Texte intégral
JULIE HAMMETT
Tout de suite c'est Christophe JAKUBYSZYN, et vous accueillez Nicole BELLOUBET ce matin, ministre de la Justice.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Oui, la ministre de la Justice, garde des Sceaux. Bonjour Nicole BELLOUBET.
NICOLE BELLOUBET
Bonjour.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous avez passé hier 10 heures avec vos collègues du gouvernement, autour du Premier ministre Edouard PHILIPPE, pour mettre en musique les annonces du président.10 heures c'est long, qu'est-ce qu'on fait pendant 10 heures ? Racontez-nous.
NICOLE BELLOUBET
Alors, pendant 10 heures nous travaillons sur les différents thèmes que le président de la République a signalés comme étant des thèmes essentiels pour notre action. Nous déjeunons ensemble aussi, ce qui est important, avec la majorité parlementaire, pour que nous partagions les points de vue, et donc nous aboutissons sur le calendrier qui a été annoncé par le Premier ministre.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, 10 heurs pour presque 10 milliards d'euros d'annonces, ça fait à peu près un milliard par heure, je ne sais pas si c'est comme ça que l'on peut définir…
NICOLE BELLOUBET
Ce n'est pas exactement comme ça que nous avons envisagé les choses, mais réellement, comme une application concrète et une déclinaison concrète.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
En tout cas, moi j'ai une question très directe à vous poser en tant que ministre de la Justice : 10 milliards, quand on sait à quel point vous vous êtes bataillé pendant des mois pour avoir de l'argent, pour notamment construire des places de prison, on sait à quel point nous sommes en surpopulation carcérale en France, vous ne vous êtes pas dit : 10 milliards le 10 décembre, 10 milliards sur les nouvelles annonces, j'aurais bien aimé avoir un peu d'argent pour les prisons.
NICOLE BELLOUBET
Non, je ne me suis pas dit cela, pour deux raisons. D'abord parce que j'ai la chance d'avoir une loi de programmation pour la justice qui a augmenté le budget de la justice d'à peu près 25 % en 5 ans, ce qui est donc la traduction de la volonté du gouvernement d'améliorer la justice en France. Et puis surtout, très sincèrement je pense que ce qui est important aujourd'hui c'est que nos concitoyens voient la traduction concrète des ambitions du gouvernement. J'entendais ce que disait le Gilet jaune à l'instant, il disait : mais au fond on n'a rien, on n'a rien obtenu. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai. Je ne dis pas que tout est résolu, mais je dis qu'il y a vraiment une volonté manifeste de traduire les choses très concrètement, à la fois ce sont des augmentations de pouvoir d'achat, les petites retraites, les primes qui ont pu être accordées au mois de décembre, et puis c'est tout ce qui va venir je crois en termes de réduction d'impôts, qui sera également cette traduction concrète. Donc moi c'est ça qui est important. Je fais de la politique pour que cela donne finalement des moyens supplémentaires aux citoyens.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Encore une ou deux questions sur les prisons. J'ai quand même calculé : un milliard d'euros, si on vous avait donné un milliard d'euros, ça fait 6 000 places de prison supplémentaires, c'est entre 150 et 190 000 € la place de prison.
NICOLE BELLOUBET
Si vous voulez, moi je n'ai pas pour ambition de construire et de construire des places de prison, il faut les places de prison…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Quand même.
NICOLE BELLOUBET
Mais absolument. J'ai pris un engagement…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il y a 15 000 détenus en surnombre.
NICOLE BELLOUBET
10 000. Le président de la République, j'ai 60 000 places de prison, 70 000 détenus. Le président de la République s'est engagé à construire 15 000 places de prison supplémentaires, nous les ferons. 7 000 vont sortir de terre et seront mises en fonctionnement d'ici 2022 et 8 000 seront lancées. Donc nous allons construire les places de prison, mais plus que cela, mon ambition c'est de construire une politique des peines qui réellement fasse que la peine de prison soit la peine la plus utile possible, et quand elle n'est pas utile, que nous n'ayons pas cette solution-là, mais d'autres sanctions.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Notamment les peines de substitution qui sont mises en œuvre notamment avec la nouvelle loi…
NICOLE BELLOUBET
Notamment le travail d'intérêt général, le placement sous bracelet électronique et d'autres solutions encore.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, tant que la surpopulation carcérale n'est pas vaincue, ça pose des problèmes, vous allez être auditionnée cet après-midi sur…
NICOLE BELLOUBET
A Condé-sur-Sarthe.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
A Condé-sur-Sarthe, cette prison où un détenu radicalisé s'était retranché avec sa compagne pendant près de 8 heures…
NICOLE BELLOUBET
C'est ça, et a blessé un surveillant.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Qu'est ce qui s'est passé ? Parce que je crois que vous avez demandé un rapport d'enquête à vos services. Est-ce qu'il y a eu des fautes ? Est-ce qu'il y a eu des manquements dans cette prison de
Condé-sur-Sarthe ?
