Texte intégral
Messieurs les Parlementaires,
Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
Je me réjouis de présider pour la seconde fois le Conseil supérieur de la Mutualité. Par ma présence je veux témoigner de l'intérêt que je porte à vos travaux et aussi saluer vos nouveaux membres élus. Votre nouveau mandat ayant commencé officiellement le 1er décembre j'ai tenu à le réunir sans plus tarder afin de remettre en route ces structures de représentation et de concertation que sont le Conseil supérieur et sa section permanente.
J'ai déjà exprimé à l'occasion du Congrès de Bayonne les intentions du Gouvernement quant à la transposition des directives européennes. Je n'y reviendrai pas, d'autant plus que je sais que la concertation est désormais entrée dans une phase active, avec comme objectif de mettre au point un texte qui réponde au souci que vous avez vous-même exprimé, monsieur le Président, d'éviter d'imposer aux mutuelles de nouvelles contraintes et de leur permettre de maintenir et d'affirmer leur spécificité.
C'est ainsi que, conformément à votre souhait, les œuvres sociales, dont l'existence découle directement de l'activité des mutuelles, pourront continuer à être gérées directement par celles-ci et qu'aucune obligation nouvelle ne devra peser sur les petites mutuelles qui n'entrent pas dans le champ d'application des directives européennes.
La place de la mutualité est en effet d'autant plus importante que notre communauté nationale a besoin de réaffirmer les valeurs de solidarité. Elle sait pour cela pouvoir compter sur ceux qui, comme vous, expriment ces valeurs par leur engagement à travers un mouvement qui conjugue intérêt personnel et solidarité collective : la prévoyance pour soi, qui répond à un objectif d'intérêt personnel et la prévoyance pour autrui qui est une forme de fraternité selon la belle formule du Président Laroque.
Parce que vous avez été à l'origine même de la protection sociale et parce que cette année nous allons célébrer le cinquantenaire de la création de la sécurité sociale, je sais que vos préoccupations se tournent actuellement vers l'avenir même de notre système de protection sociale et particulièrement de l'assurance maladie.
Vous savez que je partage votre constat sur l'insuffisante efficacité de notre système de santé au regard de son coût pour la collectivité nationale alors que le niveau de la prise en charge – hors protection complémentaire – est plus faible que dans les autres pays européens.
La politique de maîtrise médicalisée de l'évolution des dépenses de santé est directement inspirée de cette préoccupation. Les références médicales opposables, la mise en pi ace prochaine du dossier médical et la poursuite des travaux sur le codage des actes et des pathologies sont au cœur de cette démarche. Il s'agit de dépenser mieux en agissant sur le comportement des professionnels de santé et des patients.
Avec le rapport sur le Livre blanc sur la santé et l'assurance maladie, nous disposons désormais d'une base de discussion pour aller au-delà afin de dégager les moyens d'agir sur l'offre de soins et de redéfinir nos objectifs, et je sais que la mutualité toute entière est prête à en débattre.
J'ai noté les orientations que préconise la mutualité pour l'avenir de notre protection sociale ; elles ne sont pas uniquement critiques – ce qui est facile – mais se veulent aussi constructives et je m'en réjouis. Elles apportent une contribution importante au débat engagé sur ces questions.
Dans le sens de ces propositions, je vous rappelle que le programme de lutte contre l'exclusion adopté par le Gouvernement en 1994 comporte des mesures importantes pour favoriser l'accès aux soins et à la couverture sociale des plus démunis. Il comporte également l'engagement de la mise à l'étude de l'assurance maladie universelle. Mais rien ne sert d'élargir la couverture sociale, si les dépenses continuent à croître sans apporter d'amélioration de l'état de santé. Nous le savons tous, même si ici ou là certaines feignent d'en douter en cette période où les Français ont pourtant besoin qu'on leur dise la vérité…
Cette session du conseil supérieur de la mutualité est l'occasion, après les élections, de procéder à la désignation de votre Vice-Président, de votre Trésorier et des membres de la section permanente.
Je vous laisse donc le soin d'y procéder maintenant. Je vais vous quitter tout en formant le vœu que les travaux du conseil supérieur soient riches et traduisent la vitalité de cette démocratie sociale à laquelle vous aspirez.
Jeudi 16 mars 1995
Monsieur le Président,
Mesdames, messieurs,
C'est pour moi un grand plaisir de procéder aujourd'hui à la pose de la première pierre de l'Institut mutualiste Montsouris.
Ce projet illustre la volonté et la capacité de la mutualité de mener, dans la concertation et avec l'ensemble des acteurs concernés, une politique ambitieuse de restructuration et de modernisation.
