Texte intégral
Allocution de M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture
Le patrimoine suscite, de la part de nos concitoyens, un engouement croissant qui se mesure notamment à l'aune de la fréquentation des Journées du patrimoine : la dernière édition, en septembre dernier, a mobilisé quelque 7 millions de visiteurs. La visite des monuments est désormais la deuxième pratique culturelle des Français.
Parce que cet engouement a des racines profondes dans un vif désir d'appropriation et d'identité, le patrimoine est également un thème mobilisateur. Il me suffira d'indiquer que près de 6 000 associations, rassemblant quelque 500 000 adhérents, ont été constituées dans le secteur du patrimoine, et sont souvent fort actives.
Or, il n'existe pas, dans notre pays, d'organisme similaire au National Trust britannique, c'est-à-dire de grande institution privée, bénéficiant d'une reconnaissance officielle des pouvoirs publics, qui suscite et fédère les initiatives en faveur du patrimoine national dans tous ses aspects, qui concernent aussi bien le patrimoine naturel que le patrimoine culturel.
Ce n'est pas que l'action publique ne laisse pas, en France, de champ d'action suffisamment vaste pour un tel organisme. Les rapports remis à Jacques Toubon, alors ministre de la culture et de la francophonie, et à Michel Barnier, alors ministre de l'environnement, par le sénateur Jean-Paul Hugot ont, au contraire, montré qu'il y a place, dans le paysage institutionnel français, pour une Fondation du patrimoine qui constituerait, au carrefour des initiatives publiques et privées, une institution nationale de mobilisation, de promotion et de soutien.
En effet, certaines questions ne sont pas traitées par les moyens d'intervention traditionnels de la puissance publique, et devraient constituer les axes d'action prioritaires d'une Fondation du patrimoine.
Il s'agirait, en premier lieu, du sauvetage de monuments, d'espaces naturels, de paysages remarquables ou d'ensembles mobiliers menacés de dégradation, de disparition ou de dispersion. Certains monuments se trouvent, parfois pendant de longues périodes, aux mains de propriétaires incapables d'en assumer les charges : il en va ainsi, par exemple, de ces châteaux acquis par une société japonaise, aujourd'hui en déconfiture, au nombre desquels figurent quelques fleurons de notre architecture, comme le château de Louveciennes ou celui de Rosny-sur-Seine.
De façon moins spectaculaire sans doute, des ensembles de meubles indissociables de l'histoire d'un lieu sont régulièrement dispersés par des héritiers qui ne parviennent pas à trouver d'autre moyen pour sortir d'une indivision.
Dans de tels cas, une institution privée agissant de façon désintéressée pourrait se porter acquéreur du monument menacé, au besoin, par voie d'expropriation, y faire les travaux indispensables pour, ensuite, le céder à un propriétaire digne et capable d'en assumer les charges.
Elle pourrait également acquérir un ensemble de meubles sur le point d'être dispersé pour le laisser en dépôt dans les lieux auxquels il appartient. Toutes choses que, bien entendu, les collectivités publiques, et notamment l'État, ne pourraient faire avec la même simplicité.
La seconde mission que la puissance publique n'assume qu'imparfaitement concerne la gestion et la mise en valeur des monuments, qu'il s'agisse des monuments historiques de la loi de 1913 ou des monuments naturels, selon la formule de la loi de 1930 sur les sites. L'État, suivi en cela par les collectivités départementales, s'intéresse essentiellement à la restauration des monuments. La mise en valeur, pourtant essentielle car elle conditionne la conservation du monument, n'est guère prise en compte.
Une fondation du patrimoine pourrait donc, par des subventions, par des avances remboursables, par des garanties d'emprunt, faciliter pour les propriétaires, la réalisation de ces indispensables travaux de mise en valeur, qui sont d'autant plus dignes d'intérêt qu'ils sont la condition d'une exploitation du monument, et, par suite, de la valorisation du potentiel important que représente notre patrimoine en termes de développement touristique et d'aménagement du territoire.
La troisième des missions que pourrait se voir assigner une Fondation du patrimoine est sans doute celle à laquelle j'attache le plus d'importance. Elle a trait à la préservation du petit patrimoine de proximité, non protégé au titre des monuments historiques, qui constitue, selon la formule de Jacques Rigaud, « le tissu conjonctif du patrimoine », d'autant plus essentiel qu'il est la trame où s'inscrivent les paysages de la France et, avec eux, une partie de l'identité de notre nation.
Pour ce patrimoine de proximité, la protection au titre des monuments historiques, avec les très importants financements publics, mais aussi les lourdes contraintes qu'elle implique, n'est pas la solution adéquate.
La Fondation du patrimoine, institution indépendante des pouvoirs publics, peut en revanche mettre en place un instrument efficace d'identification et de labellisation du petit patrimoine.
