Interview de M. Christian Sautter, secrétaire d'État au budget, dans "L'Expansion" le 4 février 1999, sur la restauration de l'État de droit et la réforme du régime fiscal dérogatoire de la Corse.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : L'Expansion

Texte intégral

L’Expansion : Les Corses affirment que le fisc s’acharne sur eux depuis l’assassinat du préfet Érignac. Comment qualifiez-vous votre action dans l’île ?

Christian Sautter : Nous ne sommes en rien dans un régime d’exception. Nous travaillons simplement à un retour du droit fiscal. Sur le plan des contrôles, d’abord, nous avons ciblé un petit nombre de contribuables qui s’inscrivaient dans ce que le rapport Glavany appelait une réalité pré-mafieuse. Les contrôles, qui vont continuer ces prochains mois, vont donner lieu, en cas de fraudes fiscales graves, à des plaintes au pénal. Ces plaintes seront plus nombreuses et traitées plus rapidement par la justice en raison d’une meilleure coordination entre nos services. Le second volet, c’est un travail général pour améliorer le recouvrement de l’impôt. Il y a encore des retards sur l’impôt sur le revenu et les impôts locaux, mais la pente est bonne, sans qu’il y ait eu de la part des services fiscaux ou du Trésor un acharnement particulier. L’immense majorité des Corses sont des contribuables honnêtes, leur rappeler un certain nombre de règles a suffi à les faire rentrer dans le rang. En revanche, il y a une petite minorité qui avait pris des habitudes délibérées de licence au regard du droit fiscal.

L’Expansion : Combien de temps vous fixez-vous pour rétablir le droit fiscal ?

Christian Sautter : Tous les six mois, je vois les chefs de service, et je vais sur le terrain. J’y retournerai au printemps inaugurer l’hôtel des impôts de Bastia, qui avait été plastiqué. Nous élaborons des objectifs annuels, comme pour chaque région. La différence, c’est que pour la Corse, ça se fait avec le ministre, c’est un traitement de faveur… On avance ensemble, pas de façon spectaculaire. On prendra le temps qu’il faut en fonction de la difficulté du terrain fiscal.

L’Expansion : Comptez-vous réformer le régime fiscal dérogatoire dont bénéficie la Corse ?

Christian Sautter : Pour la TVA, les tabacs, etc., il y a en Corse une fiscalité spécifique liée à la géographie et à l’histoire. Il ne s’agit pas d’aligner systématiquement le droit fiscal corse sur le régime commun. Le député UDF Charles de Courson a pris une initiative sur la question des successions, qui a été suivie par les parlementaires de tous bords. Le gouvernement a fait en sorte qu’il y ait un délai suffisant avant l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2000, de ce dispositif, qui ne concernera qu’une petite minorité de successions. Il existe par ailleurs une commission mixte qui doit évaluer cette année les dispositions fiscales spécifiques. Le gouvernement est donc ouvert au dialogue avec les élus corses. Quant à la zone franche mise en place en 1997 à l’initiative d’Alain Juppé, l’Inspection générale des finances va en faire l’évaluation dans les prochains mois. Je n’ai aucun préjugé à ce jour. Si c’est bon sur l’emploi, on la gardera. Si ce n’est pas le cas, on avisera.