Interviews de Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports, à France-Inter le 8 décembre 1997 et à RTL le 17 décembre, sur la lutte contre le dopage, l'organisation de la coupe du monde de football, et les problèmes liés à la retransmission du Grand prix de France de formule 1.

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Média : Emission L'Invité de RTL - France Inter - RTL

Texte intégral

France Inter - lundi 8 décembre 1997

S. Paoli : Existe-t-il des groupes de pression suffisamment puissants et organisés qui soient capables d’influencer les enquêtes sur le dopage dans les milieux sportifs ? Le dopage est-il devenu le mal le plus répandu chez les sportifs de haut niveau, quel que soit le sport et dans la plupart des pays ? Faut-il même s’interroger sur telle ou telle performance mondiale et se poser à son propos la question « avec ou sans dopage » ? La ministre de la Jeunesse et des Sports parle de fléau, annonce une révision de la loi et ironise sur les barres de chocolat survitaminées dont la consommation laisserait dans l’organisme des traces que l’on pourrait confondre avec celles des anabolisants.

Y a-t-il, s’agissant de dopage, une sorte de conspiration du silence ? Les propos que vous avez tenus samedi soir sont des propos très forts. Je m’attendais à en trouver beaucoup d’échos ce matin dans la presse écrite. Presque rien. Pourquoi ?

M.-G. Buffet : Je pense que c’est un sujet qu’on a du mal à aborder franchement. C’est vrai qu’aujourd’hui le dopage touche le haut niveau, le sport professionnel, mais il s’étend chez de très jeunes sportifs, dont le sport amateur. C’est pour ça que je pense qu’il faut réagir fortement.

S. Paoli : Et est-ce aussi parce que parfois les noms évoqués sont les noms de sportifs qu’on aime bien, qui sont populaires, et qu’on ne veut pas trop savoir si oui ou non... ?

M.-G. Buffet : Bien évidemment, ça fait toujours mal d’entendre certains noms qui sont prononcés. C’est pour ça d’ailleurs que je n’arrête pas de répéter qu’on ferait mieux de respecter la présomption d’innocence, de préserver le secret des procédures, comme c’est prévu dans la loi. En mettant les noms en pâture, je pense qu’on jette continuellement le doute et qu’on ne permet pas à ces sportifs de se défendre normalement.

S. Paoli : Vous avez été beaucoup plus loin que ça comme ministre de la République. Vous parlez de tentative de déstabilisation du laboratoire de Châtenay-Malabry. Qu’est-ce que ça veut dire ?

M.-G. Buffet : Je pense qu’il y a une véritable campagne qui a été menée ces derniers jours pour mettre le doute sur ce laboratoire. Je rappelle simplement qu’il y a 25 laboratoires qui sont accrédités par le Comité international olympique dans le monde entier, et c’est quand même une garantie de sérieux que ce laboratoire de Châtenay-Malabry. Je pense que ce n’est pas en mettant en cause les hommes et les femmes qui travaillent dans ce laboratoire qu’on va lutter efficacement contre le dopage.

S. Paoli : Mais une campagne de déstabilisation, c’est quelque chose d’organisé ? Il y a donc des groupes de pression, un lobbying du dopage, une mafia du dopage ?

M.-G. Buffet : Il y a quand même – là, je ne parle pas des sportifs – des filières qui permettent à ces produits interdits d’arriver en France ; il y a quand même des personnes qui se chargent de les faire parvenir aux sportifs. Je ne crois pas au sportif allant avec son ordonnance faire la queue à la pharmacie pour acheter ces produits ! Je pense donc bien que quelqu’un les leur fournit. C’est pour ça d’ailleurs que j’ai porté plainte. Je n’ai pas porté plainte contre les sportifs : j’ai porté plainte contre ceux qui organisent l’arrivée de ces produits.

S. Paoli : Quel est le lien entre les enjeux financiers et le dopage ? Quand on sait à quel point le sport aujourd’hui est financièrement lucratif, est-ce qu’on ne peut pas imaginer que le dopage soit un moyen, précisément, de... ?

M.-G. Buffet : Certains sports sont lucratifs, ne généralisons pas. La plupart des fédérations sont en situation financière difficile. Il y a quelques sports qui, avec leurs liens avec les médias... Du coup, avec les sponsors, on voit arriver beaucoup d’argent. Mais c’est très limité.

