Interview de M. Jean Arthuis, ministre de l'économie et des finances, dans "Le Figaro" le 29 octobre 1996 et déclaration le 30, sur le plan gouvernemental de communication sur l'euro et sur la sensibilisation des entreprises et de l'opinion publique à l'Euro et à l'élargissement de la concurrence consécutif à la mise en place de la monnaie unique.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Présentation le 30 octobre 1996 du plan de communication sur 6 ans sur l'Euro

Média : Emission Forum RMC Le Figaro - Le Figaro

Texte intégral

Le Figaro : 29 octobre 1996

Le Figaro économie : Comment persuader les Français que l'euro sera une bonne chose pour eux, alors que jusqu'à présent la monnaie européenne est souvent synonyme de sacrifices ?

Jean Arthuis : Nous devons expliquer, répondre aux inquiétudes mais aussi lutter contre la mélancolie. Il nous faut également combattre l'idée selon laquelle, en l'absence des critères de Maastricht, la France pourrait s’exonérer d’assainir ses finances publiques. Si l'on ne peut laisser filer le déficit et la dette publique, c'est tout simplement parce qu'il serait irresponsable de notre part de faire supporter nos dettes, contractées hier, par les générations futures.

Le Figaro économie : Le gouvernement allemand explique que l'euro serait aussi solide que le mark pour convaincre ses concitoyens. Quels types d'argument comptez-vous utiliser en France ?

Jean Arthuis : Les Français éprouvent un besoin de stabilité monétaire et ils doivent élargir leur espace économique. Un Français sur quatre travaille pour l'exportation, nous réalisons les deux tiers de nos échanges extérieurs avec les quatorze autres États de l'Union européenne. Les agriculteurs, les artisans, les patrons de PME, c'est-à-dire tous ceux qui produisent en France et sont confrontés à la concurrence internationale, redoutent à juste titre les fluctuations monétaires.

La monnaie unique est une nécessité dès lors qu'il y a un marché unique.

L'euro est un instrument au service de la stabilité des changes. J'inaugurais récemment une usine en Loire-Atlantique dont l'actionnaire est japonais ; celui-ci me faisait remarquer que lorsqu'il distribue ses produits à des clients européens, il estime normal que ses factures de ventes et ses charges salariales soient libellées dans la même monnaie. C'est à cette condition qu'il est possible d'investir en Europe. L'euro sera un instrument de relocalisation de l'emploi pour les économies européennes. L'euro c'est l'emploi. Par ailleurs l'Europe pèsera bien plus lourd sur la scène internationale si elle dispose d'une seule monnaie.

Le Figaro économie : De quelle façon ? L’euro pourrait-il faire jeu égal avec le dollar comme monnaie de réserve et de facturation ?

Jean Arthuis : On parle souvent de la « vieille Europe ». L'euro va être le moyen de renforcer le lien entre les pays qui la constituent. Ce sera l'expression de la mise en commun de nos forces économiques et monétaires. Ce sera un formidable événement, un acte politique majeur, qui tout en préservant les identités nationales, va permettre une véritable renaissance de l’Europe. A l'extérieur, l'euro sera identifié comme une grande monnaie mondiale, les clients asiatiques ou américains voudront être payés en euro qui jouera le rôle d'une monnaie de facturation internationale.

Le Figaro économie : Que répondez-vous aux industriels qui redoutent que l'euro devienne une monnaie trop forte, comme le deutschemark ?

Jean Arthuis : Nous avons besoin d'une monnaie qui soit l'expression de notre force économique et de notre cohérence politique. De toute façon ce sont les marchés qui fixent les parités monétaires. Pour moi la bonne parité de change est celle qui permet d'avoir les taux d'intérêt les plus faibles, celle qui permet de ne pas douter de l'avenir, parce que la France comme les autres pays européens auront mené les réformes structurelles nécessaires pour devenir plus compétitifs. Voilà ce que doit être l’euro : une monnaie qui nous permette d’avoir les taux d’intérêt longs – les seuls qui comptent vraiment pour l’investissement des ménages comme des entreprises – les plus bas possibles, ce qui sera un gage de croissance et la voie pour créer des emplois. En parodiant la phrase célèbre d’un secrétaire américain au Trésor, nous pourrons dire alors : l’euro est notre monnaie et c’est votre problème.