Il répond aux orientations générales de la politique hospitalière des pouvoirs publics. Le rôle important que devra jouer le futur établissement dans l'organisation du service public hospitalier au service des malades de Paris et de sa région explique ma présence parmi vous aujourd'hui.
Cet Institut sera en effet la première étape de la réalisation d'un vaste projet d'établissement. Il est le fruit d'une réflexion approfondie menée durant ces trois dernières années ; il traduit votre souci constant d'adapter les établissements mutualistes à l'évolution de la médecine et aux attentes de nos concitoyens.
La restructuration, qui se traduit par la suppression de 153 lits, même s'il faut toujours relativiser la notion du nombre de lits, permettra d'adapter les budgets de fonctionnement alloués au nouvel établissement, une fois prises en compte les dépenses d'investissement.
Comme vous l'avez indiqué M. le Président votre démarche a pleinement associé les personnels médicaux, paramédicaux, administratifs et techniques dans de nombreux groupes de travail animés par votre équipe de direction. Toutes les instances des deux établissements, qu'il s'agisse des comités d'établissements, des instances de représentation des médecins, et finalement du comité central d'entreprise de la mutualité fonction publique, ont su prendre leurs responsabilités avec sagesse et pragmatisme dans les choix auxquels clics ont été confrontées.
Le projet médical vise à développer les points forts de chaque établissement : activités chirurgicales de pointe de la clinique de la Porte de Choisy et activités de médecine de l'hôpital universitaire.
Je tiens donc aujourd'hui à saluer la qualité du travail de concertation et de collaboration mené. Je le fais d'autant plus volontiers que nombre de rapports, consacrés aux restructurations hospitalières, soulignent les méfaits du cloisonnement et de l'insuffisante communication entre les acteurs.
Or, vous avez mené votre projet en étroite association avec les services déconcentrés de mon département ministériel (DRASS et DAS de Paris) et la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France également. Il s'intègre parfaitement dans le schéma régional d'organisation sanitaire.
L'État a donc résolument apporté son soutien à l'opération en acceptant un contrat d'objectif et en autorisant des crédits supplémentaires à la charge de l'assurance maladie.
Je vous demande de veiller à poursuivre cet effort tout particulièrement dans le cadre du comité de suivi de l'opération qui réunit l'État – l'Assurance maladie et la Mutualité fonction publique.
Je note à cet égard avec satisfaction que le futur Institut mutualiste Montsouris s'est engagé à développer des actions de complémentarité avec d'autres établissements hospitaliers : Gustave Roussy pour la prise en charge des malades atteints du cancer, et l'Institut de Puériculture de Paris pour les activités périnatales.
Au demeurant votre projet d'établissement s'intègre pleinement dans la politique hospitalière que je mène, fondée sur la rationalisation des équipements et le développement des structures alternatives à l'hospitalisation.
Je n'ignore pas les questions que soulève ici ou là la démarche entreprise avec les schémas régionaux d'organisation sanitaire pour définir à moyen terme les besoins de santé et les orientations qu'il convient de donner à l'utilisation des ressources que notre pays y consacre.
C'est en effet un exercice difficile qui nécessite lucidité, courage, ouverture et sens du dialogue et je tiens à remercier tout ceux qui y ont concouru, les élus, les responsables des services de l'État et les professionnels de santé.
Vous le savez notre pays consacre plus de 10 % de ses ressources aux dépenses de santé, ce qui le situe au 3ème rang mondial. Ceci témoigne de l'élévation de notre niveau de vie, de notre capacité et de notre volonté à prendre en compte les progrès de la médecine et les besoins nouveaux de la population liés en particulier aux évolutions de la démographie.
Cette dépense est largement prise en charge par la collectivité nationale à travers la Sécurité sociale ce qui témoigne de notre volonté à tous de faire preuve de solidarité en ce domaine. Pourtant, de ce fait, elle a un impact que nous ne pouvons pas ignorer sur les grands équilibres économiques de notre pays et elle engage la responsabilité des pouvoirs publics à garantir la pérennité du système, ce qui est essentiel et prioritaire. La maîtrise des dépenses de santé est ainsi l'un des enjeux les plus importants auxquels nous nous trouvons confrontés et je connais bien les préoccupations de la mutualité en la matière.
