Texte intégral
Mes chers amis,
Je vous dois des explications. Je les dois à vous tous. Je les dois d'abord à ceux, si nombreux, qui m'ont soutenu, qui m'ont aidé, qui m'ont accompagné et qui souhaitaient que je prenne toute ma part au débat sur le choix du nouveau président du RPR.
Mais ces explications, je les dois également à ceux qui n'ayant pas partagé tous mes combats ne souhaitaient pas que je sois candidat afin de me préserver pour les affrontements futurs. Ils ont été nombreux à être sincères et donc forcément à être convaincants. Ces explications, enfin, je les dois aussi à ceux-là qui s'apprêtaient à me combattre et qui l'ont dit avant même que je n'ai fait acte de candidature. C'était leur droit car finalement on a toujours la possibilité de s'occuper avec l'inutile…
Il se trouve que j'avais justement une autre idée de mon rôle. Celui qui consiste à consacrer mon énergie à nos adversaires politiques et non à perdre son temps en querelles archaïques, destructrices et si vaines. Or, il faut bien le dire, ces dernières années notre Mouvement a perdu tant d'énergie à se déchirer. Il n'est que temps que cela cesse. Si mon retrait volontaire pouvait y contribuer si peu que cela soit, il n'aurait pas été tout à fait inutile.
Mes chers amis, diriger le RPR est si difficile, si exigeant, si prenant. Il faut y consacrer tout son temps et plus encore. Décider, arbitrer, écouter, rassembler, combattre et si possible réfléchir !
J'ai aimé me consacrer à cette tâche aux côtés de Philippe SEGUIN, durant deux pleines années. Les épreuves n'ont pas manqué. Il a d'abord fallu que Philippe et moi apprenions à nous connaître en additionnant nos différences et surtout en les respectant. Mes chers amis, se respecter justement parce que l'on est différent, était la définition même du compagnonnage. A chacun d'entre nous de se demander, ce qu'il est advenu de cette valeur essentielle au mouvement gaulliste.
La réconciliation du Mouvement a été notre priorité. Récupérer les électeurs déboussolés par la défaite consécutive à la dissolution a été notre souci constant. Puis, sont venues les régionales de 1998, avec un Front National, cela paraît si lointain et pourtant si présent dans l'esprit de quelques-uns ici, si fort, qu'il donnait le tournis à nombre de nos amis. La fièvre Charles MILLON gagna alors bien au-delà de la seule région Rhône-Alpes. Il en fut de cette mode comme des autres. Elle passa… sans laisser de traces, si ce n'est davantage d'amertume et de rancoeurs dans des esprits et dans des coeurs qui n'en manquaient déjà pas.
Puis sont venus ces six derniers mois. Il m'est arrivé, pourquoi le nier, de me sentir seul à la tête de notre Mouvement. Fallait-il pour autant que je me dérobe ? Je ne me suis jamais fait d'illusions sur cette unanimité qui m'y avait poussée. C'est justement parce que la situation était impossible qu'elle m'était échue. Le RPR, ce n'était pas un simple challenge, il fallait y ajouter les Européennes. Le tout en six semaines avec un Charles PASQUA déjà parti et un Alain MADELIN déjà arrivé. Curieusement, aucun responsable de notre Mouvement n'était candidat à la tête de liste ! Et je n'oublierai pas le soulagement réel et sympathique du Bureau Politique unanime qui me confia cette nouvelle mission.
Mes amis m'ont reproché d'avoir accepté ce pari fou. Dans mon esprit, il n'y avait pas à négocier parce que ce pari fou c'était tout simplement mon devoir. J'ai essayé de l'assumer le mieux possible. J'y ai donné toutes mes forces et même un peu au-delà. Et quand l'échec est arrivé, j'ai voulu le porter parce que c'était, encore une fois, l'idée que je me faisais de mon devoir et je ne voulais pas que s'ouvre dans notre Mouvement une nouvelle période de règlements de comptes. Et, lorsqu'à la rentrée de septembre, j'ai vu la tournure que prenait la pré-campagne électorale interne au RPR dans certains esprits, j'ai préféré renoncer et renoncer rapidement, parce que ce renoncement, de mon point de vue , était plus utile à l'avenir de notre famille politique qu'une candidature qui, passant en force, prenait le risque de laisser sur le bord de la route un certain nombre de nos mais, or ma conviction est que nous avons besoin de tout le monde.
