Interviews de M. Jean-Pierre Raffarin, vice-président de Démocratie libérale et président de la région Poitou-Charentes, à RTL le 25 mars 1998 et à RMC le 1er avril, notamment sur la nécessité de refonder l'UDF, la demande de démission faite aux présidents de région élus avec les voix du Front national et sur la réforme des modes de scrutin régional et européen.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - Emission L'Invité de RTL - RMC - RTL

Texte intégral

RTL le mercredi 25 mars 1998

Jean Pierre Defrain : Une première réaction à la décision de Monsieur Bayrou - dont on va avoir confirmation dans quelques instants - de quitter l'UDF?

Jean-Pierre Raffarin : "En effet, il faut refonder aujourd'hui l'UDF. Il faut refonder l'UDF, mais il faut avoir un projet collectif. Je pense que la refondation de l'UDF ne peut pas être un projet solitaire ; il semble que le cap est plus important que le capitaine pour le moment. Et donc je fais partie de ceux qui veulent être aujourd'hui parmi les rénovateurs de ce grand courant social et libéral au cœur de la vie politique française. Je crois qu'en effet, il faut refonder, mais il faut refonder par les idées, par le projet, et ensuite on verra les structures et les dirigeants."

Jean Pierre Defrain : C'est une sorte de désaveu vis-à-vis de Monsieur Bayrou ?

Jean-Pierre Raffarin : "Non, je trouve qu'aujourd'hui, tous ceux qui se battent pour refonder l'UDF ont raison de le faire. Et s'il y a des périodes où il faut parler, la période est propice au débat, à la réflexion et à la stratégie. Je crois que ce qui est très important, c'est d répondre au déficit de projet de l'opposition. Aujourd'hui, nous avons un déficit de projet. C'est donc par les idées, par les choix que nous devons faire que l'UDF doit être rebâtie."

Jean Pierre Defrain : Mais est-ce que cette UDF n'a pas vécu ce soir ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je pense que l'UDF a connu en effet un période d'usure, et que maintenant elle est à bout de souffle. Mais il faut envisager la refondation de l'UDF avec de la perspective. Il faut prendre de l'altitude car, au fond, le travail de l'opposition consiste à devenir majorité. Et nous devons donc préparer une alternative à l'équipe Jospin. Aujourd'hui, le problème n'est pas de trouver un successeur à J. Chirac, il s'agit de construire une alternative crédible à l'équipe Jospin. Pour ce faire, à mon avis, nous avons trois priorités : d'abord constituer un contre-gouvernement efficace pour, au quotidien, mener l'audit des politiques socialistes. Il nous faut ensuite retourner à la base par des états-généraux pour bâtir notre projet de démocratie sociale et libérale. On a vu dans cette campagne régionale la remise en cause des états-majors. Il faut retourner au citoyen pour rebâtir le projet, et ensuite seulement réaménager, rénover, restructurer nos familles politiques. Mais d'abord, il faut donner de la perspective, il faut donner du contenu, et après nous verrons comment l'on construit."

Jean Pierre Defrain : Mais avec qui ? Avec la ligne Madelin, avec la ligne Bayrou ?

Jean-Pierre Raffarin : "Avec une grande ligne centrale qui doit conjuguer l'inspiration libérale et l'inspiration sociale. Il est clair, dans ce pays, que si le centre et la droite veulent pouvoir gouverner, ils doivent se rassembler. On ne peut pas gouverner sans cette double vocation. Pour l'économie il nous faut un moteur économique efficace : c'est le libéralisme. Et il faut corriger les insuffisances de l'économie libérale par une préoccupation sociale avec un projet social. Et donc, il nous faut conjuguer ces deux aspirations qui sont essentielles pour être majoritaires dans ce pays. Et le courant social et libéral que nous voulons représenter, il a la prétention à devenir majoritaire."

Jean Pierre Defrain : Vous qui êtes un proche de l'ancien président, nous pensons que V. Giscard d'Estaing va demander à C. Millon de démissionner ?

