Texte intégral
M. Denoyan : Bonsoir.
La France environ 7 000 collèges et si 175 d’entre-eux sont victimes de manifestations violentes, c’est qu’ils expriment la crise de la Société en général. S’il ne faut pas exagérer la violence dans les établissements scolaires, il n’en demeure pas moins qu’elle augmente à grande vitesse, plus de 20 % en une année, d’après une enquête de la sécurité publique.
Les événements de ces derniers temps dans certaines banlieues ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Enseignants en grève, la presse, les médias, mobilisés sur ce dossier. Mais comment répondre à ces jeunes qui n’ont souvent aucune perspective à la sortie de l’école, dont la famille en crise n’assume plus son rôle, sans oublier un environnement insalubre ?
Quelles missions pour l’école, les collèges d’aujourd’hui et des années à venir ? Invité d’Objections, ce soir, Monsieur François Bayrou, ministre de l’Éducation.
Monsieur le ministre, bonsoir.
Nous allons vous interroger, bien sûr sur les manifestations de violence qui ont touché un certain nombre d’établissements scolaires ces derniers jours. Mais n’oublions pas non plus que vous êtes chef d’un Parti politique, Force Démocrate, membre de l’UDF qui désignera fin mars son nouveau Président.
Pour vous interroger :
– Lise Jolly, Dominique Brocard, Pierre Le Marc de France-Inter ;
– Fabien Roland-Lévy, Jean-Michel Apathie du Parisien-Aujourd’hui.
Monsieur Bayrou, des enseignants en grève pour dénoncer la violence dont ils sont victimes de la part d’élèves et de parents d’élèves vous ont amené, hier, à intervenir à l’Assemblée nationale dans les questions orales au Gouvernement et à parler de « sanctuarisation » de l’école. Pourriez-vous expliquer un petit peu votre pensée et ce que cela veut dire ?
M. Bayrou : D’abord, vous l’avez parfaitement noté, Monsieur Denoyan… Bonsoir, d’abord, à tous…
M. Denoyan : … Bonsoir.
M. Bayrou : Vous avez noté que la violence que l’on constate dans un certain nombre d’établissements scolaires, pas dans tous, e vous avez eu raison de relativise les chiffres, cette violence est une violence reçue par l’école de la Société. C’est la violence du monde extérieur, un monde extérieur de plus en plus dur dans lequel, en effet, un certain nombre de liens traditionnels éclatent, et vous avez cité la crise de la famille, qui retentit à l’école. Comme si, désormais, la loi du plus fort qui est la loi de certaines cités, la loi dans certaines rues, cette loi du plus fort était désormais la loi d’un certain nombre de jeunes et ils vivaient à l’école selon cette même loi.
La loi du plus fort dans la rue, dans la cité est désormais la loi du plus fort à l’école. Et donc geste de violence quand on n’est pas content. Il est temps de dire que l’école vit selon d’autres lois et selon d’autres règles que le monde violent dans lequel…
M. Denoyan : … Tout le monde est d’accord là-dessus, Monsieur Bayrou.
M. Bayrou : Vous m’avez demandé d’expliquer.
M. Denoyan : Oui, mais je voudrais que vous en arriviez à l’explication même.
M. Bayrou : Il est temps de dire que l’école vit selon d’autres lois et qu’elle ne vit pas selon la loi du plus fort. Elle vit selon une loi plus généreuse qui est la loi du respect des enseignants qui transmettent un bien précieux. Il est donc temps de dire qu’en effet l’image ou le rêve d’une école totalement ouverte sur l’extérieur et dont le projet était d’être un reflet du monde extérieur, ce rêve était une erreur. C’est ce que j’ai voulu dire en disant qu’il fallait refaire de l’école. J’ai employé le mot de « sanctuaire » pour dire qu’il y avait du sacré républicain dans l’école.
M. Denoyan : D’accord. Cela va se manifester de quelle manière ?
M. Bayrou : Je vais prendre un exemple simple : Hier soir, sur une chaîne de télévision, dans un débat comme celui-ci, j’ai dialogué avec une enseignante qui avait été agressée. Elle avait été agressée par des jeunes venus de l’extérieur. Son lycée comptait 50 portes ouvertes sur l’extérieur. Il avait été conçu, car l’architecture n’est, bien entendu, qu’une image du projet, dans un temps où l’on pensait qu’il fallait qu’en effet l’école soit la plus ouverte possible. Je crois qu’on se trompe. Et il est temps de dire qu’en effet il faut que l’école accepte…
M. Denoyan : … Donc, vous allez mettre des vigiles à ces 50 portes ?
M. Bayrou : Non, non, pas du tout. Il faut essayer de prendre les dispositions nécessaires pour que les entrées soient limitées en nombre, qu’elles soient surveillées, bien entendu, ouvertes à tous ceux qui font partie de la communauté scolaire. Les parents font partie de la communauté scolaire, il est légitime et normal que les parents aient leur place dans l’école. Et, au contraire, il n’y a qu’avec les parents d’élèves que nous réussissons…
M. Denoyan : … Les meneurs aussi font partie de l’école.
M. Bayrou : Que nous réunissons à apporter une réponse.
M. Denoyan : Les meneurs aussi.
M. Bayrou : Je me suis inquiété de ce point avec les chefs d’établissements qui jouent un rôle très important, j’ai dit : « Comment se fait-il que, même dans les établissements fermés, on ne réussisse pas mieux à empêcher les intrusions extérieures ? », ils m’ont répondu : « Mais, attendez, il y a plusieurs années qu’on a supprimé l’interdiction d‘entrer dans les établissements ».