NICOLE BELLOUBET
Non, il n'y a pas... enfin il n'y a pas eu de faute au sens de fautes individuelles, d'ailleurs je signale juste qu'à Condé-sur-Sarthe la prison n'est pas du tout en surpopulation, pas du tout. C'est une prison extrêmement sécuritaire et il n'y a pas eu dans ce cadre-là de surpopulation. Ce qui s'est passé…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais le rapport que vous avez commandé, révèle par exemple qu'on ne contrôlait pas toutes les entrées, notamment sur l'alimentaire, ça passait sans être contrôlé.
NICOLE BELLOUBET
il y a des failles dans nos systèmes, et vous le sous-leviez effectivement, par exemple il y a des améliorations à apporter sur le contrôle des visiteurs, sur le contrôle des marchandises qui entrent, sur les fouilles des détenus, sur d'autres éléments, et tout cela c'est ce qu'a révélé le rapport d'inspection, c'est donc des mesures que nous avons d'ores et déjà mises en place.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et c'est ce que vous allez expliquez tout à l'heure à l'Assemblée.
NICOLE BELLOUBET
C'est ce que je vais expliquer aux parlementaires, bien sûr.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Aux parlementaires. Alors, hier il y avait un dossier qui vous concernait particulièrement, c'est la réforme de la Constitution. On écoute ce qu'en disait tout à l'heure vers 20h00, le Premier ministre.
EDOUARD PHILIPPE, PREMIER MINISTRE
Au mois de juillet, au mois de juillet le texte de la révision constitutionnelle sera présenté au Conseil des ministres, début du mois de juillet.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, c'est en juillet, il l'a précisé 3 fois, donc ça y est, il y a une échéance, vous allez devoir présenter cette réforme de la Constitution, dans quelques mois.
NICOLE BELLOUBET
Effectivement, vous savez qu'il y a actuellement un texte qui est pendant devant le Parlement. Nous allons réécrire un texte qui sera très resserré et qui porte au fond sur les éléments dont nous avons profondément besoin et qui ont été mis en exergue par le président de la République. J'en cite deux. Il y a l'émergence d'éléments plus soutenus en matière de démocratie participative, autrement dit la possibilité de déclencher plus facilement, sur des pétitions de citoyens, de déclencher un référendum d'initiative partagée…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais alors vous mettez en avant le point sur lequel on peut dire que le gouvernement a le moins entendu les revendications des Gilets jaunes, par exemple vous vous souvenez que les Gilets jaunes ils voulaient à la fois un référendum d'initiative citoyen, et d'ailleurs on va écouter ce qu'en a dit le président de la République la semaine dernière à ce sujet.
EMMANUEL MACRON, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Enfin il y a eu la question du référendum d'initiative citoyenne. Tel qu'il est proposé, il me semble remettre en cause la démocratie représentative, mais je crois malgré tout que nous devons donner plus de place à la voie référendaire dans notre démocratie.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Voilà la feuille de route.
NICOLE BELLOUBET
Je crois que le président a été extrêmement clair, c'est-à-dire qu'au fond nous nous fonctionnons sur un système de démocratie représentative, nous élisons des représentants au niveau local, au niveau national, ces gens ont une légitimité qui est celle du suffrage universel, il est important qu'ils puissent s'exprimer en s'appuyant sur cette légitimité. Pour autant, pour autant tout cela n'interdit pas, tout cela même exige que des éléments de démocratie que je qualifierais de démocratie augmentée, participative, viennent compléter et renforcer cette démocratie représentative, et c'est donc la raison pour laquelle, à la fois nous allons faciliter le référendum d'initiative partagée…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Il faudra combien de…
NICOLE BELLOUBET
Un million.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Contre 4 millions aujourd'hui.
