Interview de M. Alain Juppé, Premier ministre, dans "Valeurs vertes" de juillet-août 1996, sur sa décision de geler l'application de la directive communautaire "Habitats Faune Flore" pour le réseau "Natura 2000" prévoyant le classement de sites naturels en France.

Prononcé le 1er juillet 1996

Intervenant(s) : 

Média : Valeurs vertes

Texte intégral

Valeurs vertes : En gelant l'application de la directive communautaire « Habitats » au motif que la Commission européenne n'a pas prédéfinie les modalités exactes de gestion des sites du réseau Natura 2000, ne craignez-vous pas que l'on en déduise que la France attend de Bruxelles une contrainte plus forte que celle initialement prévue dans la directive ?

Alain Juppé : J'ai décidé de geler l'application « Habitats-faune-flore » parce qu'il ne me paraissait pas possible de notifier un réseau de sites naturels à protéger sans connaître au préalable les conditions de gestion de ces sites et les contraintes éventuelles qui pèseront sur les activités humaines dans ces sites.

Dans cette affaire qui est importante il ne faut pas mettre « la charrue avant les boeufs ». En même temps qu'un site est susceptible d'être retenu pour être protégé, il faut savoir avec précision et sans contestation possible quel est le calendrier des charges applicables à cette zone.

Bien sûr, la France n'attend pas une contrainte de Bruxelles plus forte que celle initialement prévue. La France attend seulement que le bon sens soit pris en compte.

Valeurs vertes : Quand le Gouvernement français soumettra-t-il à ses partenaires les propositions destinées à éviter que la France ne se retrouve devant le fait accompli ?

Alain Juppé : La France va proposer à ses partenaires communautaires dès le mois de septembre, un certain nombre de mesures d'ajustement du dispositif prévu par la directive.

Il me semble ainsi prioritaire de faire passer le message selon lequel il n'est plus possible d'imposer de réglementation nouvelle. Il faut au contraire entreprendre avec les habitants des sites naturels les plus intéressante une démarche partenariale de conception et d'explication. C'est à ce prix que la protection de l'environnement ne sera plus vécu comme une contrainte mais comme une opportunité et une chance.