Jean-Pierre Raffarin : "J'ai entendu J.-M. Colombani tout à l'heure, tout le monde était giscardien d'après lui. Je crois d'ailleurs que la rupture, en tout cas l'écart entre H. de Charette et V. Giscard d'Estaing était déjà ancien puisque V. Giscard d'Estaing n'avait pas suivi H. de Charette dans la création du PPDF. Donc, j'ai été le porte-parole de Giscard, je ne le suis plus. Mais j'ai souvent parlé avec V. Giscard d'Estaing puisque nous sommes quasiment voisins dans nos deux régions, et que nous avons échangé nos idées sur les campagnes électorales, lui en Auvergne et moi en Poitou-Charentes. Et je peux vous dire que tous les ragots qui sont répandus aujourd'hui sont inexacts. Giscard est au-dessus de tout soupçon."

Jean Pierre Defrain : Mais, il souhaite la démission de C. Millon et de cinq présidents élus avec les voir du Front national ?

Jean-Pierre Raffarin : "Giscard s'exprimera lui-même. Je vous dis qu'il est au-dessus de tout soupçon, Giscard n'est pas dans ces manœuvres, il a fait une campagne digne, il a présenté un projet pour l'Auvergne, il a présenté ses valeurs. Je crois que la ligne politique qu'a suivie V. Giscard d'Estaing dans celle campagne est exemplaire, il est au-dessus de tout soupçon."

Jean Pierre Defrain : H. de Charette dit : on connaîtra bientôt les auteurs de ce sinistre complot. Ça veut dire quoi ?

Jean-Pierre Raffarin : "On verra bien. Si H. de Charette a des informations, il nous les communiquera et nous les analyserons. Ce que je sais c'est qu'il se trouve que j'ai pu être élu en Poitou-Charentes dans la clarté avec transparence, puisque nous avons dégagé une majorité relative qui nous a permis de gagner cette région avec clarté et transparence. Donc je crois que nous sommes nombreux à l'UDF à souhaiter la clarté et la transparence. Je suis très heureux que la position de l'UDF ait été reprise par Démocratie libérale. Nous avons maintenant une ligne cohérente partagée par une large majorité, et donc nous analyserons ensuite les conséquences. Mais ce qui était très important, c'est que nous ayons dans l'urgence et pour l'actualité une position commune de demander aux présidents de démissionner. Et donc, s'ils ne veulent pas démissionner, ils seraient exclus."

Jean Pierre Defrain : Mais précisément, comment l'UDF peut rester unie, homogène, éviter l'explosion puisque votre problème c'est le Front national finalement. Le RPR a mieux résisté, en dehors de J.-F. Mancel.

Jean-Pierre Raffarin : "On peut discuter des questions de résistance. Je crois qu'en effet le problème de l'opposition toute entière c'est en effet le Front national, mais je crois que ce n'est pas le problème de la structure Front national, c'est le problème du projet politique. Et nous n'avons pas que le problème du Front national. Nous avons sur l'Europe, par exemple lors des prochaines élections européennes, à clarifier notre débat. Et s'il y a eu une certaine forme de pagaille dans les élections régionales, c'est parce que nous n'avons pas été capables de changer le mode de scrutin. Et pourquoi n'en avons-nous pas été capables ? C'est qu'on n'a pas été capables de choisir entre la région et le département, que nous n'avons pas été capables d'arbitrer, que l'UDF n'a pas fait ses choix. Que l'UDF fasse ses choix, qu'elle rebaptise son projet."

Jean Pierre Defrain : Donc vous approuver les propositions de Monsieur Jospin de modifier très rapidement les modes de scrutin notamment aux régionales ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je pense que l'UDF doit faire ses choix. Elle doit dire quel mode de scrutin elle veut, elle doit dire quel est son projet européen, elle doit se placer dans une perspective européenne claire. Est-ce qu'on est eurosceptique ou est-ce qu'on est fédéraliste ? Entre ces deux limites, est-ce qu'on a défini ces positions ? Il faut les définir. On ne peut pas être attractif sans projet. Aujourd'hui, la priorité est aux idées, Redéfinissons le projet et nous aménagerons les structures. Ne faisons pas aujourd'hui des structures la priorité. Il faut répondre aux vraies questions."

Jean Pierre Defrain : F. Léotard doit-il rester à la tête de l'UDF rénovée ?

Jean-Pierre Raffarin : "Le bureau politique s'est prononcé, il reste."

