Communiqué de M. Jean-Marie Le Pen, président du Front national, dans "Présent" du 25 juin 1996, sur sa requête à la Cour européenne des droits de l'homme concernant sa condamnation dans l'affaire du "détail" sur les chambres à gaz, pendant la deuxième guerre mondiale.

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Média : Présent

Texte intégral

La requête de Jean-Marie Le Pen

Le requérant défère à la censure de la commission européenne des droits de l’homme, aux fins de transmission à la Cour européenne des droits de l’homme, l’arrêt de la Cour de cassation du 18 décembre 1995, qui rejette son pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 18 mars 1991. Il établira dans un mémoire ampliatif qu’il produira ultérieurement.

1) Qu’il a été condamné au paiement de dommages-intérêts exorbitants au profit de diverses associations, pour le seul fait d’avoir exprimé son point de vue sur certains aspects du drame concentrationnaire lors de la Deuxième Guerre mondiale, alors qu’il était pressé de le faire par des journalistes à l’occasion d’une émission radiodiffusée ;

2) Que ces propos n’étant ni injurieux ni diffamatoires, ainsi qu’il n’a même pas été argué lors de la procédure, les décisions attaquées sanctionnent en réalité un délit d’opinion attentatoire à ses libertés de pensée et d’expression, libertés fondamentales protégées notamment par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, respectivement dans ses articles 9 et 10 § 1 ;

3) Qu’en outre cette condamnation ne respecte pas le principe général de droit universellement reconnu de légalité, les qualifications retenues par les magistrats ne prenant leur source dans aucun code de droit français ;

4) Que ces condamnations n’ont été obtenues qu’à la suite d’un détournement évident de la procédure de référé, laquelle était parfaitement inapplicable en l’espèce, ainsi d’ailleurs que le constate la doctrine, en sorte que le requérant n’a pas bénéficié des voies procédurales normales, et a donc été privé, en violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, d’une procédure juste et équitable, telle que définie dans les articles 6 § 1, § 2, § 3b de ladite convention ;

5) Que, contrairement à tous les principes généraux de droit régissant l’interprétation, les propos du requérant ont été sortis de leur contexte, et qu’en outre le mot « détail », parmi ses diverses acceptions, en a reçu une, contraire à celle qu’avait indiquée son auteur ;

6) Qu’il a été fait grief au requérant, pour prononcer contre lui une condamnation aussi considérable, du retentissement médiatique de ses propos, c’est-à-dire d’une campagne orchestrée par ses adversaires, sans que jamais ses mises au point aient été retransmises par des médias audiovisuels pourtant soumis, selon la législation française, à l’obligation légale de respect du pluralisme des opinions ;

7) Que l’usage en matière d’opinion de la voie civile a constitué un véritable détournement de procédure tendant à priver le requérant des garanties dont il aurait disposé dans une procédure relevant du droit pénal, ainsi que des limites fixées par celui-ci, et notamment l’article 111-3 du nouveau code pénal français (article 4 ancien).

Par ces motifs et tous autres à produire, déduire, et suppléer, le requérant conclut à ce qu’il : 
Plaise à la commission de transmettre sa cause à la Cour européenne des droits de l’homme, afin d’en faire condamner les autorités françaises à lui payer la somme de 1 500 000 FF (un million cinq cent franc français), en sus les intérêts au taux légal échus depuis le 18 décembre 1995, et les intérêts échus depuis plus d’une année.