuvre et la fabrication nationale et locale. Ce sont les secteurs à favoriser en priorité.

L'environnement

« La prise en compte des contraintes de l'environnent est une autre priorité de Radical, pour chaque habitant, non par un environnement technocratique édicté par des règlements, mais d'un environnement quotidien : l'espace urbain, les conditions de déplacement, la propreté et la sécurité des lieux publics.

Radical refuse de confier à une réglementation tatillonne l'hypothétique succès d'une vraie politique écologique.

C'est la responsabilité de chacun qui est concernée. C'est la solidarité locale qui est le plus sûr garant de cette politique.

Radical demande une responsabilité accrue des professionnels et des élus concernés – constructeurs, créateurs, gestionnaires, associations – et une vaste politique de déréglementation. La présomption de citoyenneté doit favoriser les initiatives individuelles. Dans ce sens, les procédures de lotissement qui ont fait leurs preuves depuis trois siècles doivent être défavorisées, à condition que le lotisseur et l'association syndicale remplissent pleinement leurs obligations. »

La déréglementation

« Depuis la fin des années 1960, les réglementations de toute nature frappant la construction ont explosé. Le coût direct sur la construction est aujourd'hui nettement plus important que ne l'estime la Fédération nationale des promoteurs-constructeurs. La décentralisation politique s'est malheureusement accompagnée d'un renforcement de la centralisation technique, sans compter la réglementation européenne.

Radical demande un arrêt de cette politique, et le report des crédits correspondants aux collectivités et associations locales, pour favoriser initiatives et responsabilités. En ce sens, la diminution des interventions de l'administration dans la mise au point des règles de lotissement est éminemment souhaitable, si les professionnels privés peuvent prendre la responsabilité de leurs actions, capacité dont je ne doute pas. »

Le financement

« Hormis pour une toute petite minorité dont Radical n'a pas à défendre les intérêts, l'acquéreur d'un logement doit recourir au crédit.

Radical donne une priorité absolue à la mobilité économique et aux réformes. Si la France veut relancer son économie à travers la compétition moderne, il faut en priorité faire disparaître les blocages persistants de notre société. Le logement est le secteur qui reste frappé des procédures administratives et financières les plus rétrogrades qui soient. Radical demande que le logement social et intermédiaire soit aussi bien individuel que collectif, et que ses acteurs soient aussi bien publics que privés ! Radical demande que le financement du logement soit entièrement repensé en attachant tout prêt à l'objet acheté et non à la personne de l'emprunteur. A titre de comparaison, si le secteur de l'automobile demandait à tout acheteur de voiture le dixième de ce qui est demandé à un acquéreur de maison individuelle, l'industrie automobile s'arrêtait définitivement.

Tout prêt immobilier doit être cessible dans les mêmes conditions et en même temps que le bien immobilier.

Des mécanismes d'aides à la personne de nature publique prendraient en charge l'aide sociale que la solidarité impose.

Il est inadmissible que l'acquisition d'un logement familial principal ou secondaire contraigne une famille à rester de quinze à vingt-cinq ans au même endroit si les nécessités économiques ou familiales imposent un déménagement.

La mobilité économique et sociale impose l'existence d'un parc immobilier de logements e accession, spécialement individuel, permettant une mobilité et des transactions facilitées.

Dans le même sens, les taux des droits de mutation doivent et être comparables aux taux européens. La fluidité des transactions immobilières. »

Le foncier

« Radical demande une remise en cause du mécanisme inflationniste dans lequel la France s'est enfoncée depuis plusieurs décennies et qui bloque le redémarrage de l'immobilier.

Radical demande une modification fondamentale du Code civil pour permettre l'existence d'une double propriété : le sol et le bâti.

Afin de permettre l'instauration d'un double marché hypothécaire et le financement simplifié et moderne de l'immobilier.

Radical demande dans le même esprit que l'impôt foncier devienne déclaratif et permette au propriétaire de fixer librement la base de son imposition comme il le fait dans un contrat d'assurance. La responsabilité du citoyen doit se substituer à la technocratie du règlement.