Je souhaite également, qu'en partenariat avec l'État et les collectivités locales, et en particulier les conseils généraux, elle aille encore plus loin et prenne l'initiative d'une vaste campagne nationale en faveur de la restauration de ce patrimoine en péril. En effet, sa sauvegarde doit constituer, aujourd'hui, à mon sens, une véritable cause nationale, comme le fut, au début de ce siècle, celle des églises de France, dont la misère, dénoncée par Maurice Barrès, fut à l'origine du vote de la loi de 1913 sur les monuments historiques.
J'attacherai d'autant plus de prix au lancement d'une telle campagne nationale, qu'elle est susceptible de créer, en l'articulant étroitement avec les dispositifs mis en place par le gouvernement en faveur de l'emploi, un volant importants d'emplois nouveaux dans un secteur qui a particulièrement besoin d'être conforté, celui des petites entreprises qui ont su préserver des savoir-faire artisanaux.
Les premières simulations que j'ai effectuées démontrent que la création de 8 000 à 10 000 emplois pourrait être attendue d'une initiative de cet ordre.
Pour mobiliser l'initiative privée en faveur des trois objectifs prioritaires que je viens d'évoquer, il manquait une institution dotée d'un statut juridique adapté. L'objet du projet de loi relatif à la fondation du patrimoine est de créer ce cadre, qui permettra à la Fondation du patrimoine d'occuper, dans le paysage institutionnel français, la place éminente qui doit être la sienne, et de jouer un rôle qui deviendra vite irremplaçable.
Ce projet de loi présente plusieurs traits originaux. Le plus notable est sans doute qu'il renouvelle profondément, au profit de la Fondation du patrimoine, le droit séculaire des fondations reconnues d'utilité publique et ce, sur trois points principaux.
En premier lieu, alors que la fondation classique est indépendante de son fondateur, la Fondation du patrimoine sera, au contraire, placée sous le contrôle direct de ses fondateurs, qui disposeront d'une majorité au sein de son conseil d'administration. Plus que l'immobilisation d'une importante somme d'argent, c'est en effet l'engagement durable des fondateurs au sein même de la Fondation du patrimoine qui garantira la continuité de son action.
Le second trait original tient au fait qu'à la différence d'une fondation traditionnelle, la Fondation du patrimoine aura, à l'image du National Trust anglais et de ses 2,2 millions de cotisants, des adhérents directs, qui lui apporteront non seulement une contribution financière, mais également leurs talents, leur enthousiasme, leur énergie : cette capacité d'avoir des adhérents directs constituera un facteur décisif de mobilisation populaire.
Enfin, la Fondation du patrimoine sera dotée d'un certain nombre de prérogatives exorbitantes du droit commun, indispensables au but d'intérêt général qu'elle poursuit. Elle pourra notamment bénéficier des procédures d'expropriation prévues par les lois sur les monuments historiques et sur les sites, ainsi que de la procédure de préemption des objets d'art. Les biens d'ordre culturel dont elle est propriétaire seront placés hors d'atteinte de ses créanciers. Elle pourra, enfin, héberger des fondations-relais, à l'instar de la Fondation de France.
Le projet de loi relatif à la Fondation du patrimoine va maintenant être déposé sur le bureau du Sénat. Son rapporteur sera le sénateur Jean-Paul Hugot, auteur des rapports que je citais précédemment, à travers lequel l'idée même d'une telle fondation a pris corps. Le texte sera, je l'espère, adopté rapidement par le Parlement.
Dans le même temps, l'association de préfiguration de la Fondation du patrimoine, que préside Paul-Annik Weiller, va se charger de boucler le tour de table financier de la future institution et de définir ses règles de fonctionnement interne.
Les statuts de la fondation pourront alors être approuvés par décret en Conseil d'État. Mon souhait est que ce décret, qui donnera la personnalité morale à la fondation, puisse intervenir avant l'été.
Fruit d'une conception libérale adaptée au tempérament français, soucieux de reconnaissance de la part de la puissance publique, la création de la Fondation du patrimoine a l'ambition d'amplifier considérablement la part de l'initiative privée dans le domaine de la sauvegarde et de la mise en valeur du patrimoine. Par ses traits originaux, ce projet renouvelle profondément les principes de l'action publique dans un domaine essentiel de la vie culturelle, élevé au rang de grande cause nationale.
Projet de loi relatif à la Fondation du patrimoine
Le ministre de la culture, Philippe Douste-Blazy, a présenté aujourd'hui au conseil des ministres, le projet de loi relatif à la Fondation du patrimoine.
Ce projet de loi définit le statut original de la Fondation du patrimoine, qui deviendra une institution privée nationale de promotion, de mobilisation et de soutien en faveur du patrimoine sous tous ses aspects : monuments historiques, patrimoine de proximité non protégé, jardins, sites, espaces naturels et paysages.
La Fondation du patrimoine, organisme indépendant de l'État, s'attachera plus particulièrement à prendre en charge des actions qui, aujourd'hui, ne sont qu'imparfaitement prises en compte par les pouvoirs publics et, en particulier :
La sauvegarde de monuments en déshérence, d'espaces naturels menacés de dégradation et d'ensembles mobiliers menacés de dispersion : La Fondation du patrimoine se substituerait alors au propriétaire défaillant, éventuellement après expropriation, pour remettre en état le monument ou l'espace naturel et lui trouver un repreneur, ou pour éviter la dispersion d'ensembles de meubles qui tiennent une part de leur intérêt historique du lien qu'ils entretiennent avec une demeure.
