Texte intégral
Madame la présidente,
Monsieur le ministre, cher Bruno,
Monsieur le président de la commission des finances,
Monsieur le rapporteur général du budget,
Mesdames et messieurs les députés,
Je suis très heureux de vous présenter, avec Bruno Le Maire, ce projet de loi de finances pour 2024.
Ce projet de loi de finances a été construit avec un cap clair : investir pour l'avenir.
Investir pour l'avenir c'est d'abord maîtriser nos comptes publics. Si l'État a pu protéger pendant les crises, c'est qu'il avait réduit son déficit et dégagé des marges de manœuvre par temps calme. En 2018, je le rappelle, notre déficit était repassé significativement sous la barre des 3%.
Après les crises successives, il est de notre responsabilité de sortir de cette période d'exception pour nos comptes publics. Nous prévoyons ainsi une nouvelle étape de réduction du déficit en 2024, qui s'établira à 4,4% du produit intérieur brut.
Le déficit budgétaire de l'État va baisser de 165 à 145 milliards d'euros. Il aurait été plus facile de repousser à demain ce retour à la normale : nous n'avons pas cédé à cette tentation.
Investir pour l'avenir, c'est préserver la croissance française, dans un contexte international bouleversé et un contexte économique incertain. Nous devons poursuivre notre politique résolue et efficace en faveur du plein emploi.
La vitalité de notre économie, notre capacité à créer des emplois, en particulier des emplois industriels, sont la première réponse aux préoccupations légitimes des Français pour leur pouvoir d'achat mais aussi pour la soutenabilité de nos finances publiques.
C'est parce que nous tenons à préserver cette dynamique essentielle que nous n'augmentons pas les impôts et que nous poursuivons les baisses des impôts de production.
Investir pour l'avenir c'est reconnaître que nous avons deux dettes, une dette publique et une dette écologique à laquelle il faut s'attaquer.
Le projet de loi de finances pour 2024 consacre un investissement inédit en faveur de la transition écologique, avec 10 milliards d'euros supplémentaires pour la rénovation thermique des logements et des bâtiments publics, pour décarboner nos transports, pour accompagner le nouveau modèle agricole, pour créer une industrie verte et pour transformer notre modèle énergétique.
Ces dépenses vertes vont aussi permettre d'accompagner les ménages. Les Français ont besoin d'investir dans la transition écologique, pour passer à l'électrique pour leurs voitures et pour isoler leurs logements. Les aider est un enjeu climatique mais aussi économique et social.
Sans cet investissement supplémentaire de l'État nous ne tiendrons pas nos objectifs climatiques. Il aurait été plus facile de repousser à demain ces investissements, en creusant notre dette écologique : nous n'avons pas cédé à cette tentation.
Investir pour l'avenir, c'est enfin avoir des services publics plus forts.
Notre projet de loi de finances poursuit l'investissement dans nos services publics régaliens, en cohérence avec les lois de programmation votées par le parlement. Hélas, l'actualité de ces derniers jours nous rappelle combien ce renfort est indispensable.
Nous investissons dans l'école en finançant les mesures nécessaires de revalorisation du métier d'enseignant. Il aurait été plus facile de repousser à demain ce réarmement des services publics de première ligne : là encore, nous n'avons pas cédé à cette tentation.
Le budget que nous vous proposons est un budget d'équilibre, qui ne renonce à aucune de nos priorités.
Et pourtant :
Certains nous reprochent l'austérité. Les hausses de crédits de l'éducation nationale, de la police, de la gendarmerie, de la justice, de l'enseignement supérieur et de la recherche comme les créations de postes qui vont permettre de recruter plus de 8 200 agents sont une réponse à ceux qui nous reprochent d'avoir délaissé nos services publics. À ceux qui sont tentés par la facilité du misérabilisme : je veux dire que rien n'est plus faux.
Certains nous reprochent au contraire de ne pas faire de grandes coupes dans les dépenses de l'État et les services publics. Les dépenses de l'État baisseront en 2024.
Oui, cette baisse s'explique d'abord par la sortie des dispositifs de crise : nous dépenserons 14 milliards d'euros de moins sur les mesures exceptionnelles en 2024. Mais non, ce ne sont pas des économies faciles, comme je l'entends parfois, car nous devons, en même temps, lutter contre la vie chère et redonner du pouvoir d'achat aux Français.
Les économies du budget 2024 viennent aussi de réformes structurelles que nous menons : nous ferons 350 millions d'euros d'économies sur la politique de l'emploi, en cohérence avec la réduction du chômage et plus de 500 millions d'euros en améliorant l'efficience de la politique de formation professionnelle.
Ce budget contient donc des économies substantielles. À ceux qui nous disent d'aller plus loin, je leur demande de nous dire concrètement sur quelles politiques publiques, sur quels ministères, sur quels opérateurs faire porter ces économies et ces baisses d'effectifs supplémentaires. Je serai attentif, comme je le suis depuis le premier jour, à leurs propositions, dès lors qu'elles sont concrètes et ciblées.