S. Paoli : Parlons clair : la Coupe du monde de football, les enjeux financiers de la Coupe du monde de football ?

M.-G. Buffet : Le phénomène du dopage est lié certainement à une course aux résultats, à un surentraînement, une surcompétition. Quand un jeune sportif, d’un seul coup, se voit à la une de l’actualité parce qu’il a remporté une grande compétition et que, dans les semaines et mois qui suivent, il est l’objet de toute une série de sollicitations pour des contrats, pour des passages dans les médias, sa vie est complètement chamboulée. Souvent, ce sont des gens qui avaient une vie modeste et qui, d’un seul coup, se voient à la une. Ensuite arrivent d’autres compétitions, et il faut faire face. Parfois, ils connaissent à ce moment-là des moments de méforme ; si l’entourage n’est pas là pour les aider psychologiquement, il peut y avoir la tentation d’utiliser des produits dopants. Il y a une sorte d’appel au dopage lié à une course aux résultats, une médiatisation peut-être trop forte.

S. Paoli : C’est la raison pour laquelle vous demandez une révision de la loi qui aille dans ce sens, y compris celui d’un accompagnement psychologique des athlètes ?

M.-G. Buffet : Oui. Je pense qu’on a besoin de revoir la loi sur plusieurs aspects. D’abord, je crois qu’il faut revoir les procédures. Il y a un temps beaucoup trop long qui se déroule entre le temps où le sportif a eu le contrôle, la contre-expertise et où, ensuite, il y a la tenue des commissions disciplinaires du mouvement sportif. Tout ça est très long. Je crois que ça n’aide pas à réagir d’une bonne façon. Deuxièmement, je pense qu’il faut mettre en place un comité d’éthique du sport, c’est-à-dire une commission réellement indépendante à la fois du ministère et du mouvement sportif, qui puisse suivre ces procédures. Enfin, je pense qu’il faut surtout développer la prévention, c’est-à-dire maintenir les contrôles, bien évidemment, mais quand on contrôle, le mal est fait ; donc, il faut une politique de prévention auprès des jeunes sportifs, auprès de leur encadrement. Et puis, il faut une sorte de suivi médical du sportif : il faut l’accompagner ; il y a des périodes de stress, des périodes de difficulté. Il faut un encadrement qui soit plus formé à cela. C’est là la vraie solution.

S. Paoli : Mais qu’en est-il de la bonne foi ou du mensonge ? Vous dites que, dans la plupart des cas, les doses retrouvées dans l’organisme étaient de 12 à 14 fois supérieures aux minima. On ne peut plus parler simplement de bonne foi dans ces cas-là !

M.-G. Buffet : Le laboratoire de Châtenay est même au-dessus des normes officielles. Les normes officielles, c’est un chiffre équivalant à 2 ; nous, on monte à 3. Certains cas actuels sont entre 8 et 14. Donc, on ne peut pas parler de barre de chocolat. C’est pour ça que j’en ai appelé simplement à la responsabilité : essayons de voir les choses avec rigueur.

S. Paoli : Parlons-en clairement : est-ce qu’on peut imaginer qu’un athlète puisse prendre des produits dopants, anabolisants, sans le savoir ? Est-ce qu’on peut imaginer qu’un entraîneur fasse prendre à tel ou tel athlète, tel ou tel produit sans que l’athlète le sache ?

M.-G. Buffet : Oui, c’est possible parce que certains de ces produits, à certaines doses, peuvent être liés carrément à des piqûres sur plusieurs jours. Donc, là, il est difficile que l’athlète ne se rende pas compte. Mais il peut aussi se transmettre par des cachets. Je ne parle pas là des entraîneurs mais de ceux qu’on appelle, entre guillemets « les pharmaciens », dans certains milieux sportifs, et qui peuvent donner ces produits sans que le sportif le sache. C’est pour cela qu’on a préservé des procédures qui permettent la défense du sportif. Maintenant, ce n’est pas le ministère qui décide des sanctions : c’est le mouvement sportif ; il y a des commissions.

S. Paoli : Est-ce que le mouvement sportif vous accompagne ? Vous êtes en train de donner un grand coup de pied dans la fourmilière. Vous parliez de la Coupe du monde de football : s’agissant du football, il y aurait peut-être beaucoup à dire.

M.-G. Buffet : Les réactions du monde sportif, de la Fédération française de football, de la Fédération internationale de football, du Comité international olympique, ont été tout à fait fortes et responsables. Donc, je fais confiance au mouvement sportif. C’est l’intérêt des sportifs eux-mêmes de faire en sorte que ce fléau recule. Donc, je crois que le mouvement sportif va m’aider dans ce combat. Certains sont tout à fait engagés pour cela. Mais, c’est un combat difficile, il ne faut pas se le cacher.