L'aide à la mise en valeur des monuments et à la gestion des paysages, qui est peu prise en compte par les aides publiques, essentiellement consacrées à la restauration : la Fondation du patrimoine interviendrait par subvention, avance remboursable ou garantie d'emprunt.
La préservation du patrimoine non protégé au titre des monuments historiques, des sites ou de la protection de la nature est une composante essentielle des paysages français, de la mémoire et de l'identité nationales. La Fondation du patrimoine pourra, en liaison avec l'État et les collectivités territoriales, lancer une vaste campagne nationale pour la restauration de ce petit patrimoine.
Pour remplir ces objectifs, le projet de loi examiné par le conseil des ministres dote la Fondation du patrimoine :
– d'un statut juridique original, associant des fondateurs, grandes entreprises qui apporteront à la fondation la dotation initiale d'environ 40 millions de francs nécessaire au lancement de ses premières actions, et des adhérents directs, porteurs de leur enthousiasme, de leurs talents et de leur énergie ;
– de moyens d'action étendus, notamment la faculté de recourir à l'expropriation et à la préemption, l'insaisissabilité des biens culturels de la fondation, la possibilité d'abriter des comptes de fondation, à l'instar de la Fondation de France ;
– du statut fiscal favorable des fondations reconnues d'utilité publique.
Par les moyens qu'il donne à la future institution, le projet de loi relatif à la Fondation du patrimoine renouvelle profondément les principes de l'action publique dans le domaine essentiel de la sauvegarde du patrimoine, désormais considérée comme une véritable cause nationale.
Il fournit à l'initiative privée, des entreprises et des particuliers, un cadre nouveau lui permettant de s'exprimer et se mobiliser en faveur d'une action culturelle dont les implications en termes d'aménagement du territoire, de développement économique et touristique, d'insertion et d'emploi sont majeurs.
* Le patrimoine aujourd'hui
Le concept de patrimoine s'est considérablement élargi depuis quelques années :
Le patrimoine culturel protégé au titre de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, comprend plus de 13 000 monuments classés « monuments historiques » et 24 000 monuments inscrits sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques.
Le patrimoine culturel de proximité peut être appréhendé scientifiquement à travers les travaux de l'inventaire général (qui dépend de la direction du patrimoine du ministère de la culture) : on estime à plus de 400 000 éléments ce petit patrimoine de proximité composé de chapelles, d'églises, de bâtiments ruraux de bonne venue architecturale, de patrimoine industriel, maritime, fluvial, et qui constitue la trame des paysages de la France et de notre identité collective.
Le patrimoine naturel est, pour partie, protégé au titre de la loi du 2 mai 1930 sur les sites (2 500 sites « classés » et 7 000 sites « inscrits »), ou à travers des instruments comme les réserves naturelles ou les parcs nationaux. Le concept de patrimoine naturel s'étend aujourd'hui (loi du 8 janvier 1993) à la notion de paysages, et dépasse désormais le cadre des sites pittoresques.
Le patrimoine vivant recouvre notamment la diversité des races animales ou des espèces végétales (voir le rapport du sénateur Gérard Larcher, « Patrimoine animal – Patrimoine rural », septembre 1994).
Le patrimoine immatériel étend le concept de patrimoine aux savoir-faire traditionnels, dans les domaines les plus divers, aux traditions populaires et au folklore.
Face à l'extension et au renouvellement de la notion de patrimoine, les outils traditionnels de l'État se révèlent insuffisants et inadaptés. Il était donc indispensable de développer et de rénover les modes d'interventions en faveur du patrimoine : c'est l'objet de la création de la Fondation du patrimoine.
* Un projet ambitieux
Le projet de Fondation du patrimoine est né d'une volonté de moderniser et d'adapter l'action publique en faveur du patrimoine national pour prendre en compte l'attachement croissant des Français pour leur patrimoine, mais aussi l'extension du concept de patrimoine, qui, au-delà des seuls monuments historiques classés ou inscrits, englobe désormais le patrimoine de proximité non protégé, mais aussi le patrimoine naturel, voire le patrimoine vivant.
Le projet de Fondation du patrimoine vient accompagner et conforter l'implication croissante des collectivités locales dans le champ patrimonial, mais aussi les perspectives ouvertes par le développement touristique pour l'activité économique régionale, l'emploi et l'aménagement du territoire.
Le projet de Fondation du patrimoine a pour ambition d'être le point d'appui d'une vaste campagne nationale en faveur de la restauration du patrimoine, susceptible de créer de nombreux emplois dans un secteur particulièrement fragile, celui des entreprises qui conservent encore des savoir-faire traditionnels.