Enfin, Radical demande une forte relance de la titularisation de la pierre par la création d'un vaste marché de biens immobiliers. Le rendement non spéculatif y est souvent plus faible que dans les marchés financiers des obligations ou des titres mobiliers.

Les mêmes avantages fiscaux que ceux dont bénéficie le marché de l'or doivent profiter à l'immobilier et favoriser la relance de la construction. Simplicité de transaction, avantages dans la transmission patrimoniale et garantie de biens réels sont des qualités que le secteur immobilier – spécialement celui de la maison individuelle – offre aux investisseurs privés. Le financement public en sera d'autant plus allégé. »


Robert Hue 

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement confrontés ?

Robert Hue : D'emblée je citerai la situation de la région Ile-de-France révélatrice du malaise qui règne dans les domaines du logement et de l'immobilier. Cette région compte 311 000 logements vides et 6 millions de mètres carrés de bureaux inoccupés alors que dans le même temps on recense 330 000 demandeurs prioritaires de logement social.

La spéculation financière et immobilière, que le désengagement financier de l'État dans le domaine du logement a favorisé, a entraîné un immense gâchis financier, une grave pénurie de logements sociaux locatifs, une hausse très importante du montant des loyers, ainsi que la quasi-impossibilité pour la majorité des gens d'accéder à la propriété du domicile familiale. Pléthore de locaux à usage d'entreprise et insuffisance de logements à loyers accessibles, voilà deux problèmes majeurs qui révèlent le dysfonctionnement du marché immobilier.

Le Magazine » : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Robert Hue : Le gouvernement, l'Assemblée nationale doivent adopter de vastes mesures législatives et réglementaires s'attaquant de front aux problèmes et proposant de vraies solutions. Je propose une loi programme de construction de 300 000 logements par an, dont 150 000 locatifs et 150 000 en accession la propriété. Cela permettrait de relancer, en outre, de façon dynamique et concrète, l'activité et l'emploi dans le BTP.

Ce programme de construction doit être financé par l'Etat et par un prélèvement sur le produit de la spéculation. Dans un premier temps, on pourrait consacrer à la construction la totalité du 1 % des entreprises et porter cette participation à 2 %.

Il est urgent de décider du blocage des loyers tout en prenant des dispositions d'ordre financier et fiscal en faveur des organismes HLM et des SEM :

- diminution du taux d'emprunt et allongement de leur durée de remboursement. Aujourd'hui 52 % des ressources des offices sont consacrées aux charges financières. Construire et réhabiliter les logements sociaux ne doit pas être source de profits : c'est une responsabilité nationale ;
- suppression des différentes taxes (taxes sur les salaires, TVA, taxe foncière) qui pèsent lourd sur les salaires.
- Suppression du surloyer, relèvement du plafond de ressources donnant droit au logement social.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élu ?

Robert Hue : Interdiction des expulsions, saisies, coupures d'eau, de gaz et d'électricité pour les familles en difficulté. Il faut bannir ces pratiques inhumaines et d'un autre âge.

Le Magazine : Coté « grands chantiers » quels sont vos projets ?

Robert Hue : Construire 300 000 logements par an jusqu'à satisfaction de la demande n'est-ce pas une des « grands chantiers » prioritaires en ce début de XXIè siècle ?


Arlette Laguiller

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés ?

Arlette Laguiller : Le problème auquel sont confrontés l'immobilier et le logement et dont découlent tous les autres résident dans le fait qu'ils sont commandés par la loi du profit. Toutes les constructions qu'il s'agisse d'équipements scolaires, culturels et sportifs, de transports, d'hôpitaux ou de logement sont conçues et réalisées en termes de marché. Il n'est pas juste que particulièrement dans ces secteurs vitaux pour la population, ce soit l'argent qui commande tout. Cela se traduit d'ailleurs dans le fait que l'immobilier et le logement sont des secteurs dans lesquels la spéculation fait rage, une poignée de promoteurs s'enrichissant de façon scandaleuse avec l'aide de l'Etat tandis que le nombre de mal-logés et de sans-abri s'accroît.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Arlette Laguiller : Je ne sais pas s'il s'agit de stimuler ces deux secteurs mais je suis sûre qu'il faudrait aller dans le sens d'un contrôle plus grand de la part de la population sur ce qui est fait en matière d'immobilier et de logement.