Jean Pierre Defrain : Estimez-vous être pour longtemps dans l’opposition ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je suis dans la majorité en Poitou-Charentes. Et sur le plan national, ce qu'il faut c'est gagner pour avoir une véritable alternative qui dure. Tous les derniers gouvernements de la droite n'ont fait que deux ans - Monsieur Balladur a fait deux ans, Monsieur Juppé a fait deux ans, Monsieur Chirac en 1986 avait fait deux ans. Tout notre problème c'est d'essayer de durer un peu plus de deux ans. Donc le problème n'est pas d'être au pouvoir, c'est d'être au pouvoir et de durer grâce à une politique efficace pour régler les problèmes des Français. Donc ce que je souhaite, ce n'est pas qu'on aille au pouvoir, c'est qu'on y reste quand on y sera. C'est-à-dire qu'on fasse une politique pour laquelle on a été élu et pour laquelle on a les moyens de réussir. Et pour cela, il faut faire avant un travail de reforestation D'abord faire l'audit au quotidien du Gouvernement, suivre ministère par ministère l'activité des socialistes. Et à côté de cela, rebâtir un projet, rebâtir nos structures, refonder une dynamique de l'opposition capable d'être claire au pouvoir et de ne pas être ambiguë."


RMC le  mercredi 1er avril 1998

Philippe Lapousterle : Vous venez d'être élu président de Poitou-Charentes dans de bonnes conditions. Est-ce que ce n'est pas la fin des régions avec ce qui s'est passé ? Tout cela est ingouvernable au bout du compte pour la plupart des présidents de région.
 
Jean-Pierre Raffarin : "Je ne pense pas que toutes les régions soient ingouvernables. Moi, je ne suis pas hostile à la majorité relative. La majorité relative, c'est-à-dire que cela oblige le président à aller écouter les autres, écouter ses oppositions. Je préfère des majorités relatives à des alliances contre nature. La majorité relative n'est pas quelque chose de particulièrement difficile. J'ai gouverné Poitou-Charentes avec les élus du Poitou-Charentes pendant six ans, avec une majorité relative, j'ai à nouveau une majorité relative; cela oblige à être attentif aux uns et aux autres, à écouter. Je pense que nous avons eu un excès de nationalisation du fait régional. Je crois vraiment que le fait régional reste une bonne réponse pour nos problèmes. Sur l'emploi, par exemple : tant qu'on ne régionalisera pas les 150 milliards d'aide à l'emploi, on ne sera pas très actif au niveau des bassins d'emploi."

Philippe Lapousterle : A condition que les régions marchent.

Jean-Pierre Raffarin : "Il faut régionaliser, mais elles vont marcher pour la plupart d'entre elles. Je crois vraiment que le fait régional est une bonne solution. Il ne faut pas avoir un excès de nationalisation. Ma première proposition, d'ailleurs, sur ce terrain-là, quand on parle de scrutin régional, il faut en effet le changer, mais il faut aussi - comme en Espagne, comme en Allemagne -, que les élections régionales aient lieu de "manière perlée" je dirais : quatre à cinq tous les ans, pas un grand rendez-vous national. Parce qu'à ce moment-là, les états-majors nationaux, les grands médias nationaux, prennent la campagne en mains, et c'est une campagne nationale et non plus une campagne régionale."

Philippe Lapousterle : Les états-majors dont vous faites partie M. Raffarin...

Jean-Pierre Raffarin : "Oui mais, je suis un peu en bataille sur... Je suis avant tout enraciné et avant tout un Picto-Charentais, et c'est mon identité première."

Philippe Lapousterle : M. "le Charentais", I'UDF est votre fédération quand même. Les présidents de région élus avec les voix des conseillers régionaux du Front national, avaient une semaine pour démissionner. Le rendez-vous, c'est demain. Est-ce que, sans état d'âme, il faudra exclure les trois qui n'ont pas démissionné ?

Jean-Pierre Raffarin : "Sans état d’âme. J'ai beaucoup d'amitié personnelle pour un certain nombre de présidents, évidemment. Nous avons délibéré, nous avons voté et la décision doit s'appliquer sans hésitation. Il en va de l'avenir de l'UDF. Je crois qu'il ne peut y avoir de rénovation sans application de nos décisions."