Le Figaro économie : Près de quarante ans après la réforme monétaire relativement simple de 1959, consistant à supprimer deux zéros, les Français parlent souvent en anciens francs. Quelle leçon en tirez-vous ?

Jean Arthuis : Il faudra prendre du temps pour bien expliquer les choses. Nous devons mettre à profit la période qui nous sépare de l’échange des pièces et billets en francs contre des euros, ce qui n’interviendra qu’à partir du 1er janvier 2002, pour identifier tous les problèmes, préparer les esprits et apaiser les craintes.

Il faudra aider les Français à se créer des repères, des échelles de valeurs. Progressivement les gens sauront combien de fractions d'euro coûte une baguette de pain, combien vaut une maison, une voiture, quel poids pèse le budget de l'État en euros... Cette phase où nous devrons aider les Français à constituer des mécanismes simples de conversion interviendra en fin du plan de communication, pas avant le 1er janvier 1999. C'est en effet à cette échéance seulement que sera connue la parité entre le franc et l'euro.

Cela n'exclut pas bien entendu, que dès maintenant les gens soient encouragés à se préparer. Dans les écoles, par exemple, des jeux ou des concours pourraient être organisés où les prix seraient libellés en euro et non plus en franc.

Le Figaro économie : Mais on ne sait pas à ce jour quel sera le taux de conversion de l’euro contre le franc !

Jean Arthuis : N’exagérons rien. Certes on ne saura le chiffre de conversion définitif du franc en euro, et des différentes monnaies européennes entre elles, que le 1er janvier 1999. Mais on connaît l’ordre de grandeur. Cela ne variera pas beaucoup d’ici là. (NDRL : l’écu, qui prendra le nom d’euro à partir de 1999, était coté 6,47 francs sur les marchés derniers).

Le Figaro économie : Les complexités purement matérielles que va provoquer inévitablement le passage du franc à l’euro et qui vont apparaître sur le devant de la scène, ne risquent-elles pas de renforcer les arguments des anti-Maastricht ?

Jean Arthuis : Il faut aller au devant de ces craintes, ne rien imposer avec brutalité. Les peurs naissent de l’incertitude. C’est parce qu’ils ne comprendraient pas bien comment les choses vont se passer que les Français pourraient s’inquiéter. Nous devrons par exemple expliquer que cela ne changera rien dans les contrats en cours, l’euro de substituant sans aucun problème au franc. Les gens peuvent s'interroger sur les prix, les impôts, leurs salaires, se demander ce que l'euro pourrait modifier. La réponse est claire : rien ne changera dans la vie quotidienne. Il faudra faire comprendre que le changement sera purement nominal. Cela me rappelle l'argument qu'un maire anti-Maastricht avait trouvé lors d'une campagne électorale : il prétendait que de toute façon la monnaie européenne ne pourrait jamais se faire, car il ne voyait pas comment un franc français pourrait valoir un jour un deutschemark ! Il faut absolument éviter que les gens se posent des faux problèmes.

Le Figaro économie : Vous soulignez à juste titre que l'euro sera un instrument de stabilité, le moyen d'empêcher les dévaluations compétitives. Mais en créant une zone monétaire unique, ne va-t-on pas exacerber de façon radicale la concurrence, notamment dans le secteur bancaire ?

Jean Arthuis : Les marchés financiers sont déjà des marchés européens. Les banques sont à l'heure actuelle confrontées à la concurrence, et rien n'empêche une entreprise de créer une filiale aux Pays-Bas si elle juge que les conditions fiscales y sont plus avantageuses. La concurrence règne déjà en maître !

Le Figaro économie : Dans les secteurs grand public, comme la vente par correspondance, le fait de présenter dans toute l'Europe les prix dans la même unité monétaire va néanmoins bouleverser la situation...