M. Apathie : Mais les intrusions extérieures ne sont qu’une partie du problème. Les gosses qui ont cassé des vitres avec des pierres, ils étaient scolarisés dans l’école. Les problèmes sont à l’intérieur de l’école. Les meneurs ne viennent pas de l’extérieur, ils sont à l’intérieur quelquefois.
M. Brocard : Il n’y a plus de surveillants.
M. Apathie : C’est une autre partie du problème.
M. Denoyan : Les questions arrivent très vite. Il faut aller à l’essentiel, Monsieur le ministre.
M. Bayrou : On va essayer de cadrer les choses.
Monsieur Apathie, qu’il y ait des problèmes avec des élèves, oui…
M. Apathie : … Oui, c’est cela.
M. Bayrou : Est-il utile de surcharger ces problèmes avec des jeunes venus de l’extérieur ?
M. Apathie : Non, ça, d’accord.
M. Bayrou : Trois sur quatre… attendez, parce qu’il faut parler de ces choses… trois sur quatre des agressions que la presse a relatées ces temps-ci étaient le fait de jeunes venus dans l’extérieur, entrer dans l’école pour faire régner la terreur, et qui n’acceptaient pas que des professeurs leur disent : « Non, ici, vous n’avez pas le droit ». N’est-il pas de bon sens, au-delà de toute théorie politique, de dire : « Protégeons nos enfants ».
M. Denoyan : Cela est une des mesures. On l’a compris.
M. Bayrou : Faisons-en sorte que les enseignants puissent ne pas être affrontés. C’est très important parce que, derrière tout cela, il y a une conception du monde. Dans les entreprises, vous n’avez pas le droit d’entrer. Sur les chantiers, vous n’avez pas le droit d’entrer. Pourquoi l’école serait-elle ouverte à des éléments extérieurs qui y auraient droit de cité, même quand ils font courir des risques aux enseignants et aux jeunes, je pense au racket, je pense à des trafics divers et je pense aux agressions contre les enseignants ? Mon devoir est de protéger cela.
Mais au-delà de cela, pour revenir toujours à l’idée de ce sanctuaire républicain, ce n’est pas seulement la protection des locaux ou des lieux de l’école, c’est plus important. C’est dire que nous avons à l’école des valeurs particulières, des règles. Ces jeunes manquent de repères et il faut que l’Éducation nationale ait le courage d’assumer ses propres règles et ses propres repères.
M. Denoyan : Vous voulez bien qu’on vous interroge, Monsieur Bayrou, pour essayer, à travers les questions, de bien comprendre votre pensée.
Lise Jolly.
Mme Jolly : Justement, vous parlez de jeunes qui manquent de repères. La violence est là. On a beaucoup parlé sur cette violence. On a beaucoup sondé les banlieues et essayé de savoir d’où elle venait. Cela fait 10 ans qu’on en parle. On l’a connue dans les lycées, on la connaît maintenant dans les collèges. Il y a pourtant dans l’Éducation nationale des expériences qui marchent. A Paris même, à Georges Clémenceau, on a cité hier, dans l’émission de télévision dont vous parliez, un collège en pleine Goutte d’Or qui est revenu à une certaine normalité, qui marche bien. Il y a aux Minguettes des expériences où on forme les profs. Pourquoi ne vous en inspirez-vous pas aujourd’hui ?
M. Bayrou : Précisément, comme vous suivez avec attention les problèmes d’enseignement, vous aurez vu que l’une des décisions que j’ai prises récemment, c’est celle de faire qu’à partir de la rentrée prochaine tous les I.U.F.M., les Instituts de Formation des Maîtres, aient une formation particulière aux situations de risques que vous décrivez. Et qu’on essaie, en effet, de transmettre cette expérience, je suis heureux que vous parliez des réussites, y compris dans la lutte contre la violence, on n’en parle jamais parce que la société médiatique est construite, et c’est naturel, de telle sorte qu’elle pointe…
Mme Jolly : … Je vais vous contredire, il y en a plein la presse en ce moment.
M. Bayrou : … Qu’elle pointe les dysfonctionnements plutôt que de pointer les réussites. C’est légitime. Mais je crois qu’il est bon, en effet, que nous puissions transmettre aux jeunes enseignants, ceux qui vont être professeurs dans ces zones et d’ailleurs dans toutes, parce que chacun a des risques de cet ordre, les réussites et l’expérience de ceux qui savent, qui ont trouvé des réponses. Non pas que les réponses éliminent le risque. Ce n’est pas la peine de croire qu’on va à l’école réduire ou répondre à tous les problèmes de la Société française, ce ne serait pas vrai. Mais au moins des réponses qui améliorent les choses.
