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Messages : Vous avez engagé une vaste réforme de la justice qui intègre une ambition nouvelle de la politique pénitentiaire. Envisagez-vous de nouvelles mesures permettant le maintien des liens familiaux entre les mères et leurs enfants notamment ?
Élisabeth Guigou : J'ai récemment adressé une circulaire sur les conditions d'accueil des enfants en bas âge, laissés auprès de leur mère détenue, pour notamment garantir leurs droits ; en effet, s'ils vivent en prison, ces enfants ne sont pas détenus : ils doivent bénéficier des mêmes prestations sanitaires ou éducatives que les autres enfants de leur âge. De plus, cette circulaire préconise une amélioration des liens entre l'enfant et son parent détenu. Par ailleurs, j'ai souhaité qu'un effort substantiel soit fait au budget 2000, pour que l'accueil des enfants dans les parloirs des établissements soit amélioré. Plusieurs établissements seront donc équipés cette année d'aires de jeu et d'accueil adaptés aux enfants qui viennent rencontrer leur père et leur mère en prison. Cette action repose également sur un partenariat, auquel je veux rendre hommage, avec le réseau associatif.
Messages : Face au bilan contrasté de l'institution carcérale, songez-vous à la création d'une instance supérieure vers laquelle pourraient se tourner toutes les personnes, victimes de traitements humiliants ?
E. G. : Les établissements pénitentiaires font aujourd'hui l'objet de multiples contrôles, de la part des autorités judiciaires et administratives et d'organismes internationaux. Une commission de « surveillance » existé par ailleurs auprès de chaque établissement et est présidée par le préfet. Pour autant, ces contrôles apparaissent insuffisants en raison de leur caractère ponctuel ou très technique. Dans le contexte de la création d'un code de déontologie pour les personnels pénitentiaires, il m'est apparu nécessaire de réfléchir à l'amélioration du contrôle extérieur des établissements pénitentiaires. J'ai demandé, au mois de juillet, à M. Canivet, premier président de la Cour de cassation, de président une commission de réflexion sur ce point et de me faire des propositions pour le premier trimestre 2000.
Messages : La prise en considération depuis trois ans, de nombreux cas de suicide a permis au travers de l'opération « prévention suicide » de réduire notablement le nombre de cas : envisagez-vous d'étendre cette application à tous les établissements ?
E. G. : L’expérimentation d'un dispositif spécifique de prévention des suicides dans onze établissements pénitentiaires a permis de vérifier la pertinence d'un certain nombre d'orientations relatives à l'amélioration de l'accueil des détenus, l'observation de ceux présentant un risque suicidaire et l'organisation dès quartiers disciplinaires. J'ai donné des instructions précises en ce sens dans une circulaire du 28/05/98. Je souhaite que ce dispositif soit progressivement généralisé dans tous les établissements pénitentiaires : la légère baisse du nombre de suicides enregistrés en 1998 - 118 contre 138 en 1996 et 125 en 1997 - ne peut qu'inciter à poursuivre ce programme.
Messages : Pourquoi avoir rejeté le projet de loi sur la création d'un conseil supérieur de la déontologie de la sécurité, chargé de veiller au respect des règles de déontologie ?
E. G. : Le critère retenu pour définir le champ de compétence du Conseil supérieur de la déontologie. à savoir le port d'armes sur la voie publique, ne permettait pas d'y intégrer les services pénitentiaires dont les personnels ne sont armés, dans des conditions d'ailleurs très précises, que dans l'enceinte des établissements pénitentiaires. Pour autant, les questions de déontologie qui se posent à l'administration pénitentiaire ne sont pas négligées : un projet de code a été élaboré en concertation avec les représentants du personnel et a été présenté au conseil supérieur de l'administration pénitentiaire en juillet dernier. Il devrait être promulgué début 2000.