NICOLE BELLOUBET
4,5 millions aujourd'hui. Nous allons également mettre en place des consultations citoyennes. Le président de la République a annoncé qu'au mois de juin nous allions réunir des conventions citoyennes…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
150 Français, tirés au sort.
NICOLE BELLOUBET
Voilà, c'est-à-dire 150 Français, tirés au sort, qui vont prendre des positions sur les mobilités périurbaines, sur les questions écologiques, c'est extrêmement important. Et cela nous voudrions le pérenniser dans la Constitution. C'est la première fois que nous verrons dans la Constitution des citoyens tirés au sort, qui pourront s'exprimer.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ça, ça va être écrit dans la Constitution ?
NICOLE BELLOUBET
Nous souhaitons l'écrire dans la Constitution.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Le fait que sur tel ou tel sujet on tire au sort des Français.
NICOLE BELLOUBET
Absolument. Alors nous allons essayer de construire un système qui soit pérenne, non pas que des citoyens s'installent de manière pérenne, mais que le système de tirage au sort puisse être pérennisé, c'est extrêmement important…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Pas seulement pour l'écologie, comme ça sera le cas en juin.
NICOLE BELLOUBET
Pas seulement pour l'écologie.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ah oui, d'accord.
NICOLE BELLOUBET
Donc vous voyez, il y a une vraie volonté…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Une démocratie du tirage au sort.
NICOLE BELLOUBET
Non, je ne dirais pas une démocratie du tirage au sort…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
A la grecque, presque.
NICOLE BELLOUBET
Je dirais une démocratie vraiment citoyenne, démocratie représentative plus démocratie participative.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Vous pouvez m'en dire plus, ce matin, sur cette idée de constitutionnaliser le tirage au sort de citoyens, pour les consulter sur des sujets ? Concrètement ça sera quoi ?
NICOLE BELLOUBET
Mais, on pourrait... L'idée peut-être que nous pourrions proposer, c'est de réformer l'actuel CESE, le Conseil environnemental…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Economique, social et environnemental.
NICOLE BELLOUBET
Economique, social et environnemental, et de le transformer pour que dans cette assemblée puissent siéger des citoyens qui pourraient être tirés au sort et qui pourraient s'exprimer pendant un certain temps sur un certain nombre de propositions ou d'initiatives citoyennes. Donc vous voyez, il y aurait en permanence dans notre système démocratique, des citoyens tirés au sort, renouvelés régulièrement mais qui pourraient exprimer la parole du citoyen.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
C'est une annonce que vous nous faites ce matin : le Conseil économique, social et environnemental sera enrichi de Français, de citoyens tirés au sort.
NICOLE BELLOUBET
Voilà, ils pourraient se transformer en un Conseil de la participation citoyenne. Ce pourrait être une proposition intéressante qui permettrait de prendre en compte cela.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Que vous faites ce matin, et en tant que garde des Sceaux, j'imagine que cette proposition sera suivie des faits.
NICOLE BELLOUBET
Ah, je le souhaiterais en tout cas oui.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Bon, il y a d'autres points qui étaient notamment exprimés par les Français, la volonté d'être mieux représenté à l'Assemblée nationale. Le président a annoncé une dose de proportionnelle. Alors à quel niveau ? J'ai vu que Gérard LARCHER disait : pas plus de 20 %.
NICOLE BELLOUBET
Eh bien il a donné un chiffre qui, cela tombe bien, est celui que le président de la République lui-même a donné lors de sa conférence de Presse. Dans les actuels textes qui sont en cours devant le Parlement, nous étions allés à une dose de proportionnelle de 15 %. Là le président de la République propose 20 %, ce qui me semble-t-il est…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ça suffira pour représenter, par exemple les Français qui votent Rassemblement national ou France insoumise ?
NICOLE BELLOUBET
Je crois que d'abord les Français qui votent Rassemblement national ou France insoumise sont représentés au Parlement aujourd'hui…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Assez peu en nombre de députés par rapport à ce qu'ils représentent dans le pays.