Jean Arthuis : C'est vrai, mais c'est aussi une chance pour nous. Nos propres catalogues pourront être diffusés dans l'Europe entière. Notre attitude ne doit pas consister à se demander comment les autres vont nous conquérir ; nous devons au contraire nous demander de quelle façon nous pourrons nous propulser sur les marchés extérieurs. Soyons dynamiques. L'euro est une chance pour nous.

Le Figaro économie : Les entreprises françaises vous paraissent-t-elles bien préparées à cet élargissement de la concurrence qui résultera de la monnaie unique ?

Jean Arthuis : Les plus grandes d'entre elles sont prêtes et nous devons tout mettre en œuvre pour aider les PME à se préparer. Il faudra le faire avec les fédérations professionnelles, les chambres de commerce, de métiers, d'agriculture, etc. L'euro doit représenter pour nos entreprises un atout pour se développer plus facilement en Europe. Dans le cadre de la réforme de la Direction des relations économiques extérieures (DREE), nous allons d'ailleurs créer une sous-direction consacrée aux PME, de façon à leur offrir une logistique capable de leur apporter les informations et les orientations nécessaires à l'export. Il faut également que tous les métiers de conseil aux entreprises, avocats, experts-comptables, ingénieurs-conseils et tous les consultants se positionnent pour soutenir les PME, à conquérir les marchés européens.

Le Figaro économie : Quelles sont les erreurs qu'il faut absolument éviter ?

Jean Arthuis : Le danger le plus grave serait qu'il y ait une certaine confusion dans la période intermédiaire entre 1999 et 2002, que les gens soient parfois amenés à confondre les prix en euros et en francs.

Il faudra sans doute qu'il y ait un double affichage des prix de façon à habituer les gens à faire les conversions, mais pour les transactions quotidiennes je ne pense pas que l'euro doive se substituer trop rapidement au franc. J’estime qu'il faudrait attendre 2002, c'est-à-dire l'apparition des billets et des pièces. En revanche, dès le 1er janvier 1999, la plupart des opérations des marchés financiers pourraient s'établir en euro, y compris pour les particuliers.

Le Figaro économie : Qui doit faire quoi ? Comment répartir les rôles d'information entre l'État et les acteurs privés ?

Jean Arthuis : L 'État, le ministère des Finances en particulier assureront la coordination. Mais nous avons besoin de tous les acteurs, de toutes les organisations professionnelles ou syndicales, ce sera une mobilisation générale. Il faudra dissiper les malentendus, identifier les problèmes aussi variés que celui par exemple des machines à pièces. Il faut faire en sorte que les Français s’approprient collectivement l'euro en toute sérénité. C’est l'affaire de tous.

Le Figaro économie : Les banques chiffrent en milliards de francs leurs coûts de préparation. Avez-vous une estimation pour l’ensemble du pays, y compris pour la campagne d'information ?

Jean Arthuis : C'est un investissement collectif, c’est le prix de la stabilité en Europe, un instrument pour développer nos échanges. L’euro est le meilleur gage de l’emploi.

Sans donner de chiffres pour la campagne d'information, je mentionnerai seulement qu'elle sera également largement financée par le budget européen, ce qui est légitime s’agissant d'une dépense commune de l’Europe.

 

Date : 30 octobre 1996
Intervention de M. Jean Arthuis : « Réussir le passage à l’euro »

Mesdames,
Messieurs,

Dans moins de six ans notre baguette de pain vaudra environ 0,6 euro. D'ici là, il faudra comprendre le processus de passage à la monnaie unique, acquérir un nouveau système de valeurs, s'adapter à un autre environnement monétaire. Les attentes devront être entendues, les inquiétudes apaisées, les problèmes résolus.

C'est pourquoi il est absolument nécessaire de donner aujourd'hui une forte impulsion à la préparation du passage à la monnaie unique en France.

