Texte intégral
Le Figaro : Quel jugement portez-vous sur la politique familiale du gouvernement ?
Philippe de Villiers : La politique antifamiliale de Lionel Jospin est en fait un règlement de comptes idéologique. Derrière les mesures prises, qui détruisent ce qui existe depuis 1945, Il y a une échelle des valeurs complètement inversée. Le modèle socialiste, c'est la méfiance de la famille et de l'enfant. C'est la famille sans enfant et l'enfant sans famille, c'est-à-dire élevé dans des structures collectives. Pour Lionel Jospin, la famille est dangereuse, car elle est un réseau de résistance affective.
Le Figaro : En quoi la politique socialiste est-elle antifamiliale ?
Philippe de Villiers : Il suffit de voir les cibles : ce sont les familles ayant des enfants qui sont visées. M. Jospin retire de l'argent aux gens qui gagnent 25 000 F et ont des enfants, et il ne retire rien à ceux qui gagnent 25 000 F et n'ont pas d'enfants. 99 % des familles touchées sont françaises, simplement parce que les familles immigrées qui continueront à percevoir des allocations familiales ne sont pas touchées pour des raisons de revenus. M. Jospin pénalise les familles à un seul salaire, puisque les couples à deux salaires ont un relèvement de plafond. Il s'attaque aux familles qui gardent ou font garder leurs enfants à domicile, puisque celles qui mettent leurs enfants dans les crèches sont privilégiées. En résumé, la mise sous conditions de ressources, la diminution de l'allocation de garde d'enfant à domicile (Aged), la fin des emplois familiaux, vont créer du chômage. Cela fera environ 100 000 chômeurs de plus. Mais c'est plus grave, dans la mesure où cela touche un certain nombre de principes fondamentaux. Les socialistes veulent disposer de l'enfant pour l'éduquer dans une vision idéologique de la société.
Le Figaro : À propos des emplois familiaux, Ségolène Royal parle de domesticité…
Philippe de Villiers : La morgue de Ségolène Royal est à la mesure du sectarisme qui l'aveugle, puisqu'un rapport montre que la division par deux de l'Aged, la suppression des allocations familiales à plusieurs centaines de milliers de familles, la diminution d'avantages fiscaux, pourraient se traduire par une perte de 150 à 200 000 emplois. Au moment où les socialistes créent des emplois jeunes et para-publics, ils détruisent un nombre d'emplois équivalent en supprimant les aides aux entreprises textiles et en supprimant les emplois familiaux. Les trois premières victimes du gouvernement Jospin sont les entreprises, les classes moyennes et les familles.
Le Figaro : L'opposition défend-elle bien les épargnants, les familles et les classes moyennes ?
Philippe de Villiers : Je suis dans l'opposition, et je veux dire haut et fort ce que beaucoup de gens n'osent pas dire parce qu'ils sont terrorisés par une forme de chape de plomb médiatique et intellectuelle. Aujourd'hui, en entendant M. Jospin, quelqu'un gagnant 15 000 F par mois finirait par avoir l'impression d'être un nanti. Le modèle socialiste, c'est l'immigration clandestine et l'assistanat permanent.
Le Figaro : Les gouvernements précédents avaient-ils fait une politique de la famille conforme à vos vœux ?
Philippe de Villiers : Je pense, hélas, que depuis un certain temps, il y avait un glissement de la politique familiale, comme de la politique européenne ou fiscale. À vouloir apprivoiser la social-démocratie, on finit par y tomber.
Le Figaro : La fiscalisation des allocations familiales n'est pas une trouvaille de l'actuel gouvernement...
Philippe de Villiers : C'était en effet une erreur. À s'approcher du gouffre, on y tombe. Mais ce n'est plus la question. Ne nous trompons pas d'adversaire. Seul l'avenir importe. Pour moi, l'avenir, c'est chasser les socialistes le plus vite possible.