Déclaration de Mme Elisabeth Borne, ministre des transports, sur les dispositifs de protection de l'environnement de l'aéroport d'Orly et son rôle intermodal, à Orly le 11 avril 2019.

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Circonstance : Clôture des Rencontres d'Orly, à Orly (Val-de-Marne) le 11 avril 2019

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les parlementaires
Monsieur le Président du Conseil département de l'Essonne, Cher François Durouvray
Monsieur le Président du Conseil départemental du Val de Marne, Cher Christian Favier,
Mesdames et Mesdames les élus,
Monsieur le Président directeur général, Cher Augustin,
Mesdames et Mesdames,


Je tenais personnellement à être parmi vous pour cette soirée de clôture des Rencontres d'Orly :

- D'abord parce que l'aéroport d'Orly occupe une place particulière dans notre pays : il est un des maillons qui unit notre capitale à l'ensemble du territoire national
- Quand je dis qui unit, je ne parle pas seulement des grandes métropoles régionales.
- Orly a une vocation de désenclavement pour beaucoup de nos territoires éloignés des grands axes.
- C'est le sens même des liaisons d'aménagement du territoire, auxquelles je suis très attachée et dont j'ai quadruplé les moyens dédiés. Ces liaisons ont bien sûr un intérêt économique pour maintenir des entreprises dans des territoires enclavés: mais elles permettent également, de maintenir les liens sociaux, je pense en particulier aux vols outre-mer.

Je tiens à remercier tout particulièrement les présidents des conseils départementaux du Val de Marne et de l'Essonne qui ont "voulu" ces rencontres. Messieurs les Présidents, vous avez, je pense, souhaité montrer (ou signifier le fait) que le développement du pôle d'Orly dépasse bien évidemment les frontières administratives, et nécessite la mobilisation de tous les acteurs publics et privés.

Vous le savez, j'ai clôturé récemment les Assises du transport aérien, et j'ai présenté à cette occasion une Stratégie nationale pour le secteur.

Le 1er axe de cette stratégie a trait à la préservation de l'environnement.

J'ai eu l'occasion de le dire lors des Assises : il ne pourra pas y avoir de développement durable du transport aérien si celui-ci ne veille pas aux conditions de son acceptabilité.

La réduction des nuisances liées à la présence de l'aéroport est une de mes principales préoccupations.

L'aéroport d'Orly dispose de mesures de protection environnementale de haut niveau que chacun, ici présent, connaît. Chacun y est attaché, moi la première. L'aéroport bénéficie d'un couvre-feu depuis 50 ans [de 23h30 à 6h], d'un plafonnement des créneaux horaires depuis 25 ans [250 000 créneaux annuels].

Je souhaite saluer ici la mobilisation des parlementaires du territoire, [je pense notamment à Marie Guevenoux, Laurent Saint-Martin et Jean-François Mbaye qui sont présents ce soir], avec qui nous avons œuvré pour que soient sanctuarisées ces garanties fortes, dans la loi PACTE votée aujourd'hui à l'Assemblée. Elles constitueront le cadre dans lequel l'exploitation de cet aéroport devra continuer de s'inscrire.

Mais au-delà des mesures de nature législative, les rencontres d'Orly et les discussions de ce jour ont montré que la protection de l'environnement et des riverains doit être l'affaire de tous, chacun dans son rôle.

Cela passe bien sûr d'abord par la modernisation des flottes d'avions : elle est dans l'intérêt des compagnies aériennes, dans l'intérêt des riverains et dans l'intérêt général. Des avions modernes, ce sont des avions économiquement plus efficaces, moins bruyants, moins polluants.

L'Etat incite déjà au renouvellement des flottes.

La taxe sur les nuisances sonores aériennes et les redevances d'atterrissage, payées par les compagnies, sont modulées en fonction de la performance acoustique des avions et de la période à laquelle ils opèrent. C'est une bonne méthode, et je pense que nous pouvons aller plus loin.