Philippe Lapousterle : Donc exclusion demain ?

Jean-Pierre Raffarin : "En effet, le processus est engagé. Ils avaient huit jours pour se prononcer."

Philippe Lapousterle : L'UDF, on peut dire - je ne sais pas si vous êtes d'accord, mais c'est ainsi que les gens le voient ; I'UDF est sinistrée. Croyez-vous qu'une vraie rénovation est possible, sincèrement ? Quand on entend parler de rénovation dans l'état actuel de l'UDF, on peut avoir des doutes légitimes... Surtout si ce sont les mêmes !

Jean-Pierre Raffarin : "Très franchement, c'est pas d'aujourd'hui que l'UDF a des difficultés. Je connais cette famille depuis un certain temps. J'ai vu, par exemple, un ancien Président de la République en bataille avec son ancien Premier ministre - MM. Giscard d'Estaing et Barre dans le temps - c'était pas très beau l'UDF à ce moment-là. Je me souviens qu'aux dernières présidentielles, on a eu une déchirure entre deux candidats RPR. L'UDF a donc connu des difficultés un peu structurelles. Je crois que la rénovation est possible, mais une vraie rénovation et non pas une rénovation coup de poing, pas une rénovation expéditive, comme cela a été proposé avec un référendum dans un mois."

Philippe Lapousterle : Vous étiez contre Bayrou par exemple, contre l'opération... ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je pense que F. Bayrou a quelque peu fragilisé l'UDF par son initiative solitaire. Aujourd'hui, nous pouvons revenir à une démarche de confiance. Mais le pacte de famille a été fissuré. Maintenant, il faut retrouver la confiance."

Philippe Lapousterle : Et sur le niveau du rythme, ne faut-il pas aller vite ?

Jean-Pierre Raffarin : "Il ne faut pas aller vite si on veut rénover en profondeur. Car il faut reconstruire complètement l'UDF. Je propose d'abord un pacte de rénovation sincère. C'est-à-dire qu'on se mette autour de la table pour bien engager une procédure, une démarche, un calendrier pour lesquels les acteurs principaux de l'UDF seront d'accord. Cette démarche doit être menée par un collectif national de rénovation, sans les chefs."

Philippe Lapousterle : Fait par qui alors ?

Jean-Pierre Raffarin : "Par des parlementaires, des présidents de fédérations, par des élus locaux ; vraiment un comité national qui gère cette rénovation sincèrement par une régionalisation des débats. Je souhaite que l'on puisse définir notre projet UDF au niveau de chaque région et que, dans les régions, MM. Méhaignerie et Madelin, en Bretagne, se mettent d'accord sur un texte qui, par exemple, devra arbitrer à mon avis les cinq grandes questions que nous avons à arbitrer : l'Europe - quelle construction européenne, quelle intensité européenne - le Front national, la place du social dans le libéral, quelles sont nos valeurs ? Un certain nombre de sujets qui sont très importants - et naturellement la décentralisation - pour lesquels notre projet, au niveau régional doit arbitrer. Je propose un pacte de rénovation, un collectif national, une démarche régionalisée, avant l'été, des assises UDF avant l'été, dans chacune des régions ; un projet UDF discuté au niveau des régions. Et puis, à l'automne, une synthèse du projet et à la fin du processus, avant la fin de l'année, un référendum et l'élection des dirigeants. Mais la structure de la direction, tout ceci doit venir après le débat d'idées ; une rénovation doit être sincère, tout le monde doit s'y engager. Je crois qu'elle est nécessaire."

Philippe Lapousterle : Le RPR a pris la décision de ne plus faire liste commune avec vous. Est-ce une décision que vous trouvez juste ou elle vous coûte beaucoup ? Vous qui disiez tout le temps : l'union, l'union ?