En renonçant et en m'imposant ce retrait, j'ai essayé d'incarner à ma manière ce refus de la division, cette détestation de nos haines fratricides, cette volonté de dire assez ! Et si pour être entendu, il fallait faire un sacrifice, je l'ai fait bien volontiers.
Car, n'en doutez pas mes chers amis, ce fut pour moi un sacrifice ou même une douleur. Nous nous connaissons bien maintenant. J'aime le combat, sans doute trop. J'aime le R.P.R. depuis longtemps, j'aime la vie politique. Mais tout ceci ne pesait finalement pas grand-chose mesuré au risque que faisait peser sur notre famille politique ce perpétuel climat de tension et d'affrontements fratricides. En renonçant, j'ai voulu, à ma manière, faire preuve d'esprit de responsabilité au regard de notre intérêt général. En agissant ainsi, j'ai voulu aussi mettre chacun devant ses responsabilités afin qu'une bonne fois pour toutes nous consacrions nos forces à construire plutôt qu'à détruire.
Construire en renonçant, voici sans doute le pari le plus étrange qui m'ait été donné de faire ces dernières années ! Et pourtant, je crois en conscience que c'était la bonne décision pour chacun d'entre vous, pour Jacques CHIRAC et si vous le permettez pour moi, pour ma vie de famille et pour l'avenir qui peut être le mien au sein de la famille gaulliste.
Il me faut cependant, pour rendre mon propos plus concret et donc plus fort, pour que vous le jugiez à l'aune de la sincérité authentique qui est la mienne au moment où je vous parle, tenir une nouvelle fois ma parole. J'ai dit, au sorti du bureau du Président de la République, que cette décision difficile faisait de moi un homme libre, Or, un homme libre se doit de parler librement. C'est donc ce que je vais m'attacher à faire.
Que chacun se rassure, j'ai pleinement conscience que la liberté ne fait pas bon ménage avec ces sentiments bas et surtout inutiles que sont l'amertume, la rancoeur, la vengeance. Avec ces ressentiments-là, on détruit et moi, je vous l'ai dit, je veux vous aider à imaginer, à préparer, à dessiner notre avenir. Vous le voyez, mon ambition est immense : parler librement dans un monde politique français tellement habitué aux prudences excessives, aux lâchetés minimums, aux conventions tellement pré-établies. Je veux vous dire ce que je crois être juste pour nous, sans me préoccuper des réactions des uns ou des autres. Je ne souhaite m'opposer à personne et accepte encore moins d'être récupéré par quiconque au service de telle ou telle inimité qui ne m'intéresse pas.
Je ne vois pas en animateur d'un courant. Je ne veux surtout pas que mes amis s'organisent en tendance, en club, en secte, en église, animés par un esprit clanique qui aboutit toujours à l'inverse du but recherché. Que mes amis restent ce qu'ils sont : divers, multiples, différents. Qu'ils restent libres eux aussi, y compris d'être en désaccord avec moi. Qu'ils ne cherchent jamais à se recroqueviller derrière les murs d'une énième ligne Maginot destinées à mieux détester les autres qui pourtant habitent dans la même famille politique que nous.
J'ai appris avec le temps à me détacher de cet esprit de clan. Il ne peut conduire qu'à la défaite. Sorti de l'échec pour nous, c'est sortir de cette logique clanique appauvrissante, exaspérante à force d'être lancinante.