S. Paoli : Mais vous ne pouvez pas le mener toute seule, c’est un combat qui doit se mener ne serait-ce qu’au niveau européen. Avez-vous des engagements là-dessus, des échos ?

M.-G. Buffet : Ce combat serait voué à l’échec si tout le mouvement sportif n’en était pas partie prenante. Et je pense en effet qu’il faut travailler à des réponses européennes. C’est pour ça que le sport est exclu complètement des questions européennes. J’ai demandé qu’en janvier ou en février se tienne une réunion des ministres du Sport pour traiter de cette question du dopage ; et puis, je dirais, pour traiter aussi de la déréglementation qui fait que des joueurs sont parfois traités comme des marchandises et transférés d’un club à l’autre d’une façon un peu abusive. Donc, je pense que ces questions doivent être traitées au niveau de l’Europe.

S. Paoli : Les conférences de presse tenues ici et là, soit par les avocats, soit par certains sportifs, vous ont-elles mises de mauvaise humeur ?

M.-G. Buffet : Non, ça ne m’a pas mis de mauvaise humeur.

S. Paoli : Sur le plan du dopage...

M.-G. Buffet : Non, ça ne m’a pas mis de mauvaise humeur. Je comprends tout à fait que ces personnes interviennent. Moi, je crois aux droits de la défense et à la présomption d’innocence. Simplement, j’appelle le mouvement sportif à beaucoup de responsabilité parce que, ce qui est en cause, c’est l’éthique du mouvement sportif. Vous parliez de la Coupe du monde : j’aimerais qu’on commence la Coupe du monde avec des gens qui pensent que tout va se passer tout à fait normalement, que chacun va jouer à partir de son entraînement, de la qualité des équipes et pas avec d’autres moyens. Donc, je crois que c’est important que l’on aborde cette question avec sérieux, voilà. La seule chose qui m’agace, c’est quand on essaye de détourner la question par des arguties.

S. Paoli : Dugny c’est chez vous, en Seine-Saint-Denis ?

M.-G. Buffet : Oui, c’est dans ma circonscription.

S. Paoli : On vous a évacuée ce matin ?

M.-G. Buffet : Moi, je n’habite pas Dugny. C’est une ville qui a beaucoup souffert, qui a été à plusieurs reprises bombardée. Ils ont déjà connu plusieurs alertes à la bombe, et je suis de tout cœur avec les habitants de Dugny ce matin.

S. Paoli : Une bombe de 500 kg quand même !

M.-G. Buffet : Oui.

S. Paoli : Une chose encore, la une de L’Humanité : « 69 % des salariés pour les 35 heures » dit l’Humanité, qui ne dit pas que la plupart des patrons sont contre.

M.-G. Buffet : Je crois que l’aspiration à avoir du temps pour vivre, c’est-à-dire à voir diminuer le temps de travail pour pouvoir s’informer, se cultiver, prendre des loisirs, est une aspiration irréversible. Je pense également que beaucoup de salariés demandent les 35 heures avec l’idée qu’on pourra embaucher des jeunes. Et, je crois que c’est une remarque...

S. Paoli : Vous y croyez ?

M.-G. Buffet : Moi, j’y crois.

S. Paoli : Vous avez vu que la plupart des Français n’y croient pas, trouvent que c’est une mesure sympathique mais que ce n’est pas avec ça qu’on va lutter contre le chômage...

M.-G. Buffet : Mais parce qu’ils ont des expériences qui les ont un peu mis en doute. Je crois réellement qu’une baisse massive du temps de travail à 35 heures peut permettre de nombreuses embauches. Je viens de finir les rencontres de la jeunesse, et la question de l’emploi chez les jeunes, c’est vraiment la première question.

 

RTL - mercredi 17 décembre 1997

O. Mazerolle : Vous êtes membre du PC et quoi qu’on pense, sur le fond, d’Henri Emmanuelli, estimez-vous normal que des responsables politiques critiquent une décision de justice au prétexte qu’elle frappe l’un des leurs ?

M.-G. Buffet : Je crois que par rapport à Henri Emmanuelli, il n’y a pas eu d’enrichissement personnel. C’est lié à des affaires sur les financements des partis et je trouve quelque peu injuste que ce soit lui qui paye tout seul.

O. Mazerolle : Vous voudriez que tout le monde paye ?

M.-G. Buffet : Je pense qu’il faut que la suite du dossier Urba soit instruite, mais je trouve cette décision quelque peu injuste par rapport à Henri Emmanuelli.

