Extraits du rapport présenté par M. Didier Niel, secrétaire de la CGT, lors de la réunion de la Commission exécutive de la CGT les 4 et 5 mai 1995, publiés dans "Le Peuple" le 18, avec un document de réflexion sur les structures et l'organisation de la CGT, en préparation du 45ème congrès, et une déclaration du bureau confédéral sur l'élection présidentielle 1995.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion de la Commission exécutive de la CGT à Montreuil les 4 et 5 mai 1995

Média : Le Peuple

Texte intégral

Le Peuple : 18 mai 1995

Élection présidentielle 1995

Déclaration du bureau confédéral

Un nouveau président de la République vient d'être élu. La période électorale qui vient de se dérouler a confirmé la gravité de la crise multiforme de la société française. Le fort mécontentement qui s'est exprimé et qui s'exprime dans les luttes sociales traduit une grande inquiétude sur l'avenir.

Cette caractéristique essentielle se trouve dans les résultats qui viennent confirmer le rejet notamment exprimé lors du premier tour des politiques d'austérité mises en œuvre par les gouvernements qui se sont succédé ces dernières années. Avec Jacques Chirac élu président de la République et le gouvernement de droite qu'il entend constituer, tout laisse à craindre que les orientations et choix politiques économiques et sociaux qui vont prévaloir iront à l'encontre des intérêts, aspirations et revendications qu'expriment les salariés.

La CGT entend renforcer ses initiatives pour faire refluer les idées racistes et xénophobes portées par les forces d'extrême droite.

En tant qu'organisation syndicale, la CGT considère qu'il est plus que jamais nécessaire que les salariés se rassemblent, débattent, définissent le contenu de leurs revendications en matière d'emploi, pouvoir d'achat, protection sociale, droits des salariés et libertés dans l'entreprise et les lieux de vie, en décidant des formes d'actions rassembleuses et unitaires pour construire le rapport de forces au niveau nécessaire pour imposer au patronat et au gouvernement les réponses à leurs besoins.

Pour porter ce vaste mouvement, la CGT appelle l'ensemble de ses organisations à impulser cette démarche revendicative tout en menant le vaste débat public à l'échelle nationale sur la nécessité d'un syndicalisme de lutte, fort et rassemblé.

CE des 4 et 5 mai 1995


Le bilan des luttes et des succès ne fait que s'agrandir

Extraits du rapport présenté par Didier Niel secrétaire de la CGT au nom du bureau confédéral

« Les manifestations syndicales unitaires ont été nombreuses pour célébrer le 1er Mai », titrait le Monde du lendemain, avec comme sous-titre « À Paris, la CGT a réussi à occuper le terrain social ».

Il y a bien longtemps qu'un tel constat a été fait par un journal qui n'a pas l'habitude de nous faire des cadeaux. C'est vrai qu'elle avait de la gueule la manif parisienne. Haute en couleurs, d'un nouveau style, elle témoignait dans une bonne tonalité que les choses sont en train de bouger. D'un contenu revendicatif important, elle a rassemblé de nombreux salariés sous les banderoles de la CGT. C'est incontestablement une progression par rapport aux années précédentes. L'appel en commun et la présence effective d'une quarantaine d'organisations et d'associations françaises et immigrées, porteuses de leurs propres revendications, lui donnait une dimension de solidarité et de fraternité. (…)

Dans de nombreuses unions départementales des rassemblements unitaires à géométrie variable ont rassemblé un nombre plus important de salariés qu'en 1994. Partout les luttes en cours ont été un élément dynamisant de ce 1er Mai et lui ont donné une autre dimension. Elles ont aidé au rassemblement unitaire de manifestations. Dans certains endroits, comme à Lyon, la CFDT a décidé, au dernier moment, d'appeler à la manifestation.

Notons aussi que ce 1er Mai a été l'occasion, dans quelques départements, de célébrer le centenaire de la CGT.

Depuis le CCN le bilan des luttes et des succès ne fait que s'agrandir.

Analyse des luttes

Devant une situation de l'emploi toujours aussi dégradée notamment, avec l'annonce de nouveaux plans sociaux, ou à la lecture des profits en augmentation, ou parce que la vie est de plus en plus difficile pour certains, rejetés hors du travail et des droits les plus élémentaires, les salariés sont de plus en plus à envisager l'action revendicative pour faire évoluer leur situation.

Le développement des luttes témoigne d'une impatience sociale importante. Les caractéristiques analysées lors du CCN d'avril se confirment. L'enracinement revendicatif est très important. Il est en opposition aux choix patronaux et gouvernementaux, tant en matière d'emploi, de pouvoir d'achat, de protection sociale, de formation professionnelle, de libertés, etc. La participation des salariés est très massive, notamment celle de catégories et couches nouvelles. La conduite est très démocratique. C'est dans l'indépendance et l'autonomie de chaque mouvement, que les formes de la lutte, la durée et le choix du moment pour faire aboutir les revendications sont déterminés sur le lieu de travail, avec maintenant des coordinations de luttes au niveau des groupes, des départements ou des branches.

Très souvent, ces actions sont unitaires au niveau des entreprises faisant sauter les blocages et les interdits pouvant exister au niveau de certaines confédérations. Ce que nous vivons est totalement inédit comme construction de luttes, et d'une qualité totalement nouvelle.

Il s'agit d'un « tous ensemble chacun chez soi » que nous avons encore des difficultés à appréhender et à apprécier correctement.

Ce qui est sûr, c'est que ce mouvement est fort, qu'il est tenace et qu'il est efficace. Les succès sur les salaires et l'emploi sont devenus monnaie courante.

Au-delà de l'activité unitaire au plan syndical, des rassemblements auxquels nous participons, des solidarités d'un type nouveau se font jour sur des problèmes touchant l'ensemble de la société, notamment contre les exclusions et la précarité, et pour lesquels le mouvement syndical ne peut avoir de prétention hégémonique ou d'exclusivité. D'autant que ces initiatives croisent et renforcent les nôtres.

Les objectifs revendicatifs du 8 avril traversent la bataille de la CGT pour les « dix droits » et les initiatives du comité national des privés d'emploi, organisés du 13 au 17 mars. C'est bien à partir de notre propre activité revendicative qu'il est indispensable de s'inscrire dans ces nouvelles formes de rassemblement. Cela contribue à vitaliser le mouvement social actuel et révèle une autre image de la CGT. Cela donne aussi une autre dimension au mécontentement d'une grande partie de la population.

C'est d'ailleurs ce qui apparaît dans le résultat du 1er tour de l'élection présidentielle. Nous sommes devant un scrutin de crise qui témoigne, à travers les divers votes protestataires et l'augmentation du nombre d'abstentionnistes, d'une réalité de mal vivre et d'une forte envie de changer.

Le vote extrême droite, en progression, s'installe surtout sur l'ensemble du territoire ce qui le rend plus inquiétant. Même si l'on ne peut confondre tous les électeurs du Front national avec Le Pen, il n'en reste pas moins que la banalisation d'un discours amalgamant immigration, chômage et délinquance laisse des traces profondes.

Brahim Bouraam, jeune marocain, est la deuxième victime de la haine raciale au cours de cette campagne électorale, après le meurtre du jeune marseillais d'origine comorienne.

La CGT qui a condamné ces assassinats, a appelé au rassemblement à Paris, pour exiger que les criminels et leurs instigateurs idéologiques soient punis. Elle exige aussi l'application, sans exception, des lois contre le racisme avec toute leur rigueur contre tous ceux et celles qui sèment la haine.

Conscient que ces théories racistes et xénophobes sèment le doute dans de nombreux esprits, doute auquel certains syndiqués et militants CGT n'échappent pas, nous devons inviter les organisations de la CGT à donner des suites à la campagne du 21 mars pour que, dans les entreprises et les cités, chacun travaille à faire reculer ces idées qui divisent le monde du travail.

Les luttes qui se développent ont besoin de l'unité la plus large, du rassemblement fraternel des Français et des immigrés et non de la division. C'est en ce sens qu'il faut faire grandir la solidarité. (…)

La situation actuelle donne une nouvelle responsabilité au syndicalisme pour la conduite des luttes et la défense des intérêts des salariés, mais aussi dans la construction de perspectives visant à transformer la société.

La CGT ayant contribué, pour sa part à l'émergence des luttes en cours se retrouve à l'aise pour multiplier les initiatives permettant leur développement. Un troisième tour social ne se décrète pas. Nous savons par expérience que l'action efficace se construit quotidiennement avec un maximum de salariés et non par des appels de sommet.

Le calendrier revendicatif de mai est déjà bien garni. De nombreux conflits se poursuivent dans l'ensemble des professions du privé et du public : Journée d'action dans toute l'automobile sur les salaires, l'emploi et le temps de travail. Action contre l'ouverture des magasins les jours fériés (notamment à l'occasion de la commémoration du cinquantenaire de la victoire sur le nazisme). Le 21 mai, rassemblement à Paris de 1 000 musiciens avec concert géant.

Le 30 mai, ce sera le tour des salariés d'EDF-­GDF d'agir dans l'unité ainsi que ceux des PTT, de la santé. Le 23, action unitaire dans les organismes sociaux. Le 31, il en sera de même également dans l'unité pour les cheminots. D'autres actions et j'en oublie, sont déjà prévues en juin notamment dans les douanes.