Et pour que les choses soient parfaitement claires, je m'imposerai de ne prendre publiquement position pour aucun candidat à la présidence de notre Mouvement. Je n'ai pas décidé de m'extraire du chaudron pour m'y retrouver mêlé par la petite porte. Cela n'enlève rien à l'amitié et même à la fraternité qui me lie à certains candidats. Ils connaissent mon choix et justement parce qu'ils sont mes amis sincères, ils le respectent !
Pour illustrer mon propos sur la liberté, je veux commencer par le sujet le plus sensible pour nous, celui qui concerne Jacques CHIRAC et ses relations avec notre Mouvement. Beaucoup a été écrit sur le sujet et pourtant il n'a pas été épuisé, pour la raison qu'il me semble que nous nous refusons à tirer les conséquences concrètes et pratiques des incantations « pour ou contre » Jacques CHIRAC, en notre sein. Dire qu'on lui est attaché à jamais ne fixe pas pour autant une ligne stratégique claire à notre Mouvement. Pas plus d'ailleurs que professer envers lui une opposition définitive plus ou moins larvée. Jacques CHIRAC est Président de la République. Il est en même temps le fondateur de notre Mouvement. A ce double titre, ce serait faire hypocrisie ou d'une complète méconnaissance de l'esprit propre à la Vème République que de lui contester le droit de peser sur les grands choix stratégiques du R.P.R.
J'ai parlé avec lui de l'avenir de notre Mouvement et lui ai exprimé ma volonté indéfectible de continuer à servir ma famille politique. Il avait son idée sur la place et le rôle dans lesquels je serais le plus utile. J'ai choisi de lui faire confiance. Cela m'a semblé d'autant plus naturel qu'il est de nous tous le mieux à même de porter nos idées, de les défendre et de gagner. S'opposer à celui qui nous conduira dans deux années à un combat si essentiel pour la France, n'aurait eu, de mon point de vue, aucun sens. C'était prendre le risque nous affaiblir sans aucun bénéfice pour le Rassemblement Pour la République.
A l'inverse, mes chers amis, une fois reconnue, cette prééminence pour quelques grands choix stratégiques, l'autonomie du R.P.R. doit être la règle, parce que la cohabitation qui impose une certaine réserve au Président doit nous donner un surcroît de liberté dans notre opposition à Lionel JOSPIN. Puisque Jacques CHIRAC ne peut pas dans l'immédiat s'opposer aussi frontalement qu'il le souhaiterait, alors il nous revient de devoir redoubler d'ardeur dans notre fonction d'opposant.
De la même façon, le Président doit rassembler tous les Français, nous nous devons de rassembler nos électeurs : ceux qui sont partis, ceux qui sont déçus, ceux qui sont exaspérés, à l'idée qu'ils se font de notre crainte à défendre nos valeurs. Combien de temps va-t-on mettre à comprendre que ce n'est pas avec l'électorat de gauche que nous avons un problème mais avec celui de la droite. Penser à élargir notre base électorale est nécessaire mais ne pourra venir qu'après que nous ayons pris le soin de reconstituer notre base de départ. Ce qui ne sera pas une mince affaire si j'en juge par le scepticisme, et parfois la colère, qui règne dans certaines catégories de la population qui nous étaient prétendument acquises.
A ce propos je reste pour ma part persuadé qu'il est important pour nous, de savoir ce que nous avons à dire à nos électeurs plutôt que de nous épuiser dans un débat de qualité inégale pour savoir qui va le dire, car finalement c'est à nous tous qu'il reviendra de le dire.
La question de nos valeurs, de nos idées, de notre programme de gouvernement ou plus simplement de notre discours politique devient crucial.