- Compte tenu des progrès technologiques réalisés par les avionneurs, j'ai demandé à la DGAC d'examiner l'actualisation de ces modulations pour favoriser les avions les plus performants et pénaliser les plus bruyants.

En complément de ces dispositions nationales viennent d'autres mesures de portée plus locale visant à privilégier l'accueil d'avions performants d'un point de vue environnemental, en particulier en début de période nocturne.

- A ce titre, je suis tout à fait prête à ce qu'on introduise des restrictions d'exploitation pour les avions les plus bruyants, dans le cadre prévu par les règles européennes. Car les atterrissages et décollages de tels avions sont assez largement minoritaires, mais n'en affectent pas moins les riverains. Je propose que l'aéroport, en étroite coordination avec tous les acteurs, engage une étude à ce sujet.

La réduction des nuisances sonores pour les riverains passe aussi par l'optimisation des trajectoires des avions.

- Sur la base d'une proposition des riverains appuyés par les parlementaires du territoire, la DSNA a travaillé sur l'optimisation du profil vertical des trajectoires, en coopération avec Airbus.
- Cette étude, dénommée "Prisalt", vise la réduction de l'impact sonore, tout en tenant compte des contraintes de sécurité et de fluidité de la circulation aérienne.
- Les premiers résultats ont été présentés dans le cadre des Assises du Transport Aérien, puis approfondis dans le cadre de la Commission Consultative de l'Environnement d'Orly. Les demandes de compléments exprimés lors de ces concertations sont en cours d'analyse et seront intégrés dans le rapport de synthèse globale de l'étude. Il sera présenté à la prochaine réunion de la CCE cet été.

Les efforts pour réduire les sorties de trajectoires des volumes de protection environnementale doivent être poursuivis. Cela passe par le développement d'outils pour réaliser des analyses plus poussées des causes de déviations de trajectoires, qui pourront conduire si nécessaire à des sanctions, parallèlement à la mise en place de mesures préventives et correctrices.

Enfin, j'ai fait en sorte que les moyens financiers issus de la TNSA soient à la hauteur des besoins pour poursuivre l'insonorisation des habitations les plus touchées.

En 2018, la Commission consultative d'aides aux riverains a validé les aides à l'insonorisation au bénéfice de 860 logements. Au total, depuis sa mise en place en 1995, 27 500 logements et locaux ont été insonorisés grâce à ce dispositif.

Si des retards d'instruction ont pu être observés en 2015 et 2016, ils ont été depuis intégralement apurés. Il n'existe plus aucun stock et la gestion des dossiers est fluide. J'invite donc les propriétaires qui n'auraient pas sollicité l'aide à l'insonorisation à le faire.

Je pense que bons nombres de dossiers n'arrivent pas à l'instruction car leur articulation avec les dispositifs d'aides aux travaux d'isolation portés par l'ANAH mériterait d'être améliorée. Je demande aux services de l'Etat de travailler à des propositions à ce sujet.

Toutes ces propositions, de même que celles qui ont été discutées durant ces rencontres d'Orly ne doivent pas en rester aux annonces, mais être suivies d'effet. A cet égard, je souhaite rappeler le rôle premier des instances de concertation existantes que sont les commissions consultatives de l'environnement et leurs comités permanents. Je sais que Monsieur le préfet du Val-de-Marne a à cœur de les faire fonctionner efficacement, et j'aurai l'occasion prochainement d'encourager la mobilisation de ces commissions sur l'ensemble du territoire nationale.

Je voudrais aussi évoquer les sujets de la qualité de l'air et de la lutte contre le changement climatique. Je ne reviens pas sur les initiatives internationales que j'ai eu l'occasion d'aborder pendant les assises nationales du transport aérien.

Je veux insister sur la nécessité d'agir aussi localement. Car c'est ici aussi que les enjeux se nouent. Optimiser les temps de roulage au sol des avions afin de limiter le bruit, la pollution et les émissions de CO2, cela peut avoir un effet très bénéfique.

