Interview de Mme Olivia Grégoire, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement, à France Info le 23 juin 2022, sur l'appel d'Emmanuel Macron au compromis pour éviter les blocages politiques, le projet de loi sur le pouvoir d'achat et l'épidémie de covid-19.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

LORRAIN SENECHAL
Bonjour Olivia GREGOIRE.

OLIVIA GREGOIRE
Bonjour.

LORRAIN SENECHAL
Emmanuel MACRON a mis hier soir au pied du mur les oppositions, en quelque sorte, il a parlé d'un pacte de coalition, ou d'un vote de texte au cas par cas. Ce sont à elles, les oppositions, de se positionner, et elles ont même seulement 48 heures, il y a une forme d'ultimatum, là. Le but, c'est quoi ? C'est de prendre à témoin les Français sur les futurs blocages à l'Assemblée ?

OLIVIA GREGOIRE
Le président de la République hier, s'est exprimé, je pense que c'était important et attendu, pour expliquer et partager avec les Français, ce qu'il avait entendu aussi de l'élection de dimanche. Et il s'est exprimé assez simplement, pour rappeler que l'on vivait une situation inédite, où il allait falloir que la majorité, mais aussi les oppositions, trouvent les voies et moyens pour continuer à travailler et à faire avancer le pays. Ce que j'ai entendu du président de la République, c'est qu'il ne doute pas, et c'est bien pour ça qu'il ouvre cette période, que les oppositions auront des propositions, possiblement des remarques, des critiques, des amplifications, des refus, par rapport au projet que nous portons, notamment sur le pouvoir d'achat, on va y revenir, et qu'il est en attente de savoir, quand il reviendra, quelles sont un peu les lignes rouges, ou alors les lignes vertes, des oppositions, à l'endroit de ces textes. Je n'ai pas entendu, et je veux être très clair ce matin, parce que j'entends que plusieurs d'entre vous, et si ça passe comme ça, c'est que ça a pu être compris comme ça, parlent d'ultimatum. Je veux être très claire, il n'y a ni ultimatum, ni question de 48 heures. J'ai réécouté avec beaucoup de précision, les propos du président de la République, qui a parlé, ses mots sont précis, à son retour du Conseil européen, dont on parlera peut-être…

LORRAIN SENECHAL
C'est demain.

SALHIA BRAKHLIA
Dans 48 heures, demain.

OLIVIA GREGOIRE
… à son retour du Conseil européen, effectivement dans 48 heures demain soir, nous commencerons à bâtir, c'est-à-dire que c'est tout sauf un ultimatum, un ultimatum c'est la fin, là il ouvre le début…

LORRAIN SENECHAL
Il attend des réponses avant demain soir.

OLIVIA GREGOIRE
Non. Non non non…

SALHIA BRAKHLIA
Il leur a clairement demandé de se positionner en transparence, devant les Français, à son retour.

OLIVIA GREGOIRE
Non, excusez-moi. Reprenez les mots et je les ai repris. A son retour, il part 48 heures, il y a des obligations, il part. Ce n'est pas…

LORRAIN SENECHAL
Après, il repart, parce qu'après il y a un Sommet du G7 et après un Sommet de l'OTAN.

OLIVIA GREGOIRE
Je termine juste ma phrase. Ce n'est pas « j'attends vos copies au retour, vendredi soir, sur oui/non, sur tel axe du projet ». Ce n'est pas ça. C'est : quand je reviendrai, on va continuer, on va même commencer à bâtir, ce sont ses mots, avec les oppositions, pour trouver des voies et moyens. C'est le début du chemin, ça n'est pas la fin. On parle d'ultimatum ce matin, et je veux le dire avec force, ça n'est pas du tout l'esprit. Un ultimatum c'est : on vous donne le moment de la fin. Là il a ouvert le début des négociations, le début du consensus et des compromis.

SALHIA BRAKHLIA
Ça veut dire qu'il n'est pas fermé, ça veut dire que…

OLIVIA GREGOIRE
On parle de plusieurs jours, peut-être même de plusieurs semaines, je veux être très claire, et certainement pas de 48 heures.