Face à cette situation, le bureau confédéral a décidé d'organiser une réunion mensuelle, avec les fédérations, pour faire le point de l'action et des problèmes revendicatifs, mieux appréhender les grandes tendances, avoir un bilan qualitatif des luttes, et être en capacité d'anticiper. Il s'agit d'avoir aussi une réflexion sur les impulsions confédérales nécessaires. (…)

Négociations avec le CNPF et unité d'actions

Aujourd'hui nous ne devons pas dissocier ces luttes des négociations en cours avec le CNPF à travers trois thèmes : le temps de travail, le niveau des négociations et l'insertion des jeunes. Tous les trois ont un objectif commun la destruction des garanties collectives, à travers notamment, des contrats collectifs d'entreprise, organisés autour du concept de « dérogation permanente ». (…)

Le développement de l'action place ces négociations dans de nouvelles conditions. Le patronat ne s'attendait pas à ce nouveau rapport de force et fait piétiner les négociations, retrouvant les durcissements naturels qui avaient court avant l'arrivée de M. Gandois.

Les autres organisations syndicales, bousculées par les luttes, sont amenées à prendre des positions plus offensives notamment sur la priorité à l'emploi et la réduction du temps de travail. (…)

Le 14 juin, c'est le jour choisi par la CFDT pour appeler à une journée interprofessionnelle d'action et de manifestations à laquelle elle invite les autres organisations à s'associer.

Comme nous le voyons depuis quelques mois, les choses bougent beaucoup en ce qui concerne l'unité d'action.

C'est la CFDT qui, courant avril, a invité les autres organisations syndicales à une rencontre commune. La CGT a fait savoir sa disponibilité, mais devant les refus des autres organisations de s'asseoir à la même table, la CFDT a proposé des bilatérales.

La rencontre entre la CGT et la CFDT s'est tenue le 3 mai 1995, au niveau des négociateurs avec le CNPF. Elle a eu pour objet l'examen de ces négociations et l'échange des points de vue sur nos différentes conceptions revendicatives. L'intérêt réside dans l'existence de ce genre de rencontres.

Les contacts plus officieux avec la CFTC et FO, les échanges lors des rencontres au CNPF montrent des évolutions intéressantes dans des organisations divisées sur la conduite à tenir dans la période.

Pour le 14 juin, nous devons être disponibles mais celui-ci sera réussi et pèsera sur les négociations que s'il est précédé de nombreuses luttes les plus diverses.

Nous voulons en créer les conditions en mettant à la disposition des organisations différents matériels. (…)

La période est prometteuse, l'action collective, le syndicalisme rencontrant de nouvelles sympathies, c'est une occasion intéressante pour lancer en grand « le débat public sur le syndicalisme fort et unitaire » que nous avons décidé d'organiser au dernier CCN. Cette initiative est bien accueillie dans et en dehors de la CGT.

Très vite, au cœur de l'action et dans la préparation du 45e congrès, nous devons être à l'initiative, interpeller les salariés, là où nous sommes organisés, comme là où nous sommes absents. Déjà nous devons prendre rapidement la dimension de ce que nous voulons entreprendre et bien faire mesurer nos ambitions à l'ensemble des organisations de la CGT. Nous ne devons pas nous contenter de la situation actuelle de l'unité d'action, il nous faut aller plus loin et ce plus loin il faut en débattre avec tous, syndiqués ou non.

Un plan de communication en direction de l'opinion publique est à l'étude. Nous allons nous organiser au niveau confédéral, dans la transversalité, pour impulser cette campagne notamment à partir des 200 sites. (…)

Réflexions sur les structures

Les 2 et 3 mars derniers, la commission exécutive confédérale a débattu des travaux effectués par le groupe de travail mis en place en février 1993. Ils portent sur nos modes de structuration, de relations entre les organisations de la CGT ; examinés non pas en soi, mais par rapport aux orientations et à leur mise en œuvre. Il a paru utile de mettre à disposition de chaque syndicat, de chaque militant, le rapport réalisé par le groupe de travail. Ce document de réflexion et de questionnement ne constitue évidemment pas un texte d'orientation, ni même un projet : il appartiendra au 45e congrès d'intégrer éventuellement dans ces décisions telle ou telle des propositions présentées. En revanche, il s'agit-là de questions importantes pour notre avenir, et à ce titre elles concernent chacun.

Le 4 février 1993, la commission exécutive confédérale a mis en place un groupe de travail chargé de « réaliser un état des lieux, de le confronter à nos orientations et d'en tirer les premières conclusions quant à l'efficacité de notre dispositif et/ou les dysfonctionnements ou problèmes rencontrés ».

À la commission exécutive du 5 mai 1994, puis au CCN du 27 mai 1994, Lydia Brovelli a présenté les premiers travaux du groupe.

Le CCN a confirmé notre mission, en souhaitant un examen plus détaillé de trois questions : la notion de syndicat, le fédéralisme, le rôle de la confédération. Avec ses limites et ses imperfections, ce travail est sans précédent depuis 1980. Nous souhaitons que la préparation du 45e congrès soit l'occasion de nouvelles avancées dans la connaissance précise de notre mouvement. En particulier, les questionnaires de « connaissance des syndiqués » prévus dans le processus de mandatement devraient faire l'objet d'un soin particulier, et d'une impulsion de toutes les structures. Il y a également besoin d'examiner régulièrement et plus systématiquement, branche par branche, département par département, les évolutions du salariat, de nos forces, de la qualité de la vie syndicale.

Le groupe a pensé utile de mettre par écrit une synthèse de ses travaux et de la communiquer aux membres de la commission exécutive confédérale, avant la réunion du 2 mars qui traitera de ces questions. Il appartiendra à la commission exécutive de décider de l'opportunité et des modalités d'une diffusion plus large. La réflexion sur nos modes d'organisation s'inscrit pleinement dans les débats d'orientation du 45e congrès : elle ne se doit donc pas être cantonnée à un « débat d'initiés ». Le travail du groupe a comporté des réunions mensuelles (depuis mars 1993) et des rencontres avec de nombreuses fédérations, unions départementales, unions locales, syndicats. Nous voulons remercier toutes les directions collectives, les militants qui ont consacré du temps à ces entretiens, et dont l'apport a été extrêmement riche.

Quelle approche des problèmes de structures ?

C'est bien sûr la conception mise en œuvre, le contenu de l'activité revendicative qui sont déterminants. Mais une question ne peut être éludée : les structures actuelles, leur mode de vie, leurs relations sont-elles oui ou non au service de notre démarche ? Contribuent-elles en permanence à la démocratie syndicale, au débat avec chaque catégorie de salarié ? Facilitent-elles les opérations, la convergence des luttes ?

Il n'y a pas de structure bonne ou mauvaise en soi. Mais, exclure ces questions de la réflexion sur les transformations du syndicalisme serait faire preuve d'immobilisme et contribuerait probablement à un nouveau recul de nos forces, de notre capacité à développer le mouvement social.

De même, la question des moyens (financiers, humains…) et de leur répartition n'est pas une fin en soi. Les décisions en la matière ne peuvent que résulter d'orientations revendicatives et structurelles. En revanche, nous avons le devoir de disposer et d'utiliser de la manière la plus efficace possible, les moyens (au demeurant importants) qui sont encore les nôtres. C'est de la responsabilité première de chaque organisation, mais cela suppose aussi une réflexion et des décisions collectives. Une idée semble universellement partagée : il faut travailler ensemble pour tourner en permanence les forces de la CGT vers la conquête (ou la reconquête) du salariat, tel qu'il est aujourd'hui ; or ce n'est pas toujours le cas… Le groupe de travail souhaite attirer l'attention sur trois points :

Notre histoire, et donc notre culture syndicale est d'une extrême diversité. Elle a sécrété des structures et des modes de vie multiples, complexes, souvent mal connus. C'est un élément de richesse.

Mais cela nous oblige aussi à un grand effort de connaissance de réalités syndicales, d'acquis, de contraintes, qui peuvent différer de ce dont nous avons l'expérience directe. Le vocabulaire même est divers, et peut entraîner des incompréhensions. Nous avons d'ailleurs éprouvé le besoin dans ce rapport de définir certains termes (d'autres définitions sans doute auraient été possibles…).

L'essentiel est bien d'aborder ces questions, et les débats légitimes qu'elles soulèvent, avec esprit d'ouverture, qualité d'écoute ; et d'éviter tout jugement hâtif face à un constat ou à une proposition apparemment surprenante.

De même, l'expérimentation de solutions nouvelles – pourvu qu'elle soit faite dans la transparence, et dans le respect des choix de chaque organisation concernée – est nécessaire. Les remèdes ne se trouveront pas uniquement à partir d'une réflexion théorique. Sachons donc accueillir l'innovation.

Seule la conviction fera avancer le débat, seul l'accord de tous permettra d'avancer des solutions concrètes. Le groupe ne suggère aucune démarche d'autorité, aucune décision normative ignorant les préoccupations de chacun. En revanche, la gravité de la situation, notamment le risque d'un syndicalisme CGT replié sur une petite partie du salariat, exige de nous des actes concrets. La quasi-totalité des organisations rencontrées souhaitent que le 45e congrès produise en la matière des résultats significatifs.

L'État d'organisation et de structuration de la CGT

Pendant les dix premiers mois de son activité, le groupe s'est efforcé de faire un état des lieux : quelles sont nos forces, où sont-elles, comment ont-elles évoluées, quelles sont leurs modes de structuration ? Comparativement à la situation du salariat, y a-­t-il adéquation ou non, et quelles tendances d'évolution peut-on repérer ? Cet état des lieux s'est révélé complexe à réaliser, les données – y compris nationales – étant souvent fragmentaires et dispersées. Cela est en soi un élément de réflexion.

Le rapport de Lydia Brovelli à la commission exécutive de mai 1994 et les documents remis au CCN comportent l'essentiel des éléments réunis par le groupe. Il est souhaitable de s'y reporter. Pour éviter les redites, nous ne rappellerons ici que quelques points de repère. Les débats des deux derniers CCN ont également enrichi notre appréciation du mouvement social, du contexte où se situe notre réflexion sur les structures ; laquelle ne peut être menée « hors du temps ».