Aucun pays, en matière d'Assurance maladie notamment, n'a réussi à ce jour à créer un système auto-régulateur, qui ne nécessiterait aucune intervention des pouvoirs publics. L'Allemagne, souvent citée en exemple, et qui a réalisé des réformes courageuses et intéressantes, est néanmoins sans arrêt contrainte de remettre sur le métier la réforme de l'assurance maladie. D'ores et déjà la réforme Sechoffer, la troisième en quelques années, qui a produit des résultats si spectaculaires en 1993 semble voir ses effets s'atténuer. Je n'évoque que pour mémoire les États-Unis, dont l'exemple suffit à montrer les limites de la thèse scion laquelle le marché dans le domaine de la santé, serait le meilleur régulateur possible. La seule loi du marché, en matière de santé, coûte très cher à la collectivité et génère des exclusions incompatibles avec l'objectif même de la protection sociale.
Notre système d'assurance maladie se caractérise par la coexistence d'une médecine libérale avec un haut degré de socialisation de la dépense. De ce fait, en l'absence de mécanisme régulateur, ni le prescripteur ni le consommateur n'ont suffisamment intérêt à une modération de la dépense. Leur entente se fait nécessairement au détriment du tiers payeur, c'est à dire la sécurité sociale ou la mutualité.
Enfin une gestion à courte vue de notre système de sécurité sociale a sans cesse retardé les inéluctables ajustements, rendus de ce fait, encore plus difficiles et plus douloureux.
Il ne faut cependant pas considérer que le retour à l'équilibre durable est impossible. J'ai lors du débat au Parlement sur la Sécurité sociale indiqué les voies d'un redressement.
En premier lieu, je me félicite de la prise de conscience de la plupart des acteurs du système de protection sociale, qui considèrent désormais que la dérive des dépenses est insupportable et menace le système lui-même. Je remarque avec satisfaction que c'est le sens même de la réflexion actuelle du mouvement mutualiste.
C'est en effet, en concentrant les moyens disponibles sur les soins utiles aux malades qu'on leur apportera la meilleure réponse possible. Efficacité médicale et efficacité économique ne sont pas incompatibles.
La maîtrise médicalisée répond à cette préoccupation. L'accroissement du champ des références médicales pour 1995 est destiné à optimiser la pratique des médecins de ville au moyens d'outils élaborés avec toutes les garanties scientifiques nécessaires.
Quant au codage des actes et des prescriptions, qui est le complément indispensable des références médicales, le décret l'organisant est actuellement soumis à l'avis de la CNIL.
Enfin, avec la publication des textes organisant les modalités d'application du carnet médical, pour la première fois, le système de santé Français sera doté d'un outil décisif pour améliorer la coordination des soins et éviter les redondances d'actes ou de prescriptions.
Dans le domaine hospitalier il convient là aussi de renforcer la médicalisation de la gestion hospitalière notamment en utilisant les résultats des actions menées par de nombreux hôpitaux pour la médicalisation des systèmes d'information et tout particulièrement en tirant les leçons de l'expérience en cours en Languedoc-Roussillon. La clinique de la Porte de Choisy s'est illustrée par son dynamisme dans ce domaine et je crois que vous pourrez bientôt tirer les fruits des investissements effectués.
Grâce aux résultats de la médicalisation des systèmes d'information, l'activité des services pourra être évaluée réellement et les moyens budgétaires être affectés en fonction des résultats obtenus.
Le système actuel se borne en effet trop souvent, en l'absence d'informations précises sur l'activité, à indexer de manière trop uniforme les dotations budgétaires et ce sont les établissements les plus dynamiques qui sont pénalisés par le système actuel. À l'inverse, d'autres établissements profitent de rentes de situations inacceptables dans la situation de l'Assurance maladie.
Les réajustements qui s'imposent s'effectueront dès lors sur une base objective.
La maîtrise des dépenses hospitalières repose aussi sur une répartition efficace des activités et un développement volontaire des complémentarités et des coopérations qui permettent de garantir la plus grande sécurité et qualité des soins tout en veillant au respect de la politique d'aménagement du territoire.
Dans cette perspective la participation des caisses d'Assurance maladie est utile et légitime. Le contrat d'objectif passé entre l'État, la Caisse régionale d'Assurance maladie d'Ile de France et la Mutualité fonction publique me paraît répondre à la nécessité d'associer les caisses régionales à la démarche de planification.
La cérémonie qui nous réunit aujourd'hui est donc à plus d'un titre l'occasion de constater que votre action est en harmonie avec plusieurs orientations fondamentales de la politique que le Gouvernement a entrepris dans le domaine sanitaire et social.
Les œuvres sociales mutualistes peuvent y concourir. Par ce projet vous le démontrez avec éclat et je vous en félicite.