O. Mazerolle : Vous pensez que le président de la République devrait le gracier comme semblent le désirer les socialistes ?

M.-G. Buffet : Il y a la démarche de M. Hollande, c’est une démarche du PS.

O. Mazerolle : Vous n’avez pas d’appréciation à apporter là-dessus ?

M.-G. Buffet : Non.

O. Mazerolle : Pourra-t-on se rendre au Grand Stade dans la mesure où il y a peu de places de parking et que les conducteurs de la RATP démontrent actuellement, avec la grève, qu’ils peuvent en réguler l’accès au gré de leurs désirs ?

M.-G. Buffet : Il y a eu un formidable effort fait sur les infrastructures pour les transports en commun, de nouvelles gares. Il y aura des rames supplémentaires. Il faut aussi qu’il y ait plus de moyens humains. Je comprends qu’on ne puisse pas assumer l’afflux de voyageurs lié à la Coupe du monde sans qu’il y ait un peu plus de conducteurs, de personnel.

O. Mazerolle : Vous appuyez les revendications actuelles ?

M.-G. Buffet : Je pense qu’il faut résoudre rapidement cette question. Le match d’ouverture est le 28 janvier, moi je n’arrête pas de dire que ceux qui viendront en voiture n’assisteront pas à la première mi-temps, c’est évident. Donc, il faut utiliser le métro, le RER, et pour ça, il faut qu’il y ait les moyens humains.

O. Mazerolle : Mais cette situation de monopole en faveur du métro et du RER, est-ce que ça ne donne pas des armes fantastiques aux revendications des salariés de la RATP ? Vous êtes un peu prisonnière ?

M.-G. Buffet : Non. Mais, je pense qu’on doit pouvoir résoudre ce problème. On a été capable de résoudre les problèmes techniques. Alors soyons capables de résoudre les problèmes humains.

O. Mazerolle : Donc les grèves spéciales Coupe du monde, ça vous paraît assez justifié finalement ?

M.-G. Buffet : Je pense qu’il faut résoudre ce problème qui est, je crois, juste. Il faut qu’on ait les moyens en personnel pour assumer ce surplus de voyageurs.

O. Mazerolle : Donc c’est un appel lancé à la RATP ?

M.-G. Buffet : Si vous voulez.

O. Mazerolle : Autre point, concernant le Stade de France : est-ce que, finalement, il y aura des matchs de foot qui y seront organisés en dehors de quelques événements de l’équipe de France de football, de rugby ou éventuellement de concerts ? Il n’y a pas un seul club qui veuille s’y rendre, pour le moment.

M.-G. Buffet : Ce Stade de France, je l’appelle le Grand Stade, existe, c’est un magnifique équipement. On peut y faire bien sûr des concerts, mais je pense qu’il doit vibrer d’événements sportifs. Donc, il y a le rugby. J’espère, si les coûts de location le permettent, qu’il y aura un jour les championnats du monde d’athlétisme. Mais il faut un club résident de foot qui permette vraiment que ce stade soit approprié par des supporters, par un public. Aujourd’hui, quand on regarde la région capitale, le club qui pourrait faire en sorte que ce stade soit un stade réellement extraordinaire, c’est le PSG, mais la décision appartient au club.

O. Mazerolle : Et à M. Tibéri ?

M.-G. Buffet : Elle appartient au club. C’est lui qui décide où il va. Je pense également que l’on pourrait créer un deuxième club en Île-de-France. Il y a beaucoup de voix, d’ailleurs, qui le disent, je vais faire une table ronde pour réunir tous ceux qui sont intéressés par cette possibilité. Mais un club ne se construit pas en six mois.

O. Mazerolle : Vous allez y aller ?

M.-G. Buffet : Oui. On en a discuté avec le président de la Fédération française de foot, on est prêt à mettre toutes les bonnes volontés autour d’une table mais en sachant qu’il faut plusieurs années pour qu’un club prenne vraiment une grande dimension.

O. Mazerolle : Vous dites au PSG : attention, si vous n’allez pas au Stade de France...

M.-G. Buffet : Pas du tout. Il y a le Parc des Princes aussi, il faut utiliser tous ces équipements.

O. Mazerolle : Ça en fait des stades et beaucoup de spectateurs potentiels. Mais seront-ils présents ? Parlons du dopage : la Fédération française de football hésite à prononcer des sanctions bien que la contre-expertise se soit déclarée également positive concernant quelques joueurs.