SALHIA BRAKHLIA
Ça veut dire quoi ? Qu'il va revoir les présidents de parti ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça veut dire que par exemple, tout à fait, que possiblement il reverra les présidents des forces politiques, et il échangera avec eux, en étant à l'écoute, pour savoir ce qui relève de lignes rouges, ce qui relève de lignes que nous pourrions discuter. Il y a le sujet du pouvoir d'achat, il y a par exemple le taux d'indexation des retraites, il y a le taux d'indice des fonctionnaires, il y a la prime Macron. Il y a beaucoup de choses dans ce texte, le bouclier tarifaire, le blocage des prix de l'énergie. Comment les oppositions, très prosaïquement, très concrètement, réagissent, refusent, veulent plus, par rapport à ses propositions ? Et ensuite, ce sera à nous, je veux le dire aussi très clairement, la majorité présidentielle, de réagir aux propositions, au refus ou aux messages donnés par les forces politiques. Mais il a enclenché un dialogue. Vous savez, il y a ce mot…

SALHIA BRAKHLIA
Il n'a pas renvoyé la balle, comme on l'entend ce matin dans les réactions des oppositions ?

OLIVIA GREGOIRE
On est dans un… Mais c'est pour ça que j'ai le plaisir d'être chez vous et que je veux le dire avec beaucoup de force et de simplicité. On a engagé un dialogue, qui ne va certainement pas se clore après 48 heures.

LORRAIN SENECHAL
Qui commence demain.

OLIVIA GREGOIRE
Qui commence en réalité quand il revient, et je trouve de bon aloi d'expliquer aux forces politiques, mais aussi aux Français, que pendant 48 heures il part pour aller contribuer et renforcer aussi l'adhésion de l'Ukraine à l'Europe, qui est un enjeu européen…

SALHIA BRAKHLIA
On en parlera tout à l'heure aussi.

OLIVIA GREGOIRE
Il revient et il se remet à la tâche, la main est tendue, et il n'attend certainement pas des retours pour demain soir, 48 heures, à 18h00.

SALHIA BRAKHLIA
Main tendue, Olivia GREGOIRE, vers la droite, la gauche, l'extrême droite comme l'extrême gauche, c'est-à-dire : vous tendez la main au RN, comme à La France insoumise ?

OLIVIA GREGOIRE
Le président de la République tend la main à toutes celles et ceux qui ont envie de faire avancer le pays. Vous savez, on dit : le pays peut être bloqué, avec ce cette situation institutionnelle.

SALHIA BRAKHLIA
D'absence de majorité absolue.

OLIVIA GREGOIRE
En réalité, et je le pense sincèrement, le statu quo n'est pas tenable, il est tenable pour aucune force publique, parce qu'il n'est pas tenable en responsabilité face aux Français. Donc on a tous intérêt, la majorité relative, mais les minorités aussi, à se mettre autour d'une table pour trouver les voies et moyens d'avancer.

SALHIA BRAKHLIA
Même avec le Rassemblement national il peut y avoir discussion, il peut y avoir compromis, il peut y avoir coalition de majorité ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors, un gouvernement, et le nôtre aussi, en l'occurrence ne peut pas refuser, quand un député vote pour un amendement ou pour un article, d'un projet de loi.

SALHIA BRAKHLIA
Non, mais est-ce que vous allez chercher les voix du RN ?

OLIVIA GREGOIRE
Non.

LORRAIN SENECHAL
C'est pourtant ce qu'a dit la députée En Marche Céline CALVEZ.

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais alors figurez-vous que « Errare humanum est », et que Céline CALVEZ a peut-être une des propos qui ont été incompris, mais qui ont été très clairement repris par le ministre des Relations avec le Parlement Olivier VERAN hier, qui a été très clair, et je vais l'être encore : il n'y a pas une seule seconde, à un seul moment, l'idée d'aller chercher des voix, des accords avec le Rassemblement national.

LORRAIN SENECHAL
Donc c'est la ligne que Clément BEAUNE…

OLIVIA GREGOIRE
Nous n'empêcherons pas, néanmoins, si des députés veulent voter, c'est le droit des députés.

SALHIA BRAKHLIA
Et avec la France insoumise, est-ce qu'il y a une possibilité de discuter de…

OLIVIA GREGOIRE
C'est la même chose.

SALHIA BRAKHLIA
C'est la même chose ? C'est à signe égal ?