- Le Plan de protection de l'atmosphère d'Île-de-France fixe à ce titre un certain nombre de défis aux aéroports qu'il faudra relever.
- L'amélioration de la qualité de l'air passera aussi par des mesures en faveur du verdissement des véhicules circulant sur la plate-forme.
- J'invite l'aéroport à faciliter l'accueil des véhicules les moins polluants en développant notamment les bornes de recharge, à renouveler la flotte de véhicules en zone réservée et à inciter à l'emploi de matériels de piste fonctionnant avec des énergies renouvelables.

Je ne suis pas sans savoir que l'urbanisation a progressivement rattrapé la plate-forme d'Orly, et que paradoxalement ce territoire a pour particularité une exposition aux nuisances générées par les activités qui ont été et continuent d'être son moteur. Nous devons par toutes ces mesures de protection de l'environnement dépasser ce paradoxe, tout en veillant bien sûr à ne pas accentuer la présence d'habitation sur les zones exposées.

S'agissant du 2ème thème, à savoir l'enjeu de la mobilité, mon objectif est bien de renforcer le rôle d'Orly en tant que nœud intermodal le plus accessible possible : 

- Pour les territoires qui l'entourent directement, notamment sur sa partie Sud,
- Pour tous les territoires franciliens,
- Pour les pôles économiques des régions voisines

Pour ce qui concerne sa fonction nationale, je souhaite évoquer le chantier d'amélioration de la ligne ferroviaire Massy-Valenton identifié par le conseil d'orientation des infrastructures.

- Afin de mener à bien l'achèvement des travaux sur la section Ouest de la ligne Massy-Valenton, j'ai récemment missionné, sous l'égide du Préfet de la Région Ile-de-France, les services de l'Etat pour que soient engagées discussions avec l'ensemble des partenaires, y compris les régions de l'Ouest de la France, sur les financements complémentaires nécessaires.
- Les améliorations sur la ligne Massy-Valenton permettront de préserver la faisabilité d'une nouvelle gare TGV dans le secteur d'Orly-Pont-de-Rungis. L'État s'est ainsi engagé, dans le cadre du Contrat d'avenir pour les Pays de la Loire signé le 8 février 2019, à accompagner les études sur ce projet de gare.

Pour faciliter l'accès du pôle à l'échelle régionale et locale, il faut ensuite « mettre le paquet » sur l'amélioration des dessertes. Le Nord Essonne est par exemple très mal relié à l'Aéroport alors que beaucoup de ses salariés y résident, et les transports en commun sont saturés.

Pour changer la donne, plusieurs chantiers sont lancés :

- Le projet d'amélioration de la ligne Massy-Valenton doit aussi permettre de fiabiliser l'ensemble des circulations ferroviaires, que ce soit le TGV et le RER C mais également la circulation de fret, en supprimant les nombreux conflits de circulation afin de gagner en régularité sur cet axe et même de doubler la fréquence des RER C.
- Les travaux sur la section Est de la ligne Massy-Valenton, doivent reprendre prochainement à partir de la mi-2019.
- Nous menons par ailleurs une profonde rénovation, inédite, des RER B et C et D. Ce sont 1,3Md€ que nous consacrons aux infrastructures dans le CPER actuel, tous financeurs confondus. Ces travaux de rénovation des lignes vont se poursuivre jusqu'en 2021, parallèlement au renouvellement du matériel roulant. L'objectif est clair : améliorer la régularité de nos RER.
- nous avons par ailleurs confirmé notre plein engagement dans la réalisation du Grand Paris Express dans son intégralité. 200 km de lignes nouvelles, c'est un chantier hors normes qui va transformer la région capitale.

En particulier, je vous confirme l'horizon de mise en service du prolongement de la ligne 14 à Orly en 2024. En outre l'Etat est attentif au développement des interconnexions entre les réseaux et à la mise en oeuvre d'une intermodalité aboutie. C'est à ces conditions que l'efficacité de ce nouveau réseau sera maximisée aux bénéfices des territoires.