De 1981 à 1992, nos forces ont globalement reculé de 63 %. Si le recul est général, les disparités sont très fortes :

– pour les fédérations, de moins 30 % à moins 80 %,
– pour les unions départementales, de moins 10 % à moins 93 %.

Les écarts entre répartition des salariés par secteurs d'activités, et répartition des syndiqués se sont creusés. Si les décalages sont nettement moins sensibles au plan des départements, ils le sont par rapport aux nouvelles zones d'activité, technopoles etc.

Dit rapidement, la syndicalisation à la CGT s'est fortement concentrée sur les salariés à emploi stable, couverts par des garanties collectives fortes, employés dans de grandes entreprises ou services publics. Il y a donc un vrai et urgent problème de déploiement :

– dans des catégories nouvelles (employés, jeunes diplômés…),
– auprès des salariés précarisés, chômeurs,
– dans les PME-PMI et entreprises sous-traitantes, prestataires de service…

Les découpages entre champs fédéraux, produits de notre histoire, des luttes et des conquêtes syndicales, posent de multiples et complexes problèmes. Un des principaux étant l'inadéquation entre le terrain à couvrir et les forces actuellement organisées. Ainsi, 60 % du salariat relève aujourd'hui de six fédérations CGT dont pas une n'a un taux de syndicalisation supérieur à 3 %.

Il faut prendre la mesure des évolutions qui ont marqué le salariat et la structure des entreprises ces dernières années :

– éclatement, PMIstion…
– essor des secteurs de service, et nécessité d'aborder différemment des distinctions « traditionnelles » (productif-non productif, industrie-service, etc.),
– explosion en nombre et en pourcentage des salariés employés, Ictam, femmes,
– élévation rapide du niveau de formation à la sortie du système scolaire, ce qui n'amène nullement à sous-estimer le scandale de l'exclusion de centaines de milliers de jeunes, de tout diplôme ou qualification,
– modifications profondes et diverses des rapports sociaux sur un même lieu de travail : intervention d'employeurs multiples, salariés de statuts (ou de « non-statut ») différents…, sur fond de recul global des garanties collectives.

Enfin, nous devons garder présents à l'esprit les potentialités, et les besoins du mouvement social aujourd'hui :

– aspiration forte de nombreux salariés à l'engagement collectif, à condition qu'il parte de leur propre situation et soit placé sous leur contrôle,
– enjeux de la syndicalisation, rôle décideur et acteur de l'adhérent, comme éléments constitutifs du rapport des forces.

Le syndicat

C'est l'élément central de la réflexion du groupe, à partir duquel nous pensons nécessaire de concevoir toute l'activité d'organisation et de structuration de la CGT.

Paradoxalement (?) le syndicat (son rôle, ses droits et devoirs, ses relations avec les autres composantes confédérales) est quasiment absent de nos statuts.

Chaque congrès confédéral est l'occasion d'évaluer la représentativité des « syndicats » CGT : il s'agit alors de groupements de syndiqués gérant une trésorerie, collectant et reversant des cotisations à une fédération et à une union départementale.

En ce sens, la CGT disposait en janvier 1992 (44e congrès) de 14 398 syndicats. Le nombre de nos lieux d'implantation à la même date était évalué à 30 000.

En pratique, le terme recouvre des réalités très différentes, du syndicat d'établissement de quelques salariés, au syndicat national de 10 000 adhérents et plus. La distinction entre syndicats, sections syndicales, union de syndicats n'est pas non plus toujours nette. Si la notion juridique de syndicat est clairement définie par le code du travail, l'existence de statuts déposés légalement ne signifie pas forcément activité structurée, vie démocratique, présence d'un collectif de direction élu par les syndiqués, etc.

Quelle conception du syndicat ?

Ce n'est donc pas en fonction d'une forme institutionnelle ou d'un niveau de structuration particulier que nous proposons de définir le syndicat, mais à partir du rôle qu'il doit jouer.

Un lieu de développement de la démocratie, au plus près des syndiqués, favorisant leur rôle de décideur et d'acteur.

Un cadre permettant l'élaboration des propositions de la CGT, le débat avec les salariés, la construction par les intéressés eux-mêmes des revendications, et des formes de lutte.

La prise en compte des besoins des salariés sur lesquels il rayonne, et la recherche des convergences.

Le syndicat ainsi conçu, devrait être l'élément constitutif de toutes les autres organisations confédérées, celles-ci mettant leur activité propre et les relations entre elles au service du développement des syndicats et de leur création là où ils n'existent pas encore.

Cette approche nous semble en filiation directe avec le document d'orientation du 44e congrès (« Le Peuple » N° 1346/1347/1348, pages 194 à 203) qui traite de la vie syndicale dans deux chapitres intitulés « un syndicat pour les revendications » et « un syndicat pour plus de démocratie ».

En revanche, elle est nouvelle dans la CGT.

Historiquement, la plupart de nos syndicats ont adopté leur niveau et leur mode de structuration :

– pour assurer le regroupement (et donc l'action solidaire) de salariés d'un même métier dispersés dans de nombreuses entreprises ;
– pour conquérir, défendre et améliorer des accords collectifs à différents niveaux (conventions collectives et accords salariaux de branches, nationaux ou régionaux…) ;
– ou encore en adéquation avec des structures administratives de décision et de gestion des personnels, notamment dans la fonction publique et les secteurs à statut particulier ;
– et toujours dans un contexte où les entraves patronales visaient prioritairement l'exercice du droit syndical sur le lieu de travail : celui-ci n'a été légalisé qu'après le mouvement de mai - juin 1968.

(Ces éléments étant bien sûr schématiques et ne rendant compte que très partiellement des processus de construction syndicale engagés depuis plus d'un siècle).

Affirmer cette conception du syndical ne règle évidemment pas l'ensemble des problèmes, et le groupe de travail a souhaité éviter tout simplisme.

Trois questions méritent un approfondissement :

– syndicats et bases CGT,
– diversités et syndicats spécifiques,
– quel niveau de structuration du syndicat ?

Syndicats et bases CGT.

80 % des 14 398 syndicats recensés au 44e congrès ont moins de 50 adhérents. Au-delà de la faiblesse quantitative de nos effectifs sur la plupart des lieux de travail et parfois même de la précarité de notre existence, nous connaissons aussi la réalité du fonctionnement syndical. Il y a donc à distinguer :

– la base CGT, c'est-à-dire la présence sur un lieu de travail donné d'un ou plusieurs adhérents,
– le syndicat CGT, présentant un caractère de durabilité, une capacité propre de vie démocratique, d'initiative revendicative, ce qui suppose l'existence d'une direction.

Il ne s'agit pas de classer les bases en syndicats « bons » ou « mauvais », mais de réserver le terme de syndicat aux implantations CGT répondant effectivement aux objectifs énoncés plus haut.

Si la taille est un critère à prendre en compte (moyens d'action, capacité réelle de débat démocratique …) ce n'est pas le seul, et il n'est pas question de fixer un seuil.

Mais surtout, il faut avoir une conception dynamique : les efforts de toute la CGT doivent contribuer à ce que le plus grand nombre possible de bases se structurent et acquièrent les caractéristiques d'un syndicat.

Diversité et syndicats spécifiques.

La diversification, la construction du rassemblement à partir des besoins et des luttes consciemment décidées par chaque catégorie du salariat sont des points forts de la réflexion du 44e congrès. Elles doivent traverser l'activité de chaque syndicat : autrement dit, notre objectif n'est pas de traiter toutes les diversités de façon structurelle (un syndicat pour chaque), mais bien de développer des organisations de base capables de prendre en compte la richesse de chaque composante, et de faire percevoir les communautés d'intérêt.

Cela vaut pour les diversités de métier, de statut, ou celles liées à l'âge, au sexe, etc.

Par contre, la CGT prend en compte de façon structurelle les diversités liées à la place dans la production. Encore faut-il apporter quelques précisions :

Les organisations spécifiques UGICT ne viennent pas en supplément d'un syndicat général. C'est toute la CGT qui se réorganise pour être plus efficace en direction des ouvriers, employés, et des Ictam. On pourrait dire que tous les salariés ont droit à l'activité spécifique.

L'évolution du salariat, des technologies, des processus de travail nous ont conduits à traiter ensemble les différentes catégories d'Ictam, à partir de leur place spécifique dans les rapports de production capitalistes. Cela ne minimise en rien leur diversité, ni la nécessité de mieux les prendre en compte.

Là encore, ni démarche administrative, ni modèle structurel imposé ne sont la solution. Cependant, nous confirmons le besoin d'organisations spécifiques à part entière, responsables de leur vie démocratique, de leur expression, de leur activité revendicative : c'est justement ce sens-là que nous proposons de donner au mot syndicat ! L'objectif devrait donc être la constitution au plus près des salariés de « couples de syndicats », l'un exécution, l'autre Ictam, avec la solidarité et la coordination nécessaires.

Quel niveau de structuration des syndicats ?

Il nous semble d'abord nécessaire de préciser des termes. Dans ses travaux, le groupe a utilisé la terminologie suivante.

Entreprise définie par une raison sociale, un employeur commun (secteur privé, secteur à statut ou fonction publique).

Établissement unité d'une entreprise, sur un même lieu géographique, avec une plus ou moins grande autonomie de gestion (ce n'est pas forcément l'établissement au sens des élections professionnelles, ou en terme de gestion administrative).

Lieu de travail lieu où des salariés d'entreprises (éventuellement différentes) participent à un même processus de travail (exemple une raffinerie avec l'ensemble des salariés des entreprises sous-traitantes).

Site juxtaposition de lieux de travail distincts par l'activité exercée, mais formant une entité géographique (zone industrielle, zone de bureaux) ou présentant une cohérence d'activité (Cité des Sciences de la Villette). Il peut y avoir ou non mise en commun de services entre les entreprises présentes (restauration, gardiennage…).

