Déclaration de M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales, sur les initiatives locales de développement, "élément déterminant" de la politique de l'emploi, de la formation et de l'insertion, appuyées par des expériences de déconcentration, Paris le 24 octobre 1996.

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Circonstance : Ouverture des premières rencontres nationales des initiatives locales de développement à Paris le 24 octobre 1996

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

1. Je suis heureux d'ouvrir ces premières rencontres nationales des initiatives locales de développement, organisées par deux réseaux qui y contribuent au plan national, et que je salue ici, celui des Chambres de commerce et d'industrie (ACFCI), celui des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (Union nationale des MFR).

Organisées aussi par deux organismes créateurs et partenaires de projets, bien connus des acteurs locaux, soit ARDAN-Lorraine et la Maison des professions de Marcq-en-Baroeul.

2. En avril dernier, j'ai demandé au professeur Michel Godet, ici présent, de réfléchir sur ce que la formation professionnelle et l'aide à l'insertion dans l'emploi pourraient apporter à la croissance économique locale. J'ignorais – même si on pouvait le soupçonner – que vous alliez mener cette mission aussi vite et aussi loin… C'est tant mieux ! Je connais votre dynamisme et votre force de conviction !

Vous avez donc constitué un groupe « informel », avec des hommes de terrain, qui s'est assigné deux buts :

- réfléchir aux idées-force qui justifient ce que vous avez nommé les « initiatives locales de développement » ;
- formuler des propositions susceptibles de renforcer et de multiplier ces initiatives.

En juillet dernier, vous m'avez rendu un rapport comportant ces idées-force et ces recommandations, sur lesquelles je reviendrai tout à l'heure.

Vous ne vous êtes pas arrêtés là. Vous avez décidé, les uns et les autres, d'organiser cette première rencontre nationale des acteurs du développement local, des professionnels de la formation et de l'insertion, afin d'échanger plus largement vos expériences et de pérenniser au printemps dernier votre rassemblement initial dans un groupe informel.

3. L'initiative locale est aujourd'hui un élément déterminant de notre approche de l'emploi et de la formation. Lors d'un récent déplacement dans la région Nord-Pas-de-Calais, le président de la République l'a souligné lui-même : c'est par la mobilisation autour des projets et des initiatives locales de terrain que l'on enrichira encore la croissance des emplois. Il a, du reste, tenu à apporter son parrainage personnel à la manifestation de ce jour.

J'ai donc voulu, en ouvrant ces rencontres, apporter le témoignage d'une conviction et d'un soutien actif.

En tant que membre du gouvernement, mais aussi, je n'aurais garde de l'oublier, au titre de mon expérience de responsable de collectivités territoriales qui me conduit à partager, très directement, un ensemble de convictions qui sont les vôtres. Le bassin d'emploi de Sainte-Sigolène a plus d'actifs que d'habitants et l'ensemble de la Haute-Loire avec un taux de 7 % est plutôt protégé des dégâts du chômage.

4. Les initiatives locales, c'est d'abord la conviction que l'emploi est affaire d'hommes et d'union entre les hommes. Il n'y a pas de, région « maudite ». Il n'y a pas d'infrastructures miraculeuses. C'est l'association des acteurs et leur créativité qui font l'emploi.

Quant à la formation, elle peut, bien sûr, être développée pour elle-même, en tant qu'acquis de culture et de savoir. Mais dans une finalité emploi, elle se pratique, dans les meilleures conditions, par l'insertion professionnelle, c'est-à-dire somme toute en alternance, car on apprend en travaillant.

Autrement dit, la politique de l'emploi et de la formation professionnelle doit comporter :

- l'accompagnement des projets, des initiatives locales, pour créer ou redynamiser ;
- la reconnaissance et l'extension des compétences en milieu professionnel.

D'où des options que vous avez retenues et que je me plais, avec vous, à souligner :

- priorité au conseil sur la subvention, même si celle-ci est souvent nécessaire ;
- priorité aux dépenses « activées » sur la simple indemnisation ;
- priorité à la logique de projet sur le maintien à toute force des emplois dépassés ;
- priorité au facteur humain sur les dispositifs prédéfinis : mobilisation des retraités, des cadres au chômage, des jeunes créatifs, au service de nouveaux projets, renforçant, par exemple, le potentiel des PME-PMI ou enrichissant les emplois de service.

Quant à vos propositions plus précises, je vous laisserai le soin d'en discuter, de les approfondir, de les modifier peut-être.

5. Je voudrais juste souligner que certaines d'entre elles sont déjà en voie d'être réalisées :

- le renforcement de l'apprentissage ;
- la simplification des procédures d'embauches ;
- le développement des garanties des prêts avec l'expansion des interventions de la Safaris (entreprises artisanales, professions libérales, …) et les interventions du même type, très spécifiques, de l'ADIE pour les créateurs RMIstes ou assimilables.

Les partenaires sociaux ont aussi fait un pas vers l'activation des dépenses avec les conventions de coopération des ASSEDIC et le dispositi1i de l'ARPE.

6. Enfin, je pense, comme vous, que les responsabilités doivent être exercées au plus près du terrain. C'est pourquoi je suis favorable à un mouvement de déconcentration qui permet aux acteurs locaux, à l'État et aux collectivités locales, d'être de vrais partenaires et de vrais décideurs de proximité. Aussi, une réflexion est entamée sur des expérimentations dès 1997 de déconcentration. Le thème central de ces expérimentations pourrait être une dotation globale donnée aux préfets.

Déjà, dans deux bassins d'emploi des Ardennes, dans le cadre du PREJ de la région de Champagne-Ardenne, une fongibilité des aides pour les jeunes a été tentée. De même, en Basse-Normandie, un fonds commun a été créé pour les emplois de services.

Il faut marier politique d'emploi et politique de développement, c'est indispensable ! La déconcentration est un vecteur important pour y parvenir de façon concrète, que ce soit afin de préserver notre tissu industriel ou en faveur du développement des activités de services. Il faut donc beaucoup de micro-économie et de micro-social, autour de projets qui, souvent, grandissent vite.

Conclusion – Nos voeux (et déjà notre action) vous accompagnent. Je souhaite un plein succès à ces premières rencontres et aux projets locaux qu'elle se proposent de multiplier.