M. Roland-Lévy : Je voudrais revenir à l’aspect immédiat et d’urgence du problème. Votre prédécesseur Jack Lang, a réclamé ce matin que soient créés immédiatement 1 000 postes de surveillants. Je crois que cela rejoint ce que vous préconisez aussi, c’est-à-dire surveiller les allées et venues dans les établissements. Est-il possible d’envisager ces 1 000 postes de surveillants ? Plus ou moins 1 000 postes.
M. Bayrou : Il faut faire des efforts d’encadrement. Et ce n’est pas la peine de dire le contraire, il faut que les zones sensibles aient des moyens supérieurs aux autres. C’est d’ailleurs ce que j’ai fait puisque les 175 collèges sensibles que Monsieur Denoyan citait ont des moyens plus importants. Et j’ai dit, hier, que ces moyens seraient intégralement respectés, même si le nombre des élèves baissait. Mais, naturellement la priorité que vous signalez d’affectations signifie aussi qu’il faut comprendre que les normes qui s’appliquent à ces zones doivent être des normes particulières. Elles ne sont pas généralisables parce que sans cela, bien entendu, on ne pourrait pas faire face. C’est donc un effort de solidarité demandé à tous.
Moi, je souhaite que tous les jeunes appelés du contingent qui jouent un rôle semblable, présence, attention, écoute et encadrement…
M. Denoyan : … Sans formation, tout de même.
M. Bayrou : Cela marche très bien.
M. Denoyan : Oui, mais peut-être que, face à certains groupes, ce sera difficile.
M. Bayrou : Je vais vous citer une enquête auprès des chefs d’établissements : les jeunes appelés du contingent, 97 % d’indice de satisfaction. Et les surveillants non plus n’ont pas de formation particulière. Les surveillants sont des étudiants salariés. Ils jouent un rôle très important.
Je suis pour ce que ces jeunes soient dirigés, bien entendu, en priorité vers ces zones sensibles. Il faut accepter de dire que la Nation toute entière doit faire un effort en direction de ceux qui sont les plus fragiles. Ce qui veut dire qu’il faut accepter de classer en urgence, accepter de dire où l’effort doit être dirigé et que, d’une certaine manière, les autres doivent participer à cet élan de solidarité.
M. Roland-Lévy : Je crois qu’on s’est un peu moqué de vous quand vous avez annoncé la création d’un numéro de téléphone « SOS Violence », c’était il y a quelques semaines, à propos des mêmes problèmes de violence. Quel bilan en tirez-vous ? N’avez-vous pas été, à ce moment-là, pris un peu de court puisque, aujourd’hui, vous ne parlez plus de numéro « SOS Violence » ?
M. Bayrou : J’en parle et je trouve que ce n’est pas la réponse. Si c’était la seule mesure, ce serait complètement ridicule. Mais c’est une manière de faire attention aux problèmes. Une de vos consœurs a écrit ce matin dans un grand journal du matin que, au début, on pouvait croire que c’était un gadget. Et puis elle est allée passer une journée au téléphone « Violence ». Elle a pris la peine d’aller une journée écouter et elle a écrit un article où elle conclut que « ce qui pouvait apparaître comme secondaire, au fond, c’était un geste complètement nécessaire à l’égard de ces centaines d’enseignants qui ont besoin de parler à quelqu’un de la situation de risque qui est la leur.
Je vous invite, si vous en avez le temps, non pas à envahir mais, vous aussi, faites cet effort. Demandez-vous pourquoi il y a des centaines d’appels depuis que ce numéro a été ouvert pour les enseignants qui viennent dire leurs difficultés ?
M. Denoyan : Donc, vous en êtes satisfait ?
M. Bayrou : Monsieur Denoyan, dans les temps vers lesquels nous allons, il faut que les administrations ou les pouvoirs fassent attention à la base. Il faut qu’ils tendent l’oreille vers les gens qui sont sur le terrain et qui eux sont dans les situations de risque. Il faut considérer que ce sont des interlocuteurs aussi importants que les commentateurs avec lesquels, d’habitude, nous discutons, quels que soient les mérites de ces commentateurs.
M. Denoyan : D’accord, et qui peuvent poser des questions.
Dominique Brocard
M. Brocard : Vous êtes père de famille, moi aussi. Vous avez des professeurs qui sont chahutés, d’autres qui inspirent le respect, ce qui est nouveau, ce sont les professeurs qui sont tapés. Et on a l’impression qu’on redécouvre les vertus des surveillants. Mais il y 20 ou 30 ans, finalement, le système marchait pas mal. Il y avait des surveillants et il y avait moins d’histoires.
M. Bayrou : Monsieur Brocard, la Société française d’il y a 20 ou 30 ans n’était pas la Société française d’aujourd’hui. Les modèles sociaux que les élèves essaient d’imiter n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui. Je ne sais pas si vous avez regardé, elle était très intéressante, l’émission d’hier soir sur ces sujets-là ? La violence est devenue non pas un recours mais pour un certain nombre de jeunes une pratique normale…
M. Denoyan : … C’est le résultat d’un certain nombre de situations, tout de même.
M. Bayrou : Et ils disaient : « Il y en a qui ont peur de la bagarre, ce sont des bouffons. La bagarre, c’est normal et ce n’est pas si difficile ». En effet, ce n’est pas si difficile. Mais que leur montrons-nous à la télévision ? Quels modèles les émissions, les films, les feuilletons présentent-ils ?