Ces définitions ne prétendent pas décrire toutes les situations, ni être exemptes d'ambiguïté : comment préciser la notion d'entreprise dans la fonction publique d'État ? S'agit-il des services d'un même ministère (par exemple les Finances) où d'une direction – dans ce cas, impôts, trésor, douanes… ?

Elles nous ont cependant paru utiles dans la plupart des cas.

Historiquement, les syndicats se sont le plus souvent affrontés à une entreprise un interlocuteur patronal unique, et ont construit un rapport de forces dans ce cadre-là. Il est donc normal que l'essentiel des syndicats CGT soient des syndicats d'entreprises ou des décentralisations de tels syndicats dans les grandes entreprises.

Trop souvent cependant, les syndicats ont limité leur intervention aux salariés stables, titulaires du statut ou de la convention collective de l'entreprise.

Il est indispensable aujourd'hui que tout salarié puisse être « couvert » par un syndicat CGT capable de prendre en compte ses propres revendications.

L'ampleur des formes d'éclatement de l'entreprise (intérim, sous-traitance, entreprises extérieures…) amène à d'autres réflexions : construire un rapport de forces efficace exige souvent la mobilisation de salariés dépendant légalement d'employeurs différents. En fait, nous sommes confrontés à une multitude de niveaux de décision et de gestion des personnels :

– dirigeants des entreprises (ou établissements) intervenant sur un lieu de travail,
– direction de groupes, holding, etc. La complexité des participations au capital et des filialisations entraîne la dilution (ou plutôt le manque de transparence) des responsabilités patronales, avec des aspects nationaux et trans­nationaux…
– GIE, SCI, comité de gestion de services communs sur un même site.

Ceci étant également vrai sous des formes particulières dans le secteur public, même là où existe un important noyau de salariés stables et couverts par un statut.

Il n'est donc plus possible de calquer systématiquement la structure syndicale sur les niveaux de gestion patronale. Par contre, des méthodes de coopérations sont nécessaires pour que la CGT puisse être présente, et surtout porteuse de revendications et de rapport de forces,

Partout où des décisions sont prises.

Le groupe ne pense ni possible, ni souhaitable de définir « un » bon niveau de structuration des syndicats.

Ce serait ignorer la diversité des situations, et surtout la nécessité impérieuse de respecter la décision démocratique des adhérents. Ce sont bien eux qui doivent décider le cas échéant de décentraliser un syndicat ou dans certains cas de procéder à des regroupements.

En revanche, quelques principes pourraient guider nos réflexions ultérieures et constituer une orientation de congrès :

Favoriser la constitution de syndicats à taille humaine, proches des salariés concernés, où la démocratie syndicale puisse s'exercer directement et en permanence.

S'efforcer de regrouper dans un même syndicat tous les salariés concourant à un même processus de travail sur un même lieu et sous l'autorité de fait d'un même employeur.

Généraliser la coopération entre les syndicats concernés pour organiser les salariés des entreprises sous-traitantes, en prenant en compte :

La cohérence de l'activité sur un même lieu de travail, le point d'appui que représente le syndicat CGT des personnels statutaires de l'entreprise. Mais aussi, le besoin d'une coordination syndicale des salariés d'un même sous-traitant, notamment quand il s'agit d'une grande entreprise (Eurest, Sodhexo…).

Les syndiqués isolés.

Un nombre important d'adhérents ne dispose pas d'un cadre syndical leur assurant une vie démocratique régulière et ce pour différentes raisons :

– adhérents individuels,
– adhérents peu nombreux sur leur lieu de travail (petites entreprises, bases en constitution…),
– adhérents appartenant à des catégories professionnellement dispersées (par exemple les VRP et commerciaux non-sédentaires d'une entreprise, ou les cadres des PTT dans les départements ruraux …).

Pour qu'ils soient dès maintenant des syndiqués à part entière, il peut être constitué des regroupements profes­sionnels ou interprofessionnels, selon des modalités adaptées aux diverses situations.

Le plus souvent, il s'agira de dispositions transitoires, permettant de créer et de structurer des syndicats sur les lieux de travail.

Dans le même ordre d'idées, on peut envisager qu'un syndicat constitué puisse accueillir provisoirement, des adhérents pour lesquels n'existe pas encore de structure sur leur lieu de travail. C'est aussi un des aspects du parrainage.

Il peut cependant y avoir des cas où la taille réduite des lieux de travail ou d'autres facteurs de dispersion, rendent indispensable la création durable de syndicats regroupant des isolés.

Sur toutes ces questions, le rôle de l'union locale apparaît essentiel.

Les salariés privés d'emploi.

Le développement des efforts de toute la CGT pour répondre aux besoins des salariés privés d'emploi, précarisés, exclus, conduit à réfléchir sur leurs formes d'organisation, à partir de deux objectifs complémentaires :

Permettre à ces hommes et à ces femmes de décider collectivement de leurs revendications, et de leurs actions, avec les mêmes droits que les autres salariés.

Tenir compte de leur situation particulière, de ce qu'ils n'ont pas vocation à rester des chômeurs, et donc qu'il y a un renouvellement important et rapide des syndiqués sans-emploi sur un lieu donné ; avec un problème de pérennité de l'animation syndicale.

Le groupe considère que les organisations de chômeurs doivent être représentées en tant que telles dans les congrès (d'unions locales, d'unions départementales, confédéral, voire de fédérations dans certains cas). Les avis divergent sur l'opportunité – et la possibilité – de considérer les collectifs de sans-emploi comme des syndicats à part entière.

Il est également nécessaire de poursuivre et d'étendre les expériences engagées pour maintenir un lien entre les salariés victimes d'un licenciement collectif et le syndicat de leur entreprise d'origine.

Les organisations de base de retraités.

C'est un des points sur lequel la réflexion du groupe est très insuffisante, et devra donc être complétée.

Des besoins nouveaux, en termes quantitatifs et qualitatifs.

Il y a actuellement 11 millions de plus de 60 ans.

Dans 15 ou 20 ans, ce sera le cas d'une personne sur trois. L'augmentation du champ de responsabilité de la CGT envers ces catégories tient en même temps :

– à l'allongement de la durée de vie (avec des problèmes nouveaux dépendance…),
– à la cessation précoce d'activité imposée à l'occasion de départs en préretraite, de FNE, de plans « sociaux »…

Au-delà d'un point commun (arrêt définitif de la vie active salariée), il y a une grande diversité de situations (âge, capacités, revenus, lieu de vie…).

Aux revendications traditionnelles (pouvoir d'achat, santé…) s'ajoutent de fortes aspirations aux loisirs et au maintien d'une utilité sociale, terrains très disputés par les associations, amicales…

Le cadre de vie (notamment pour ceux qui habitent en zone rurale) est aussi source de besoins en services (publics et marchands) renvoyant aux choix gouvernementaux d'aménagement du territoire.

Les sections de retraités.

Il n'y a pas statutairement de syndicats de retraités au sens précédent, mais :

– des sections professionnelles de retraités au sein de syndicats regrou­pant les actifs,
– des sections interprofessionnelles, directement rattachées aux USA départementales.

Le congrès de l'UCR n'est pas celui des sections, mais des USA et UFR (constituées dans les fédérations).

Au congrès confédéral, comme dans la plupart des congrès d'unions départementales et de fédérations, il est décompté une voix pour douze cotisations trimestrielles ; autrement dit, la représentation d'un actif équivaut à celle de trois retraités (supposés à jour de leurs cotisations).

Six UFR (essentiellement du secteur public) regroupent 80 % de nos forces. Le pourcentage de syndiqués retraités dans une fédération varie de 1 % à 81 %.

Des questions à examiner.

Le lien des retraités avec les syndicats d'actifs est indispensable. Comment renforcer son efficacité ?

En terme de syndicalisation (on évalue à 75 % en moyenne la perte d'adhérents lors du passage à la retraite ou à la préretraite).

En terme revendicatif, et de rapport de forces (compte tenu de ce que les retraités ne sont plus sur leur lieu de travail).

Comment éviter aussi des phénomènes de « déséquilibre » là où le nombre de syndiqués actifs a régressé beaucoup plus vite que celui des retraités ?

Comment coopérer pour que les sections interprofessionnelles disposent de plus de moyens pour faire face à leurs responsabilités ? N'y a-t-il pas besoin de coordinations locales, non pas nouvelles structures, mais outils de développement de la CGT intégrés aux unions locales ?

Faut-il modifier les prérogatives et la représentation des sections au sein de l'UCR ? La représentation des retraités dans les congrès confédéraux ?

On notera que ces questions concernent à la fois la CGT dans sa globalité et l'UCR, en tant qu'organisation ayant ses statuts propres et sa mission confédérale (voir la quatrième partie).

Conclusion de la troisième partie « Le syndicat »

Le groupe considère que dans le document d'orientation du 45e congrès, et dans le projet de refonte des statuts, il conviendra de donner une place centrale au rôle et aux prérogatives des syndicats.

D'autre part, l'expérimentation de solutions nouvelles pour organiser la vie démocratique au plus près des syndiqués apparaît tout à fait nécessaire. La mise en œuvre des « 200 cibles » le confirme, tout en pointant les réticences qui peuvent exister. Il est souhaitable que l'impulsion coordonnée de toute la CGT contribue à les lever et favorise les échanges d'expériences novatrices, ainsi que leur bilan critique.

Structures et organisations

Au cours d'un siècle d'histoire de la CGT, les besoins du mouvement social ont conduit à mettre en place de multiples structures de coordina­tion des syndicats.

Elles sont extrêmement diverses en prérogatives (statutaires ou non, plus ou moins autonomes…), en fonctionnement (régulier ou non, avec une direction plus ou moins stable, élue ou non…), en moyens (militants, financiers, avec cotisation propre ou non…), et dans leurs relations entre elles.