M.-G. Buffet : Nous sommes en cours de procédure. Pour l’instant, il n’y a eu qu’un joueur concerné par la commission disciplinaire du foot, donc, il faut attendre les autres commissions. Je pense qu’il faut que le mouvement sportif assume ses responsabilités. Les déclarations qui ont été faites par les différentes fédérations montrent cette volonté. Si l’on veut vraiment mettre fin à ce fléau du dopage, le ministère a un rôle : on doit développer la prévention, l’éducation.

O. Mazerolle : Vous préparez une loi ?

M.-G. Buffet : Oui, une loi qui ne sera pas simplement une loi antidopage mais une loi pour la santé physique et morale des sportifs, c’est-à-dire qui va élargir le champ parce que, qu’est-ce qui mène au dopage ? C’est peut-être cela qu’il faut examiner.

O. Mazerolle : C’est-à-dire ?

M.-G. Buffet : Par exemple, le surentraînement, la surcompétition dans certains sports ou d’autres phénomènes : quand un jeune sportif d’un seul coup est à la une des médias ou qu’il est assailli par les contrats, par tout cela, et qu’une nouvelle compétition arrive ; s’il se trouve en mauvaise forme, s’il n’a pas un entourage capable de l’aider à traverser cette période, la tentation du dopage peut exister.

O. Mazerolle : Vous voulez dire une surveillance accrue à ce moment-là ?

M.-G. Buffet : Oui, un suivi plus intelligent autour du jeune sportif.

O. Mazerolle : Mais, croyez-vous qu’on en sait suffisamment, en ce moment, sur le dopage ?

M.-G. Buffet : Je crois qu’il faut être très sérieux. Les normes qui sont appliquées par le laboratoire de Châtenay sont les normes du Comité international olympique, qui ont été élaborées par des scientifiques. La base c’est 2, pour constater qu’un contrôle est positif ; là, nous avons certains sportifs qui sont entre 5 et 10. Donc, je ne pense pas que cela puisse provenir de barres de chocolat, ni de production naturelle.

O. Mazerolle : Vous n’avez pas du tout été ébranlée par les protestations de bonne foi des sportifs ?

M.-G. Buffet : Mais j’ai défendu depuis le début la présomption d’innocence. Que les noms soient lâchés dans la presse, ce n’est pas une bonne chose. Je pense que le sportif doit avoir les moyens de se défendre. On peut toujours penser qu’il a pu être dopé sans en avoir vraiment une pleine conscience. Le droit à la défense ne me gêne pas du tout à partir du moment où elle se fait sur des bases sérieuses.

O. Mazerolle : Le laboratoire de Châtenay-Malabry est irréfutable, la FIFA a eu l’air de dire : « Oh, on ne sait pas trop ! »

M.-G. Buffet : Il y a 25 laboratoires agréés dans tout le monde et il en fait partie. Moi, je ne suis pas contre le fait qu’un autre laboratoire soit agréé mais il faut qu’il fasse ses preuves.

O. Mazerolle : Sur la F1, le Grand prix de France est menacé pour des raisons de retransmission de télévision. Le Gouvernement veut préparer une nouvelle loi. C’est inédit qu’un gouvernement veuille changer de loi parce qu’un organisateur de spectacle, fût-il sportif, l’exige ?

M.-G. Buffet : Non, parce qu’on a un problème avec la loi de 1984. Les articles qui concernent les retransmissions sont contradictoires. À la fois ils donnent pouvoir à l’organisateur de régler ces problèmes de retransmission, mais ils précisent, et moi j’y tiens également, le droit à l’accès à l’information. Et donc, lorsque nous avons présenté le décret au Conseil d’État, qui ne concernait pas la F1 mais l’ensemble des événements sportifs, le Conseil d’État a dit : il n’y a pas les bases juridiques nécessaires. Donc, il faut retravailler une nouvelle loi. Mais c’est à la fois la loi sur l’audiovisuel de Mme Trautmann et la loi sur le sport. En ce qui concerne la F1, si la question c’est vraiment le problème de la retransmission, je signale quand même que toutes les télévisions concernées ont passé un accord, et donc il y a toutes les conditions pour que le prix se déroule dans les meilleures conditions.

O. Mazerolle : Ils n’ont pas l’air décidé.

M.-G. Buffet : Oui, mais je constate aussi qu’il y a d’autres prix européens qui sont menacés. J’espère qu’il n’y a pas l’envie de quitter l’Europe.