M. Denoyan : Que leur offre la Société française ? Le chômage…
M. Apathie : … L’exclusion. Tout ça, oui je crois.
M. Bayrou : La télévision, elle aussi, montre la violence quotidienne. Le recours à la violence, c’est la façon normale de régler les choses.
M. Denoyan : Des banlieues sinistres, du chômage à la sortie de l’école…
M. Bayrou : … Monsieur Denoyan, vous avez complétement raison. Au fond, si on devait résumer le projet politique qui devraient être celui de toutes les formations politiques aujourd’hui, c’est bien celui-là. Essayer de construire une Société humaine, pas une Société…
M. Denoyan : … L’école n’est-elle pas devenue la bonne à tout faire de la République ? Il faut qu’elle assume le rôle des parents défaillants. Il faut qu’elle remplace un petit peu, j’allais dire, les repères intellectuels et philosophiques de la Société qui sont ne train de s’effilocher. Et vous voulez simplement maîtriser tout cela en fermant les portes à des éléments étrangers à l’établissement et mettre quelques surveillants en place. N’est-ce pas insuffisant par rapport à la nature du problème qui est posé ?
M. Bayrou : Restaurer le modèle républicain du respect, de la générosité et de l’autorité. Il n’y a pas de raison, il faut le dire de manière simple…
M. Le Marc : … C’est un peu défensif tout ça, François Bayrou.
M. Bayrou : Non, je suis pour le respect et je crois que les jeunes ont besoin d’autorité. Je crois que tous ceux qui racontent le contraire…
M. Denoyan : … Même ceux que nous avons vus sur les écrans de télévision ? Tels que vous les avez vus aussi ?
M. Bayrou : Oui, ceux-là aussi demandent de l’autorité.
M. Denoyan : Ceux-là seront amadoués par les mesures que vous dites ?
M. Bayrou : En tout cas, l’école a le devoir de défendre son modèle. Mais un instant pour répondre à ce que vous avez dit. Naturellement, vous avez raison. Chaque fois que quelque chose va mal dans la Société française, on se tourne vers l’école et vers personne d’autre, en disant : « S’il vous plaît, essayez de répondre ». C’est vrai dans tous les secteurs. C’est l’école qui doit…
M. Denoyan : … Intégrer, informer et éduquer.
M. Bayrou : Qui doit apprendre la sécurité routière. C’est l’école qui doit apprendre la santé. C’est l’école qui a la charge, et c’est un problème très important, de la lutte contre le Sida. C’est l’école qui a la charge de donner des repères alors que personne n’en a plus…
M. Denoyan : … Il faut peut-être revoir tout cela ? Monsieur Bayrou.
M. Bayrou : Il faut recentrer l’école… Monsieur Denoyan, c’est très facile – naturellement, c’est votre rôle – derrière un micro de dire : « S’il vous plaît, revoyez tout cela »…
M. Denoyan : … Oui, je vous le demande parce que cela ne va pas très bien.
M. Bayrou : Les enseignants, et je suis un peu leur avocat, disent : « Aidez-nous à revoir tout cela. Vous êtes gentils quand vous nous mettez en demeure de revoir les choses, nous voulons bien y participer, mais essayez aussi de comprendre ce qu’est la difficulté de notre travail et essayer de nous entourer de la considération nécessaire. Nous sommes en première ligne devant tous les problèmes de la Société française ».
Mme Jolly : Vous dites : « La Société a changé, il faudrait réorganiser l’école ». La question des rythmes scolaires est une question récurrente aujourd’hui dans notre Société. C’est peut-être d’ailleurs même, la réorganisation de la journée scolaire, une solution pour ces établissements empreints à la violence. On a l’impression, dans ce domaine, qu’on fait au coup par coup et on ne sait même pas qui fait quoi puisque, avec Guy Drut, vous vous partagez un petit peu la vedette sur ce dossier ?
M. Bayrou : C’est tout à fait normal que le ministre de la Jeunesse et des Sports y participe aussi et y travaille aussi, même si l’Éducation nationale a une responsabilité particulière. Pour ma part, plus on met d’énergie déployée pour essayer de changer les choses et plus je suis heureux.
Un mot sur les rythmes scolaires. Vous dites : « On fait au coup par coup », non, je ne crois pas que ce soit la bonne méthode. La bonne méthode, c’est l’expérience parce que nous savons que nous devons assumer un changement profond qui fasse que la journée d’un enfant lui permette de suivre complètement le cycle scolaire et, en même temps, de rencontrer des disciplines de la sensibilité, et, en même temps, d’avoir l’expression physique, sportive, qui lui est nécessaire. Or, on est en train d’éviter ce modèle-là. Ce n’est pas le modèle français habituel. Et cela ne peut se faire que par le terrain, que par des expériences soutenues par le sommet.