OLIVIA GREGOIRE
C'est la même chose, ne doutons pas, et j'espère vraiment qu'en responsabilités, La France insoumise réagira, fera des propositions, pour dire « nous on veut plus », « on veut moins » ou « on ne veut pas de ça ». Mais on attend des oppositions aujourd'hui qu'elles se positionnent très clairement en disant : ça on veut, ça on ne veut pas. Aujourd'hui les Insoumis…

SALHIA BRAKHLIA
Pardon, Olivia GREGOIRE, juste pour que l'on comprenne…

OLIVIA GREGOIRE
… j'entends Adrien QUATENNENS tous les jours, mais ok on est en majorité relative, mais ils sont en minorité absolue, donc il va bien falloir trouver des voies et moyens pour avancer, parce que sauf erreur de ma part, 72 députés insoumis, c'est toujours moins de 235 personnes dans la majorité présidentielle.

SALHIA BRAKHLIA
On vous écoute ce matin, Olivia GREGOIRE, vous dites : « on n'a pas vocation à chercher des voix au RN ni à la France insoumise »

OLIVIA GREGOIRE
Non.

SALHIA BRAKHLIA
Mais alors pourquoi hier le président de la République…

OLIVIA GREGOIRE
Vous m'avez parlé de coalition. Coalition avec le RN, je vous réponds : non.

SALHIA BRAKHLIA
Coalition avec la France insoumise ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça n'est pas au programme non plus.

SALHIA BRAKHLIA
Alors, pourquoi hier le président de la République n'a pas dit directement, il n'a pas désigné directement ses partenaires qu'il souhaite avoir, à savoir Les Républicains ?

OLIVIA GREGOIRE
Parce que ce n'est pas, d'abord je ne pense pas que soit le rôle d'un président de la République de fonctionner comme ça, ça n'est pas sa fonction. Il y a d'autres types d'opposition, ça ne vous a pas échappé, que le RN et NUPES, il y a aussi des divers gauche, il y a aussi des Républicains, il y a un groupe ultramarin qui s'est créé hier. Donc il va y avoir des discussions, des échanges avec l'ensemble des forces politiques, et vous savez, encore une fois je ne doute pas et j'ai envie de le croire, sur le mouvement NUPES, que chacun ait envie de faire avancer le pays, mais c'est aussi valable pour les NUPES, le blocage il n'est pas tenable pour les Français, et on doit tous le débloquer. Ça n'est pas uniquement à la majorité présidentielle de le débloquer, c'est aussi à l'ensemble des forces politiques. On attend de voir ce qui est rédhibitoire, ce qu'on peut discuter, et je ne doute pas qu'il y ait des bonnes volontés, peut-être à NUPES aussi.

LORRAIN SENECHAL
Mais, que ce soit bien clair, le RN et la France insoumise ne sont pas les bienvenus au sein du gouvernement.

OLIVIA GREGOIRE
C'est très clair.

LORRAIN SENECHAL
Très bien. On va revenir dans le détail justement des propositions que vous faites avec les priorités fixées par le chef de l'Etat lui-même hier soir Olivia GREGOIRE.

SALHIA BRAKHLIA
Toujours avec la porte-parole du Gouvernement Olivia GREGOIRE. Un premier test sur la possibilité de faire des compromis ou pas. La loi sur le pouvoir d'achat qui devrait arriver à l'Assemblée cet été, pour les retraites par exemple vous prévoyez une augmentation de 4 % dès le mois d'août. Ecoutez la réaction du patron du Parti socialiste Olivier FAURE.

OLIVIER FAURE, PREMIER SECRETAIRE DU PARTI SOCIALISTE
4 % c'est trop peu. Une revalorisation, ça ne peut pas être en dessous du niveau de l'inflation. Ce n'est quand même pas ça ce que j'appelle une revalorisation. Ce n'est pas possible de dire aux gens : on va vous donner un peu plus mais moins que ce que vous perdez chaque semaine ou chaque mois. Ce n'est pas possible ! Moi ce que je dis, c'est qu'on ne peut pas…

MARC FAUVELLE
Donc vous ne voterez pas les 4 % d'augmentation des retraites ?

OLIVIER FAURE
On ne peut pas accepter une revalorisation qui serait inférieure au niveau de l'inflation, ça me paraît une évidence.