* Des missions entièrement nouvelles
L'action de l'État dans le domaine de la protection du patrimoine reste centrée sur la mise en œuvre de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques : cette mission fondamentale, principalement orientée vers le contrôle et le financement de la restauration des monuments historiques protégés, n'est absolument pas remise en cause par la création de la Fondation du patrimoine. Elle reste assurée exclusivement par la direction du patrimoine du ministère de la culture et, en régions, les conservations régionales des monuments historiques et les services départementaux de l'architecture et du patrimoine.
La Caisse nationale des monuments historiques et des sites (CNMHS), a vu son statut profondément transformé par le décret du 27 avril 1995 : en vertu de ce décret, la CNMHS s'est désengagée des actions tous azimuts pour la promotion du patrimoine national qu'elle avait développées pour se recentrer sur un rôle d'opérateur de gestion des monuments historiques de l'État. La CNMHS gère désormais près d'une centaine de monuments (dont : Notre-Dame, Chambord, Mont Saint-Michel, Haut-Koenigsbourg, Pierrefonds, etc.…) accueillant près de 9 millions de visiteurs par an. La Fondation du patrimoine n'aura pas vocation à se substituer à la CNMHS pour gérer des monuments appartenant à l'État ; la gestion de monuments ne sera d'ailleurs pas sa principale vocation, à la différence du National Trust britannique.
La Fondation du patrimoine se consacrera donc à des missions entièrement nouvelles, c'est-à-dire à des actions non prises en charge aujourd'hui par les acteurs publics ou privés.
Parmi les actions non prises en charge aujourd'hui par les acteurs publics ou privés, la Fondation du patrimoine privilégiera trois axes d'action qui apparaissent absolument prioritaires :
Restaurer et mettre en valeur le patrimoine de proximité : La Fondation du patrimoine suscitera et soutiendra financièrement des programmes d'intervention en faveur du petit patrimoine de proximité, en liaison avec les collectivités territoriales concernées.
Une vaste campagne nationale en faveur de la restauration du patrimoine devrait être la première initiative de la Fondation du patrimoine.
Sauver des monuments ou ensembles mobiliers menacés : La carence du propriétaire, à un moment ou à un autre de la vie d'un monument, peut mettre en péril sa conservation. L'acquisition par l'État n'est pas une solution, car d'une part, l'État n'entend pas, sauf cas tout à fait exceptionnels, accroître son parc de monuments historiques (870, dont 400 sont affectés au ministère de la culture) et, d'autre part, l'entrée dans le domaine public est définitive et irréversible.
La Fondation du patrimoine, organisme de droit privé, pourra intervenir rapidement, au besoin, par voie d'expropriation, pour prendre en charge un monument menacé. La Fondation du patrimoine pourra ainsi assurer un portage temporaire du monument, pendant la durée nécessaire à la mise sur pied d'un projet viable de mise en valeur et à l'exécution des travaux indispensables.
Dans le même ordre d'idées, la Fondation du patrimoine pourra se rendre acquéreur d'ensembles mobiliers formant le complément direct d'un monument (mobilier original de château, par exemple), afin d'en éviter la dispersion.
Aider à la mise en valeur et à l'ouverture au public des monuments : L'intervention de la Fondation du patrimoine pourra prendre la forme de subventions, mais aussi d'avances remboursables ou de garanties d'emprunt. Elle visera à faciliter des interventions se situant au-delà de la stricte restauration des monuments (soutenue financièrement par l'État pour les monuments protégés), et consistant en des travaux de mise en valeur, d'exploitation et d'accueil nécessaires à l'ouverture au public ou à d'autres formes d'exploitation.
* Historique du projet
Au printemps 1993, Jacques Toubon, alors ministre de la culture et de la francophonie, confiait à Jean-Paul Hugot, sénateur maire de Saumur, une mission de réflexion sur les conditions de création d'une fondation inspirée des modèles anglo-saxons – et notamment du National Trust – susceptible de constituer, au carrefour des initiatives publiques et privées, une véritable institution nationale de promotion, de mobilisation et de soutien en faveur du patrimoine historique.
Le rapport remis en janvier 1994 par Jean-Paul Hugot concluait à l'opportunité de la création d'une telle institution, susceptible de prendre en charge des actions non prises en compte par l'initiative publique ou privée.
En mars 1994, Michel Barnier, alors ministre de l'environnement, demandait à Jean-Paul Hugot de compléter son étude en examinant la possibilité d'étendre le champ d'action de la Fondation du patrimoine au patrimoine naturel. Un rapport complémentaire était présenté en octobre 1994.
Conformément aux conclusions de ces rapports, l'élaboration technique du projet a été immédiatement engagée, en partenariat avec le Crédit local de France dont le président-directeur général, Pierre Richard, a soutenu le projet depuis l'origine.
Cette phase a permis de préciser les missions prioritaires de la Fondation du patrimoine et d'aboutir à la conclusion qu'une forme juridique originale, créée par la loi, serait mieux adaptée qu'une fondation reconnue d'utilité publique de type classique, formule initialement envisagée.
Le travail d'élaboration de ce texte a été menée de façon continue par le ministère de la culture, avec la participation de la mission de préfiguration de la Fondation du patrimoine, mise en place en janvier 1995 et présidée par Paul-Annik Weiller, et le soutien de l'Association des amis de la Fondation du patrimoine, présidée par Jean-Paul Hugot.