J’ai signé avec Philippe Séguin la première expérience d’Épinal. C’était même mon premier geste quand j’ai été nommé ministre de l’Education nationale, il y a trois ans. C’était une expérience. Ce sont des expériences qui coûtent, mais ce sont des expériences heureuses parce que c’est une manière qu’on va inventer le nouveau modèle français de journée scolaire dans lequel tout le monde cherche et tout le monde hésite.
Objections
M. Denoyan : Objection de Monsieur Marcel Pétavi, Secrétaire Général du Syndicat National des Personnels de Direction de l’Éducation Nationale. Bonsoir, Monsieur.
M. Pétavi : Bonsoir.
Bonsoir, Monsieur le Ministre.
M. Bayrou : Bonsoir, Monsieur le Président.
M. Denoyan : Je vous livre Monsieur Bayrou.
M. Pétavi : Je vous écoute avec intérêt, Monsieur le Ministre, cela fait des années que l’on parle de la violence à l’école. Le sentiment qu’ont les chefs d’établissement, c’est que, plus on en parle, plus nous voyons la violence s’emparer de l’école au point de la mettre en danger.
Il y a 20 ans, la violence était loin de nos établissements. Depuis 10 ans, elle rôde autour, à la sortie, par racket, drogue, etc. Depuis quelques années, elle pénètre dans l’école. Et ce qui est plus grave, me semble-t-il, c’est que ce ne sont plus des éléments extérieurs mais ce sont nos élèves ou une partie de nos élèves qui la transportent et qui la véhiculent.
Ils sont de plus en plus jeunes. Ils commettent des actes de plus en plus violents pour des motifs de plus en plus futiles et presque, parfois infantiles. On a l’impression qu’ils ne font plus la différence, du moins certains d’entre eux, entre le jeu et la réalité de la vie et de la mort.
Nous avons le sentiment que nous sous-estimons dans l’Éducation Nationale ce problème, et que ce que l’on nous demande, à nous, chefs d’établissement, c’est « pas de vague », « débrouillez-vous » …
M. Denoyan : Votre objection à Monsieur Bayrou, Monsieur Pétavi ?
M. Pétavi : Je vais vous poser trois questions :
1. êtes-vous prêt, Monsieur le Ministre, à donner un signe fort et des consignes fermes pour que les personnels et les chefs d’établissement aient les moyens de combattre la violence ?
2. êtes-vous décidé à rappeler à tous que, pour les jeunes, les droits n’ont de sens que si l’on exige d’eux qu’ils respectent leurs devoirs ? Et, pour cela, êtes-vous prêt à prendre des mesures concrètes, notamment à nous permettre d’agir en simplifiant les procédures disciplinaires, en nous permettant de passer des contrats avec certains élèves en difficulté, de prendre des sanctions rapides contre l’absentéisme, peut-être de créer des internats pour les élèves les plus désocialisés, et avec un suivi, bien sûr, particulier, un renforcement quantitatif et qualitatif des personnels de surveillance ?
3. êtes-vous décidé à poser ce problème de Société auprès du Gouvernement, du Premier Ministre, des élus de la Nation, pour qu’il soit pris dans sa globalité ? Il est évident que si l’on veut résoudre les problèmes de l’école, il faut aussi, en même temps, dans les banlieues-ghettos, prendre des mesures contre la violence sociale et le chômage.
M. Denoyan : Si vous le voulez bien, Monsieur Pétavi, Monsieur le Ministre va répondre à vos trois questions.
M. Bayrou : Monsieur Pétavi, je voudrais vous dire – vous le savez d’ailleurs – que je me sens profondément en accord avec ce que vous dites sur ce sujet.
Je me sens profondément en accord parce que – vous me l’avez souvent dit et nous avons souvent discuté ensemble de ce qu’il convient de faire et de dire – les chefs d’établissements, les enseignants, les personnels dans leur ensemble ont besoin de se sentir soutenus par leur hiérarchie.
Et je vais vous dire de la manière la plus claire, la politique du « pas de vague », c’est fini.
Je n’attends pas des responsables des établissements scolaires qu’ils dissimulent les problèmes pour que l’on fasse croire qu’il n’y a en a pas. C’est exactement le contraire, et c’est pourquoi j’ai aussi ouvert ce numéro de dialogue direct pour que l’on puisse signaler les problèmes.
Il est de ma responsabilité de donner aux recteurs, aux inspecteurs d’académie, à la hiérarchie de l’Éducation Nationale la consigne de soutenir les enseignants de les soutenir hiérarchiquement, de le soutenir juridiquement, de les soutenir dans les démarches qui doivent être les leurs ou même lorsqu’ils ont des prédations, de les soutenir en accélérant les versements des assurances.
Le soutien de l’Éducation Nationale est garanti.
Deuxièmement, droits/devoirs des élèves : je trouve que l’idée que vous émettez est très juste : on a renoncé, il y a quelques années, après une demande accidentelle, à l’idée que pour réinsérer un élève, un établissement pouvait passer un contrat avec lui, en disant : « On est prêt à renouer la confiance avec vous, donc à vous reprendre, à la condition que vous respectiez un certain nombre de règles ». Il me semble que l’on a eu tort de renoncer à cela.
