Texte intégral
SAMUEL ETIENNE
C'est l'heure de retrouver l'invitée de la matinale de France Info, je vous le disais, ce matin Nathalie ELIMAS, la secrétaire d'Etat chargée de l'Education prioritaire, et elle répond aux questions Daïc AUDOUIT.
DAIC AUDOUIT
Bonjour madame. Merci d'être avec nous.
NATHALIE ELIMAS
Bonjour.
DAIC AUDOUIT
On va évoquer évidemment les nouveaux protocoles sanitaires dans les écoles, mais avant tout je voudrais une réaction par rapport au hashtag inceste me too, qui a été beaucoup utilisé sur Twitter tout ce week-end. Des personnes, majoritairement des femmes, ont raconté l'inceste dont elles avaient été victimes pendant leur enfance. Est-ce qu'on est dans une libération de parole de la même ampleur que me too après l'affaire Weinstein ?
NATHALIE ELIMAS
D'abord, beaucoup de stupéfaction, colère, tristesse, en lisant effectivement ces témoignages qui affluent en masse depuis quelques jours. En même temps, je note et je crois qu'il faut saluer et soutenir le courage de ces personnes qui osent enfin parler, qui libèrent leur parole, et on sait combien c'est à la fois difficile de libérer sa parole, mais en même temps libérateur. Donc voilà, je pense qu'il faut leur dire, d'abord qu'on les croit et puis qu'on les soutient. En tout cas c'est un sujet sur lequel je me suis engagée et pour lequel j'ai une sensibilité en effet particulière.
DAIC AUDOUIT
Tout à fait, engagée d'ailleurs du point de vue législatif, vous avez poussé pour qu'on change la législation. Et le débat ce matin c'est : est-ce qu'il faut rendre imprescriptibles les crimes sexuels contre les enfants ? C'est dans ce cadre-là que rentre l'inceste.
NATHALIE ELIMAS
C'est vrai que j'ai beaucoup travaillé sur le sujet quand j'étais députée, j'avais porté trois propositions très claires, c'était au moment où l'opinion publique avait été saisie de l'affaire de la petite Sarah, cette petite fille de 11 ans qui avait été violée, et puis ça avait été requalifié par le Tribunal de Pontoise.
DAIC AUDOUIT
Vos propositions, c'est lesquelles ?
NATHALIE ELIMAS
Mes trois propositions, c'était d'abord de, effectivement d'ouvrir le débat sur l'imprescriptibilité des crimes sexuels commis sur mineurs.
DAIC AUDOUIT
Maintenant, la prescribilité elle est de 30 ans…
NATHALIE ELIMAS
Elle est passée à 30 ans.
DAIC AUDOUIT
… de18 ans depuis 2018.
NATHALIE ELIMAS
Absolument.
DAIC AUDOUIT
Ça suffit peut-être comme temps.
NATHALIE ELIMAS
Eh bien, on voit bien que non, puisqu'on a des personnes aujourd'hui qui justement ont dépassé ce temps, et s'il devait y avoir un procès eh bien ne pourraient être que partie civile, donc ça pose question. La deuxième proposition portait sur la fixation d'un seuil d'âge de consentement, pour renverser la charge de la preuve, et faire en sorte que plus jamais, plus jamais la question du consentement à l'acte sexuel puisse être posée à un enfant. Et enfin…
DAIC AUDOUIT
Dernier sujet, oui, est-ce que l'inceste doit être un crime et non pas une circonstance aggravante d'un crime sexuel, qui est un crime spécifique d'inceste.
NATHALIE ELIMAS
C'était exactement ma proposition. J'ai milité, j'ai plaidé pour la création d'un crime spécifique d'inceste, qui n'est effectivement aujourd'hui qu'une circonstance aggravante.