Il est proprement hallucinant de voir le Parti Socialiste débattre sans complexe de la nécessité de baisser les impôts, des conditions d'élargissement des stocks-options et des privatisations à tout va, alors que nous passons une partie de notre temps à nous excuser d'un libéralisme économique que nous n'avons jamais mis en oeuvre une fois au pouvoir et auquel nous ne nous sommes jamais référé dans notre discours. Ce faisant, nous ne faisons d'ailleurs que donner du crédit à un argument éculé régulièrement, employé par la vieille gauche pour déstabiliser une droite décidément bien fragile. Après qu'on nous ait accusé d'avoir des relations mauvaises avec l'extrême droite, voilà qu'on nous contesterait d'avoir des relations mauvaises avec un libéralisme que nous n'avons, par ailleurs, jamais revendiqué et jamais mis en oeuvre.
Nous en sommes arrivés à nous voir reprocher, par nos électeurs, des choses parfaitement contradictoires qui sont devenues, dans leur esprit, cumulatives dès lors qu'elles pouvaient être portées à notre débit. Alors que l'on nous reproche de ne pas défendre avec suffisamment de force notre identité idéologique sur des thèmes majeurs. Nous sommes vus, dans le même temps, comme trop rigides pour pouvoir nous adapter à la réalité du monde d'aujourd'hui sur le plan social et sur les questions de société. Pas assez d'identité d'un côté, trop de rigidité de l'autre. Le résultat est attendu : une déficience de modernité. La problématique de la modernité de notre discours doit être notre priorité.
Chacun comprendra que sur ce chemin exigeant, nous ne pouvons nous en tenir à des formules vagues comme « le retour aux sources » qui pour parler au coeur de certains militants les plus fidèles n'a aucune signification pour l'ensemble de la population que nous aspirons à représenter. Pour être plus clair, je veux dire ma conviction qu'il convient d'arrêter de nous définir par ce que nous ne sommes pas, pour retrouver un discours beaucoup plus positif et donc porteur d'espoir. Dire ni gauche, ni droite, ni tout l'Etat, ni tout le marché, ni complètement la France, ni complètement l'Europe. Cette incantation du ni-ni nous met en position permanente de réagir aux propositions des autres, rarement d'agir au nom de nos propres convictions.
Devant les jeunes du R.P.R., lors des universités d'été, j'ai été amené à revenir sur certains débats pour montrer pourquoi, dans mon esprit, notre message n'avait pas été entendu. J'ai voulu faire comprendre que la frilosité n'était plus de mise, compte tenu de ce qu'est devenu le Parti Socialiste aujourd'hui. Que l'inflexion de notre discours était indispensable si nous voulions parler au plus grand nombre.
Certains, parmi vous, m'en ont fait le reproche car ils considéraient que j'avais cédé comme un recul face à la pression culturelle d'une pensée unique de gauche. Mon avis est tout autre. Loin de renoncer, je vais persévérer. Pourquoi donc ferions-nous le cadeau au Parti Socialiste de lui laisser le monopole de la représentation de couches immenses de la population, tout simplement parce que, telles des statues de sel, nous aurions choisi de rester figer dans notre caricature ?
Le monde change, la France change. La question de notre évolution est une affaire de vie ou de mort.
Les fonctionnaires, les jeunes, les Français de la dernière génération, les Français différents du modèle social dominant, les classes moyennes, les salariés doivent être nos interlocuteurs. Ils doivent trouver leur place dans notre discours politique. Les ignorer, c'est les laisser dans la situation d'une clientèle captive de la gauche ou de l'abstention. Mes chers amis, ces Français là ne demandent pas que nous renoncions à nos convictions fondamentales. Ils ne demandent même pas que nous répondions à toutes leurs attentes mais ils sont en droit d'exiger de notre part un minimum d'écoute, d'attention, d'intérêt et finalement de respect.
Rester l'interlocuteur exclusif des chefs d'entreprises, des professions libérales, des agriculteurs, des commerçants, c'est l'assurance de demeurer minoritaire. Et ce, d'autant plus que le passé récent a montré que ces catégories, pourtant traditionnellement favorables, pouvaient nous abandonner à la suite de déceptions post-électorales. S'abstenir de conquérir des nouveaux électeurs, accepter de perdre les anciens, voici un cocktail qui ressemblerait furieusement à la stratégie du perdant-perdant. C'est pour cela que le pire risque c'est celui qui consiste à refuser de ne pas en prendre.