Je suis prêt à discuter avec vous, avec les enseignants, avec tous ceux qui sont intéressés au sujet et les parents d’élèves… je suis prêt à discuter avec vous pour voir si nous ne pouvons pas remettre en vigueur ces contrats. Cela me paraît une très bonne idée.
La condition, c’est que nous sachions affirmer qu’il y a, dans l’école, un contrat de confiance et que les droits ne vont pas sans devoirs, notamment dans une collectivité où le respect doit être la règle.
M. Denoyan : Je crois que l’on a été assez complet sur ces problèmes d’éducation.
Je disais tout à l’heure que vous êtes aussi chef de Parti, vous êtes effectivement le Président de Force Démocrate, il nous reste une bonne dizaine de minutes, nous allons parler de politique.
M. Le Marc : Le 31 mars, l’UDF qui est la confédération à laquelle appartient votre formation, Force Démocrate, élit son Président. Il y a déjà un candidat déclaré, Alain Madelin. Pourquoi ne voulez-vous pas ce candidat-là et pourquoi souhaitez-vous la candidature d’une autre personnalité, François Léotard ?
M. Bayrou : Ce ne sont pas des affaires de personnes. Alain Madelin est un homme qui a des qualités, avec qui nous avons travaillé depuis des années et des années dans la meilleure ambiance. J’ai eu l’occasion de le dire et de le lui dire souvent.
Il s’agit du projet de l’UDF et de son image. Le projet de l’UDF, son image dépend en effet en partie de l’élection que nous allons vivre le 31 mars.
Le projet de l’UDF d’abord : on croit que les problèmes sont étrangers les uns aux autres, ce sont en réalité les mêmes. Nous avons tout à l’heure dit que, pour la Société française, il allait falloir une attention de plus en plus grande du sommet vers la base. Eh bien, c’est pareil pour les formations politiques. Il faut que, désormais, le projet des formations politiques donne à ceux qui la forment, on appelle cela des militants, des sympathisants à la base… il faut qu’ils aient leur place, qu’ils soient représentés dans l’organisation qui dirige le mouvement.
En effet, depuis longtemps on a cru que, et c’est aussi la démarche d’Alain Madelin, il suffisait qu’une personnalité forte – il y a eu à la tête de l’UDF, il y a aujourd’hui des personnalités extrêmement fortes – se déclare pour que cela entraîne le mouvement.
Or, très souvent, cela a donné des conflits et des incompréhensions et la qualité des personnes n’est pas en cause. J’ai trop de respect et de liens avec le Président Giscard d’Estaing pour le mettre en cause. J’ai été son secrétaire général pendant 5 ans.
Mais j’ai observé pendant ces 5 ans, constamment, la base de l’UDF a le sentiment qu’elle n’est pas entendue et qu’elle n’est pas écoutée. Il faut donc un projet…
M. Denoyan : Pourquoi François Léotard serait mieux qu’Alain Madelin ?
M. Le Marc : Pourquoi Alain Madelin détruirait l’image de l’UDF ?
M. Bayrou : Il faut donc un projet qui associe cette base-là et ces militants-là. Or, il se trouve qu’à l’U.D.F.… vous savez, dans les habitations, il y a des immeubles collectifs et puis il y a des villages, dans les formes d’habitations des hommes.
Il y a de grands Partis politiques, le RPR, le Parti Socialiste, qui sont davantage des immeubles collectifs et puis l’UDF, c’est un village. Dans ce village, il y a des maisons. Ces maisons ont appris à vivre ensemble. Les gens qui forment ces maisons, ont appris à vivre ensemble. Ils ont besoin désormais d’être directement associés, de former une équipe nouvelle, pour une UDF nouvelle. On aurait pu envisager que d’autres se présentent, mais il me semble que François Léotard est aujourd’hui le mieux placé parce qu’il n’est pas au Gouvernement et parce qu’il a la responsabilité d’une famille majeure, parce que nous sommes prêts à constituer une équipe avec lui pour le partage des responsabilités.
Pour un projet qui entraîne, il me semble qu’il est le mieux placé pour le projet et pour l’image politique.
J’ai dit qu’Alain Madelin, et ce n’est pas lui faire un reproche, je crois qu’il assumera cet adjectif, lui est un ultra-libéral…
M. Apathie : Lui le vit assez mal apparemment ? Il nous l’a dit la semaine dernière.
M. Le Marc : Il n’assume pas cette image.
M. Bayrou : C’est en tout cas le sens de son engagement politique et de son langage, c’est un ultra-libéral.
Je crois que l’économie ne doit pas diriger la politique. L’économie a son importance. Elle pose des questions, mais c’est la démocratie qui doit apporter des réponses.
De ce point de vue-là aussi, il faut que le Président soit le plus proche possible du point d’équilibre que forment ensemble toutes les familles libérales et toutes les familles démocrates qui forment l’U.D.F.
Il me semble que François Léotard est aujourd’hui en mesure, dans cette élection, de porter le drapeau de cette famille.
M. Roland-Lévy : Si François Léotard est élu Président de l’UDF le 31 mars, vous, que devenez-vous dans la structure de l’UDF ? Est-ce que vous vous êtes réservé ? Avez-vous un accord avec lui pour le poste de Secrétaire Général ? Y-a-t-il un « ticket » Léotard/Bayrou ?