SALHIA BRAKHLIA
Exemple concret, sur la revalorisation des retraites vous pouvez bouger ou pas ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors déjà, j'ai vraiment envie de dire qu'on est dans un état d'esprit d'ouverture pour débloquer le pays et pour faire avancer le pays. On doit tous prendre nos responsabilités à commencer par nous. Olivier FAURE est parcellaire, je vais être très neutre, dans sa réponse. En janvier, nous avons augmenté de 1,1 % les pensions de retraite à cause de l'inflation. Nous proposons dans le texte pouvoir d'achat d'augmenter à nouveau, ce qui est exceptionnel en milieu d'année, de 4 % 4+ 1,1…

SALHIA BRAKHLIA
Donc 5,1.

OLIVIA GREGOIRE
Egal 5,1. Au moment où je parle, l'inflation est entre 5,1 et 5 2. Donc nous proposons très simplement d'indexer les retraites avec le niveau de l'inflation au moment où je vous parle. Il a juste oublié, mais on va dire que ça n'est qu'un oubli, l'indexation de janvier. Mais ça fait partie des choses qui seront discutées.

SALHIA BRAKHLIA
Ça peut être plus ou pas ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça peut être plus. Ça fera partie des choses qui seront discutées. Après je vais vous dire, et c'est ce que j'ai appris puisque j'ai siégé trois ans et demi au Parlement et à la commission des finances, comme dans beaucoup de métiers et de fonctions, on n'évolue pas hors sol quand on fait une loi ou de la politique. Il y a des contraintes. Il y a des contraintes et il y a une réalité financière, économique. On va voir dans quelques semaines quel est l'état du pays en termes d'inflation, en termes de remontée des taux, en termes de déficit, de dettes.

SALHIA BRAKHLIA
Mais ça, les oppositions en ont conscience.

OLIVIA GREGOIRE
Oui mais alors elles en ont conscience, mais il va falloir qu'elles l'intègrent en responsabilité. Entre déclamer des propositions sur les plateaux télé et les faire rentrer dans le réel au Parlement, en tenant compte d'une trajectoire économique qui est une trajectoire de réalité, il va voir aussi comment Olivier FAURE, comment les Insoumis se positionnent par rapport à ces contraintes.

LORRAIN SENECHAL
Ils se sont déjà positionnés. Ils disent que pour eux il n'y a pas de problème et on peut continuer…

OLIVIA GREGOIRE
On va aller où ? À 3 000 milliards de dette ? On va aller où ? Parce que 3 000 milliards de dette, ça fait quoi ? Ça fait les impôts de demain donc il faut dire la vérité aux Français - même les impôts d'aujourd'hui possiblement. Donc là, on va rentrer dans le moment de vérité.

SALHIA BRAKHLIA
Moment de vérité, moment concret. Par exemple la Nupes pendant la campagne des législatives proposait d'intégrer le blocage des prix de première nécessité. Est-ce que cette mesure-là vous pourriez l'intégrer à ce texte sur le pouvoir d'achat cet été ?

OLIVIA GREGOIRE
Nous sommes ouverts à discuter sur beaucoup de choses et ça fait partie des choses qui peuvent être discutées. Mais vous voyez, il y a une question j'ai posée à laquelle la Nupes n'a jamais répondu. Et ça aussi, c'est de la réalité. D'un côté ils vous disent : on veut un SMIC à 1 500 euros. C'est à peu près 1 300 euros, ça veut dire 200 euros de plus pour, par exemple, la vendeuse qui est à la boulangerie. Ok. Le boulanger, il va falloir qu'il trouve ces 200 euros pour augmenter sa vendeuse. Il a deux options : soit il augmente le prix de ses produits, de la baguette, soit il dit à l'apprenti, au stagiaire ou à la personne à mi-temps qu'il avait : désolé, je vais devoir arrêter parce qu'il faut que j'augmente la vendeuse. Dans le haut pays de Jean-Luc MELENCHON et dans le programme de Jean-Luc MELENCHON, vous avez chez les Insoumis cette volonté à la fois d'augmenter le SMIC, mais vous n'avez pas le droit de toucher aux prix. Je n'ai toujours pas compris comment le boulanger augmentait la serveuse et augmentait le SMIC sans pouvoir augmenter le prix de la baguette. Voilà une question très concrète…

LORRAIN SENECHAL
Donc le SMIC à 1 500 euros, c'est non.

OLIVIA GREGOIRE
À laquelle média après média, plateau après plateau je n'ai toujours pas de réponse. Voilà des questions qui seront passionnantes à discuter cet été dans l'hémicycle. C'est la réalité. Et faire de la politique, c'est intégrer le réel. C'est beaucoup plus facile de déclamer en plateau télé, c'est plus dur d'agir dans la réalité.