Nous devons moderniser notre discours. Nous devons le préciser. Nous devons l'ouvrir, nous devons le crédibiliser, et par-dessus tout, nous devons le renforcer.
Oui, d'abord le renforcer car à force de prudences avouées ou de lâchetés cachées, nous sommes devenus par trop inaudibles. Puis-je dire ma conviction, qu'il vaut mieux être combattu parce qu'identifiable, qu'ignoré parce que transparent. L'eau tiède, les raisonnements exclusivement technocratiques, les grandes promesses qui ne sont illustrées par aucun exemple concret appartiennent à un passé définitivement révolu.
Renforcer notre discours, c'est par exemple dans le domaine de la sécurité, prendre clairement position sur ce que d'autres démocraties ont mis en oeuvre bien avant nous, et qu'il nous arrive d'hésiter à revendiquer. Les mâles discours sur l'autorité de l'Etat, sur la sécurité, premier droit du citoyen, ne serviront à rien si nous n'affichons pas notre détermination à répondre précisément à quelques grandes questions : la question de la suspension provisoire des allocations familiales, dans les cas bien précis de familles qui renoncent à assumer le minimum de scolarisation d'adolescents entrés sur le chemin de la délinquance est une question à laquelle il nous faudra répondre clairement et franchement. La question de l'âge de l'irresponsabilité pénale alors que l'âge des délinquants ne cessent de diminuer est une question à laquelle il faudra répondre clairement. La question des zones de non-droit qui sont devenues des sujets de colloques, de dissertation ou même d'études anthropologiques en même temps que l'on renonçait à en faire un terrain d'action pour les forces de l'ordre. Le théorème de la société médiatique a été posé : plus on en parle moins on agit !
Je dis à ceux d'entre nous qui, comme moi, sont préoccupés de nous voir coupés des catégories les plus populaires, nous retrouverons leur écoute en rendant notre retour au pouvoir synonyme d'amélioration de leur sécurité au quotidien, plutôt qu'en voulant singer la gauche en promettant moins de travail, plus d'allocations, et encore davantage de redistribution.
Car qui prend les transports en commun ? Qui vit dans les quartiers difficiles ? Qui subit la violence au quotidien, si ce n'est les catégories les plus populaires de nos compatriotes. Qui est davantage exaspéré par ces analyses intellectuelles et pompeuses en même temps que sociologiques sur les fondements de la violence, si ce n'est ceux qui la subissent et qui n'ont nul besoin qu'on leur explique doctement le pourquoi de ce qui, hélas, est devenu leur quotidien.
Incarnons pour nos compatriotes l'ordre, l'autorité, la sécurité pour tous et notamment pour les moins fortunés, alors nous retrouverons l'écoute de beaucoup. N'ayons pas peur de revendiquer ces valeurs éternelles que sont le travail, le mérite, la discipline, le respect que l'on doit aux autres et notamment aux personnes âgées. Et nous serons à notre tour respectés par ceux que nous aspirons à représenter.
Ouvrir notre discours. Ouvrir notre programme aux préoccupations du monde tel qu'il est. S'adresser aux Français d'aujourd'hui et non à ceux d'hier. Là réside, sans doute, pour nous, le plus difficile. Car, il va nous falloir rompre avec des habitudes et sans doute aussi, avec des certitudes qui étaient justes et qui le sont moins aujourd'hui. Ouvrir notre programme, c'est avoir la préoccupation de donner à chaque Français une perspective personnelle, individuelle, dont il saura faire une certitude pour sa propre vie.