Aujourd'hui la construction de logements sociaux, destinés aux familles populaires est freinée par l'État qui manquerait, paraît-il, de moyens financiers qui manquent, mais la volonté politique de la part de l'État de consacrer de l'argent des impôts à construire pour loger les familles, sans préoccupations de profit à réaliser.

Pourtant en ouvrant des chantiers, une telle politique permettrait de créer des emplois, dans le bâtiment, et les travaux publics, emplois utiles pour tous.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élue ?

Arlette Laguiller : La première mesure pour résoudre rapidement le problème du logement serait de recenser les logements vides d'une part et, de l'autre, les besoins. Il faudrait également procéder à l'inventaire des cinq millions de mètres carrés de bureaux vides sur l'ensemble de la France afin de se rendre compte si l'on peut rapidement et sans difficultés majeures les transformer en logements. Tel est certainement le cas pour quelques millions de mètres carrés que l'on pourrait mettre immédiatement à la disposition des familles mal-logées ou sans-logis du tout. Cela bien évidemment sans qu'il soit question de subventionner les propriétaires pour cette transformation des bureaux en logements comme se propose de le faire le gouvernement actuel. Cette politique ne peut être mise en oeuvre sans la participation active de la population.

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Arlette Laguiller : Il faut déterminer avec la population et les usagers la matière de logement et d'urbanisme. Il est évident que la construction de logements doit s'accompagner de celle des moyens de communication adéquats, et en tout premier lieu de transports en commun. Il est aberrant de construire de grands (ou moins grands d'ailleurs) ensembles immobiliers à la périphérie des grandes villes sans dans le même temps concevoir et réaliser des lignes d'autobus, d'autocar, de tramway, voire de chemin de fer qui permettent à la population de se déplacer aisément et à moindre coût, voire gratuitement, 24 heures sur 24. Aujourd'hui les grands chantiers du BTP, comme par exemple le Grand Stade, ne sont pas définis pour répondre à de réels et d'urgents besoins populaires, mais représentent des marchés considérables, qui se chiffrent en milliards de profits pour les magnats du béton. Cela explique la foire d'empoigne à laquelle a donné lieu le choix du site de sa construction en périphérie parisienne.


Jean-Marie Le Pen

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs e l'immobilier et du logement sont confronté ?

Jean-Marie Le Pen : Le logement est devenu en Franc un bien rare et cher, rendant impossible pour beaucoup de familles françaises l'accession à la propriété, surtout dans les zones des spéculation (Paris et sa région) et les zones touristiques.

De nombreux Français sont contraints d'habiter dans des conditions précaires, voire insalubres, ou de quitter leur logement devenu trop cher. Ce constat alarmant, particulièrement sensible à Paris (merci M. Chirac !), est la conséquence d'une législation irresponsable (loi du socialiste Quillot et du libéral Méhaignerie) et de l'insuffisante construction de logements, en raison d'un urbanisme bureaucratique qui a permis toutes les spéculations. Cette situation résulte aussi du dévoiement de la pratique du droit de préemption urbain au profit des communes. Par ce biais, les maires deviennent de véritables promoteurs-constructeurs et certains se comportent comme de petits potentats uniquement soucieux de préserver leur clientèle politique.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez, mener pour simuler ces deux secteurs ?

Jean-Marie Le Pen : J'entends développer la propriété du logement pour tous, et plus particulièrement pour les Français et les Européens les plus modestes. Aujourd'hui, la proportion de propriétaires est de l'ordre de 33 %, y compris les résidences secondaires. Ce pourcentage doit connaître une augmentation considérable, assurant non seulement un enjeu économique et social mais aussi l'une des dimensions naturelles de la liberté.

Mes principaux axes s'articuleront autour de trois grandes orientations :

- la priorité d'accès aux logements HLM pour les Français. Soit par la vente massive de logements soit, pour les Français défavorisés, par l'attribution gratuite de logements HLM ;
- l'accession à la propriété de son logement, le prêt familial au logement, avec remise partielle de la dette à chaque naissance ;
- la distribution des actions des entreprises (offices HLM) à privatiser.