En effet, les travaux avancent rapidement au niveau communautaire. Le Conseil européen de Dublin devrait permettre de constater de nouvelles avancées. Les caractéristiques du SME bis, qui succédera à compter du 1er janvier 1999 au mécanisme de change actuel, font l'objet d'un large consensus. Les discussions sur le pacte de stabilité ont permis de progresser dans la définition des règles d'application du traité pour garantir notre future monnaie commune. Le statut juridique de l'euro enfin, dont les éléments constitutifs devraient être agréés pour Dublin, permettra de donner à tous les opérateurs de claires indications sur la façon dont s'opérera le basculement.

Nous devons, dans le même temps, veiller à assurer une préparation optimale de nos compatriotes et de nos entreprises à l'arrivée de l'euro. Changer de monnaie est une opération complexe : cela suppose une préparation minutieuse, tant technique que psychologique.

L'euro donnera aux pays de la « vieille Europe » la chance d'une renaissance. En leur permettant à l'aube du XXIe siècle d'unir leurs forces, l'euro leur donnera les moyens de peser plus fortement dans un monde dont le centre de gravité ne se détermine plus spontanément par rapport à eux.

Mais notre économie, c'est-à-dire notre croissance et donc nos emplois, ne tirera pleinement profit de l'avènement de l'euro que si nous savons nous préparer efficacement. Dans ce domaine, l'anticipation apparaît à l'évidence comme une clé du succès.

C'est pour répondre à cet objectif prioritaire que le gouvernement a décidé ce matin, sur ma proposition, trois actions fortes que je voudrais exposer brièvement devant vous. Elles concernent :
    – la communication à l'égard du public ;
    – la préparation des administrations publiques ;
    – celle des acteurs économiques.

1. Première action : la communication à l'égard du grand public

Un observatoire de l'euro a été mis en place. Tous les six mois un sondage est effectué pour suivre l'état de l'opinion sur cette question. La deuxième vague de sondages vient d'être effectuée. Ses principaux résultats sont présentés dans le dossier de presse qui vous a été remis. Que montrent-ils ?

On observe tout d'abord une légère décroissance du nombre de personnes favorables à la mise en place de la monnaie unique : 54 % contre 57 % en avril dernier. Mais l'adhésion de nos compatriotes demeure largement majoritaire (40 % de personnes opposées).

Les Français estiment, à juste raison, que l'arrivée de l'euro emportera des effets favorables sur nos échanges extérieurs, sur la compétitivité des entreprises, pour notre secteur bancaire, pour l'économie française en général et la stabilité des prix.

Au fur et à mesure que l'échéance se rapproche, on observe cependant une montée des inquiétudes, s'agissant notamment des éléments les plus concrets comme les problèmes de conversion par exemple. Ceci démontre l'urgence qui s'attache à la mise en place d'une stratégie de communication active, orientée sur les aspects concrets et matériels du passage à l'euro, comme le calendrier, les mécanismes de conversion, le double affichage des prix.

J'observe enfin que ce sondage montre une forte adhésion à l'idée que j'avais lancée et que je compte poursuivre d'un « conseil de stabilité », incarnant l'autorité politique face à la Banque centrale européenne (74 % d'opinions favorables). Il en va de même pour le pacte de stabilité qui est destiné à protéger notre monnaie commune contre les risques que lui ferait encourir une mauvaise gestion des finances publiques des États membres (75 % d'opinions favorables et 7 % seulement d'opinions défavorables).

Le gouvernement a adopté ce matin, sur ma proposition, un plan de communication sur 6 ans, destiné à préparer notre opinion publique à l'arrivée de l'euro.

Ce plan distingue 4 phases :

Sensibilisation (oct. 96/début 98) : il s'agit de mettre en place une information concrète et pédagogique sur l'euro, destinée à expliquer le processus et ses étapes, permettant aux Français qui le souhaitent d'obtenir une information pratique sur le passage à l'euro. À titre d'exemple, nous prévoyons de mettre à la disposition d'un large public, à la fin du premier semestre 1997, une brochure détaillant ces éléments.