Prenons la question des retraites justement évoqués par Jacques CHIRAC. Pendant que Lionel JOSPIN, contre toutes les évidences, contre l'intérêt des retraités d'aujourd'hui comme ceux de demain, refuse avec une obstination coupable de prendre les décisions qui s'imposent. Nous avons là une bonne occasion d'exprimer notre conception de la liberté. Pour assurer la survie de nos régimes de retraite, il faudra qu'une partie de nos compatriotes travaillent plus longuement. Il faut les encourager dans cette direction à travailler davantage et non pas les éloigner du travail. Qui ne voit le double ravage de ce scandale français qui consiste à avoir le plus grand nombre de jeunes au chômage et dans le même temps, la plus grandes proportion de 50-60 ans à la retraite ou en pré-retraite ? Quel gâchis ! Quel formidable sacrifice humain ! Quand comprendra-t-on que mettre un « quinqua » à la retraite n'a jamais créé un emploi pour un jeune ? Et bien disons aux Français qu'avec notre retour aux responsabilités du gouvernement, la retraite couperet, la retraite guillotine n'aura plus aucun sens ; elle a déjà perdu tout son sens l'allongement de la durée de vie. Que ceux qui veulent travailler davantage puissent le faire. Que leur retraite en soit améliorée, que leur niveau de vie progresse, ce sera l'expression de notre conception de la liberté.
Ce même raisonnement pourrait nous permettre de sortir du piège des 35 heures dans un pays comme la France si attachée à ce qu'elle considère, à tort ou à raison, comme des acquis sociaux. Vous savez tout le mal que je pense des 35 heures pour des raisons économiques, sociales, financières et même idéologiques. Mais le plus choquant est que l'on veille interdire à ceux qui veulent travailler davantage de pouvoir le faire. Cette vision socialiste d'une France à ce point centralisée, administrée, réglementée, enrégimentée, a 50 ans de retard. Que ceux de nos compatriotes qui voudront rester aux 35 heures le fassent mais que ceux qui choisissent, pour gagner davantage, pour assurer la promotion sociale de leur famille, de travailler plus, le puissent. C'est ainsi que l'on construit une véritable société, mes chers amis, où choisir deviendrait un droit.
Il en va de même de notre discours sur la Famille. Le sujet est bien sensible. La Famille est irremplaçable. Elle est le socle de notre société. Elle est l'avenir des plus jeunes. Réussir sa vie, c'est bien sûr d'abord réussir sa famille. Nous ne devons renoncer en rien à cette conviction. Nous devons d'ailleurs faire bien davantage que nous ne l'avions fait lorsque nous étions aux responsabilités du gouvernement. Je pense notamment à ce débat qui avait agité l'ancienne majorité, s'agissant de ce formidable gisement d'emplois que représentent les emplois familiaux.
Le développement inéluctable du travail féminin rend indispensable la possibilité pour une famille de déduire fiscalement la totalité des salaires versés à un emploi familial. En revenant sur la plus grande part de ce que nous avions décidé. Martine AUBRY a encouragé le travail au noir et entravé la compatibilité pour une entre sa vie professionnelle et sa vie familiale. Même si cela ne lui plaît pas, c'est la stricte et authentique vérité.
Mais notre attachement à la famille ne doit pas être interprété comme une intrusion dans la morale individuelle ou comme une marque d'intolérance à l'endroit des nouvelles formes de vie familiale. Là encore, la liberté a un sens. Ce n'est pas au politique de choisir entre les différentes formes de vie personnelle. L'amour, la confiance entre deux êtres, l'enfant qui naît de ce couple, doivent être encouragés par l'Etat, quelle que soit la forme juridique retenue par la famille. Nous ne devons pas donner le sentiment de la frilosité, de la rigidité, de l'incompréhension face aux couples de 1999. Aimer sa Famille, c'est l'aimer sous toutes ses formes.