- Enfin, le développement des transports en commun de surface est ici essentiel. C'est pour cette raison que l'Etat s'est engagé dans le CPER sur le financement du tramway T9 entre Paris et Orly Ville dont les travaux sont en cours. Les financements du prolongement du T7 à Juvisy sont également inscrits dans le contrat de plan.

Enfin je n'oublie pas la nécessité d'améliorer la desserte routière. Il s'agit de mieux mailler et mieux hiérarchiser le réseau et de le connecter davantage aux pôles multimodaux que sont les gares, je sais que les collectivités territoriales y travaillent d'arrache-pied.

Je pourrai aussi insister sur les enjeux de mobilité pour les activités logistiques qui doivent viser une meilleure insertion urbaine. Le pôle d'Orly me semble le site idéal pour concevoir la logistique urbaine de demain, à l'instar des projets de la SOGARIS qui développe des plateformes d'entrée d'agglomération, des hôtels logistiques et des espaces de proximité en centre-ville. La SEMMARIS joue aussi un rôle essentiel dans la chaîne logistique. Je sais que des projets sont en cours pour développer le transport ferroviaire vers le MIN de Rungis.

Enfin, bien évidemment tous ces efforts doivent contribuer à conforter le développement économique du secteur et la création d'emplois.

- Le pôle d'Orly concerne, au-delà de la plate-forme aéroportuaire qu'il accueille, tout le sud francilien dont le développement s'articule principalement autour des deux opérations d'intérêt national d'Orly-Rungis-Seine-Amont et de Massy-Saclay, portées par deux établissements publics d'aménagement de l'Etat.
- Améliorer le cadre de vie et les conditions de déplacement des habitants de ce territoire doit s'accompagner d'un accès pour eux le plus « privilégié possible, si vous me permettez l'expression, aux emplois créés par le développement des activités du pôle d'Orly.
- Il faut pour cela favoriser les synergies entre le développement des filières d'activités et l'offre de formation permanente ou initiale. Je pense aux secteurs de la logistique et de l'agro-alimentaire avec la présence de grands opérateurs comme le MIN de Rungis, la SOGARIS ou Air France industrie

Je pense aussi bien sûr à l'ensemble de la filière aéroportuaire.

- A cette fin, plusieurs outils sont en place ou en voie de création. C'est par exemple dans le cadre du Bassin Emploi Formation et du territoire d'industrie Grand Orly Seine Bièvre que se met en place la coopération entre les entreprises et les pouvoirs publics pour construire une véritable politique de formation adaptée aux besoins des entreprises dans le cadre d'une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territorialisée.
- C'est par ailleurs Air France qui est le partenaire industriel principal du projet de Territoire d'industrie qui sera prochainement contractualisé avec l'État et la région sur ce secteur.

C'est sur ce type d'initiatives que je compte pour rassembler les énergies, vos énergies, vous services de l'Etat, vous porteurs de projets publics et privés, pour, ensemble, réussir le développement harmonieux de ce territoire.

Nous savons que les disponibilités foncières sont encore importante ici et que le développement économique et urbain peut se poursuivre.

Mais j'aurai une attention particulière à ce que les habitants de ce territoire, comme les nouvelles populations qui viendront s'y installer, aient davantage demain le juste retour du développement du pôle.

Pour ce faire :

- Le gouvernement souhaite que l'Etat soit un acteur engagé aux côtés des collectivités, les communes, l'EPT Grand Orly Seine Bièvre, les départements, la Région et de tous les acteurs économiques pour contribuer à définir le projet de territoire du Grand Orly intégrant de manière équilibrée ses deux "hémisphères" l'Essonne et le Val de Marne. Rappelons-nous que nous sommes au sein d'une OIN.
- Je vous confirme la poursuite du soutien de l'Etat aux projets facilitant la connexion de ce territoire à son environnement autant éloigné que très proche.

Il nous faut rassembler les énergies qui ne manquent pas sur ce territoire en renforçant la coordination de tous les acteurs pour que chacun soit au rendez-vous.


Je vous remercie.


Source https://www.acnusa.fr, le 14 mai 2019