Préparation (début 98/1er janvier 99) : une fois la liste des pays participant à la première vague de l'euro arrêtée, il s'agira de présenter les bénéfices économiques et sociaux du passage à l'euro et d'amorcer la transition au système qui sera mis en place à compter du 1er janvier 1999.

Mise en œuvre (1er janvier 99/1er janvier 2002) : nous voulons permettre aux Français de se familiariser avec l'euro et favoriser l'apprentissage d'un nouveau système de valeurs. Ce dernier point est évidemment crucial : il faudra faire en sorte que chacun puisse se constituer une « échelle des valeurs en euro » : combien coûte une baguette en euro ? une voiture ? une maison ? combien représente mon salaire en euro ? Pour y parvenir, tous les moyens de communication devront être mis en œuvre, de manière imaginative et pragmatique.

Accompagnement (1er janvier 2002/1er juillet 2002) : au 1er janvier 2002, les pièces et les billets en euro auront été mis en circulation. Nos francs disparaîtront au 1er juillet au plus tard. Il s'agira alors d'aider nos compatriotes à s'adapter dans les meilleures conditions et le plus rapidement possible à ce nouvel environnement monétaire.

À chaque phase est associée une démarche de communication adaptée. Durant toutes ces étapes les relais d'information (élus, organismes consulaires, associations et entreprises) seront sollicités pour relayer les actions initiées par les pouvoirs publics.

L'Éducation nationale aura, dans ce domaine, un rôle tout à fait central à jouer. Les enfants du franc aujourd'hui seront les adultes de l'euro demain. Une information pédagogique particulièrement adaptée devra leur être fournie. On peut imaginer des rencontres dans les écoles, des concours, des jeux pour les familiariser avec l'euro, mais aussi avec la notion même de « monnaie ».

Une attention toute particulière sera apportée aux personnes dont on peut estimer a priori qu'elles auront plus de difficulté à assumer ce changement important. Nous devons réussir le passage à l'euro avec tous les Français. Personne ne doit rester« au bord du chemin ».

J’ai décidé, pour la conduite de ce plan de communication ambitieux, de créer, au sein de la direction de la communication du ministère des Finances, un centre national d’information sur l’euro. La conduite de ces opérations sera plus directement assurée, sous la responsabilité du directeur de la communication, Gérard Moulin, par Jean-Paul Holz, directeur adjoint.

Bien évidemment, les institutions communautaires compétentes seront associées à nos travaux. Je souhaite qu'elles puissent pleinement participer, sur le plan des idées comme sur le plan financier, aux efforts de communication du gouvernement.

Le plan de communication sera bien sûr évolutif et souple. Il s'agit d'adapter la politique de communication gouvernementale en fonction des événements et des réactions de l'opinion publique. Mais un tel plan garantit la cohérence de la démarche dans la durée, ce qui apparaît indispensable pour une opération de cette ampleur.

2. Deuxième action : la préparation des administrations publiques

La mission « euro », que j'ai créée au ministère des Finances pour remplir les tâches assignées par le Premier ministre dans sa circulaire du 22 mars dernier, est dirigée par Philippe Marchat. Elle a rendu un premier rapport de synthèse très prometteur au mois d'août dernier.

Grâce à la collaboration de l'ensemble des départements ministériels, les travaux avancent bien : des « responsables euro » ont été désignés dans chaque administration, des groupes de travail ont été créés sur les sujets essentiels que sont l'informatique, les problèmes juridiques, la communication et la formation.

Le Premier ministre a signé hier une nouvelle circulaire appelant les préfets à mettre en place, au niveau départemental et en liaison avec les trésoriers payeurs généraux, des instances locales de coordination et d'impulsion. Il est demandé aux préfets d'ouvrir ces instances, au-delà des administrations déconcentrées, aux représentants de la société civile.