Examiné le 8 février 1996 par l'assemblée générale du Conseil d'État, le projet de loi est présenté en conseil des ministres le 14 février 1996 par Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture. Il sera ensuite déposé sur le bureau du Sénat, pour une adoption en mars prochain. Après approbation de ses statuts par décret en Conseil d'État, la Fondation du patrimoine pourra être opérationnelle à l'été 1996.
* Un statut original
La Fondation du patrimoine constitue une instance nationale de mobilisation des différents acteurs du patrimoine et du développement local.
Placée sous la surveillance de l'État, elle en sera indépendante, tant en termes financiers, puisque son financement sera majoritairement assuré par des entreprises, des particuliers et des collectivités locales, qu'en termes d'organisation, puisque les représentants de l'État ne seront pas majoritaires au sein de son conseil d'administration, et en termes de missions, puisqu'elle se consacrera prioritairement à des actions qui ne sont prises en charge ni par l'État, ni par la Caisse nationale des monuments historiques et des sites.
Personne morale de droit privé, la Fondation du patrimoine verra son autonomie juridique et financière garantie par la loi.
Son statut juridique original, à mi-chemin entre le droit des fondations et celui des associations, repose sur trois piliers :
– un contrôle de l'institution par les fondateurs, entreprises, collectivités, mécènes, qui apportent le capital initial de la fondation, qui devrait être de 40 à 50 millions de francs, et disposent de la majorité des voix au conseil d'administration ;
– l'association étroite des adhérents directs, particuliers ou institutionnels, qui apporteront à la fondation des contributions financières, mais également leur talent, leur imagination, leur enthousiasme ;
– une surveillance par les pouvoirs publics, représentés minoritairement au conseil d'administration et chargés de la tutelle de la fondation.
L'originalité de cette organisation suppose de créer, pour la Fondation du patrimoine, un cadre législatif spécifique, qui sera complété par des statuts, régissant le fonctionnement interne de l'institution, approuvés par décret en Conseil d'État.
Ce cadre législatif spécifique permet en outre de doter la Fondation du patrimoine de moyens d'action spécifiques.
La Fondation du patrimoine renouvelle profondément, par les moyens qui lui sont donnés, par les méthodes qu'elle a vocation à employer, les principes de l'action publique dans un domaine essentiel de la vie culturelle, désormais considéré comme une véritable cause nationale.
* Une institution partenariale
Dotée d'un « capital » mixte, apporté par des entreprises, des mécènes et des collectivités publiques, la Fondation du patrimoine repose sur un principe partenarial. Elle met en relation des acteurs particulièrement concernés par la politique d'aménagement du territoire et conscients de ses enjeux : État, régions, départements, communes, mais aussi grandes entreprises publiques et privées.
Les collectivités participant à la dotation initiale feront partie du cercle restreint des fondateurs. À ce titre, elles seront étroitement associées à la création et au fonctionnement d'une nouvelle structure d'envergure nationale, porteuse d'un projet capable d'intéresser et de mobiliser des millions de citoyens.
Par l'intermédiaire de leurs filiales et de leurs réseaux d'implantations locales, les entreprises seront au cœur des actions menées par la Fondation du patrimoine dans les régions.
Les adhérents directs de la Fondation du patrimoine apporteront à ses actions la contribution irremplaçable de leur savoir-faire, de leur imagination, de leur enthousiasme, en même temps que leur contribution financière.
Soutenue par ses fondateurs et par ses adhérents, la Fondation du patrimoine permettra à un mouvement de masse en faveur du patrimoine, de prendre corps en France, comme il s'est incarné en Angleterre, à travers le National Trust.
* Des moyens d'actions étendus
Créée par la loi, la Fondation du patrimoine disposera d'un ensemble de prérogatives et de moyens d'action adaptés aux buts d'intérêt général qu'elle poursuit :
Des avantages fiscaux pour les donateurs : La Fondation du patrimoine bénéficiera des dispositions fiscales favorables applicables aux fondations reconnues d'utilité publique. Les particuliers seront autorisés à déduire de leurs impôts 40 % des dons effectués au profit de la Fondation du patrimoine, dans la limite d'un plafond égal à 5 % du revenu imposable. Les entreprises pourront appliquer à leurs dons le régime fiscal du mécénat.
La possibilité de recourir à des procédures d'expropriation : La Fondation du patrimoine pourra demander à l'État de mettre en œuvre pour son compte, et à ses frais, les procédures d'expropriation concernant les monuments historiques classés et les sites classés. Les biens ainsi acquis pourront être cédés par la Fondation du patrimoine, à l'issue de la période de portage temporaire.
La possibilité de préempter des objets mobiliers en vente publique : La Fondation du patrimoine pourra bénéficier de la procédure de préemption d'objets d'art en vente publique, instituée au profit de l'État par la loi de finances pour 1922.