Leur recensement – sans doute non exhaustif – s'est avéré compliqué. On se reportera sur ce point aux documents accompagnant le rapport (différentes introductions présentées lors des réunions du groupe).

Leur constitution s'est faite en règle générale de façon dispersée, une (ou quelques fois plusieurs) structure décidant d'en mettre d'autres en place. Elles se sont donc le plus souvent superposées, entraînant parfois une accumulation de charges sur les syndicats.

Si de nombreux efforts d'adaptation ont été accomplis, allant en général dans le sens d'un allégement, et d'un redéploiement des moyens et des responsabilités vers les organisations de base, nous héritons d'une situation complexe et souvent inadaptée aux besoins.

Le groupe exclut là encore toute démarche autoritaire, qui ignorerait le fait que chaque structure a pour origine un besoin, a eu (et a souvent encore) une utilité, et contribue le plus souvent à notre identité syndicale. Les réflexions et propositions suivantes visent à clarifier les données du problème (notamment à distinguer les organisations fondamentales des autres structures) et à aider ainsi chaque composante de la CGT à mener les débats nécessaires aux évolutions la concernant. Nous avançons aussi une approche (partir des besoins des syndicats) qui devrait permettre à terme de redonner plus de cohérence et d'efficacité à notre dispositif.

Partir des besoins des syndicats.

Aujourd'hui, le développement de l'activité revendicative exige d'intégrer de multiples aspects, à la fois professionnels et interprofessionnels.

Professionnel :

– reconstruction des garanties collectives adaptées au salariat d'aujourd'hui, à la reconnaissance des qualifications…,
– étendre aux salariés sous-traitants, filialisés, etc., les garanties existant dans les secteurs plus stables,
– prendre en compte les identités pro­fessionnelles, ressort d'un grand nombre de luttes ayant marqué ces dernières années,
– maîtriser le contenu des métiers, les évolutions de la profession,
– « professionnaliser » les problèmes nationaux (par exemple la protection sociale).

Interprofessionnel :

– développer les solidarités (entre salariés de différentes entreprises, avec les usagers, la population…),
– échanger des expériences, maîtriser la cohérence des stratégies patronales et gouvernementales,
– les garanties collectives ont aussi des dimensions interprofessionnelles (Smic, droit du travail, statut cadre, réflexions sur un statut des techniciens…),
– construction des temps forts de convergences, à différents niveaux,
– intervention sur le cadre de vie (transports, logement, santé…).

Tous ces éléments sont nécessaires à l'activité du syndicat, et il ne peut les maîtriser seul. Loin d'être dévalués, les rôles des fédérations, unions départementales, unions locales s'en trouvent renforcés. Il y a besoin d'organisations capables de faire circuler toutes les informations utiles, d'impulser la réflexion, de proposer des initiatives, de coopérer entre elles avec efficacité, d'intervenir, porteuse d'un rapport de forces, dans tous les lieux de négociation.

Le syndicat doit être au centre d'un réseau très riche de contacts, d'échanges, avec une pluralité d'organisations professionnelles et interprofessionnelles, de secteurs de travail, de collectifs de réflexion et d'action, etc.

Les structures doivent aussi répondre à la nécessité de création et de développement des syndicats. Les unions locales, en coresponsabilité avec d'autres organisations et à condition d'en avoir les moyens réels, sont sans doute les mieux placées pour contribuer au déploiement de la CGT ; et à la transformation des bases en syndicats au sens de la troisième partie. Cela ne conduit pas à restreindre le, champ d'intervention professionnel notamment pour :

– contribuer au contenu revendicatif des initiatives de parrainage,
– intervenir dans les entreprises ou établissements non organisés des groupes, avec une réflexion particulière sur les sièges sociaux,
– utiliser efficacement les CCE, comités de groupe, conseils d'administration, organismes paritaires de branche, et leurs élus CGT.

Organisations fondamentales et autres structures.

À partir de l'examen de la situation existante et des réflexions précédentes, le groupe propose de distinguer plusieurs types de structures, auxquels seraient attachées des places et prérogatives différentes.

Les organisations fondamentales de la CGT : syndicats, unions locales, unions départementales, fédérations, confédération.

Elles constituent l'ossature de notre dispositif. Leur rôle, leurs droits et devoirs, leurs principes généraux de fonctionnement et de relation sont du domaine des statuts confédéraux. Tout syndiqué, par l'intermédiaire de son syndicat, est adhérent aux quatre autres organisations et sa cotisation contribue à leur financement.

L'UGICT, organisation confédérale, avec ses statuts, son autonomie et sa double mission :

– définir et mettre en œuvre l'action de la CGT parmi les ingénieurs, cadres, techniciens et agents de maîtrise,
– coordonner l'activité et le développement des syndicats et sections regroupant ces catégories.

L'UCR, elle aussi organisation confédérale avec ses prérogatives et un rôle :

– de déploiement de la CGT auprès des retraités de toutes catégories,
– de liaison et coordination des structures syndicales les concernant (sections, UFR, USA).

Le groupe considère comme tout à fait positive l'évolution qui a conduit à faire de l'UCR une véritable organisation et non un « secteur de travail » confédéral.

Cela ne dispense pas d'examiner au plan de l'UCR les questionnements évoqués dans la troisième partie du rapport.

Les comités régionaux, constitués et animés sous l'autorité des unions départementales correspondantes.

Deux questions doivent cependant être approfondies :

Quelles conséquences tire-t-on du rôle et des pouvoirs renforcés des régions en tant que collectivités territoriales ? Cela touche à la dimension régionale des luttes et à la construction du rapport de forces<nécessaire auprès des organismes consultatifs ou décisionnaires régionaux.

Comment amplifier les coopérations avec les fédérations au plan régional, ce qui ne se limite pas aux relations avec les unions régionales professionnelles existantes ?

Tout en étant attentif aux évolutions en cours, et aux orientations gouvernementales de recomposition du territoire dans un cadre européen, le groupe considère qu'actuellement l'union locale et l'union départementale sont les niveaux essentiels d'organisation interprofessionnelle.

Les structures de coordination, mises en place par une ou plusieurs organisations fondamentales, l'UGICT ou l'UCR et sous leur entière responsabilité. Il appartient aux organisations « créatrices » de définir entre elles, les modalités de fonctionnement et d'en dégager les moyens. Il ne peut y avoir de règle statutaire confédérale pour ces structures.

Dans l'état d'esprit évoqué plus haut, le groupe estime cependant nécessaire :

– de poursuivre le « toilettage » entrepris, leur allégement, l'examen sans tabou de l'utilité de chacune et du degré de structuration réellement nécessaire,
– d'éviter tout ce qui peut faire écran, et gêner le déploiement des organisations fondamentales de la CGT.

Le rôle et le fonctionnement du CCJ posent plusieurs questions. Le groupe de travail n'a pas dépassé le stade du constat. Il y a un besoin évident d'impulsion beaucoup plus forte et plus permanente en direction des jeunes dans toutes les organisations, du syndicat à la confédération.

Actuellement, la place du CCJ est ambiguë :

– absence dans les statuts confédéraux,
– il a certaines des caractéristiques d'une structure : conseil national, bureau et secrétariat, collectifs constitués dans onze départements et quatre fédérations,
– et d'autres qui sont celles d'un secteur de travail (responsabilité directe d'un secrétaire confédéral, aucune autonomie budgétaire…).

Cette ambiguïté ne renvoie-t-elle pas aussi à des questions non ou mal résolues concernant la place des jeunes dans les organisations de base : si personne ne défend (à notre connaissance) l'idée de syndicat ou section de jeunes, il y a néanmoins une forte aspiration des jeunes à se retrouver « entre eux » y compris pour agir sur leur situation sociale. La réponse à ce besoin peut être un élément important d'adhésion à la CGT et de prise de responsabilités syndicales.

Le syndicat composant des quatre autres organisations.

Le syndicat doit être l'élément constitutif des union locale, union départementale, fédération, auxquelles il appartient. Cela signifie que l'orientation et la désignation des directions résultent de la décision démocratique des syndicats.

Cette conception est affirmée dans la plupart des statuts. Cependant la pratique n'est pas toujours celle-là, avec des survivances d'un rôle hiérarchique (de direction et/ou de contrôle) de la structure sur le syndicat. Promouvoir le rôle dirigeant du syndicat amène aussi à une réflexion renouvelée sur ses devoirs. Nous devons éviter les excès ou les « abus de position », confisquant au profit d'un ou plusieurs syndicats des décisions appartenant à l'ensemble. Cela concerne par exemple l'utilisation de « l'arme financière » ou les détachements contrôlés par un syndicat pour peser sur l'orientation ; ou encore l'appréciation de l'activité des directions sortantes à l'occasion des congrès.

L'affiliation d'un syndicat à une union locale, une union départementale, une fédération est un principe fondamental. Elle ne doit pas cependant conduire à une sorte de « propriété exclusive » d'une structure sur le syndicat, ni gêner les relations de plus en plus nécessaires du syndicat avec une pluralité d'organisations (voir plus haut).

En dehors des cas particuliers déjà évoqués (regroupements interprofessionnels d'isolés, organisations de sans-emploi), il peut surgir des difficultés dans le choix de la fédération d'affiliation. Le groupe pense évidemment impossible d'édicter des règles. En revanche, un axe de réflexion peut être retenu : quel choix est le plus favorable à la (re)conquête de garanties collectives pour les salariés du ressort du syndicat ?

Une question a soulevé de nombreuses discussions, tant dans le groupe qu'à la CE et au CCN de mai 1994 : « faut-il considérer que la confédération est directement composée des syndicats ? »

Dire qu'un syndiqué est d'abord adhérent à la CGT et que le syndicat est le constituant essentiel de notre dispositif ne tranche pas le débat ouvert sur la nécessité de modifier ou non les règles actuelles de rattachement du syndicat. Par contre, c'est un principe solide sur lequel peuvent s'articuler les organi­sations de la CGT.

