Texte intégral
PATRICK ROGER
Bonjour Sophie CLUZEL.
SOPHIE CLUZEL
Bonjour Patrick ROGER.
PATRICK ROGER
Avant d'évoquer l'école et le handicap, considérez-vous qu'il y a eu un peu trop de relâchement hier, avec beaucoup de monde dans certaines rues, sans trop de précautions, je pense notamment au Canal Saint Martin à Paris ?
SOPHIE CLUZEL
C'est certain que ces images peuvent être choquantes pour des Français, et il faut absolument redire que cette distanciation physique elle est capitale, il le faut vraiment, et si on ne peut pas, parce qu'on est dans un commerce ou parce qu'on est dans une rue étroite, portez vos masques. C'est très important. Donc oui, il faut absolument préserver cette distance, c'est capital. On doit vivre avec ce virus, il est là, il est présent, et donc il faut vraiment le dire et le redire, et je vous remercie parce que vous le dites sans arrêt, et je pense que c'est comme ça qu'on pourra vraiment interpeller les Français sur leur responsabilité collective.
PATRICK ROGER
Oui, et en même temps quand on leur dit : « Vous pouvez retourner au travail, vous pouvez retourner reprendre les transports, etc. », eh bien forcément ils se disent « pourquoi pas aussi partager des bons moments ». Ça, ça peut se comprendre Sophie CLUZEL.
SOPHIE CLUZEL
On peut partager des bons moments, mais il faut juste pour tout simplement être en distance, c'est capital. Etre en plein air, bien sûr, tout le monde a envie d'être en plein air, tout le monde a envie de retrouver une vie sociale, mais respectons la distanciation physique et le port de masque quand on ne peut pas être plus éloigné que cela. Donc ça c'est vraiment le message à faire passer.
PATRICK ROGER
Oui, parce que c'est sérieux, comme le dit Jean CASTEX, le Monsieur Déconfinement, il peut y avoir un retour au confinement.
SOPHIE CLUZEL
Mais bien sûr, bien sûr, le virus est toujours là, donc si de nouveau on a des foyers, on a des clusters, il faudra prendre les décisions, et ce que l'on ne veut pas c'est justement de voir revenir en arrière, donc on a une responsabilité collective, majoritairement les Français les respectent, on l'a bien vu un dans les transports, on l'a vu dans les commerces, ils font intention et ils ont raison de le faire attention.
PATRICK ROGER
Oui, alors, Sophie CLUZEL, c'est la rentrée à l'école, très attendue ce matin dans le primaire, à peine 20 % des élèves acceptés, priorité aux plus défavorisés. Les enfants handicapés feront-ils vraiment partie de ces prioritaires ? Combien sont-ils ? Et est-ce qu'ils ne sont pas non plus quand même vulnérables, plus vulnérables face au Covid ?
SOPHIE CLUZEL
Alors oui, les enfants handicapés sont, font partie des publics prioritaires. On a travaillé avec Jean-Michel BLANQUER sur ceux-là, parce que ce sont ceux qui ont subi peut-être le plus de pertes d'acquis. Les apprentissages à distance, la continuité éducative et pédagogique, a été certes une priorité, pour autant certains enfants ont besoin d'être en présentiel, et c'est pour ça que nous en avons fait des publics prioritaires, et parce que le confinement a un impact important sur eux, notamment psychologique, et donc il faut absolument pouvoir les accompagner et les réaccompagner sur le chemin de l'école et sur le chemin des établissements médico-sociaux, qui réouvrent aussi progressivement, au même rythme que les écoles. Ça c'est excessivement important. Et bien sûr, il va y avoir tout l'apprentissage des gestes barrières, se les approprier, ça va être peut-être plus compliqué, mais nous sommes là justement à côté, au volontariat des familles, bien sûr dans le dialogue avec l'école, la famille et tous les professionnels du médico-social pour pouvoir les accompagner sur cette appropriation des gestes barrières, si importante aussi au sein de l'école. PATRICK ROGER Vous estimez à combien de jeunes handicapés qui peuvent reprendre le chemin de l'école aujourd'hui et qui pourront le faire dans les jours qui viennent ?
SOPHIE CLUZEL
Ecoutez, là c'est vraiment au cas par cas, puisque c'est encore une fois les familles qui vont décider, donc c'est toute la complication de cette reprise de l'école, et c'est pour ça qu'avec Jean-Michel BLANQUER nous y travaillons main dans la main… ah non, il ne faut plus dire ça…
PATRICK ROGER
Ah oui, pas main dans la main, Sophie CLUZEL ! Ah non, surtout pas !