NICOLE BELLOUBET
C'est bien la raison pour laquelle le président de la République souhaite vraiment que l'ensemble des Français soit représenté. Je crois que cette dose de proportionnelle nous permettra de faire cela.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
La baisse du nombre de députés et de sénateurs, là aussi Gérard LARCHER dit : pas plus de 20 % de baisse. Ça ne fait pas beaucoup de sénateurs en moins.
NICOLE BELLOUBET
Alors, là-dessus si vous voulez nous nous sommes vraiment partis sur ces deux principes qui étaient d'ailleurs des engagements présidentiels. Proportionnelle et diminution du nombre de parlementaires. Cette diminution nous l'avions envisagée initialement à 30 % du nombre de parlementaires, sans doute est-ce que ce chiffre doit être revu à la baisse…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Parce que vous avez négocié avec le Sénat.
NICOLE BELLOUBET
Je ne sais pas si nous irons jusqu'à 20 %, mais en tout cas autour de 25 % pourrait être un chiffre acceptable.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et vous espérez que ce soit adopté par le Congrès et non pas par référendum.
NICOLE BELLOUBET
Alors là, ces deux derniers éléments...
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
N'ont pas besoin de révision constitutionnelle.
NICOLE BELLOUBET
Ce n'est pas dans la révision constitutionnelle, c'est dans un texte législatif…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Loi organique.
NICOLE BELLOUBET
Voilà. Et donc là nous n'avons pas besoin de concret, mais j'espère vraiment que la révision constitutionnelle, centrée sur les deux points que j'ai évoqués, c'est-à-dire participation et différenciation des territoires, c'est un point extrêmement important, pourra faire l'objet d'un accord par le Congrès ou sinon eh bien le président de la République pourra choisir une autre voie.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Eventuellement le référendum.
NICOLE BELLOUBET
Oui, c'est une possibilité constitutionnelle, effectivement.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
On va parler de la journée de demain, le 1er mai, journée à haut risque on nous dit, parce qu'il y a évidemment notamment, ça c'est traditionnel, les syndicats, les Gilets jaunes, on les a vus qui vont se joindre aux syndicats et puis malheureusement les casseurs les Blacks blocs, de toute l'Europe qui appellent en France à une journée d'insurrection. Est-ce que vous craignez, est-ce que vous redoutez cette journée ? Et une question : est-ce que la nouvelle loi anticasseurs qui a été votée, va pouvoir s'appliquer de manière efficace demain ?
NICOLE BELLOUBET
Alors, est-ce que je redoute, pour répondre à votre première question, je ne sais pas si redoute este le mot juste, en tout cas nous sommes extrêmement vigilants, le ministère de l'Intérieur au premier chef. Et puis le ministère de la Justice évidemment, ensuite. Nous sommes extrêmement vigilants sur ce qui pourrait se passer demain. Si vous voulez, il y a une... Moi ce que je trouve extrêmement choquant c'est que le 1er mai c'est sans doute une des très belles manifestations de notre pays, c'est la commémoration des insurrections ouvrières, c'est vraiment un temps fort des manifestations, et moi j'ai participé à beaucoup de manifestations du 1er mai c'est un moment qui est souvent un moment et de revendications et un moment de fraternité aussi. Je trouve déplorable que des Blacks-blocs ou que des casseurs viennent briser ce moment-là, qui est un moment qui doit être respecté. Pour ceux qui vraiment y mettent les valeurs que je précisais à l'instant. Donc la loi qui a été adoptée, mais les autres textes également, nous permettent c'est vrai de faire des contrôles, nous permettent d'être plus présents, nous permettent également d'avoir des modalités de prise en compte des personnes qui casseraient, plus efficaces. Je pense que ce sera un texte qui sera utile demain.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Mais vous savez, les policiers nous disent souvent aussi que la justice est un peu lente ensuite dans la manière dont elle appréhende, dont elle rend ses décisions sur notamment les casseurs.
NICOLE BELLOUBET
Non, ce n'est pas vrai. Vous savez, pardon, excusez-moi, je réponds vivement , mais je comprends qu'ils puissent avoir ce ressenti mais vous savez, à la suite des différentes manifestations des Gilets jaunes, les tribunaux et notamment le tribunal de Paris, qui a été le plus impacté, a organisé très souvent le lundi et le mardi qui suivaient les samedis où des violences avaient été commises, des audiences de comparution immédiate, pour que, évidemment, les jugements puissent être rendus rapidement. Mais nous avons d'ailleurs encore des jugements qui doivent être rendus dans ce cadre-là.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, puisque vous nous avez avoué avoir participé à des manifestations du 1er mai, à quel titre d'ailleurs, vous étiez dans la rue le 1er mai ?
