Déclaration de Mme Élisabeth Borne, Première ministre, sur l'engagement de la responsabilité du Gouvernement sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 réformant les retraites, Assemblée nationale le 16 mars 2023.

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Circonstance : Examen du projet de de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 à l'Assemblée nationale

Texte intégral

En engageant la responsabilité de son Gouvernement, le 15 novembre 1990, lors du débat sur la création de la Contribution sociale généralisée, Michel ROCARD avait eu ces mots : «Dans un scrutin où chacun voterait selon sa conscience, permettez-moi de dire que je suis sûr que ces dispositions réuniraient une majorité, peut-être même une large majorité.»

Ces mots, aujourd'hui, je les fais miens, et j'ajoute que si chacun votait selon sa conscience et n cohérence avec ses prises de positions passées, nous n'en serions pas là cet après-midi.

Cet après-midi, je n'ai pas envie de revenir sur les échappées personnelles, qui peuvent faire oublier à certains et les positions qu'ils défendaient quelques mois plus tôt, avec leur famille politique.

Cet après-midi, je n'ai pas envie de revenir, non plus, sur le comportement de ceux qui ont tout fait pour bloquer le débat, qui ont refusé d'échanger, idées contre idées, programme contre programme, et se sont contentés de multiplier les insultes, les excès, les attaques.

Et les cris, au moment même où je m'exprime, n'en sont qu'une preuve supplémentaire !

Ce sont les mêmes qui n'ont cessé de remettre en cause notre procédure parlementaire, nos Institutions, et donc notre démocratie !

Enfin, cet après-midi, je n'ai pas envie de revenir sur le mutisme de ceux, à l'extrême droite de cet hémicycle, qui sont restés tapis dans l'ombre tout au long des débats, qui ont préféré se taire, profitant en silence des outrances des uns et des revirements des autres.


Mesdames et Messieurs les députés,

Ce que je veux retenir de ces derniers mois, c'est que nous avons mené depuis l'automne dernier, avec le ministre du Travail, une concertation dense avec les organisations syndicales, patronales et les groupes politiques.

Ce que je retiens de ces dernières semaines, c'est que nous nous sommes donné les moyens de la discussion, et que vous avez passé plus de temps de débat sur cette réforme des retraites, que sur chacune des deux précédentes.

Ce que je retiens, c'est l'engagement que j'ai pris devant vous, lors de ma déclaration de politique générale, et lors de la présentation du projet du Gouvernement pour les retraites : toujours rechercher des compromis.

Le temps passé à dialoguer avec les partenaires sociaux, et les parlementaires qui étaient attachés, comme nous, à garantir l'avenir de notre système de retraite par répartition, nous a permis de converger autour de propositions nouvelles, et d'une réforme enrichie, améliorée – mais toujours équilibrée.

Hier, la commission mixte paritaire, coeur même de la co-construction parlementaire, composée de députés et de sénateurs de toutes les sensibilités, et où les soutiens du Gouvernement ne sont pas majoritaires, a construit un compromis.

Ce compromis n'est pas le projet du Gouvernement, c'est le texte du Parlement.

Ce compromis, je n'en partageais pas tous les points, mais c'est le vôtre, enrichi de propositions de la majorité et des oppositions des deux assemblées, et adopté au Sénat ce matin.

Et le texte du Parlement, que contient-il ?

Ce n'est pas un compromis tiède, au contraire, ce sont des avancées pour celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt, pour celles et ceux qui ont des métiers difficiles, pour revaloriser les pensions des femmes et mieux prendre en compte leurs carrières, ou encore pour augmenter les petites pensions.


Mesdames et Messieurs les députés,

Aujourd'hui, sur le texte du Parlement, l'incertitude plane à quelques voix près.

On ne peut pas prendre le risque de voir 175 heures de débat parlementaire s'effondrer.

On ne peut pas prendre le risque de voir le compromis bâti par les deux Assemblées, écarté.

On ne peut pas faire de pari sur l'avenir de nos retraites, et cette réforme est nécessaire.

Aussi, parce que je suis attachée à notre modèle social, et parce que je crois dans la démocratie parlementaire, c'est sur votre réforme, sur le texte du Parlement, fruit d'un compromis entre les deux Assemblées, que je suis prête à engager ma responsabilité.

Aussi, sur le fondement de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, j'engage la responsabilité de on Gouvernement, sur l'ensemble du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, modifié par l'amendement de coordination, communiqué à l'Assemblée nationale.

Dans quelques jours, je n'en doute pas, à l'engagement de la responsabilité du Gouvernement, répondront une ou plusieurs motions de censure.

Un vote aura donc bien lieu, comme il se doit.

Et c'est donc la démocratie parlementaire qui aura le dernier mot.


Source http://www.presseagence.fr, le 11 avril 2023