DAIC AUDOUIT
Ces propositions n'avaient pas été retenues. Est-ce que le gouvernement doit changer et mettre en oeuvre ces propositions, vu l'émotion qu'il y a eu ce week-end suite à l'affaire Olivier DUHAMEL ?
NATHALIE ELIMAS
Le gouvernement effectivement doit y réfléchir, nous allons y réfléchir. Il y a un certain nombre de propositions de loi qui arrivent, notamment d'Alexandra LOUIS, et nous allons regarder de près pour voir comment on évolue sur le sujet.
DAIC AUDOUIT
On va passer aux écoles, donc un nouveau protocole sanitaire qui se met en place cette semaine, il sera obligatoire lundi prochain. Quand vous dites « obligatoire », c'est des recommandations, des préconisations, ou lundi prochain ça doit être obligatoire, c'est-à-dire qu'on ne brasse plus dans les cantines, plus d'activité physique, ou il y aura de la souplesse, par rapport à ce qui est possible suivant les bâtiments ?
NATHALIE ELIMAS
Alors, d'abord ces protocoles ils sont déjà existants, ça n'est pas une nouveauté. J'étais par exemple la semaine dernière dans une école, dans un collège à Laval, où j'ai vu déjà comment fonctionne ce protocole, par cohortes.
DAIC AUDOUIT
Mais, on va dire que c'était des recommandations, des préconisations, là ça devient obligatoire.
NATHALIE ELIMAS
Ah ben là oui, c'est obligatoire effectivement dans les écoles à partir du 25. Donc on se laisse une petite semaine pour travailler en concertation avec les collectivités, voir comment on met tout cela en place, mais je crois que ça va se régler à la marge, encore une fois parce que c'est déjà en place dans les écoles, dans les collèges, où les enfants arrivent par cohorte, à la même heure, mangent à la même table et parfois même ils sont pris en photo, ils sont photographiés, pour voir qui est à côté de qui et pouvoir réagir le plus vite possible.
DAIC AUDOUIT
Est-ce que ce matin vous faites un appel aux parents qui pourraient nous regarder, de sortir s'ils le peuvent évidemment leurs enfants de la cantine ? On n'en est pas là ?
NATHALIE ELIMAS
Non non, on n'en est pas là, et puis la cantine ça a quand même un intérêt, d'abord il faut imaginer que si on le proposait aux parents, ça aurait quand même un impact assez compliqué dans les familles…
DAIC AUDOUIT
S'ils le peuvent, encore une fois.
NATHALIE ELIMAS
Et puis rappeler quand même que ce repas qui est délivré le midi, repas chaud et équilibré, pour certains de nos enfants c'est le seul de la journée.
DAIC AUDOUIT
Autre précision : couvre-feu à 18h00. Est-ce que ça veut dire que toute activité dans les écoles, qu'elles soient scolaires ou périscolaires, s'arrêtent ?
NATHALIE ELIMAS
Alors, à 18h00, évidemment, d'abord la vie continue pour les écoles et pour certains établissements, donc évidemment on pourra rentrer chez soi et on pourra aller récupérer ses enfants à l'école de façon dérogatoire et sans difficulté.
DAIC AUDOUIT
Mais il faudra en attestation.
NATHALIE ELIMAS
Il faudra une attestation.
DAIC AUDOUIT
Enfin, autre question : Olivier VERAN a parlé d'un million de tests qui seront à disposition dans les écoles. Quelqu'un de mon entourage m'a dit : tiens, il va y avoir des tests obligatoires, pour aller à l'école, c'est de ça dont il s'agit ?
NATHALIE ELIMAS
Non non, pas du tout.
DAIC AUDOUIT
De quoi s'agit-il ?
NATHALIE ELIMAS
Ce sont des tests qui sont mis à disposition des élèves, à partir de 6 ans et sur autorisation parentale évidemment, et des personnels. Dès lors qu'il y a une circulation du virus dans les écoles et dans les établissements, nous recommandons fortement d'aller se faire tester pour casser au plus vite les chaînes de contamination, mais ce sont des tests, 300 000 par semaine, plus d'un million par mois, qui sont mis à disposition. Il suffira de contacter l'ARS qui pourra déployer une équipe mobile pour réaliser ces tests.