NICOLE BELLOUBET
D'abord comme simple citoyenne, et puis je l'ai été également comme élue. Ça fait des années que je suis élue locale, que j'étais, pardon, élue locale, et donc à ce double titre.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et comment vous appréciez justement cet appel du pied, de la main, des syndicats aux Gilets jaunes pour manifester à leurs côtés ? Ce sentiment qu'au fond les syndicats essaient de se raccrocher à cette participation sociale forte qu'ils n'ont plus dans leurs propres rangs ?
NICOLE BELLOUBET
Moi je ne veux pas prendre parti sur cet appel, sur cette convergence des luttes. Ce que je voudrais juste dire c'est que les syndicats sont je crois des représentants importants de notre société, et que le gouvernement souhaite travailler avec eux, parce que, comme d'ailleurs nous le faisons au quotidien, dans mon ministère je travaille en permanence avec les organisations syndicales, parce que ce sont évidemment des personnes qui représentent les salariés ou les fonctionnaires. Donc moi je considère que les syndicats apportent une réelle plus-value dans notre pays et nous devons évidemment travailler avec eux.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Nicole BELLOUBET, ça n'a pas toujours été le cas de ce gouvernement, on se souvient d'Edouard PHILIPPE qui avait refusé la main tendue de Laurent BERGER à l'automne dernier, de grandes conférences sociales et environnementales.
NICOLE BELLOUBET
Nous pouvons avoir que les divergences avec les organisations syndicales. Je ne suis pas toujours d'accord avec les organisations syndicales de mon ministère. J'ai parfois des points de convergence, j'ai parfois des points de divergence, mais c'est un dialogue qui doit être en permanence conduit et construit avec eux.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Alors, vous avez été aussi je crois interrogée hier soir, fait partie d'un débat sur la mise en oeuvre de la loi sur les violences sexistes et sexuelles qui a été adoptée l'an dernier…
NICOLE BELLOUBET
Absolument.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Quel bilan on peut faire, quelques mois après l'application de cette loi ? Est-ce que c'est en régression ? On a plutôt l'impression, alors que c'est parce qu'heureusement les femmes, c'est souvent des femmes, victimes d'agressions en parlent plus, mais est-ce que cette loi est utile ?
NICOLE BELLOUBET
Elle est je crois très utile. Alors d'abord hier, simplement pour vous dire que, au-delà du séminaire gouvernemental, le Parlement continue à travailler. Hier j'ai participé à deux débats…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
A 23h00 notamment.
NICOLE BELLOUBET
Alors, un premier débat sur la question de la délinquance financière, ça nous ramène d'ailleurs au programme de travail gouvernemental puisque vous le savez…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
La lutte contre la fraude.
NICOLE BELLOUBET
Le président de la République a souhaité que la Cour des comptes intervienne pour établir un bilan de cette question de la fraude fiscale, c'est un travail interministériel très lourd et donc la Cour des comptes nous aidera, et effectivement hier, cette nuit, j'ai participé Marlène SCHIAPPA à une première réflexion à la suite de la loi sur les violences sexuelles qui a été adoptée au mois d'août dernier. Je crois que c'est une loi très utile parce qu'elle permet réellement de prendre en compte, avec beaucoup plus de facilité, de prendre en compte les viols qui sont de véritables crimes, et notamment d'allonger le délai de prescription, de faciliter le travail des magistrats, je crois que c'est un travail très utile. Mais beaucoup demeure à faire, et je pense notamment à toutes les violences faites aux femmes, où je crois que nous avons, et je m'y engage profondément, nous avons une action extrêmement volontariste à conduire encore, et je pense notamment à tous les moyens techniques, aux innovations technologiques qui nous permettent de protéger les femmes. Nous avons mis en place un téléphone Grave danger, nous devons mettre en place un système d'alerte…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Dont vous pouvez rappeler le numéro, peut-être, de cette ligne.
NICOLE BELLOUBET
Non, le téléphone Grave danger c'est un téléphone qui est donné aux femmes qui risquent d'être victimes de violences…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ah oui, d'accord.