Parler aux jeunes, c'est les considérer tels qu'ils sont. Ecouter les jeunes, c'est tenir compte de leurs aspirations même si celles-ci doivent faire évoluer notre modèle social. Respecter les jeunes, c'est refuser les à priori. Une fois posé ce discours, plus clairement que nous l'avons fait, nous pourrons avec davantage de force expliquer en quoi notre opposition, mon opposition au PACS état juste. Ce PACS inadapté et inutile pour soulager les détresses apparues avec le SIDA. Oui, être à la fois plus ouvert et plus déterminé me semble non seulement possible mais parfaitement complémentaire.
Préciser notre discours enfin. Il va falloir nous décider à être beaucoup plus présents sur un certain nombre de sujets : regardez ce qui se passe avec l'environnement. Les Gaullistes qui ont, entre autre chose, garanti l'indépendance énergétique de la France avec une filière nucléaire citée en exemple partout dans le monde, filière qui est le fruit du travail acharnée de plusieurs générations de chercheurs et d'ingénieurs français ; nous ne pouvons, sans réagir, voir Lionel JOSPIN mettre en péril l'avenir de cette industrie vitale pour la France, pour la seule raison qu'il conviendrait de consolider une coalition gouvernementale dont l'hétéroclisme apparaît chaque jour davantage.
La question centrale de la pollution dans nos villes ne peut tout de même pas se réduire au débat sur la « journée sans voiture » annoncée avec un fracas inversement proportionnel aux résultats, par Dominique VOYNET.
Le refus de la désertification qui menace des pans entiers de notre territoire, l'amélioration de la qualité de vie dans nos villes, le combat qui reste à mener pour la sécurité du consommateur, la volonté de faire de chaque Français, un propriétaire de son logement afin qu'il respecte son environnement et qu'il s'y attache, la destruction de barres de logements insalubres, la rupture avec une architecture massive à laquelle la gauche – il suffit de voir M. CHEMETOV et BERCY – a été il n'y a pas encore si longtemps tellement attachée. Tous ces objectifs sont les nôtres. Ils doivent se retrouver concrètement illustrés dans notre programme politique.
Que dire de l'Education Nationale dont il nous est arrivé d'être complice en immobilisme. Oui, mes chers amis, après avoir renoncé à « faire », il nous est même arrivé de renoncer à « dire ».
Je ne suis pas opposé à ce que l'on remplace le mot « sélection » par celui plus policé d'« orientation », mais à la condition que l'on ne masque pas la vérité aux étudiants. Les études gratuites imposent, parce qu'elles sont financées par le travail des Français, qu'on les mérite par son travail. La méritocratie républicaine à laquelle nous sommes tellement attachés doit réserver les diplômes à ceux qui l'ont mérités par leurs efforts. Puis-je rappeler qu'à chaque fois que l'on a refusé la sélection par le travail, on a subi la sélection par l'argent et par le niveau social ? Et de celle-là définitivement nous n'en voulons pas.
La décentralisation de l'Education Nationale, prononcer le mot fait même trembler un certains nombre de nos amis, mais c'est un rendez-vous incontournable pour quiconque veut tant soit peu améliorer l'efficacité du ministère de la rue de Grenelle. Et ce mouvement moderne, indispensable, est parfaitement compatible avec l'absolue nécessité de l'égalité des chances entre les jeunes Français et entre les différentes régions. Qu'est-elle devenue l'égalité des chances avec le système actuel : ce qui n'ont pas de chances, à la fin du cycle en ont encore moins. Alors ne nous contentons pas de slogans, de phrases creuses ou d'à priori tout simplement parce qu'à notre retour nous aurions peur de faire bouger le Mammouth.
Bien d'autres questions aussi considérables devraient être posées. Celle du collège unique, du programme unique, de la méthode unique pour des enfants qui le seront de moins en moins. Nous tous, nous savons que nos enfants vont aller vers leurs différences et nous continuons à scander collège unique, méthode unique, programme unique, résultats uniques, catastrophe en nombre d'illettrés et en échecs scolaires. Celle des horaires uniques dans leur lourdeur en Europe. Philippe SEGUIN et Guy DRUT furent des précurseurs. Pourquoi, à notre tour choisirions-nous pas en matière de culture et de sport à l'école d'être audacieux ?