Ces mesures iront de pair avec des incitations fiscales, comme par exemple la révision du taux de TVA abaissé aux taux normal européen (14 à 15 %), et l'exonération de l'impôt foncier durant quinze ans pour les logements neufs.

Bien d'autres mesures peuvent être envisagées, car là où il y a une volonté, il y a un chemin.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élu ?

Jean-Marie Le Pen : Ma première mesure sera la création du prêt familiale au logement. Pour que le logement ne soit plus un frein à l'agrandissement des familles, cette formule offrirait un différé d'amortissement de l'emprunt automatiquement accordé à chaque naissance, l'État prenant en charge les intérêts au cours de cette période

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Jean-Marie Le Pen : Je n'envisage pas à proprement parler de gros ou de grands chantiers. Je considère que les différents points évoqués ci-dessus constituent en eux-mêmes une grande et belle politique pour la France d'abord.


Dominique Voynet 

Dominique Voynet : Pour les Verts, le problème n°1 est la situation dramatique des sans-logis et des mal-logés : le droit au logement n'est pas assuré dans notre pays.

Les dysfonctionnements de l'immobilier et du logement sont multiples : le nombre trop élevé de logements inutilisés dont un certain nombre en bon état (d'autres facilement réhabilitables) et bien situés, la disparition du parc privé locatif « social de fait », l'aggravation de la ségrégation urbaine par le prix du foncier et le manque de volonté politique, le manque de fluidité entre le parc locatif social et l'accession à la propriété, la complexité et l'inefficacité de la fiscalité (prélèvements et déductions), l'énorme gâchis urbain et financier des constructions inconsidérées d'immeubles de bureaux…

Le magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Dominique Voynet : C'est le système de production et de gestion de l'habitat qui doit être révisé en prenant en compte sa complexité et ses effets de chaîne. Tout un ensemble de mesures devra être pris notamment :

- pour exploiter l'immense gisement des logements vacants et favoriser leur location aux plus démunis ;
- améliorer l'efficacité du « 1% logement » ;
- réduire la taxe sur les mutations ;
- donner un nouvel élan à la réhabilitation et à l'entretien du parc existant ;
- réduire l'impact du foncier et maîtriser les coûts de la construction qui varient actuellement du simple au double à prestations comparables ;
- mettre en oeuvre la conception dite « du coût global » (investissement et exploitation) qui permettra de maîtrise les consommations énergétiques et de développer les énergies nouvelles (architecture bioclimatique, solaire, nouvelles chaudières au bois)… Ces mesures cohérentes avec la démarche des Verts qui marient environnement et solidarité, s'inscrivent dans la recherche du développement durable et du droit au logement et à la ville pour tous.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous prendrez si vous êtes élue ?

Dominique Voynet : La mesure la plus efficace et la plus économique à court terme est de travailler à la mise en location des logements vacants. Les élus Verts du Conseil régional d'Ile-de-France viennent de faire un premier pas dans ce sens avec la mise en place d'une mission « logements vacants » et ‘un dispositif d'aide aux petits propriétaires et aux associations qui garantissent le paiement des loyers.

Le Magazine : Côté « grands chantiers » quels sont vos projets ?

Dominique Voynet : Chacun s'accorde à constater que le logement est très créateur d'emplois (et d'emplois qualifiés) … Plus en tout cas que les autoroutes…

Mon grand « chantier » sera donc de multiplier les chantiers de réhabilitation des immeubles existants et de construire des logements à loyers accessibles en petites unités, bien situés, en premier lieu au coeur des villes.


Philippe de Villiers

Le Magazine : Selon vous, quels sont les grands problèmes auxquels les secteurs de l'immobilier et du logement sont confrontés ?