M. Bayrou : Il y a une alliance et donc un « ticket » qui associe tous ceux qui forment l’UDF : Force Démocrate, le Parti Républicain qui sont les deux principales familles, et aussi ce qu’on appelle les adhérents de l’UDF et aussi le Parti Radical. Tous ceux-là ont vocation à travailler ensemble. Tous ceux-là ont vocation à trouver un équilibre dans les responsabilités et à faire en sorte que chacun s’y sente associé.
Vous comprenez ? C’est ce que je disais à l’instant : il faut que chacun de ceux qui forment l’UDF à la base, ait le sentiment que sa voix est portée dans l’organisation qui dirige. C’est une attention nouvelle à ceux-là, qui sont les militants, qu’il faut avoir. C’est une manière de traduire cette attention que d’équilibrer les responsabilités au lieu de les mettre à l’intérieur entre les mains d’une seule équipe, même si elle est faite de personnalités brillantes. Mais le projet et l’image sont essentiels à l’avenir de l’UDF.
M. Apathie : Il y a un point qui me laisse interrogateur dans votre démonstration, c’est que vous dites qu’à l’UDF comme dans le pays, il faut que le sommet regarde vers la base. On a l’impression que Madelin, qui est candidat, est un candidat indépendant. Il se présente, lui, parce qu’il a envie de se présenter et on a l’impression que, face à lui, il y a une coalition des vieux Partis qui veut que l’on verrouille, on bloque, on contrôle… et des délégués venus de « on ne sait pas où » vont élire celui que les États-Majors de Partis auront choisi ? Cela n’a pas l’air d’être très démocratique tout cela ?
M. Bayrou : Monsieur Apathie, c’est très simple : si ce que vous dites était vrai, eh bien le 31 mars, les militants qui voteront, feraient un autre choix. Je ne le crois pas. Je crois que les militants ont désormais l’intention d’être entendus et qu’ils ne laisseront pas à des personnalités individuelles la possibilité de confisquer, d’une certaine manière, un peu leurs voix et leur volonté.
Sur ce point, le projet de l’UDF, l’association de tous ceux qui la forment, l’écoute de la base, cette association nouvelle des militants au sommet, que se jouera cette élection !
Je crois que si François Léotard se présente, comme je le souhaite, pour représenter cet ensemble, eh bien je crois qu’il sera élu et la démocratie triomphera.
Parce que vous ne pouvez pas non plus, vous, parce que vous êtes observateurs, décréter qu'un tel est libre et tel autre est présenté par nous. Ce sont les militants qui choisiront. Ils choisiront celui en qui ils ont le plus confiance.
M. Apathie : Ce n’est pas le suffrage direct, c’est un peu plus compliqué que cela !
M. Le Marc : Ils choisissent une alliance ou bien ils installent à la tête de l’UDF, finalement, un conflit à venir entre vous et François Léotard ?
M. Bayrou : Il n’y a aucun conflit d’aucune sorte…
M. Brocard : Qu’est-ce qui vous empêche de briguer la présidence ?
M. Bayrou : Qu’est-ce qui m’empêche de me présenter ? On aurait pu imaginer ! Force Démocrate est une des composantes majeures, mais je suis Ministre de l’Éducation Nationale, c’est aujourd’hui une responsabilité extrêmement lourde. Je préside une formation politique, Force Démocrate, et j’ai aussi des responsabilités locales.
M. Denoyan : Vous n’êtes pas le seul au Gouvernement, le Premier Ministre est, semble-t-il, dans la même situation !
M. Bayrou : … Il aurait fallu un évènement majeur.
Nous sommes en train de traiter les problèmes de violence à l‘école, qu’auriez-vous dit si, aujourd’hui, j’avais eu à l’esprit la compétition à la tête d’une formation politique ? Je crois que vous auriez dit que je mélangeais un peu les genres et que je ne m’occupais pas de ma responsabilité majeure.
M. Le Marc : N’est-ce pas Yalta ce que vous êtes en train de conclure actuellement, François Bayrou ?
M. Bayrou : Attendez, je vais vous répondre sur ce point !
Ce que l’on attend aujourd’hui, c’est que les responsables essaient d’assumer leurs responsabilités pleinement. J’ai assez de travail, je crois que ce n’est pas le moment.
Deuxièmement, l’histoire de l’UDF, c’est l’histoire du soupçon ou de la compétition à laquelle vous revenez tout le temps…
M. Le Marc : C’est une réalité.
M. Bayrou : … entre ces familles. Le doute et le soupçon.
Eh bien, il faut passer à la confiance. Et pour la confiance, il faut bien qu’il y en ait un qui tende la main, qui accepte de dire : « je passe mon tour » …
M. Le Marc :… pour l’avoir de manière plus intéressante après !
M. Bayrou : … qui accepte de dire : « pour moi, ce n’est pas le moment ».
Il aurait fallu un fait majeur. Ce fait n’est pas là. On a une solution de quelqu’un qui n’est pas au Gouvernement, qui représente la sensibilité dominante de cette UDF, qui a des qualités personnelles reconnues largement, eh bien c’est le moment de faire acte de confiance en disant : « je tends la main et je passe un accord ».