L'insaisissabilité des biens culturels appartenant à la Fondation du patrimoine : Les biens culturels appartenant à la Fondation du patrimoine (monuments historiques, sites naturels, etc.…) ne pourront être saisis par ses créanciers.
La possibilité d'abriter des comptes de fondation : La Fondation du patrimoine aura la capacité, à l'instar de la Fondation de France, d'abriter des fondations consacrées à un objet déterminé dans son domaine d'action, autour d'un monument ou d'un domaine, par exemple. Elle pourra ainsi jouer un rôle de structure d'accueil pour les fondations consacrées au patrimoine.
* La Caisse nationale des monuments historiques et des sites et la Fondation du patrimoine
Établissement public créé par la loi du 10 juillet 1914, la Caisse nationale des monuments historiques et des sites (CNMHS) a vu son statut profondément modifié par un décret du 27 avril 1995.
Conçue, à l'origine, comme un fonds d'intervention alimenté par le droit d'entrée dans les monuments historiques de l'État (créé par la loi de finances de 1992), la caisse avait développé des actions tous azimuts pour la promotion du patrimoine national. De ce fait, les responsabilités de la CNMHS et de la direction du patrimoine étaient extrêmement imbriquées, et n'excluaient pas les doubles emplois.
Le concept de « Club du patrimoine », qui avait été étudié par la CNMHS, devait constituer, à l'intérieur de l'établissement public, une structure partenariale d'intervention dont les ambitions préfiguraient celles de la Fondation du patrimoine.
Depuis le nouveau statut de 1995, le partage des responsabilités est parfaitement clair :
– la CNMHS est recentrée sur un rôle d'opérateur de gestion des monuments historiques de l'État, et dispose de l'ensemble des moyens nécessaires pour accroître la fréquentation et améliorer le service rendu au public, dont le niveau laissait parfois à désirer ; la CNMHS gère désormais près d'une centaine de monuments (dont : Notre-Dame, Chambord, Mont Saint-Michel, Haut-Koenigsbourg, Pierrefonds, etc.…) accueillant près de 9 millions de visiteurs par an ;
– la direction du patrimoine a repris l'ensemble des actions dirigées non pas uniquement vers les monuments de l'État mais vers la totalité du patrimoine : par exemple, le réseau des Villes et Pays d'art et d'histoire (label national) et les actions de promotion du patrimoine, désormais largement déconcentrées en DRAC.
La CNMHS, sous l'empire de son nouveau statut, ne saurait donc concurrencer la Fondation du patrimoine.
La création de la Fondation du patrimoine, succédant au recentrage de la Caisse nationale des monuments historiques et des sites sur sa mission d'opérateur de gestion, apparaît comme le second volet d'une réforme globale des modes d'intervention et des responsabilités dans le secteur du patrimoine.
* L'exemple du « National Trust » anglais
Le National Trust a été créé en 1895 dans le but de protéger le patrimoine historique et géographique d'Angleterre, du Pays de Galles et d'Irlande du Nord. Il existe, par ailleurs, un National Trust for Scotland en Écosse.
Une loi de 1907 a doté le National Trust d'un statut juridique spécial, qui lui permet notamment de déclarer inaliénables ses propriétés, afin de les mettre à l'abri de l'expropriation.
Aujourd'hui, la National Trust compte 2,2 millions de membres, soit 4,5 % de la population du Royaume-Uni, hors Écosse.
Il est le premier propriétaire foncier privé, avec 238 000 hectares de terrain, 885 kilomètres de côtes, 220 demeures accessibles au public, 162 parcs, 466 sites présentant un intérêt scientifique particulier, 940 monuments industriels et environ 40 000 sites archéologiques. Le National Trust possède non seulement des monuments historiques, mais aussi des paysages., et jusqu'à des villages entiers.
Le National Trust est financé essentiellement par les cotisations de ses membres et par les dons et legs, exonérés de droits de succession, qu'il reçoit.
Il dépend également beaucoup des bénévoles qui lui donnent de leur temps, notamment pour guider et accueillir les visiteurs : 28 000 bénévoles donnent l'équivalent de 1,6 million d'heures par an, ce qui équivaut à 973 emplois à temps plein. De ce fait, le nombre de salariés du Trust ne va pas au-delà de 2 700.
Comme le National Trust, la Fondation du patrimoine bénéficiera d'un statut spécial créé par la loi.
Comme le National Trust, la Fondation du patrimoine comptera sur une forte mobilisation d'un nombre important d'adhérents directs.
À la différence du National Trust, la Fondation du patrimoine n'aura pas vocation à être propriétaire de monuments à titre définitif.
PROJET DE LOI relatif à la « Fondation du patrimoine »
EXPOSÉ DES MOTIFS
La richesse exceptionnelle du patrimoine français, et l'attachement croissant que lui marquent les citoyens, appelle le développement de modes d'actions novateurs, capables de relayer et de compléter, dans ce domaine, la politique de l'État, de même que les actions que mènent les collectivités territoriales, les associations, et généralement, les autres personnes publiques ou privées.