LORRAIN SENECHAL
Et baisser la TVA notamment sur le carburant comme le propose le Rassemblement national ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça fait partie des propositions. Je ne doute pas que le groupe Rassemblement national…

LORRAIN SENECHAL
Oui mais vous disiez les 1 500 euros, ça fait partie des propositions sauf qu'on a compris que c'était non en fait.

OLIVIA GREGOIRE
Non, ce n'est pas juste ce que vous dites. J'ai dit qu'il va falloir s'expliquer comment on augmente en même temps. Vous allez faire quoi ? Vous allez taper sur la tête du boulanger pour qu'il aille trouver les 200 euros pour payer sa vendeuse ? Je voudrais comprendre. Ce n'est pas que c'est non, c'est que je voudrais comprendre. Sur la TVA, on a déjà dit de multiples fois et Bruno LE MAIRE en priorité que ça n'était pas selon nous le meilleur moyen d'augmenter le pouvoir d'achat. Il y a eu des précédents donc on se fixe sur ce qui s'est déjà passé. Il y a eu des baisses de TVA importantes dans la restauration dont, en réalité, les clients et les consommateurs n'ont pas bénéficié. Quelle garantie aurons-nous demain que cette baisse de TVA ira dans la poche des Français ?

SALHIA BRAKHLIA
Olivia GREGOIRE, si à chaque proposition le gouvernement et la majorité disent non, comment vous voulez qu'il y ait un compromis ?

OLIVIA GREGOIRE
Après il y a les débats parlementaires. Il y a les débats parlementaires. Je vous ai dit par exemple sur les taux, sur le point d'indice, sur un certain nombre de choses on va voir. On peut embarquer un certain nombre de propositions. Bien sûr qu'on a notre responsabilité dans le compromis mais il faut aussi, et c'est le charme du débat parlementaire, il faut aussi qu'on en discute dans l'hémicycle.

LORRAIN SENECHAL
On a l'impression que vous cherchez surtout à convaincre avant de recevoir des propositions.

OLIVIA GREGOIRE
Non, je ne crois pas. Il y a une réalité. Quand je vous parle de cette histoire de SMIC avec le blocage des prix, c'est du réel. Donc j'ai à cœur, et je pense que le groupe de la majorité présidentielle aura à cœur, d'essayer de comprendre et d'écouter. De commencer par écouter comment les Nupes justifient et proposent d'avancer.

LORRAIN SENECHAL
Olivia GREGOIRE, porte-parole du Gouvernement, vous nous disiez tout à l'heure qu'Emmanuel MACRON allait le cas échéant recevoir à nouveau les forces politiques. Est-ce que c'est lui ou est-ce que c'est Elisabeth BORNE, qui est censée diriger la majorité, qui le fera ?

OLIVIA GREGOIRE
Qui dirige la majorité.

LORRAIN SENECHAL
Qui dirige.

OLIVIA GREGOIRE
Voilà. Elisabeth BORNE dirige…

LORRAIN SENECHAL
Digère peut-être cet échec aux législatives

OLIVIA GREGOIRE
Digère non, dirige oui. Et elle a eu l'occasion de le faire savoir hier soir lors de notre première réunion d'intergroupes. Hier je crois tout simplement, il ne faut pas chercher des sens à tout, il s'est exprimé en tant que président de la République, garant des institutions…

LORRAIN SENECHAL
Et il n'a pas cité son nom.

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais je crois que ça n'était pas un contenu de commentaire de l'actualité et de l'action du gouvernement. C'était en tant que président, je réagis au message des Français, à la réalité de ce qu'ont voulu les Français et j'essaie de trouver des voies et moyens pour avancer et tracer un chemin, pour bouger et pas bloquer le pays. L'objet n'était pas de commenter ou d'impulser l'action gouvernementale.

SALHIA BRAKHLIA
Elisabeth BORNE doit prononcer un discours de politique générale le 5 juillet prochain. Est-ce qu'elle se soumettra à un vote de confiance du Parlement ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors sic Jean-Luc MELENCHON, donc on la refait aussi : Jean-Luc MELENCHON veut soumettre à Elisabeth BORNE à un vote de confiance sur ce qu'on appelle une DPG, déclaration de politique générale.

SALHIA BRAKHLIA
Oui.