Philippe de Villiers : Les grands problèmes de l'immobilier et du logement sont la pénurie d'offres de logements, l'insolvabilité d'un fort pourcentage de locataires, la surpopulation de certaines agglomérations, une législation pénalisant le droit de la propriété, le gonflement artificiel de la demande de logements sociaux et un interventionnisme étatique qui déséquilibre le marché plus qu'il ne le corrige. On observe en fait une quadruple crise : crise de l'accession à la propriété, crise du logement locatif privé, crise du logement social et crise des modes de financement et des aides publiques. Cette crise immobilière entraîne les propriétaires à retirer des logements du marché en attendant des jours meilleurs… le total des aides publiques s'élève aujourd'hui à 150 milliards par an, somme qui correspond au coût total des 300 000 logements construits en France chaque année. Mais la construction aidée se traduit en réalité par d'énormes gaspillages et une corruption considérable.

La situation du marché locatif est aggravée par le refus d'appliquer la loi, les propriétaires sont de plus en plus démunis contre les mauvais payeurs. A cela s'ajoutent les contraintes de la loi Quilliot en faveur des locataires et une lourde fiscalité pour les propriétaires, notamment en matière de transactions. Le parc locatif privé disparaît progressivement : selon l'Insee, depuis dix ans, 70 000 logements locatifs privé disparaissent chaque année ! Les HLM ne remplissent plus leur mission sociale : leur objectif est de loger les ménages les plus démunis, dont les revenus sont inférieurs à un plafond de ressources. Or, 28 % des ménages logés en HLM dépassent ce plafond… Quant à l'accession à la propriété, elle subit une crise qui résulte de taux d'intérêt trop élevés, de la menace du chômage, de la réticence à prendre des engagements de longue durée, et de la désolvabilisation de la clientèle.

Le Magazine : Quels sont les grands axes de la politique que vous comptez mener pour stimuler ces deux secteurs ?

Philippe de Villiers : Simplifier la législation ; rétablir un marché unique du logement, où puissent s'échanger le neuf et l'ancien, le locatif et l'accession à la propriété ; lutter contre la corruption, les gaspillages et les rentes de la situation ; rétablir pleinement le droit à la propriété.

Plus précisément, il faut unifier les aides de l'État avec l'attention unique d'une prime unique de logement, vendre les logements HLM grâce à des prêts gratuits remboursables sur 30 ans ; privilégier les familles à partir du deuxième enfant ; accorder aux maires le droit exclusif d'attribution des logements sous la tutelle du préfet et le contrôle de la Chambre régionale des comptes ; privilégier les aides à la réhabilitation de logements pour les occupants, au besoin par recours à l'entreprise.

La réforme des aides de l'État doit se traduire par une aide unique prenant en compte les ressources réelles et révisables des ménages, en fonction de leur évolution et de la composition de la cellule familiale. L'instauration de prêts à long terme à taux réduit et à capital indexé sur le pouvoir d'achat de la monnaie donnerait la possibilité d'emprunter plus que dans les conditions actuelles, sans accroissement de l'annuité initiale. Les seuls prêts bonifiés à la charge de l'Etat porteront sur les prêts aux familles de trois enfants.

Le Magazine : Toujours pour ces deux secteurs, quelle sera la première mesure que vous rendrez si vous êtes élu ?

Philippe de Villiers : Créer un marché unique du logement, à la fois neuf, de l'ancien et de la réhabilitation disposant des mêmes facilités de crédit.

Le Magazine : Côté « grands chantiers », quels sont vos projets ?

Philippe de Villiers : Lancer un grand plan de réhabilitation des logements anciens. Accroître l'importance du parc locatif privé. Concentrer les aides sur le secteur social, qui doit s'adresser uniquement à ceux qui en ont besoin. Privatiser partiellement le secteur locatif social des HLM. Mais d'une façon générale, le redémarrage de la construction sur des bases saines est vital pour notre économie. Egalement pour la solution des problèmes sociaux. C'est un secteur à stimuler, qui doit concourir aux créations d'emploi. Cette relance de la construction et de l'immobilier est largement liée au développement de l'investissement privé.

Le coup de fouet nécessaire sera obtenu très rapidement par la révolution fiscale que je propose. Le désengagement de l'Etat qui en résultera conduira à la compression des dépenses publiques, à la réduction de la pression fiscale. Les initiatives seront alors encouragées, avec pour conséquences la relance de l'ensemble de l'économie est un pas important pour gagner la bataille de l'emploi.