NICOLE BELLOUBET
Et qui peuvent, elles, déclencher une alarme auprès de services de police. Mais il y a d'autres innovations que nous devons déployer, et je suis vraiment arc-boutée sur cette volonté.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
J'aimerai que l'on vienne, pour terminer, sur cet agenda des réformes qui vous a été présenté hier par le Premier ministre. J'ai envie de dire : on n'a pas encore les décisions concrètes, mais on a de nouveau un agenda, des promesses, des commissions, des gens qui sont missionnés, par exemple je pense à la réforme de la Haute fonction publique. Est-ce que vous n'avez pas peur que les Français se disent : c'est gentil ces promesses, on les voit défiler derrière, de juin, mai, juillet, etc., mais est-ce qu'après les paroles il ne faut pas maintenant en venir assez vite aux actes ?
NICOLE BELLOUBET
Oui, mais des actes, évidemment que cette attente elle est parfaitement compréhensible. Des actes il y en a eu, déjà, et il y en aura encore. Quand le président de la République, au mois de décembre, a dit : « Je mets 10 milliards sur la table », tout cela a déjà été déployé. Cela a fait l'objet de mesures qui sont déjà mises en oeuvre. Il faut désormais aller plus loin encore et donc c'est le calendrier qui vient d'être décidé.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc vous n'êtes pas en train de nous occuper, de gagner du temps.
NICOLE BELLOUBET
Non, nous n'occupons personne. Mais vous comprenez bien que quand on dit : il y aura une baisse de 5 milliards d'euros sur l'impôt sur le revenu, il faut un petit peu réfléchir, ça ne se décide pas comme cela…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ça sera annoncé en juin, les modalités seront définies en juin, a dit le Premier ministre hier.
NICOLE BELLOUBET
Absolument. Quand on dit : on va mettre en place France service, c'est-à-dire des lieux où les citoyens, dans chaque canton, pourront se rendre pour obtenir des renseignements ou une aide juridique, cela…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Donc toutes les prestations ou les services publics auxquels ils ont droit.
NICOLE BELLOUBET
Absolument. Eh bien, cela aussi se construit un tout petit peu et nous allons le faire dès le mois de juin. La révision constitutionnelle, il faut juste l'écrire. Nous le ferons pour le mois de juillet. Donc je crois vraiment que nous sommes arc-boutés sur ce programme de travail.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Une question qui concerne aussi indirectement, c'est les pensions alimentaires et le fait que l'on va permettre…
NICOLE BELLOUBET
Ça me concerne très directement.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Très directement, mais aussi Agnès BUZYN votre collègue, c'est pour ça que je disais ça. Ça, concrètement aussi, c'est pour quand ?
NICOLE BELLOUBET
Eh bien, dès le mois de septembre. Là encore le président de la République, parce que c'est ce que nous entendons partout, a pris en compte cette demande des familles souvent monoparentales, et des femmes seules, qui n'arrivent pas à obtenir le versement de leur pension alimentaire. Nous avons des dispositifs juridiques, mais qui sont trop complexes, donc c'est là que j'interviens pour simplifier les choses et faire en sorte…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Notamment le recours à la justice est complexe.
NICOLE BELLOUBET
Absolument, de manière générale.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et on va donner aux Allocations familiales…
NICOLE BELLOUBET
Mais nous allons améliorer les choses, nous allons les clarifier et les simplifier.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Concrètement, c'est directement les Allocations familiales qui pourront recouvrer les sommes.
NICOLE BELLOUBET
Absolument. C'est l'idée que les Caisses d'allocations familiales puissent évidemment immédiatement verser la pension alimentaire, telle qu'elle est…
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Et faire une saisie sur salaire.
NICOLE BELLOUBET
Et après, se retourner vers le conjoint défaillant par une action récursoire pour récupérer la pension.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Ça c'est pour septembre, ça sera opérationnel en septembre.
NICOLE BELLOUBET
En tout cas nous allons faire en sorte que ça soit le plus tôt possible et sans doute dès septembre.
CHRISTOPHE JAKUBYSZYN
Merci beaucoup Nicole BELLOUBET d'avoir été notre invitée. On retrouve tout de suite la Matinale avec Julie HAMMETT.
NICOLE BELLOUBET
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 mai 2019