OLIVIA GREGOIRE
Alors je sais bien que Jean-Luc MELENCHON a pris l'habitude de soumettre. Le leader des Insoumis aime soumettre. Il a soumis d'ailleurs dans de Nupes et les socialistes, et les écologistes. Mais déjà, je peux me permettre de vous dire que je trouve un peu cocasse qu'un monsieur qui ne se présente pas aux élections lui-même parle de vote de confiance à l'endroit d'une Première ministre qui, elle, a été élue.

SALHIA BRAKHLIA
Mais elle va le faire ou pas ? Est-ce qu'elle va se soumettre au vote ?

OLIVIA GREGOIRE
Pardonnez-moi. Je veux bien répondre à toutes les interjections multiples et variées de Jean-Luc MELENCHON et je vais le faire encore aujourd'hui, même si je pense que ce n'est pas l'alpha et l'oméga de la vie politique française. Mais c'est quand même cocasse d'avoir ce leader qui n'est pas élu, qui n'est pas député, qui n'est pas Premier ministre, qui aujourd'hui essaie de soumettre une Première ministre alors même, et l'histoire est éclairante, toujours, qu'en 1988 quand Jean-Luc MELENCHON faisait déjà de la politique, il n'avait aucun problème avec la majorité relative de monsieur ROCARD et l'absence de vote de confiance.

LORRAIN SENECHAL
Ça remonte quand même à presque 25 ans.

OLIVIA GREGOIRE
Ne soyez pas, « ça fait des années », vous allez être méchant.

LORRAIN SENECHAL
35 ans presque !

OLIVIA GREGOIRE
Non mais ce que je veux dire, c'est qu'il faut être un peu cohérent. En 88, il n'a aucun problème. Maintenant il a des gros problèmes.

SALHIA BRAKHLIA
Olivia GREGOIRE, est-ce qu'elle va le faire ou pas ?

OLIVIA GREGOIRE
Ce n'est pas à moi de répondre et ça n'est pas à Jean-Luc MELENCHON de soumettre…

SALHIA BRAKHLIA
Vous êtes porte-parole du Gouvernement.

OLIVIA GREGOIRE
Ma réponse est très claire. Ça n'est pas en fonction des demandes de soumission de Jean-Luc MELENCHON que le gouvernement agit et agira. Voilà.

SALHIA BRAKHLIA
Alors juste, donc on n'a pas la réponse pour le vote de confiance.

OLIVIA GREGOIRE
Chaque chose en son temps. On n'a même pas la date de la déclaration de politique générale.

LORRAIN SENECHAL
C'est le 5 juillet.

OLIVIA GREGOIRE
Ça peut bouger. On ouvre une période de dialogue, il y a peut-être une semaine possible de décalage. Les choses peuvent bouger.

LORRAIN SENECHAL
On a le temps de repousser les échéances ?

OLIVIA GREGOIRE
Il faudra prendre le temps nécessaire pour débloquer le pays, pour faire en sorte qu'on puisse porter des lois enrichies par les oppositions qui fassent avancer le pouvoir d'achat, la sécurité, la santé des Français.

SALHIA BRAKHLIA
Pareil, on prend le temps pour le remaniement ?

OLIVIA GREGOIRE
Ce n'est pas : on prend le temps. C'est qu'on a tous une responsabilité…

LORRAIN SENECHAL
Il a trois ministres qui ont perdu aux législatives.

OLIVIA GREGOIRE
Sur quinze.

SALHIA BRAKHLIA
Le remaniement, c'est quand ?

LORRAIN SENECHAL
D'accord mais elles ont perdu.

OLIVIA GREGOIRE
Sur quinze !

LORRAIN SENECHAL
La règle, c'était elles ont perdu donc elles doivent partir.

OLIVIA GREGOIRE
Oui, elles ont perdu. Donc lundi, on a eu une réunion. Il ne vous a pas échappé qu'elles étaient là. Donc il ne vous a pas échappé qu'elles sont encore au travail, qu'elles démissionneront évidemment. La règle est très claire.

SALHIA BRAKHLIA
Quand ?

OLIVIA GREGOIRE
Que ce remaniement sera fait au moment voulu. Là, on a aujourd'hui des ministres qui sont à leur ministère et qui dirigent leurs administrations, vous voyez. Donc on le fera dans les semaines qui viennent, c'est une évidence. La date, je ne l'ai pas encore.

LORRAIN SENECHAL
Avant ou après le discours de politique générale par exemple ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne sais pas encore. On verra.