De façon plus générale, il conviendra de parvenir pour la fin de l'année, à la définition de « schémas de projet » pour les principales administrations et leurs démembrements, précisant la liste des opérations à réaliser et le calendrier qui y sera associé. Il s'agit à l'évidence de l'un des chantiers essentiels de la réforme de l'État. Le gouvernement y attache une importance toute particulière. Une bonne préparation des administrations publiques est en effet le gage d'une dynamique efficace s'étendant à l'ensemble du pays.

À cet égard, mon ambition est de faire de Bercy une « plateforme de compétence » au service de toutes les autres administrations.

3. Troisième et dernière action : la préparation des acteurs économiques

De nombreux travaux ont déjà été engagés par les professionnels, notamment dans le domaine financier, sous l'égide de la Banque de France et de Jean Lemierre, le directeur du Trésor. Le président du comité consultatif du crédit, Benoît Jolivet a également mené à ma demande des auditions très larges, dans tous les secteurs d'activité.

La qualité des résultats obtenus en la matière est à la hauteur de la forte mobilisation des organismes professionnels et des entreprises elles-mêmes. Je voudrais ici les en remercier très vivement, ainsi que la Banque de France qui a joué, dans tous ces domaines, un rôle tout à fait fondamental. Il importe que tous ces travaux soient activement poursuivis.

À mesure que le champ des organismes concernés s'élargit, il convient de donner encore plus de cohérence et de visibilité à ces travaux. Toutes les entreprises, notamment les PME/PMI, doivent être associées aux réflexions. Je le répète, personne ne doit être laissé au bord du chemin. Cette préoccupation est réellement au cœur de la démarche du gouvernement qui doit jouer un véritable rôle d'impulsion et d'entraînement.

C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de créer un « comité national de l'euro », que je présiderai personnellement et dont le directeur du Trésor sera le rapporteur général. J'ai invité bien évidemment le gouverneur de la Banque de France à s'associer à ces travaux. Il me paraît de même nécessaire que la Commission, si elle le souhaite, y soit présente.

Toutes les forces vives du pays doivent être représentées : entreprises financières, industrielles, de service, PME/PMI, artisans et commerçants, professions libérales, secteur agricole, organismes de protection sociale, organismes consulaires, associations de consommateurs ou représentant les catégories sociales les plus fragiles.

Toutes les questions relatives aux modalités de préparation de l'arrivée de l'euro seront susceptibles d'être évoquées. Des comités « ad hoc » seront mis en place pour traiter des questions spécifiques qui pourront se poser : communication, problèmes comptables, préparation du schéma de place, interface avec les administrations.

Il s'agit de mettre en place les conditions d'une réelle concertation qui permettra de diffuser l'information vers tous les acteurs intéressés, de coordonner les initiatives mais aussi de prendre en compte les avis et les préoccupations des uns et des autres. C'est en prenant conscience des problèmes qui ne manqueront pas de se poser, qu'une réponse adéquate, au niveau national ou communautaire suivant les cas, pourra être apportée.

Cette initiative répond à une réelle attente des acteurs économiques.

Je souhaite mettre en place ce comité national de l'euro avant le Conseil européen de Dublin.

Vous l'aurez compris, nous réussirons le passage à l'euro grâce à la mobilisation de chacun en France. Telle est la conviction du gouvernement. Tel est le sens des propositions que j'ai faites ce matin et qui ont été approuvées en Conseil des ministres.

Chaque Français peut avoir son opinion sur les avantages et les inconvénients de la monnaie unique. La France, en approuvant par référendum le traité de Maastricht, a choisi sa voie. Je suis persuadé que c'est la voie de la sagesse et celle aussi de l'ambition.

Le gouvernement a pris toutes les dispositions nécessaires pour que la France soit au rendez-vous de l'euro le 1er janvier 1999.

Nous devons mobiliser aujourd'hui la nation tout entière, pour faire en sorte que chaque Français soit au rendez-vous de l'euro. C'est à cette condition, et à cette condition seulement, que notre pays pourra tirer de cette étape fondamentale de son histoire tous les bénéfices qu'il est en droit d'en attendre.

Je vous remercie de votre attention.