D'autre part, le groupe ne partage pas les conceptions aboutissant à une hiérarchisation des rôles des organisations (syndicat, puis union départementale et fédération, puis confédération) ou limitant les relations directes entre elles.

Quelques réflexions concernant les unions locales, unions départementales fédérations.

Concernant les unions locales, leur rôle est déjà clairement affirmé dans nos statuts et un grand nombre d'autres écrits. Mais les conséquences sont encore bien loin d'en être tirées dans les actes (par exemple en ce qui concerne le règlement des cotisations). Contrairement aux unions départementales et fédérations dont l'existence est bien établie (même quand elle est difficile et matériellement précaire), un grand nombre de nos unions locales sont des organisations en construction, et cela interpelle syndicats, unions départementales, fédérations, confédération, ainsi que l'UGICT et l'UCR.

La commission exécutive confédérale aura à réfléchir sur les moyens de renforcer la place des unions locales dans nos statuts, notamment dans le processus de mandatement au congrès confédéral. Plusieurs possibilités envisagées ont donné lieu à des avis différents dans le groupe (non pas sur le fond : renforcer les prérogatives des unions locales, mais sur la faisabilité en fonction de leur nombre et de leur diversité de situation) :

– tenir compte des cotisations effectivement payées aux unions locales dans le décompte des voix au congrès confédéral,
– ouvrir aux unions locales la possibilité de présenter des candidatures à la commission exécutive confédérale,
– avancer vers un traitement statutaire de pleine égalité des unions locales avec les unions départementales et fédérations.

S'agissant des fédérations et unions départementales, le groupe unanime tient à préciser que rien ne justifierait un amoindrissement du rôle de l'un ou l'autre type d'organisation. La seule vraie question est de le concevoir à partir des besoins des syndicats tels qu'évoqués plus haut, et de construire une véritable complémentarité (ce sera l'objet de la cinquième partie de ce rapport).

Le groupe considère que les prérogatives des unions départementales et fédérations doivent être abordées de façon beaucoup plus parallèle et égalitaire, y compris dans nos statuts.

C'est d'ailleurs une tendance observée dans l'évolution de notre pratique. La CE et le CCN de mai 1994 ont abordé les questions complexes de découpages des champs fédéraux. Si les décisions éventuelles ne peuvent être prises qu'au cas par cas, et de la pleine initiative des intéressés, le groupe de travail a pointé un certain nombre de questions qui à l'évidence demandent approfondissement :

Quel rôle des fédérations pour le développement des garanties collectives, notamment là où les statuts et conventions collectives fondateurs des découpages fédéraux actuels ont plus ou moins éclaté ?

De quel(s) outil(s) se doter dans toute la CGT pour apprécier plus finement – et en temps réel – l'évolution des branches d'activité (mutations technologiques, du salariat ; recomposition du capital ; restructuration des entreprises) ?

Comment être offensifs face à l'apparition ou au bouleversement de certains domaines d'activité (industries de la communication et multimédia par exemple) ?

Comment mener une réflexion et une bataille à la hauteur des enjeux, associant toutes les forces de la CGT en matière de service public (contenu, besoins nouveaux, exercice des missions, rôles respectifs de la fonction publique, des secteurs à statut, du privé) ?

La confédération

Confédération, confédéralisation, centralisation :

Au risque d'enrichir notre « langue de bois », le groupe propose de distinguer :

La confédération en tant que structure (avec des prérogatives statutaires, des organismes de direction, un « appareil »).

La confédéralisation de certaines questions (revendicatives ou touchant à la syndicalisation, au développement de nos cadres, etc.), c'est-à-dire leur prise en compte coordonnée par toute la CGT.

Notons d'ailleurs que la confédéralisation d'un problème donné peut se gérer de différentes façons :

Soit par une « maîtrise d'œuvre » de la confédération. Celle-ci initie le débat, propose et anime un processus de suivi, tire les enseignements.

Soit par un travail collectif, structuré (ou non), entre plusieurs organisations, la confédération pouvant (ou non) y jouer un rôle sans qu'il soit forcément dirigeant.

L'essentiel est d'accomplir un travail de coopération permettant d'appréhender toutes les facettes du problème, et de déboucher sur des actions efficaces. Cela n'a rien à voir avec la centralisation qui serait à l'opposé de toute la démarche exposée dans ce rapport.

À l'évidence, des questions de plus en plus nombreuses nécessitent des échanges et des coopérations nationales et interprofessionnelles : le champ de la confédéralisation s'accroît. Mais nous n'en concluons pas que les prérogatives et l'appareil confédéral devraient augmenter en proportion.

La Confédération et ses secteurs de travail :

Ce besoin croissant de prise en compte coordonnée dans de multiples domaines est une des grandes constantes des rencontres du groupe avec les fédérations, unions départementales, unions locales.

Il y a deux types complémentaires d'attentes vis-à-vis des secteurs de travail confédéraux :

– pour produire des analyses, repères, propositions d'actions,
– pour apporter une aide concrète aux unions départementales et fédérations (voire aux unions locales et syndicats) dans la définition et la mise en œuvre de leur propre démarche.

Notamment pour l'animation revendicative, l'amélioration de la vie syndicale, la communication et la réflexion / action en matière économique.

Dans une période de transformation profonde de nos conceptions et de nos pratiques syndicales, la confédération a une responsabilité particulière :

– pour l'impulsion de ces efforts, la valorisation des acquis, le débat franc et lucide sur ce qui pose problème ;
– pour créer un climat de réflexion sereine, d'écoute mutuelle, d'expérimentation de solutions novatrices ;
– pour le respect des règles de vie mutuellement et librement consenties, point sur lequel nous reviendrons plus loin.

Les organismes de direction confédérale :

Le groupe a très peu travaillé sur cette question, ce qui n'est pas en sous-estimer l'importance, ni minimiser les nombreuses remarques présentées par les organisations rencontrées. Mais il nous a semblé qu'une éventuelle évolution du rôle, de la composition, du mode de fonctionnement du CCN, de la CE ou du bureau confédéral ne pouvait venir qu'en conséquence d'une analyse des structures de la CGT, de leurs relations, et de la place propre de la confédération dans le dispositif.

De façon plus générale, nous pensons que les approches contenues dans ce rapport – si elles étaient retenues – devraient conduire à ce que chaque organisation s'interroge sur les moyens de les mettre en œuvre, et notamment sur leurs conséquences en matière d'organismes et de style de direction.

Le fédéralisme

Le fédéralisme est un des principes fondateurs de la CGT, présent dans les statuts confédéraux depuis 1902 sans une forme pratiquement inchangée.

Il n'est cependant pas défini précisément. Plus qu'une règle explicite, c'est un mode de vie, une conception des relations entre les organisations confédérées.

Cette bien cette conception qu'il est nécessaire de clarifier et d'enrichir, pour répondre au besoin essentiel déjà exposé : assurer la complémentarité des organisations de la CGT au service de l'activité et du développement des syndicats.

Autonomie et cohérence.

Deux notions indissociables nous semblent définir le fédéralisme adapté aux conditions d'aujourd'hui.

L'autonomie de décision et de fonctionnement de chaque organisation.

La nécessité de cohérence, de prise en compte de l'ensemble des besoins du mouvement syndical.

Souvent, le fédéralisme a été assimilé à la seule autonomie, conçue de manière défensive. Parfois on tourne même à la caricature : « on ne peut rien nous imposer ».

Depuis le 44e congrès, les notions de coopération, coresponsabilité, codécision ont fait l'objet de nombreux débats. Le groupe a estimé nécessaire de préciser la signification de ces termes. Comme d'autres définitions, celles-ci pourront paraître arbitraires, mais elles sont certainement utiles pour clarifier les problèmes complexes qui nous sont posés.

Coopération :

Il s'agit du mode de vie normal entre organisations (ou individus) engagés dans une même cause, partageant les principes fondamentaux du syndicalisme, pour impulser la mise en œuvre d'une même orientation.

Concrètement, c'est la pratique systématique de l'information, de l'écoute, de la consultation, de l'entraide, du respect mutuel, de la franchise dans l'expression de désaccords ou d'interrogations.

Coresponsabilité :

C'est le fait d'assumer à plusieurs la conduite de telle ou telle action ou la mise en œuvre de telle ou elle orientation déterminée ensemble.

On peut par exemple parler de coresponsabilité des unions départementales et fédérations dans la conduite d'une lutte, pour la syndicalisation, pour le mandatement au congrès confédéral, ou la mise en place des cadres et des moyens nécessaires aux unions locales, etc.

Codécision :

Il s'agit de prendre ensemble une décision pour laquelle peuvent exister des approches différentes. Cela peut aussi concerner des situations où une décision appartenant en propre à une organisation – au nom de l'autonomie a des incidences sur la vie d'autres composantes de la CGT. Évidemment, nos principes nous conduisent à ce que la codécision résulte du débat, de la conviction. Mais peut-on éluder le besoin dans certains cas de procédures permettant de trancher un désaccord persistant ?

Ces questions ne sont pas nouvelles. Mais elles prennent aujourd'hui une acuité particulière :

Parce que notre conception de l'élaboration revendicative, de la décision d'action coordonnée n'est plus de « définir d'en haut et de faire redescendre », mais de partir des besoins, de la décision de chaque catégorie, secteur, entreprise, et d'en organiser la convergence.

Parce que l'activité revendicative avec ses divers aspects professionnels et interprofessionnels, exige d'intervenir à de multiples niveaux de décisions patronales et gouvernementales, et donc ne peut être gérée efficacement par une seule organisation.

