Interview de Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, à France Ô le 24 juin 2019, sur l'érosion de la côte en Martinique, sa biodiversité et les énergies renouvelables.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Emmanuelle Wargon - Secrétaire d'Etat auprès du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire

Média : France ô

Texte intégral

CYRIAQUE SOMMIER
Bonsoir Emmanuelle WARGON.

EMMANUELLE WARGON
Bonsoir.

CYRIAQUE SOMMIER
Alors est-ce qu'il va falloir en Martinique déplacer tout ce qui a été construit finalement près des côtes ?

EMMANUELLE WARGON
Alors je suis en Martinique pour deux jours et j'ai souhaité que ma première visite soit au Prêcheur parce que l'expérience qu'il y a là-bas est vraiment une expérience intéressante. C'est un bourg qui est une commune qui est confrontée à cette érosion du trait de côte, à la fois un risque sismique et, en plus, au risque de lahar avec ses coulées de boue et puis de morceaux montagne en fait qu'on a vus dans le reportage. Et ils travaillent en deux temps : un temps d'urgence pour essayer de déplacer les constructions qui sont les plus exposées, notamment l'école, et puis un temps de plus long terme pour proposer une solution de relogement aux habitants. Et là où c'est intéressant, c'est qu'on peut prendre exemple sur cette expérience qui est faite avec l'appui du ministère de la Transition écologique et solidaire, un laboratoire du ministère et puis des chercheurs et des universitaires de l'université de Marne-la-Vallée. Donc s'appuyer sur cette expérience pour faire la même chose dans d'autres communes de la Martinique et d'ailleurs des Antilles, et nous lançons un grand appel à manifestation d'intérêt aux équipes d'architectes, d'urbanistes de maîtres d'oeuvre pour qu'ils arrivent et qu'ils aient des idées un peu innovantes de construction au bénéfice de la Martinique et des Antilles.

CYRIAQUE SOMMIER
Parce qu'il y a 70.000 personnes en gros en Martinique qui vivent sur cette côte, en tout cas sur la bande des 50 pas géométriques la plus exposée bien sûr, il s'agit donc aujourd'hui de trouver les solutions, ce n'est pas encore fait, c'est ce que vous dites.

EMMANUELLE WARGON
Alors pour la commune du Prêcheurs, les solutions sont en route, l'école, le projet est là, elle ouvrira l'année prochaine donc ça va être rapide, les 300 relogements sont programmés, les parcelles ont été identifiées et on est vraiment au stade de la conception des logements. Pour d'autres communes, on peut s'inspirer de cet exemple, il faut évidemment des maires volontaires comme c'est le cas de monsieur NADEAU au Prêcheur. Mais on peut s'inspirer de cet exemple pour inventer d'autres types de changement d'habitat, avec bien sûr les citoyens, parce que c'est aussi ce qui est intéressant au Prêcheur, ça a été fait avec les habitants.

CYRIAQUE SOMMIER
Alors est-ce qu'on s'intéresse également aux éventuelles solutions techniques pour contrer en quelque sorte ce phénomène d'érosion, je sais bien que ce n'est pas évident, mais il y a quand même des techniques qui sont utilisées ça et là de… Parfois on peut même replanter des palétuviers, refaire de la mangrove en quelque sorte, est-ce que ça ce sont des pistes qui vous semblent intéressantes ?

EMMANUELLE WARGON
La piste de la nature, de la biodiversité, de la mangrove, ça me paraît très intéressant, d'ailleurs demain j'irai dans une zone de mangrove. En fait la nature et ce qu'on appelle les solutions fondées sur la nature c'est extrêmement efficace, quand on relaisse sa place à la nature, à la fois on préserve la nature elle-même, la biodiversité, les espèces, à la fois les végétaux et puis les oiseaux et aussi des animaux. Et à la fois cette nature elle-même reprend son rôle de protection. Donc c'est aussi pour ça que l'un des sujets de cette visite en Martinique, c'est la protection et le développement de la biodiversité. Nous signons demain avec le président de la collectivité territoriale de Martinique une convention entre l'Etat, l'Agence française de la biodiversité et la collectivité.

CYRIAQUE SOMMIER
Elle consistera en quoi cette convention ?

EMMANUELLE WARGON
Elle consiste à unir nos efforts pour préserver la biodiversité en Martinique, à la fois le parc, le parc marin et puis le parc naturel régional, les réserves. On a par exemple un projet d'extension de la réserve de la Caravelle, je m'y suis rendue cet après-midi, j'ai rencontré les pêcheurs et puis tous les acteurs de cette réserve, donc unir nos efforts pour pouvoir programmer les actions sur la protection terrestre, la protection de la mangrove, la protection maritime, aussi pour valoriser cette richesse parce que c'est une belle richesse et c'est aussi au service du tourisme vert par exemple.

CYRIAQUE SOMMIER
Alors vous êtes également ici pour parler transition énergétique, demain vous allez visiter l'usine d'Albioma qui fournit de l'énergie à la sucrerie du Galion, les écologistes depuis le début dénoncent ce projet comme étant très, très polluant, très émetteur de particules fines notamment, est-ce qu'on a fait le bon choix en ce qui concerne ce projet ?

EMMANUELLE WARGON
Oui, j'aimerais rassurer tout le monde y compris les écologistes, ce n'est pas le seul endroit en France et d'ailleurs dans les outremers où on produit de l'énergie à partir de la bagasse, c'est-à-dire ce dérivé de la canne à sucre. On a fait toutes les études et donc on sait que l'usine est aux normes en matière de pollution. Et puis c'est une valorisation possible de la canne à sucre et d'ailleurs je viens demain annoncer une bonne nouvelle, puisque les producteurs de canne à sucre n'avaient pas le bénéfice d'une prime, qui s'appelle la prime bagasse, qui va pouvoir bénéficier désormais aux producteurs de la Martinique. C'est un million d'euros que l'Etat met sur la table pour soutenir la filière de la canne à sucre et puis la bagasse, ça remplace en général le charbon, donc ça va rentrer dans une vision plus globale et on en parlait avec Alfred MARIE-JEANNE ce matin que j'ai vu, pour programmer la sortie des énergies fossiles de Martinique, programmer l'indépendance énergétique de la Martinique à horizon 2030, aller vers des énergies plus renouvelables, éolien, le solaire, la géothermie.

CYRIAQUE SOMMIER
Vous l'avez dit, 2030, 100 % selon les prévisions, enfin les objectifs fixés par la COP21, 100 % d'énergies renouvelables dans nos régions, on en est très loin, on est à peine à 7 %, là, il va vraiment falloir donner un coup de collier.

EMMANUELLE WARGON
On est tout à fait prêts à passer à la vitesse supérieure, donc à développer ce que je vous disais, l'éolien, le solaire, la géothermie, aussi la production à partir de biomasse, donc de matériel végétal, c'est atteignable, l'autonomie énergétique et les énergies renouvelables en 2030, mais il faut une ambition et je crois que c'est bien, on va pouvoir lancer les travaux formellement avec la collectivité territoriale de Martinique, c'est important.

CYRIAQUE SOMMIER
Emmanuelle WARGON, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, merci d'avoir acceptée notre invitation.

EMMANUELLE WARGON
Merci à vous et Vive la Gay Pride au Carbet.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 juin 2019