La « Fondation du patrimoine », dont la création est l'objet du présent projet de loi, a vocation à constituer, au carrefour des initiatives publiques et privées, une institution nationale de promotion, de mobilisation et de soutien, conformément aux conclusions des rapports déposés en 1994, par le sénateur Jean-Paul Hugot, maire de Saumur.
L'opportunité d'une telle création a, en effet, été analysée au regard des lacunes constatées dans le paysage institutionnel français. Aujourd'hui, quelque 40 000 monuments publics ou privés, 8 000 sites classés ou inscrits, bénéficient de la part de l'État, d'un important dispositif de protection et de contrôle. Mais, sauf exception, aucune institution n'a pour mission d'assurer le financement spécifique des actions de mise en valeur de ces monuments et de ces espaces.
En outre, la France ne dispose pas, à l'inverse des pays anglo-saxons, d'une institution qui puisse prendre en charge, à titre au moins provisoire, les monuments et espaces délaissés durant la période, souvent assez brève, au cours de laquelle ils sont directement menacés.
Enfin, la France compte de très nombreux bâtiments et espaces qui méritent d'être sauvegardés sans qu'une protection, au titre de la loi du 31 décembre 1913 ou de la loi du 2 mai 1930, soit pour autant la solution la plus adéquate. Les initiatives locales ne parviennent pas toujours à assurer la survie et la mise en valeur de ces éléments du patrimoine.
Pour répondre à ces besoins, la « Fondation du patrimoine » s'attachera notamment à rechercher des moyens originaux de protéger des éléments du patrimoine, menacés de destruction ou de dispersion, que ce soit en apportant aux propriétaires une assistance technique ou, le cas échéant, financière, ou en recherchant un nouveau propriétaire après avoir, éventuellement, assuré la prise en charge temporaire du bien.
Elle s'efforcera également de mettre en œuvre, en liaison avec l'État et les collectivités locales, un instrument d'identification des biens mobilier, ou immobiliers qui, quoique n'étant pas classés ou inscrits au titre de la loi du 31 décembre 1913 ou de la loi du 2 mai 1930, méritent cependant d'être sauvegardés en raison de leur intérêt patrimonial.
Elle apportera un soutien, sous forme d'assistance technique, et éventuellement financière, à des partenaires publics et privés afin de promouvoir une plus large ouverture au public de certains monuments et espaces naturels.
Constituée avec des apports qui seront majoritairement fournis par des entreprises ou des particuliers, la « Fondation du patrimoine » jouira d'un statut spécifique lui permettant d'accomplir au mieux son objet.
À l'inverse des fondations d'un type classique, et à l'image du « National Trust » britannique, la « Fondation du patrimoine » ne pourra réussir à susciter une large mobilisation qu'à la condition d'offrir aux personnes physiques ou morales la possibilité d'y adhérer directement. Ainsi, toute personne intéressée pourra contribuer à l'objet de cet organisme, non seulement pour le versement d'une cotisation, mais aussi en apportant son savoir-faire, son imagination et son enthousiasme.
De ce fait, la « Fondation du patrimoine » doit adopter une forme juridique qui déroge très largement aux règles régissant les fondations reconnues d'utilité publique, ce qui commande l'intervention du législateur. Celui-ci est également appelé à doter la « Fondation du patrimoine » des prérogatives nécessaires à l'exercice de ses missions. Celle-ci pourra ainsi bénéficier des procédures d'expropriation prévues pour l'acquisition de monuments historiques ou de sites protégés, ainsi que du droit de préemption institué au profit de l'État. Elle aura la possibilité d'accueillir des comptes de fondation. Les biens culturels placés sous sa main ne pourront pas être saisis par ses créanciers. Le recours à la loi permet, enfin, de marquer avec force l'intérêt général qui s'attache à cette institution et la relation de partenariat que celle-ci a vocation à établir avec les pouvoirs publics.
PROJET DE LOI relatif à la « Fondation du patrimoine »
Article 1er
La « Fondation du patrimoine » est une personne morale de droit privé à but non lucratif, soumise aux règles relatives aux fondations reconnues d'utilité publique, sous réserve des dispositions de la présente loi.
Art. 2
La « Fondation du patrimoine » a pour but de promouvoir la connaissance et la mise en valeur du patrimoine national.
Elle s'attache à la sauvegarde des monuments, édifices, ensembles mobiliers ou éléments remarquables des espaces naturels ou paysages menacés de dégradation, de disparition ou de dispersion, ainsi qu'à l'identification, à la préservation et à la mise en valeur du patrimoine non protégé.
Elle participe, notamment par subvention, à l'acquisition, l'entretien et la gestion de ces biens, ainsi qu'à leur présentation au public, qu'ils aient ou non fait l'objet de mesures de protection prévues par la loi et qu'ils appartiennent à des personnes publiques ou privées.
Elle peut acquérir de tels biens, dans les cas où cette acquisition est nécessaire aux actions de sauvegarde qu'elle met en place.
Art. 3
La « Fondation du patrimoine » est constituée, initialement, avec des apports dont les montants figurent dans les statuts approuvés par le décret en Conseil d'État, prévu à l'article 11.
