Texte intégral
La France doit gagner la bataille de l’innovation. La lutte contre le chômage est d’abord une lutte pour la création d’emplois, si les entreprises qui embauchent aujourd’hui, et embaucheront demain, sont à la fois des entreprises de haute technologie qui investissent les marchés à forte croissance, comme le multimédia, les télécommunications ou les biotechnologies, et des entreprises du secteur plus traditionnel qui auront pu intégrer des innovations technologiques issues des recherches. Toutes ces entreprises et ces secteurs émergents sont livrés à une concurrence mondiale sans équivalent, entre l’Europe et les Etats-Unis, mais aussi entre les pays développés et les nouveaux pays industrialisés.
C’est une nouvelle révolution industrielle qui est en marche, où les services prendront une place considérable et où la connaissance – la connaissance acquise, protégée et transformée en nouveaux savoir-faire, en nouveaux produits et en nouveaux procédés – fera la différence, creusant rapidement l’écart entre les pays.
Pour affronter dans les meilleures conditions la mondialisation, la France doit miser sur son intelligence et sur une bonne maîtrise des nouvelles technologies de la société du savoir et de l’information. Comme l’a souligné avec force Alain Juppé, nous devons « jouer à fond la carte de l’innovation, et si nous mobilisons notre potentiel d’éducation, de recherche, de création, nous nous placerons parmi les tout premiers au monde ».
Après quatorze années de flâneries socialistes, le gouvernement a engagé cette bataille, le 3 octobre dernier, en réunissant un Comité interministériel de la recherche scientifique et technique, qui a défini les grandes priorités pour l’avenir. Aujourd’hui, notre dispositif public de recherche, le premier des grands pays industrialisés par son volume financier rapporté au PIB, poursuit des objectifs clairs et ambitieux. Le soutient de la recherche fondamentale est pour l’Etat la première des exigences. Même les pays les plus libéraux comme les Etats-Unis, ont compris que cette recherche de longue haleine, aux résultats souvent imprévisibles, devait être financée sur fonds publics.
Mais c’est sur la valorisation de la recherche qu’il faut désormais porter l’effort, afin de multiplier nos atouts économiques. Il n’est pas illégitime – au contraire – que la nation veuille tirer un parti maximal des performances d’excellence de la recherche française. D’ailleurs, les chercheurs sont de plus en plus conscients du capital qu’ils sont entre les mains. Encore faut-il leur donner les moyens de libérer leur esprit d’initiative, de laisser libre cours à leur talent et à leur énergie.
Voilà pourquoi le gouvernement a décidé d’intéresser financièrement les chercheurs aux produits de leurs découvertes. C’était chez eux une demande aisément compréhensible, que les socialistes n’ont jamais su entendre. Voilà pourquoi, surtout, nous avons mis au point un projet de loi qui permettra aux chercheurs publics de créer ou de participer au développement d’entreprises innovantes, issues de leurs propres travaux de recherche.
Avec ce projet, activement soutenu par le Président de la République et le Premier ministre, nos chercheurs pourront se découvrir une vocation d’entrepreneur, sans compromettre leur carrière scientifique ou risque des conflits d’intérêt. L’enjeu n’est pas mince.
Aux Etats-Unis, où la croissance de l’économie est que pour moitié à l’innovation technologique, les entreprises qui créent le plus d’emplois – des emplois durables et qualifiés – sont directement adossés aux meilleurs laboratoires universitaires.
Les chercheurs français qui, j’en suis convaincu, seront nombreux à saisir cette nouvelle opportunité bénéficieront d’un environnement particulièrement favorable : nous créerons pour eux des pépinières d’entreprises spécifiques et nous mobiliserons à leur profit de nouvelles formes de capital-risque, comme les fonds pour l’innovation, ce placement tout récent qui permettra aux Français, non seulement de faire une bonne opération financière, mais aussi de contribuer au succès d’entreprises stratégiques pour l’avenir de la France.
Desserrer l’étau qui emprisonne l’initiative, faire confiance à l’individu, rapprocher des cultures trop longtemps opposées, c’est cela le libéralisme bien tempéré auquel nous croyons. Les socialistes qui, en quatorze ans de pouvoir, se sont habitués à gloser sur la vocation profonde de la science tout en signant des chèques en bois, dénoncent aujourd’hui l’asphyxie de notre système de recherche et sa « dérive utilitariste ». Laissons-leur les formules tapageuses et continuons à rattraper le retard qu’ils ont fait prendre à la France.
Maintenons le cap. Donnons le temps aux responsables politiques, comme aux chercheurs, de concrétiser leurs efforts. C’est à ce prix que la France entrera en force dans le nouveau millénaire, dynamique et rayonnante.