M. Brocard : Bernard Bosson : « La candidature logique serait une candidature non centriste avec des accords de fonctionnement extrêmement précis », est-ce votre opinion ?
M. Bayrou : On va rechercher des accords de fonctionnement. Ce ne sont pas les accords qui comptent…
Mme Jolly : … il dit aussi que cette succession s’est ouverte un peu tôt.
M. Bayrou : … pardonnez-moi, ce ne sont pas les accords qui comptent. Ce qui compte, c’est la volonté.
Les Français, je crois, sont un peu lassés et fatigués des responsables politiques qui n’arrivent jamais à s’entendre, et ils se tournent vers notre génération en disant : « Écoutez, est-ce que vous ne pouvez pas, pour une fois, mettre de côté, les conflits, les compétitions possibles et essayez de vous entendre ? ».
Eh bien, je suis persuadé que c’est cela qui peut rendre la confiance, et j’ai donc l’intention de m’entendre au sein de cette famille.
M. Denoyan : Lise Jolly voulait poser une question.
Mme Jolly : C’est justement le reproche que Bernard Bosson qui est dans vos rangs, à Force Démocrate, vous fait. Il estime, lui, qu’il aurait fallu s’entendre avec Valéry Giscard d’Estaing qui pouvait encore apporter beaucoup à l’UDF sur le social et sur l’Europe ?
M. Bayrou : Que Valéry Giscard d’Estaing puisse apporter beaucoup à l’UDF, qui le niera ? Surtout pas moi. Vous avez entendu ce que je vous en ai dit : il faudra aussi dans cette répartition des responsabilités, que l’on cherche de quelle manière Valéry Giscard d’Estaing va pouvoir apporter tout son capital d’expérience et de dynamisme à ce groupe. Tout cela, ça ne résiste pas à un travail de bonne volonté.
Un point encore : J’ai eu Bernard Bosson au téléphone à 18 h 30, juste avant de venir, et il m’a dit : « je suis complètement avec toi ».
Souvent les déclarations échappent un peu aux responsables politiques. On aurait pu imaginer des scénarios différents. Ce qui compte, c’est le projet et c’est l’image. Ce projet et cette image seront incarnés par un candidat le 31 mars.
M. Le Marc : Avez-vous dit à Bernard Bosson que vous êtes d’accord avec l’article qu’il a publié dans Le Monde hier. Un article qui est très critique à l’égard de la politique du Gouvernement auquel vous appartenez, et qui souhaite une autre politique, avec baisse des taux, relance salariale, etc.
Êtes-vous d’accord avec cette critique fondamentale de l’action du Gouvernement ?
M. Bayrou : La majorité compte, je crois, 470 députés…
M. Le Marc : Bernard Bosson est Président du Groupe de Force Démocratie à l’Assemblée Nationale.
M. Bayrou : 470 députés et, parmi eux, des hommes éminents. Ces gens ont bien le droit de s’exprimer.
M. Le Marc : Président du Groupe « Force Démocrate » à l’Assemblée…
M. Bayrou : Il a bien le droit d’indiquer qu’il y a des attentes qui ne sont pas satisfaites. Qui dira qu’aujourd’hui toutes les attentes le sont ?
Ce que je sais, c’est que Bernard Bosson soutient le Gouvernement, qu’il est un de ses soutiens actif et fidèle et qu’il est, de surcroît, de mes amis.
M. Roland-Lévy : Le Président qui sera élu à la tête de l’UDF le 31 mars, aura-t-il vocation à conduire la bataille des législatives de 1998 pour cette formation ?
M. Bayrou : Je vous ai dit qu’on allait chercher une organisation nouvelle, qu’on allait, dans cette organisation nouvelle, examiner les statuts et le mode de fonctionnement. Laissez l’UDF faire son travail. Pour l’instant, c’est le Congrès et le 31 mars. Le 31 mars, je souhaite que François Léotard soit candidat.
M. Aphatie : La Majorité parlementaire discute d’un autre problème : Pierre Mazaud souhaitait que les abus de biens sociaux connaissent une prescription au bout de six ans, et le Groupe RPR a dit : « C’est peut-être une bonne idée mais c’est le Gouvernement de prendre une position là-dessus et de présenter un projet de loi ». Souhaitez-vous que le Gouvernement auquel vous appartenez, s’avance vers cette réforme ?
M. Bayrou : Non. Je pense qu’il faut éviter tout ce qui pourrait donner l’impression que l’on essaie d’éviter les conséquences d’affaires en cours.
Qu’il y ait une protection des droits du citoyen, qu’il faille faire attention à ce que la Justice soit égale pour tous, je le crois ! Mais je ne suis pas partisan de tout ce qui pourrait laisse planer un doute ou un soupçon sur les souhaits du Gouvernement dans cela…
M. Apathie : Donc c’est une réforme à ne pas faire ?
M. Denoyan : Monsieur Bayrou, merci d’avoir répondu à nos questions.
Objections est terminé pour ce soir.
La semaine prochaine, notre invité sera Monsieur Henri Emmanuelli.