Parce que l'urgence de notre déploiement, de la mise en œuvre des transformations nécessaires de nos pratiques syndicales suppose une coordination efficace, et une utilisation optimale de nos moyens humains et matériels.

Quelles règles de vie ?

La mise en œuvre du fédéralisme défini plus haut pose à l'évidence plusieurs problèmes.

L'autonomie des organisations suppose pour elles une vie démocratique de qualité, mettant effectivement les syndicats qui la constituent en situation de décider, en toute connaissance de cause.

La nécessité de codécisions exige un accord mutuel sur des méthodes de résolution des différences de point de vue.

Enfin, la dernière période a été marquée par une multiplication de conflits parfois aigus entre syndicats, fédérations, unions départementales, accompagnés de « coups de force » : décisions unilatérales de désaffiliation, blocage des cotisations, recours (heureusement rares) aux tribunaux… Le groupe de travail considère qu'il faut réaffirmer – et surtout pratiquer – une éthique syndicale plus rigoureuse, et revaloriser la notion de respect scrupuleux des règles de vie, à partir du moment où elles ont été librement acceptées par tous.

En revanche, des opinions différentes sont apparues concernant l'opportunité de renforcer les règles statutaires et de prévoir des procédures d'arbitrage ou disciplinaires.

Notons à ce propos que l'actuel article 16 des statuts prévoyant une « commission des conflits » n'est pas utilisé, et de surcroît illégal (la loi interdit l'usage dans les associations et syndicats de clauses dites compromissoires).

Questions des moyens

Dès le début de ses travaux, le groupe a considéré que la répartition des cotisations, comme l'ensemble des questions financières, ne pouvait être abordée qu'en conséquence d'une analyse de nos structures et de leur fonctionnement.

Il faut donc absolument éviter de les traiter « en soi ». D'autant que la situation financière globalement difficile des organisations confédérées ne crée pas les conditions les plus favorables au débat. En revanche, il est certain que la nécessaire modification de notre mode de vie dépendra pour partie d'un volet financier. Nos différents contacts avec les organisations ont d'ailleurs montré une attente forte d'avancées concrètes, notamment de la part des syndicats et unions locales. Le CCN de mal 1994 a adopté la proposition suivante (une voix contre, une abstention) : « Nous votons sur le principe d'une étude de nouveaux systèmes de péréquation. Nous étudierons une répartition en pourcentage ; nous verrons aussi si d'autres systèmes sont possibles et nous examinerons le FNI ». Le groupe de travail n'est pas en tant que tel chargé de cette étude. À partir de recherches sur la situation actuelle réalisées par le secteur politique financière, il en a cependant débattu, en lien avec l'ensemble de sa réflexion.

Les problèmes rencontrés.

Actuellement, toutes les organisations sauf les syndicats, décident indépendamment et annuellement du montant de leur cotisation. Les conséquences de cette « juxtaposition des autonomies » sont multiples :

Les ressources du syndicat sont définies par soustraction : la cotisation de l'adhérent, moins ce que réclament les structures auxquelles il est affilié. Dans des cas de plus en plus nombreux (notamment là où le syndicat rayonne sur des secteurs à bas salaires), le total des reversements statutaires dépasse la somme perçue. Cela conduit nombre de syndicats à des entorses plus ou moins explicites aux règles statutaires : « choix » des structures auxquelles on reverse, non-paiement de toutes les cotisations, usage excessif des timbres à taux réduits…

La diversité des taux pratiqués introduit des inégalités considérables. À niveau de cotisations et de besoins équivalents, deux syndicats auront des ressources très différentes selon leur branche ou département.

Sans qu'il ait été possible de conduire une étude vraiment précise, Il apparaît que les unions locales sont les « victimes privilégiées » des difficultés des syndicats à assumer toutes leurs obligations.

Malgré des correctifs apportés par certaines structures (cotisations différenciées par tranche, parfois au pourcentage…), le système des reversements à taux fixe pénalise les syndicats dont les adhérents ont les plus bas salaires.

Les cotisations spécifiques (essentiellement la part de l'UGICT et celle des unions fédérales, avec parfois une cotisation fédérale plus forte) se surajoutent le plus souvent aux autres. Cela pèse particulièrement sur les syndicats recrutant dans les plus petites catégories de maîtrise et de techniciens ; c'est aussi un frein financier à l'affiliation à l'UGICT de la totalité des Ictam syndiqués.

La révision annuelle du barème des cotisations ne favorise pas les concertations entre structures, même là où elles correspondraient à une volonté partagée.

Ainsi, et sans vouloir noircir le tableau, ni minimiser les nombreux efforts de modération opérés ces dernières années, nous sommes en présence d'un système complexe, inégalitaire, et qui défavorise d'abord les organisations dont nous affirmons le rôle essentiel : syndicats, unions locales. Évidemment, aucune règle de répartition ne suffira à régler les problèmes, ni ne remplacera la conquête de forces organisées plus nombreuses, et la bataille pour un collectage régulier des cotisations de l'adhérent.

Il est également clair que toutes décisions éventuelles devraient être assorties de dispositions transitoires évitant à quiconque des chutes brutales de ressources.

Pour la clarté du débat, il nous semble nécessaire de distinguer :

La répartition elle-même de la cotisation, c'est-à-dire la détermination de la part revenant à chacun au terme du processus de collectage/reversement.

Le processus de circulation des cotisations : qui collecte et comment ? qui reverse et à quelles structures ? directement ou indirectement ? etc. Des questions analogues se posent aussi pour l'acheminement du matériel (carnets pluriannuel, timbres, FNI).

Les méthodes de gestion des cotisations. Sur ce dernier point, le groupe n'a pas engagé de réflexion, si ce n'est pour rappeler des constats bien connus : des exercices échelonnés sur 36 mois ; pas de cohérence (donc peu de moyens de pression) vis-à-vis des organismes bancaires ; progrès encore lents de l'utilisation du Pac ; complexité de la tâche des trésoriers difficultés à utiliser le collectage et les reversements pour améliorer la connaissance en temps réel de nos adhérents et de leur répartition.

Concernant la répartition de la cotisation.

Le groupe est favorable à une règle générale de répartition entre les cinq organisations fondamentales, syndicat, union locale, union départementale, fédération, confédération. Étant entendu :

– que le financement des comités régionaux est à assurer par les unions départementales correspondantes, sur leur part,
– que le financement des structures de coordinations évoquées dans la quatrième partie relève (en montant et en modalités) des organisations qui en ont décidé la mise en place, et ceci sur leur part de ressources.

Le financement de l'UCR devra faire l'objet de réflexions complémentaires. S'agissant des organisations spécifiques de l'UGICT, il nous semble nécessaire de poser les principes suivants :

– l'affiliation à l'UGICT de tout ou partie des adhérents d'un syndicat devrait être sans incidence sur les ressources de celui-ci,
– il faudra prévoir le montant et les modalités des cotisations à l'UGICT au plan national,
– la part professionnelle doit inclure le financement des structures spécifiques. La répartition entre fédération et union fédérale, et les modalités de perception, sont à déterminer branche par branche, compte tenu des diversités existantes : union fédérale ayant ses propres cotisations et budget, ou recevant une part de la cotisation fédérale, etc.

La grande majorité du groupe considère que la fixation d'un pourcentage pour chacune des cinq organisations est à terme la meilleure solution : simple, équitable, ne nécessitant pas de révision annuelle.

Il n'y a pas, en l'état, de propositions sur la clé de répartition. Le groupe a pointé un besoin urgent : garantir aux syndicats et unions locales des ressources minimales. En revanche, des opinions différentes sont apparues sur plusieurs questions :

Faut-il présenter un projet complet dès le 45e congrès, ou envisager une étape concernant les syndicats et unions locales ? (mais alors, selon quelles modalités ?).

Faut-il fixer nationalement le pourcentage attribué à l'union départementale et celui à l'union locale, ou bien déterminer un chiffre global pour le « bloc interprofessionnel », de façon à tenir compte des situations diverses existantes (pas d'union locale partout, des différences de structuration, de capacités d'intervention) ?

Faut-il lier une réforme de la ventilation des cotisations à un examen général des moyens ? Celui-ci est-il d'ailleurs concrètement réalisable ?

Enfin, la gestion du FNI devrait faire l'objet d'une réflexion : comment en utiliser à plein les ressources ? Faut-il les augmenter de façon à donner de plus larges possibilités d'intervention ? Quels principes d'attribution des fonds : seulement des aides ponctuelles ou transitoires ? Ou une péréquation plus structurelle au profit de certaines organisations ? Quel lien opérer entre nos axes de déploiement prioritaires et l'utilisation du FNI ?

À propos des modalités.

S'agissant de l'acheminement du matériel syndical et du processus concret de répartition des cotisations, nous en sommes au stade du questionnement. Par exemple (et de façon non limitative) :

– Comment revaloriser ensemble la démarche de commande du matériel par chaque syndicat ?
– Faut-il en rester à un acheminement placé sous la responsabilité des fédérations ?
– Doit-il y avoir un seul système d'acheminement du matériel ? Ou faut-il d'abord viser l'efficacité dans des situations très différentes ?
– Comment régler la part confédérale ? Directement ou via les unions départementales et fédérations ?
– Y a-t-il lieu de distinguer règlement du FNI et règlement des autres cotisations ?