SOPHIE CLUZEL
Voilà, vous avez raison. Nous y travaillons vraiment tous les jours, pour pouvoir aussi que les professionnels du médico-social soient en appui, en appui ressources, donc on a un vrai travail avec les familles, pour expliquer, et puis nous faisons aussi un très gros travail de pédagogie, en adaptant les supports de communication, pour que les enfants, les familles comprennent, quand vous avez un enfant déficient intellectuel, « nous avons fait en fasciné » à lire et à comprendre, qu'est-ce que c'est que le déconfinement, qu'est-ce que sont les gestes barrières, pour maximiser vraiment c'est l'appropriation et pouvoir rescolariser sereinement justement ces enfants.
PATRICK ROGER
Oui, parce qu'en plus, sur la vie administrative, évidemment elle est au ralenti. Je crois que vous mettez en place un numéro vert, là, dans les jours qui viennent, à la fois pour les aidants, les parents également, un nouveau numéro vert.
SOPHIE CLUZEL
Nous voulons pouvoir accompagner dans la durée, parce que pendant longtemps encore il va y avoir du domicile, de l'école, du domicile, des établissements, et donc les familles sont vraiment des aidants, 8 millions d'aidants en France. Ces familles ont subi aussi le confinement de façon importante et il nous faut être à leurs côtés. Il nous faut être à leurs côtés aussi, si par exemple moi en tant qu'aidant je deviens malade, et que ma personne aidée elle est toujours à la maison, il faut pouvoir les accompagner. Donc ce numéro vert il sera vraiment spécifique, comme filet de sécurité pour les personnes en situation de handicap, leurs aidants, pour travailler dans la durée, parce que ce « en même temps », d'un peu de domicile, d'école, d'établissement, il va durer certainement, et pendant cet été il faudra aussi…
PATRICK ROGER
Quand est-ce qu'il va être mis en place ce numéro, Sophie CLUZEL ?
SOPHIE CLUZEL
Courant mai, fin mai, nous y travaillons, parce qu'il faut avoir vraiment les bonnes solutions, et donc en même temps nous réouvrons aussi les solutions de répit pour les familles, elles peuvent faire des séjours de 7 jours, de 14 jours. Et les externats, donc les établissements médico-sociaux, réouvrent aussi en même temps, donc c'est tout un travail d'accompagnement, extrêmement complexe, il faut remettre en route aussi les transports spécialisés, donc nous travaillons avec les départements pour cela, donc un vrai travail de terrain, d'écoute, de co-construction, bien sûr. Sans arrêt je suis en visio avec les associations, avec les départements, avec bien sûr les familles aussi, parce que je les écoute, j'ai fait un Facebook Live aussi pour répondre à toutes leurs questions pratico-pratiques.
PATRICK ROGER
Oui, évidemment. Est-ce que, vous n'avez pas répondu à ma question, là, Sophie CLUZEL tout à l'heure, est-ce que les handicapés, les enfants handicapés, sont plus vulnérables face au Covid et est-ce qu'il y en a eu d'ailleurs qui ont été victimes du coronavirus ?
SOPHIE CLUZEL
Alors, moi je garde ma boussole, si vous voulez. Le handicap ne doit pas être une source de discrimination sur un préjugé d'une situation de vulnérabilité, parce que parfois on dit handicap = vulnérabilité. En revanche, oui, il faut faire…
PATRICK ROGER
Non, mais on se pose la question, hein. On se pose la question.
SOPHIE CLUZEL
Mais vous avez raison, certaines pathologies sont importantes, par exemple quand vous avez un enfant polyhandicapé, qui a déjà des difficultés respiratoires, eh bien il faut plus le protéger. C'est pour ça que par exemple dans les établissements médico-sociaux, les internats, on a eu des protections très très importantes, avec l'arrêt des visites, ce qui était problématique pour le lien avec les familles, mais qui a été vraiment, je dirais, et là franchement bravo, les professionnels du médico-social, parce qu'ils ont tenu bon, et nous avons justement moins de pathologies qui ont souffert vraiment de ce virus. Donc une grande, très grande protection pour certains types de handicaps, mais pour autant, handicap n'égale pas vulnérabilité au sens classique du terme. Donc pas de discrimination sur ce sujet-là. Mais, pas plus si vous voulez de droits, mais beaucoup plus d'accompagnement spécifique pour certains types de handicaps, en effet.
PATRICK ROGER
Certains ont été victimes ? Des gens ont été touchés malheureusement ?