LORRAIN SENECHAL
D'accord.

SALHIA BRAKHLIA
On a l'impression que vous êtes déstabilisés.

OLIVIA GREGOIRE
Non. Ce n'est pas parce que l'agenda médiatique, l'agenda des oppositions est rapide que c'est forcément l'agenda politique et l'agenda des Français. Ce qu'il faut, c'est que les choses soient faites et qu'elles soient bien faites. Je comprends vos questionnements médiatiques, mais il s'avère que je suis porte-parole du Gouvernement…

SALHIA BRAKHLIA
Mais c'est une question de réalité. C'est-à-dire que si vous n'avez pas de gouvernement et de majorité, les textes ne passeront pas et donc ça a un impact sur le quotidien des Français.

OLIVIA GREGOIRE
Et c'est bel et bien pour ça qu'il me semble, et votre réaction est intéressante, que la priorité numéro un c'est de trouver des moyens pour bosser ensemble et avancer. Sinon on va faire une DPG, censure pas censure, confiance pas confiance, puis on se retrouve au Parlement et comment on avance. Comment on avance ? C'est ça le sujet.

LORRAIN SENECHAL
Olivia GREGOIRE, porte-parole du gouvernement. On le disait, il y a des urgences, elles ont même été identifiées parfois par Emmanuel MACRON. Il y a notamment le Covid qui revient. Plus de 54.000 cas désormais identifiés chaque jour. On est en pleine reprise épidémique ?

OLIVIA GREGOIRE
J'en ai parlé, il y a une dizaine de jours au Conseil des ministres, parce qu'on est très vigilant et attentif, on a effectivement, vous vous souvenez de ce fameux taux R d'incidence, qui remonte. Donc oui, on est très vigilant, ça remonte, les contaminations remontent. Et par conséquent, deux messages, d'abord, de la prudence, je veux dire, vous savez, se laver les mains, ça demeure une mesure d'hygiène indispensable…

SALHIA BRAKHLIA
Les gestes barrières…

OLIVIA GREGOIRE
Pour tous les virus respiratoires, donc gardons notre bon sens, et je sais que les Français en ont. J'ai aussi envie de donner un message très clair à ceux d'entre nous qui ont un peu plus de 60 ans, sont porteurs de maladies chroniques ou immunodéprimés, il est indispensable d'aller faire son rappel, la deuxième dose de rappel, parlez-en à votre professionnel de santé, nous avons aujourd'hui à peu près un quart des Français concernés qui l'ont fait, ça n'est pas suffisant. Donc parlez-en aux professionnels de santé, à partir de plus de 60 ans, il est indispensable de faire ce rappel deuxième dose.

LORRAIN SENECHAL
Et juste, Emmanuel MACRON hier soir a dit qu'il n'excluait pas des mesures d'urgence sur l'épidémie, est-ce que ça peut vouloir dire par exemple le masque obligatoire cet été ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça veut dire qu'on est attentif, vigilant, réactif, et que, si jamais effectivement, ça continuait à augmenter, s'il fallait par exemple considérer un retour du masque dans les transports, l'objectif étant de protéger les Français, on ne s'interdit rien, mais ça n'est pas ni le président ni le gouvernement qui décideraient…

LORRAIN SENECHAL
Ça n'est pas exclu en tout cas ?

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais on saisirait les autorités sanitaires pour obtenir leur avis, comme on l'a toujours fait, pour connaître leurs recommandations et agir…

SALHIA BRAKHLIA
On vous pose la question, parce qu'Alain FISCHER, le « Monsieur vaccin » du gouvernement a dit qu'il était…

LORRAIN SENECHAL
Favorable…

SALHIA BRAKHLIA
Favorable au port du masque dans les transports…

OLIVIA GREGOIRE
On l'a bien entendu, et si cette question devait se poser dans les prochaines semaines, c'est avec les autorités sanitaires que nous prendrions une décision, on est très vigilant, très attentif pour éviter une reprise.

SALHIA BRAKHLIA
Olivia GREGOIRE, une enquête a été ouverte après le dépôt de deux plaintes pour viol visant la secrétaire d'Etat, Chrysoula ZACHAROPOULOU, avant d'être politique, elle était gynécologue, et c'est donc dans ce cadre médical que les faits lui sont reprochés. Est-ce qu'elle peut rester au gouvernement ?