DAIC AUDOUIT
On va passer maintenant au projet de loi sur le principe, la défense des principes républicains qui est examiné en commission à partir d'aujourd'hui. L'amendement d'Aurore BERGE qui souhaitait interdire le voile pour les enfants mineurs, et notamment les petites filles, parce qu'elle considérait que c'était de la maltraitance, finalement est retiré, il ne sera pas de discuté, le gouvernement était contre parce qu'il disait que ça stigmatisait l'islam et que ce n'était pas l'objet du projet de loi. Vous saluez le fait que cet amendement ait été retiré ?
NATHALIE ELIMAS
Alors, il faut regarder ce texte pour ce qu'il est et son objectif. Son objectif c'est de lutter contre les atteintes aux valeurs de la République. Il n'y a pas vocation à en faire un texte fourre-tout, cet amendement en effet a été retiré, il ne sera pas examiné par la commission spéciale ce matin, c'est un sujet, peut-être faudrait-il le traiter par ailleurs et de façon un peu plus spécifique, mais en tout cas, voilà, aujourd'hui on est sur les atteintes aux valeurs de la République, il faut rester concentré là-dessus et une chose après l'autre.
DAIC AUDOUIT
Et toujours sur le port du voile par les mamans lors des sorties scolaires, là aussi il n'y a pas d'amendement ou d'article qui légifère là-dessus et qui l'interdirait.
NATHALIE ELIMAS
Non non, absolument pas dans ce texte, ça n'a rien à voir avec ce sujet-là, encore une fois d'ailleurs dans le texte précisément il y a 4 articles qui concernent l'Education nationale, c'est le hors contrats notamment, c'est l'instruction à domicile, mais rien sur le port du voile.
DAIC AUDOUIT
Justement, sur l'instruction à domicile, on sait que les parents qui pratiquent cette forme d'enseignement, considèrent être les dommages collatéraux de la lutte contre le fondamentalisme. Ils réclament de pouvoir continuer à pratiquer cet enseignement. L'école est toujours obligatoire à 3 ans, dans le projet de loi ?
NATHALIE ELIMAS
Alors, l'école évidemment est toujours obligatoire à 3 ans, bien sûr. Pour ce qui concerne l'instruction en famille, on passe d'un régime de déclaration à un régime dérogatoire, mais qui ne change rien pour les familles qui aujourd'hui déjà en bénéficient, qui ont un enfant malade, qui ont un enfant en situation de handicap, ou alors un sportif de haut niveau par exemple.
DAIC AUDOUIT
Oui, mais les familles veulent voir ce choix, tout simplement elles n'ont plus ce choix.
NATHALIE ELIMAS
Oui, mais là encore il faut regarder ce que l'on vise et quel est l'objectif de ce texte, qui est de lutter contre les dérives, on le voit dès lors qu'on démantèle à une école clandestine, un élève sur deux était déclaré comme étant instruit en famille, ce qui n'est absolument pas le cas, ça a beaucoup progressé et donc voilà, je reste sur l'objectif du texte et encore une fois les dérogations restent permises et il n'y a aucun souci de ce côté-là.
DAIC AUDOUIT
On en reparlera, parce que je pense que les parents qui pratiquent cette forme d'enseignement ne sont pas tout à fait d'accord, mais le projet de loi il commence simplement à être mis en discussion…
NATHALIE ELIMAS
Aujourd'hui.
DAIC AUDOUIT
… et il sera dans l'hémicycle dans plusieurs semaines. Merci beaucoup d'avoir été avec nous.
NATHALIE ELIMAS
Merci à vous.
DAIC AUDOUIT
Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 janvier 2021