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Dommage
Ainsi, nous serions des conservateurs, l’émission Polémiques de Madame Michèle Cotta, m’aura permis de mesurer la haine que nous vouent nos adversaires. Ce n’est pas tant la nature de l’invective que le comportement général qui mérite attention.
Car enfin, qu’y-a-t-il de grave à vouloir conserver et défendre un régime de sécurité sociale qui, somme toute, avec ses faiblesses, était, il y a quelques mois encore, un modèle.
Rappelons-nous l'intérêt que lui portail notamment la femme du Président des États-Unis, et sa volonté (détruite par la réaction) d'utiliser ce précédent pour répondre aux 45 millions d'exclus dans ce pays.
En fait, il semble bien que la Mutualité, ou à tout le moins les dirigeants de la FNMF, comme d'autres, ait soutenu le plan Juppé afin d'étendre ou de sauvegarder ses intérêts (intérêts financiers s'entend) et d'alimenter, ou peut-être, avec d'autres, d'être à l'origine de la campagne de presse sur notre refus de réformer et sur notre volonté de défendre le statu quo.
Le vrai problème de la sécurité sociale reste le chômage et ses effets sur les cotisations sociales, donc les recettes des régimes sociaux.
Le second problème est celui des affectations de charges et des transferts. Dans son livre, le président de la FNMF déclare que le régime général (celui des salariés) « fédère » les régimes déficitaires, attribution non justifiée qui exonère de constater que les salariés paient pour les non-salariés.
Ce qui ne le choque guète, lui qui reçoit des cotisations volontaires des salariés et de non-salariés et qui perçoit des remises de gestion lorsqu'il gère les dossiers des régimes obligatoires.
En fait, son hostilité se base sur un esprit de revanche. D'une part, il n'accepte pas que la gestion de la sécurité sociale en 1945 n'ait pas été sous-traitée à la Mutualité et surtout il espère, à travers la carte « Sésame vitale », récupérer une charge de travail nécessaire à la pérennité des réseaux mutualistes.
Au demeurant, cela peut se comprendre, il a charge, maintenant, avec les œuvres mutualistes, de plus de 50 000 salariés, mais cela doit-il se faire au détriment des effectifs salariés de la sécurité sociale ?
Faut-il sacrifier l’essentiel (la couverture obligatoire) au complémentaire ?
Il lui arrive d'ailleurs de faire parfois preuve de franchise. Dans son livre, n'indique-t-il pas que la Mutualité a eu quelques maladresses avec les autorités européennes et ne reconnaît-il pas que, conformément aux principes libéraux en application en Europe, il risque d'être obligé d'affronter la concurrence des assurances sur ce terrain.
D'ailleurs, ne voit-on pas déjà quelques mutuelles d'importance qui adoptent des formules différenciées de cotisations, ce qui correspond plus aux techniques « assurancielles » qu'autre chose.
J'avoue avoir été quelque peu surpris du culot du président de la Mutualité française, il défendait son fonds de commerce en attaquant et dénigrant le régime de sécurité sociale qui sert de base à son propre fonctionnement, cela s'appelle cracher dans la soupe, et on comprend mieux qu'il ne marque aucun étonnement, ni réprobation devant la confiscation des cotisations sociales... Il cherche à en bénéficier.
Mais cependant, une importante partie des mutualistes ne sont-ils pas des salariés, et notamment des salariés de la fonction publique ? Le plan Juppé n'avait-il pas pour objectif de remettre en cause certaines garanties, en matière de pension notamment. Mieux, ce plan n'avait-il pas comme but de remettre en cause certains régimes particuliers qui sont gérés par la Mutualité (les SIL (1) par exemple) au nom du régime universel ?
Le président de la FNMF ignore-t-il que la gestion de la sécurité sociale, comme celle des hôpitaux, fait l'objet d'une tutelle permanente qui s'exerce d'ailleurs a priori, et que les dysfonctionnements qu'il dénonce ont été constatés par les services compétents de la sécurité sociale. Est-il sûr qu'il n'y a pas de dysfonctionnements dans sa propre gestion ?
Il se gausse de l'universalité et il avance que 500 000 à 600 000 (ses amis disent 800 000) personnes ne bénéficieraient pas de la sécurité sociale. Ces chiffres, que nous avons voulu vérifier, ne trouvent aucun fondement réel. Les dernières statistiques en la matière font état de 152 000 - c'est encore trop, c'est vrai. Nous savons tous qu'en fait il s'agit d'intégrer les bénéficiaires des cartes santé, qui coûtent maintenant trop cher pour les finances municipales, dans le régime général et, pour tout dire, cela ne nous effraie pas, sous réserve d'une contrepartie financière.
Car la vérité est là, on a bien souvent chargé la barque du régime d'assurance-maladie des salariés sans contrepartie, c'est au moins en partie la cause de l'évolution des dépenses de santé.
Pourtant, bien négociée, la convention médicale avait obtenu quelques résultats, sans pour autant provoquer de rationnement.
Monsieur le président de la FNMF ne veut pas voir que le plan Juppé a pour objectif de mettre en place une sécurité sociale en fonction des contraintes économiques et non en fonction des besoins, il s'engouffre tel Zorro dans le débat, persuadé d'être, en la matière, l'homme providentiel. De syndicaliste, il est devenu le leader d'un mouvement social, prêt à assurer la gestion en lieu et place du gouvernement. C'est une réminiscence de ce qu'a été la Mutualité en 1942. Dommage.
(1) Sections locales interministérielles.