Jean-Pierre Raffarin : "Mais je suis toujours pour "l'union." Je vous le répète, si c'est un mot qui vous plaît. Je suis très attentif aux propos naturellement du RPR. Je dis simplement au RPR qu'il faut être vigilant. Si la division conduit à mettre le Front national devant, il faut être responsable et donc avoir des stratégies d'union. Mais je pense qu'il faut aller plus loin. Je suis pour que l'on poursuive la démarche qu'a lancée F. Léotard hier soir : par exemple, la réunion des deux bureaux politiques UDF et RPR. Je suis pour que l'on ait un conseil national de l'opposition - permanent, UDF et RPR - pour qu'ensemble, d'abord, on marque le Gouvernement. Je suis pour qu'on ait un contre-gouvernement - un shadow cabinet, disent les Anglais - pour qu'on puisse marquer au quotidien, qu'on fasse l'audit quotidien de l'action des socialistes. Et puis, qu'on bâtisse un véritable projet. Notre problème politique aujourd'hui, ce n'est pas de succéder à J. Chirac, ce n'est pas de multiplier les ambitions présidentielles, ce n'est pas de donner la grosse tête à nos leaders. Notre problème aujourd'hui, c'est de dégager une équipe, capable de remplacer l'équipe Jospin, avec un projet. Voilà notre problème politique dans l'opposition."

Philippe Lapousterle : Et un seul parti  ce que vos électeurs veulent, avec des tendances à l'intérieur, comme cela existe dans tous les partis, n'est-ce pas une bonne solution ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je crois qu'il faut être réaliste : un seul parti aujourd'hui serait une décision prématurée. Je pense qu'aujourd'hui, il nous faut un seul projet, c'est-à-dire un projet gouvernemental : que faisons-nous si nous sommes au gouvernement, comment nous nous organisons, quelle équipe ? En fait, il faut remplacer l'équipe Jospin - quand, comment, pour quoi faire ? Évitons d'être dans la situation dans laquelle nous nous sommes trouvés trois fois, pour les trois derniers gouvernements : être incapables de durer plus de deux ans au pouvoir. Notre problème, c'est de durer. Et pour cela, il ne faut pas décevoir les électeurs. Pour cela il faut travailler, constituer une équipe, avec un projet, pour que l'on ait une alternative, et, en partenariat avec J. Chirac, lui proposer une stratégie pour bâtir."

Philippe Lapousterle : Faut-il changer le mode de scrutin des européennes qui ont lieu dans un an ?

Jean-Pierre Raffarin : "C'est la première des urgences. Je veux bien qu'on change le scrutin régional - cela me paraît nécessaire après ce que nous venons de vivre - mais le plus important, c'est le scrutin européen pour éviter les problèmes que nous avons pu connaître avec le scrutin régional. Je propose la régionalisation du scrutin européen. M. Barnier a déposé un projet de loi au Sénat - une proposition de loi au Sénat - j'approuve complètement. La circonscription, interrégionale - par exemple : en ce qui concerne Poitou-Charentes, une circonscription "arc-Atlantique" et une élection pour les régions de l'Atlantique."

Philippe Lapousterle : Ce n’est pas trop tard pour organiser tout cela ?

Jean-Pierre Raffarin : "Ce n'est pas trop tard ; la proposition de loi est déposée au Sénat. Nous avons eu un certain nombre de débats. Je souhaite vraiment que, dans l'urgence, on modifie le scrutin des élections européennes en le régionalisant."

Philippe Lapousterle : Le cumul des mandats, c'est urgent aussi ?

Jean-Pierre Raffarin : "Je pense que le cumul des mandats est un sujet qui est un peu biaisé aujourd'hui."

Philippe Lapousterle : Je vous sens moins enthousiaste...

Jean-Pierre Raffarin : "Je le suis parce que je suis contre la nationalisation... Le cumul des mandats, le non-cumul des mandats, cela veut dire qu'il y aura deux catégories d'élus : des élus enracinés - ce que moi je choisirais : le terrain, le concret, l'opérationnel, l'actif - et puis il y aura les états-majors et la classe politique - tous ceux qui auront fait l'ENA, qui auront eu le diplôme pour avoir droit à être un politicien -, ceux-là, naturellement, vont encombrer l'ensemble des allées du pouvoir. Et je pense que la classe politique régionale deviendra une classe de deuxième classe. Je pense qu'il vaut mieux qu'il y ait une seule catégorie de responsables, qui doit être pluraliste et ne pas venir toujours du même moule. Il y a de la diversité dans la politique. Je ne me battrai pas sur ce sujet, je ne veux pas apparaître dans le camp es cumulards. Les électeurs choisiront."