OLIVIA GREGOIRE
D'abord, vous venez de le dire, c'est une gynécologue qui pratique depuis de nombreuses années, qui a consacré sa vie justement à accompagner des femmes, notamment atteintes d'endométriose ; il y a aujourd'hui des plaintes qui ont été déposées, la justice, elle est saisie, elle va se prononcer, et conformément à ce que nous avons toujours dit, nous enjoignons les femmes qui possiblement ont été victimes à porter plainte, à se rendre devant la justice, à parler. Et nous laissons la justice légiférer, si ces plaintes devaient donner lieu à d'autres faits de justice, des décisions seraient prises, mais la justice…

LORRAIN SENECHAL
Une mise en examen par exemple, ça pourrait signer un départ du gouvernement, comme ça a été le cas précédemment ?

OLIVIA GREGOIRE
Ecoutez, on verra, aujourd'hui, on a une justice saisie, ça date d'hier…

LORRAIN SENECHAL
Ça n'est plus une règle stricte, en tout cas ?

OLIVIA GREGOIRE
Je suis beaucoup…, ça ne vous a pas échappé, j'ai beaucoup réagi à ça depuis que je suis porte-parole. Et ce n'est pas tant le sujet de la règle que le sujet du respect de la différence entre la justice et le pouvoir exécutif, et je pense que c'est très important pour nous tous, il est indispensable que la justice puisse travailler indépendamment du pouvoir politique, indépendamment de l'exécutif, et mener à bien ses investigations pour porter un diagnostic et une réponse ; c'est en fonction de ça que le pouvoir politique réagit…

LORRAIN SENECHAL
Mais ça veut dire que désormais, vous attendez une décision de justice avant de…

OLIVIA GREGOIRE
Eh bien, c'est-à-dire que, on a très peu de temps comme d'habitude, mais c'est très important en droit, c'est les fondements de notre République dont vous êtes en train de parler, et on est dans une démocratie qui est de plus en plus d'opinion, ça n'est ni sur les réseaux sociaux, ni dans des journaux, ni au café du coin, ni dans les partis politiques où on rend la justice…

SALHIA BRAKHLIA
Sauf qu'Olivia GREGOIRE, ces accusations, elles s'ajoutent à celles qui sont proférées à l'encontre de Damien ABAD, le ministre des Solidarités, avoir deux ministres qui sont accusés de viols, d'agressions sexuelles, dans le gouvernement, ça ne fait pas tache ?

OLIVIA GREGOIRE
Et vous me demandez de donner suite, pour Damien ABAD, à deux accusations qui ont donné lieu à des plaintes classées sans suite…

SALHIA BRAKHLIA
Il n'y a pas de procédure judiciaire en tout cas, effectivement…

LORRAIN SENECHAL
Damien ABAD, il y avait une des victimes qui n'a pas porté plainte…

OLIVIA GREGOIRE
… Parce que j'ai décidé de maintenir la ligne, c'est la ligne de la justice, la justice a tranché sur Damien ABAD…

LORRAIN SENECHAL
Pas totalement, puisqu'une des victimes n'a pas souhaité pour l'instant porter plainte…

OLIVIA GREGOIRE
Oui, il y a eu d'autres faits qui ont été…

LORRAIN SENECHAL
Il peut encore y avoir une enquête sur ce fait…

OLIVIA GREGOIRE
Tout à fait, et c'est pour ça que je suis prudente, et que je vous parle au moment où vous m'interrogez, les faits qui ont été relatés il y a encore quelques jours dans un journal, c'est dans un journal que ça a été relaté, ça n'est pas auprès des policiers, et il est indispensable, et c'est une femme qui le dit, et donc je pèse mes mots, et si tant est que ces faits aient été réels, ils soient portés à la connaissance de la justice. Et je sais en tant que femme que c'est dur comme pas à franchir. Et je veux leur dire…

LORRAIN SENECHAL
Et la justice peut travailler sereinement quand ces personnes restent au pouvoir ; ce ne serait pas plus simple de les écarter le temps de l'enquête et que la justice travaille sereinement ?

OLIVIA GREGOIRE
La justice travaille sereinement et peut tout à fait travailler, ce n'est pas l'enjeu, là.

LORRAIN SENECHAL
Olivia GREGOIRE, merci beaucoup.

OLIVIA GREGOIRE
Merci à vous


source : Service d'information du Gouvernement, le 24 juin 2022