SOPHIE CLUZEL
Oui, nous avons bien sûr à déplorer des décès, mais assez limités, puisqu'aujourd'hui nous avons 269 décès sur des établissements médico-sociaux. Donc on a réussi à contenir ce virus, il nous faut accompagner. Bon, le facteur de l'âge est quand même un facteur aussi qui vient aggraver la situation, donc nous avons vraiment travaillé avec les familles. Pour autant, vous avez raison de souligner qu'il nous faut absolument retourner à l'accès aux soins. Il faut pouvoir démultiplier l'accès aux soins, ça c'est très important, pour éviter justement du (microcoupure liaison) handicap sur certaines pathologies, donc nous avons maintenu les téléconsultations, ça c'était très important, pour l'orthophonie, pour la psychomotricité, et nous les maintiendrons encore. Et puis nous réouvrons petit à petit tous les cabinets de rééducation, pour permettre justement tous les soins, que les soins reprennent.
PATRICK ROGER
Oui, et l'une des craintes aussi par l'ensemble des personnels, les personnels soignants, mais également les personnels dans les écoles, et c'est le cas aussi donc bien sûr pour les assistants qui accompagnent ces enfants et ces handicapés, sur la distance possible, quoi, comment faire, est-ce que là il y a eu un certain nombre de protocoles qui ont été mis en place, des nouveaux protocoles, sur cette fameuse distance physique ?
SOPHIE CLUZEL
Alors, exactement, le respect justement des gestes barrières et de la distanciation est importante, pour autant parfois certains accompagnements, notamment pour les actes de la vie quotidienne, si un enfant est dépendant pour par exemple enfiler son manteau, parce qu'il a des problèmes moteurs, sont importants, donc nous avons travaillé avec, pour les accompagnants d'élèves en situation de handicap, les AESH, qui font un travail vraiment quotidien auprès des enfants, des protections spécifiques, avec un renfort de protection pour certains qui seront vraiment rapprochés, mais beaucoup peuvent faire une distanciation, un accompagnement pédagogique à distance, comme à 1 m de l'enfant. Mais pour ceux qui ont vraiment besoin d'être en proximité, eh bien nous travaillons avec le médico-social, pour avoir un renfort de protection, s'assurer que bien sûr les masques sont là, mais aussi plus de lingettes, plus de gestes possibles sanitaires, en collaboration avec les familles, parce qu'il faut qu'il y ait la même capacité de ces gestes barrières importants et renforcés, entre la famille, l'école, et le lieu de l'établissement médico-social.
PATRICK ROGER
Sophie CLUZEL, le mot de la fin, avec Cécile de MENIBUS.
CECILE DE MENIBUS
Bonjour Madame la Ministre. Est-ce que vous, vous avez eu des directives justement sur le déconfinement du gouvernement, sur le retour par exemple en radio, en télé, et sur le terrain ?
SOPHIE CLUZEL
Alors, pour l'instant, eh bien on se, je dirais, on fait la même chose que ce qu'on demande aux Français, c'est-à-dire qu'on n'essaie le maximum de rester en télétravail. Vous voyez, aujourd'hui je suis depuis chez moi, je vais bien sûr au ministère, nous allons reprendre certains déplacements, parce qu'il est important aussi d'être aux côtés des Français. Je vais me déplacer cette semaine dans une école, dans un établissement médico-social, en respectant bien sûr les gestes barrières, mais nous essayons de minimiser nos déplacements et de respecter le télétravail, pour justement minimiser les déplacements dans les transports, pour respecter ce que l'on demande aux Français. Je pense que c'est très important. Pour autant, il faut aussi qu'on soit à côté de des Français qui redémarrent l'école, qui redémarrent le travail. J'irai dans un établissement médico-social de travail, un ESAT, une entreprise adaptée, pour accompagner tous ces professionnels et les personnes elles-mêmes qui reprennent aussi une vie normale. Donc on est aussi dans ce compromis et dans cet équilibre, de protéger les gens, mais aussi de reprendre petit à petit une activité économique, sociale, aux côtés des familles, aux côtés des personnes, aux côtés des travailleurs en situation de handicap, donc je me déplacerai très très, dans mon rayon de 100 km, pour respecter vraiment ce qu'on demande de faire aux Français.
PATRICK ROGER
Merci Sophie CLUZEL, secrétaire d'Etat chargée des Personnes handicapées, d'avoir été avec nous ce matin sur Sud Radio.
CECILE DE MENIBUS
Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 mai 2020