Avec un petit effort d'imagination, nous aurions tôt fait de montrer M. ALLEGRE sous son véritable visage : celui d'un homme digéré par l'administration qu'il prétendait diriger. D'autres questions, celle de la place des enseignants et j'en passe encore…. J'aurai beaucoup d'autres sujets…
Un mot simplement sur MICHELIN. J'ai été étonné de l'interrogation sur MICHELIN car la véritable interrogation, pour nous Gaullistes, ne réside pas dans une opposition factice entre les salariés de MICHELIN et les actionnaires de MICHELIN. La véritable interrogation, pour nous Gaullistes, réside dans le fait qu'en France si peu de salariés puissent devenir actionnaires. La solution à ce conflit n'est pas dans une nouvelle forme de lutte des classes ou de lutte des statuts entre des actionnaires dont nous avons besoin et entre les salariés qui sont le coeur de vie de l'entreprise ; la solution dans ce conflit, elle est dans la possibilité massive qui doit être donnée aux salariés français de devenir copropriétaires de leurs entreprises.
Et que dire de la justice en France avec son cortège de juridictions enchevêtrées et diverses ? Nous avons même une juridiction administrative et personne n'est choqué que lorsqu'il s'agit de trancher un conflit entre un individu et une collectivité, la juridiction de droit commun, la juridiction civile n'y suffit pas : il convient d'avoir une juridiction d'exception. Voilà une belle source d'économies. Neuf pays sur les quinze pays d'Europe ne connaissent pas de juridictions administratives. Expliquez-moi un peu pourquoi lorsque vous avez un conflit avec votre voisin, vous allez devant le juge civil et quand c'est un conflit avec l'administration vous voilà traîné devant une juridiction administrative ?
Vous le voyez, mes chers amis, je ne me sens finalement assez peu dans la peau d'un préretraité de la vie politique ! Je veux travailler avec d'autres à la modernisation de notre projet politique. Je participerai, aux côtés de Jean-Louis DEBRE, aux grands débats à l'Assemblée nationale et, naturellement, j'aiderai de toutes mes forces ceux de nos amis qui iront au combat des municipales et des législatives. Je le ferai à ma façon, en prenant plus de distance par rapport à la vie politique quotidienne. Je ne veux pas participer aux polémiques, mais je veux peser dans le grand débat pour l'alternance au socialisme.
Et je terminerai par ces quelques mots. L'opposition a besoin d'un RPR fort. Fort pour tendre la main à nos partenaires de l'opposition. Sans l'union entre nous, il n'y aura pas de victoire, que cela plaise ou non, c'est la réalité ! Mais ne vous y trompez pas, si nous ne savons pas être forts, nous ne serons pas respectés. Nous ne le serons ni par François BAYROU ni par Charles PASQUA. Un mot sur ce sujet où il s'est déjà dit tant de choses. Tout doit être fait pour que rien ne vienne accroître le fossé entre nous. Mais on ne m'empêchera pas de penser que la meilleure chance de la réunification réside dans notre force, dans notre unité et dans notre détermination. Tendre la main comme j'entends si souvent le faire. Lancer des appels qui sont suivis en retour d'une annonce de candidature dissidente aux présidentielles pourrait vite devenir humiliant pour le grand parti politique que nous devons rester. Et nous le resterons si nous savons nous faire respecter de tous.
Voilà, mes chers amis, c'est curieux à dire et peut-être davantage à comprendre pour ceux qui sont extérieurs à notre famille politique, mais je ne me suis jamais senti comme aujourd'hui, aussi concerné par notre avenir, aussi déterminé pour les prochaines échéances, aussi mobilisé au service de notre idéal. Merci.