L'admission de nouveaux fondateurs, dans les conditions prévues par les statuts, peut être prononcée par un décret qui indique le montant de leurs apports.
Sont dénommées fondateurs, les personnes publiques ou privées désignées dans les décrets mentionnés ci-dessus.
Les droits des fondateurs ne peuvent être ni cédés, ni échangés, sauf autorisation spéciale donnée dans les mêmes formes. En cas de disparition de l'un d'eux, ses droits sont repartis entre les autres fondateurs, selon les modalités prévues par les statuts.
Des personnes physiques ou morales, publiques ou privées, peuvent adhérer, dans les conditions prévues par les statuts à la « Fondation du patrimoine », à condition de s'acquitter d'une cotisation annuelle dont le montant est déterminé par le conseil d'administration. Cette adhésion ouvre droit aux avantages prévus par les statuts.
Art. 4
Les fondateurs sont tenus des dettes de la « Fondation du patrimoine » à proportion de leur part dans les apports.
Les créanciers de la « Fondation du patrimoine » ne peuvent poursuivre les fondateurs pour le paiement des dettes de celle-ci qu'après l'avoir préalablement et vainement poursuivie.
Art. 5
Les biens visés au quatrième alinéa de l'article 2, dont la « Fondation du patrimoine » est propriétaire, ne peuvent être saisis par ses créanciers. Cette disposition n'affecte pas les droits des créanciers du précédent propriétaire d'un bien lorsqu'ils ont fait l'objet d'une publication régulière.
Art. 6
La « Fondation du patrimoine » est administrée par un conseil d'administration dont le président est nommé par décret, sur proposition du conseil d'administration.
Outre son président, le conseil d'administration est composé :
1° D'un représentant de chacun des fondateurs, disposant chacun d'un nombre de voix déterminé proportionnellement à sa part dans les apports, dans la limite du tiers du nombre total des voix.
2° D'un sénateur, désigné par le président du Sénat, et d'un député, désigné par le président de l'Assemblée nationale.
3° De représentants de l'État.
4° De représentants élus des membres adhérents de la « Fondation du patrimoine ».
Les représentants des fondateurs doivent disposer, ensemble, de la majorité absolue des voix au conseil d'administration.
Les statuts déterminent les conditions de désignation et de renouvellement des membres du conseil. Ceux-ci exercent leurs fonctions à titre gratuit.
Art. 7
Les ressources de la « Fondation du patrimoine » comprennent les revenus de ses biens, les produits du placement de ses fonds, les cotisations, les subventions publiques, les dons et legs et, généralement, toutes recettes provenant de son activité.
L'article 19-3 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 modifiée sur le développement du mécénat est applicable à la « Fondation du patrimoine ».
Art. 8
Dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, la procédure d'expropriation prévue par l'article 6 de la loi modifiée du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques et par les dispositions de la loi modifiée du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites à caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, ainsi que la procédure de préemption prévue par les articles 37 et 38 de la loi du 31 décembre 1921 portant fixation du budget général de l'exercice 1922, peuvent être menées par l'État, sur demande ou avec l'accord de la « Fondation du patrimoine », eu bénéfice et à la charge de celle-ci.
La « Fondation du patrimoine » peut céder, de gré à gré, les biens mentionnés au précédent alinéa, à des personnes privées ou publiques, sous condition que celles-ci les utilisent conformément aux prescriptions d'un cahier des charges annexé à l'acte de cession.
Art. 9
La « Fondation du patrimoine » peut recevoir, en vue de la réalisation d'une œuvre d'intérêt général à but non lucratif se rattachant à ses missions, l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources qu'elle gère directement sans que soit créée une personne morale nouvelle. Cette affectation peut être dénommée fondation.
Art. 10
Les dispositions du code général des impôts applicables aux fondations reconnues d'utilité publique sont applicables à la « Fondation du patrimoine ».
Art. 11
La reconnaissance d'utilité publique de la « Fondation du patrimoine » est prononcée par le décret en Conseil d'État, qui en approuve les statuts.
La « Fondation du patrimoine » jouit de la personnalité morale à compter de la date de publication au Journal officiel de ce décret. La reconnaissance peut être retirée, dans les mêmes formes, si la fondation ne remplit pas les conditions nécessaires à la réalisation de son objet. Sa dissolution est régie par les articles 19-11 et 19-12 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 modifiée sur le développement du mécénat.
Art. 12
L'autorité administrative s'assure de la régularité du fonctionnement de la « Fondation du patrimoine ». À cette fin, elle peut se faire communiquer tous documents et procéder à toute investigation utile. La « Fondation du patrimoine » adresse, chaque année, à l'autorité administrative, un rapport d'activité auquel sont joints les comptes annuels.
Art. 13
La « Fondation du patrimoine » est soumise au contrôle de la Cour des comptes.
Art. 14
La « Fondation du patrimoine » peut, seule, utiliser cette dénomination.
Le fait d'enfreindre les dispositions du présent article est puni d'une amende de 15 000 francs.