Interview de Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, dans "La Vie" le 15 octobre 1998, sur le PACS et la signification du mariage.

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Média : CFTC La Vie à défendre - La Vie

Texte intégral

Q - Comme chrétienne, comme citoyenne, quel sens donnez-vous personnellement au mariage ?

Le mariage est un projet de vie durable, un engagement de fidélité. Il concerne non seulement le couple, mais aussi la famille, l'éducation des enfants. Quelle que soit sa forme civile ou religieuse, il est fondé sur le respect de l'autre, sur le choix d'une vie commune qui permettent l'épanouissement de chacun. Si je peux faire de la politique, c'est parce que mon mari et mes enfants – j'ai deux filles de vingt-deux et seize ans – l'ont accepté. Aujourd'hui, contrairement à ce que j'ai vécu personnellement – je me suis mariée à dix-neuf ans –, le mariage n'est que très rarement le début de la vie d'un couple.

Q - A-t-il, selon vous, perdu de son sens ? Et pour quelles raisons ?

Il est moins perçu comme une valeur sociale. Et il a perdu une partie de sa signification avec l'effondrement de la pratique religieuse. De plus, les hésitations des jeunes à se marier tiennent aux nombreux échecs qu'ils voient autour d'eux. Le mariage est aujourd'hui lié à une stabilité sociale et professionnelle. Il marque une nouvelle étape dans la vie commune. Un nombre non négligeable de personnes se marient également pour des raisons pratiques et fiscales… C'est pourquoi il faut penser à d'autres formes de reconnaissance de la vie commune, comme le Pacs. C'est un contrat de solidarité, fondé sur des obligations réciproques et volontaires entre deux personnes, de tout âge, sexe ou situation, qui ne se substitue pas au mariage. Celui-ci peut alors retrouver tout son sens, parce qu'il est l'expression d'un engagement fort, devant le maire et la société. On ne se marierait plus alors pour de simples raisons administratives.

Q - La société doit-elle reconnaître toutes les associations affectives qui relèvent du domaine privé ?

Non, mais elle doit contribuer au bien-être et à l'épanouissement de ses membres en apportant des réponses aux problèmes qu'ils se posent et en favorisant les situations de solidarité. Comme maire, j'ai été confrontée à des questions douloureuses. Comment répondre à ces couples en union libre – un sur cinq en France – qui cherchent un cadre juridique à l'entraide qu'ils se donnent ? Comment répondre à la détresse des homosexuels, dont le compagnon est mort du sida, et qui peuvent être mis à la porte de chez eux ? Le Pacs, qui ne fait pas évoluer le statut du couple, prend en compte la société telle qu'elle est, avec les nouvelles formes d'une vie plus mobile, plus éclatée.

Q - Quelle est votre définition du couple ?

Question difficile… Ce sont deux personnes qui décident de partager la même vie et qui ont un lien affectif et matériel… Ce débat sur les formes nouvelles de vie commune est un débat de fond. On n'en a pas fait complètement le tour, ni mesuré toutes les conséquences. Il faudrait pouvoir mener cette discussion de manière dépassionnée.