Conclusion

Tout au long de son activité, le groupe a constaté l'ampleur et la complexité des problèmes abordés. À l'évidence, il n'exista pas de solution toute faite, ni de mesures immédiatement applicables suffisant à tout régler. Nos réflexions, puis le débat le plus large possible dans la CGT devraient permettre de démarrer un processus, avec des étapes, des transitions, des expérimentations, et un bilan régulier. Mais le plus mauvais choix serait celui de l'immobilisme. Comme le rappelait Louis Viannet dans ses conclusions à la commission exécutive du 5 mai 1994 :

« Quand on donne la dimension des problèmes au niveau national, cela devient presque une révélation. Pourquoi ? Parce que la connaissance des réalités fait mieux apparaître le sérieux et la gravité de la situation (…) Si nous n'inversons pas la tendance que nous constatons depuis dix ou douze ans, nous allons tout droit vers un syndicalisme qui ne sera présent que sur un champ dangereusement rétréci. Et cela va vite, très vite… ! »

« La question, c'est de mettre toutes nos forces au service de notre objectif. De ce point de vue, nous avons une question incontournable : quand on a pris conscience totale de cette réalité, qu'est-ce qu'on change ? Qu'est-ce qu'on modifie du point de vue du style de travail, des modes d'organisations, des rapports entre organisations, de la conception de la coopération, des moyens à mettre en œuvre pour que toutes les forces soient au service de cet objectif ? »

Statuts confédéraux le débat est lancé

Au mois de juin, la commission exécutive confédérale examinera les propositions de modifications statutaires à soumettre au congrès. Cette question, comme toute la préparation du 45e congrès, doit être l'affaire de chaque syndicat de chaque adhérent.

Dans notre organisation, fondée sur l'engagement volontaire et la solidarité, les statuts ne peuvent être conçus comme une réglementation contraignante. Ils n'ont pas non plus vocation à résumer un document d'orientation. En revanche, ils décrivent nos règles de vie commune, nos objectifs, nos valeurs, nos principes de fonctionnement, bref, ce qui fait l'identité du syndicalisme confédéré. Ils sont aussi la référence permettant la coopération, la conver­gence des efforts des organisations de la CGT, dans toutes leurs diversités.

Ainsi, leur réécriture est inséparable de l'ensemble des réflexions préparatoires au 45e congrès. Elle découle évidemment du débat d'orientation. Mais la rédaction de statuts nécessairement synthétiques et précis dans leur formulation amène à mieux percevoir et à poser plus clairement certaines questions centrales dans notre réflexion d'aujourd'hui. Le débat très riche mené par la commission exécutive confédérale les 2 et 3 mars derniers en a été l'illustration. Il permet à la commission chargée de proposer les modifications statutaires, de travailler en pleine cohérence avec toute la préparation du congrès.

Cependant, des débats d'une telle importance concernent chaque syndicat, chaque adhérent. Cet article vise à présenter l'état actuel des travaux de la commission et la façon dont elle entame la phase de rédaction. Comme il est d'usage, il n'engage que ses deux auteurs, qui se sont néanmoins efforcés de traduire au mieux la réflexion collective…

Le premier axe retenu est de procéder à une refonte complète des statuts, de leur agencement comme de la rédaction des articles. Cela est sans précédent dans l'histoire récente de la CGT. Nous vivons en effet avec des statuts issus de modifications successives apportées depuis 1936, ce qui au fil du temps les a rendus assez confus. Mais nous avons surtout – besoin de traduire les conceptions novatrices engagées avec le 44e congrès et depuis. Nous allons essayer de construire ensemble un texte lisible par tous les salariés, présentant le plus clairement possible ce que nous sommes, ce que nous voulons, comment nous fonctionnons. En cette année du centenaire, ce peut être une des façons d'affirmer nos grandes ambitions pour l'avenir du syndicalisme.

Les valeurs fondatrices

Refonte complète ne signifie en rien rupture. Il s'agit au contraire de dégager, d'expliciter les valeurs fondatrices du syndicalisme et qui en constituent aujourd'hui la modernité. Nous proposons que le préambule affirme cette continuité, en référence aux deux textes historiques que sont la charte d'Amiens, et la charte d'unité de 1936, et expose nos choix essentiels pour une société fondée sur la réponse aux besoins des hommes.

Ensuite, une première partie traitera des buts du syndicalisme confédéré, de sa constitution, de ses principes. La défense des intérêts des salariés y occupera une place centrale ainsi que le rôle et les droits du syndiqué, ce qui sera une véritable nouveauté. Évidemment, cette partie explicitera nos conceptions de la lutte des classes, de la démocratie, de l'unité (y compris notre objectif de réunification syndicale), de l'indépendance (conçue non comme une restriction au champ de l'activité syndicale, mais au contraire comme l'affirmation du rôle indispensable du syndicalisme dans toute la société).

La question de savoir qui compose la CGT a soulevé de multiples débats. Chacun reconnaît qu'il est nécessaire d'affirmer le syndicat (quasiment absent de nos statuts actuels…) comme l'élément de base de notre construction. Cela ne doit pas conduire à affaiblir le rôle des fédérations et unions départementales, ni à abandonner une des règles constitutives les plus anciennes de la CGT : pour être confédéré, un syndicat doit nécessairement adhérer à chacune de ces deux organisations. Dans ces conditions, la CGT ne se compose­-t-elle pas de ses syndicats, de ses unions départementales, de ses fédé­rations, de ses unions locales, la confédération étant le bien commun à chacun ?

La place du syndicat, son rôle pour l'exercice de la démocratie, la définition des revendications et le développement des luttes avec les salariés, seront les éléments les plus nouveaux de la deuxième partie consacrée à la description des organisations de la CGT et de leurs relations. Les syndicats constituent les unions départementales, les fédérations, les unions locales. Ils en déterminent les orientations, les mettent en œuvre, élisent les directions de ces organisations. L'obligation d'acquitter complètement et régulièrement les cotisations statutaires est à confirmer.

Les unions locales

Concernant les unions locales, il y a lieu d'affirmer encore plus nettement la place qu'elles doivent tenir dans l'activité et le déploiement de la CGT, et la responsabilité de toutes nos organisations pour qu'il en soit réellement ainsi la mise en place partout et le renforcement des unions locales, la conquête de leurs moyens financiers et humains sont posés en termes de processus, exigeant la coopération de toutes les composantes de la CGT. En ce sens, reconnaître aux unions locales, une importance analogue à celle des unions départementales et fédérations ne conduit pas à un traitement identique dans les statuts qui ignorerait les caractéristiques propres de chaque organisation et la réalité de la situation des unions locales, aujourd'hui.

L'autre question importante posée dans cette partie est celle du fédéralisme, terme présent dans nos statuts depuis 1902, mais qui a recouvert des conceptions et pratiques sensiblement différentes. Là encore, l'essentiel est, nous semble-t-il, de définir clairement les principes des relations entre les organisations. Deux idées inséparables seront proposées : le respect de l'autonomie de chaque organisation, dans le cadre des statuts et des orientations du congrès confédéral ; la recherche permanente de la coopération, de la solidarité, de la prise en compte des intérêts de l'ensemble du salariat. Ainsi, loin d'opposer des structures entre elles, le fédéralisme moderne organise la complémentarité au service de l'activité et du développement des syndicats.

Faut-il traiter des conflits éventuels et de leurs modes de règlement ? Il s'agit là d'une question complexe. Des problèmes réels se sont posés dans la CGT, et se posent encore. Le respect scrupuleux des statuts, l'information complète des syndiqués, la recherche permanente de la coopération sont évidemment les méthodes les plus efficaces. La commission proposera cependant des pistes permettant d'aider à régler des différents persistant entre organisations. La reprise des dispositions actuelles (commission des conflits) apparaît exclue elles sont juridiquement prohibées, les syndicats ne pouvant mettre en place des procédures d'arbitrage ; elles sont surtout tombées en désuétude.

Deux autres éléments nouveaux devraient figurer dans cette partie : la responsabilité de toute la CGT pour organiser les sans-emploi, et donner à ces syndiqués les mêmes droits qu'aux autres ; l'orientation de construction d'organisations spécifiques d'ingénieurs, cadres, techniciens, sans évidemment imposer de modèles ou de rythme de mise en œuvre de cet objectif.

Diversités des situations

Plus généralement, cette deuxième partie des statuts devra veiller à tenir compte des grandes diversités de situations existant dans la CGT, et éviter toute démarche normative.

S'agissant de l'Ugict et de l'UCR, les statuts rappelleront leur nature d'organisations de la CGT (même si elles ne peuvent être considérées sur le même plan que les syndicats, unions locales, unions départementales et fédérations) et leur rôle pour définir et mettre en œuvre l'activité confédérale et le déploiement de la CGT auprès des salariés concernés.

Une insistance particulière sera portée au rôle des comités régionaux, compte tenu des pouvoirs renforcés donnés à la région en tant que collectivité territoriale et à l'importance de leurs coopérations avec les fédérations. Nous en restons à la conception actuelle d'un comité régional émanation des unions départementales concernées, tout en étant attentifs aux évolutions en cours. Un tel sujet mérite sans doute de nou­veaux approfondissements.

La troisième partie proposée traitera du congrès confédéral, des organismes de direction, de quelques aspects de l'activité confédérale (presse, associations…) et des principes de sa politique financière. À l'évidence, il s'agit là de questions encore plus directement liées à des débats d'orientation qui sont loin d'être conclus. Nous n'avons d'ailleurs pas toujours une connaissance suffisamment exacte de la situation actuelle : par exemple en matière financière, l'enquête lancée par la confédération pour connaître précisément les moyennes de cotisations versées aux syndicats est encore très peu prise en compte. C'est pourtant indispensable si l'on veut être en capacité de proposer des modifications viables au système actuel.

Plusieurs de ces questions feront l'objet d'un examen prochain à la com­mission exécutive confédérale et nécessiteront un article prolongeant celui-ci.

Nous souhaitons que ces quelques éléments aident à mesurer l'enjeu de la refonte de nos statuts, et contribuent à en faire une partie intégrante de la réflexion collective, évitant ainsi qu'ils soient du domaine réservé de quelques-uns.

Philippe Masson et Alain Pouchol, Commission des statuts ; Membres de la commission exécutive confédérale