Certains voudraient que nous augmentions les impôts. Nous avons la conviction que ces hausses seraient dommageables à la croissance, donc à l'emploi et, donc, à nos finances publiques. Par ailleurs, pourquoi devrions-nous revenir sur une stratégie qui fait ses preuves ? Les baisses d'impôt ne sont pas une fin en soi ni un totem : notre objectif a toujours été et reste le plein emploi. Et je constate, que grâce à la politique que nous menons avec constance depuis 2017, nous nous en rapprochons. Ce n'est pas le moment de changer de cap.
Certains nous accusent enfin de faire porter l'effort sur les collectivités. Cessons d'opposer l'État et les collectivités ! Nous portons ensemble les services publics. Je rappelle que les concours financiers de l'État aux collectivités s'élèvent à près de 55 milliards d'euros en 2024. La dotation globale de fonctionnement augmentera à nouveau de 220 millions d'euros, après la hausse de 2023 qui était la première en 12 ans. Pour renforcer les capacités d'investissement des collectivités, nous étendons le fonds de compensation de la TVA aux dépenses d'aménagement. Cela répond à une demande des élus locaux et représente un effort de 250 millions d'euros pour l'investissement local.
Nos collectivités bénéficieront aussi de l'effort inédit en faveur de la transition écologique : le fonds vert est pérennisé, à hauteur de 2,5 milliards d'euros, dont 500 millions d'euros pour la rénovation des écoles, comme annoncé par le Président de la République. Il faut accélérer le verdissement de toutes nos dépenses publiques, État, collectivités, opérateurs, et, pour cela, nous devons avoir une boussole commune.
Cette boussole commune ce sont les budgets verts, dont je souhaite la généralisation aux opérateurs et aux grandes collectivités.
Force est de constater que les groupes d'opposition ne partagent pas les grandes priorités que nous proposons aux Français dans ce projet de loi de finances et les grands équilibres qui les portent.
Mais je constate aussi qu'il n'y a pas de projet alternatif susceptible de rassembler davantage.
La première partie de ce projet de loi de finances, bien que largement amendée, n'a pas trouvé le soutien d'une majorité d'entre vous en commission.
Des amendements ont certes rassemblé des majorités. Mais le budget est un équilibre d'ensemble et ne peut se réduire à une somme d'articles et d'amendements.
Sur cet équilibre d'ensemble, il n'existe pas de projet alternatif :
- entre ceux qui veulent une baisse drastique du déficit et des coupes sombres dans les dépenses et ceux qui nous accusent d'austérité, il n'y a pas de point de rencontre ;
- entre ceux qui veulent dépenser plus sur la transition écologique et ceux qui veulent brunir nos dépenses et notre fiscalité, il y a une vraie incompatibilité ;
- entre ceux qui voudraient baisser très fortement les impôts et ceux qui veulent taxer quoi qu'il en coûte pour l'activité économique il y a aussi une divergence de fonds.
Malgré ces divergences de fond, nous bâtissons ce texte avec le parlement.
Le dialogue entre nous a été, est et sera continu.
Les dialogues de Bercy nous ont permis d'échanger avant l'aboutissement du projet de loi de finances, avec tous les groupes parlementaires.
Ces dialogues vont aboutir dans le cadre de ce projet de loi mais pas seulement. Je pense en particulier à la stratégie des financements de la transition écologique qui a été inscrite dans le projet de loi de programmation des finances publiques par cette assemblée. C'était une attente exprimée par tous les groupes.
Au-delà des dialogues de Bercy, j'ai échangé avec la majorité des groupes ces derniers jours et je continuerai à le faire.
Je salue aussi le travail très important réalisé en commission, sous l'égide du rapporteur général du budget, avec l'examen de près de 3 000 amendements.
Pour la séance qui nous réunit, plus de 5 000 amendements ont été déposés. Il n'y a pas lieu ici de faire des statistiques mais je crois que c'est un record.
De ces dialogues, du travail en commission, de ces amendements, je retiens d'ores et déjà de nombreux sujets sur lesquels nous avons des points de convergence.
Pour soutenir le pouvoir d'achat des Français, qui doivent faire face à l'augmentation des prix du carburant, je pense à la reconduction des aides carburant pour les travailleurs qui est portée par le groupe Renaissance et par le député Mathieu Lefèvre. Nous mettrons ainsi en place à partir de mi-janvier l'indemnité carburant pour ceux qui doivent rouler pour travailler. Cette mesure vient compléter le bouclier contre l'inflation que nous mettons en place avec la revalorisation des tranches du barème de l'impôt sur le revenu, des pensions et des minima. Nous faisons ainsi le choix de dépenser 25 milliards d'euros pour protéger le pouvoir d'achat des Français.
Des convergences aussi pour accélérer le financement de la transition écologique, je pense à l'amendement porté par les trois groupes de la majorité avec le rapport général du budget de prolongation de la contribution sur la rente inframarginale de la production d'électricité. Je pense aussi aux propositions du député David Amiel pour financer la rénovation énergétique des logements.
Des convergences aussi pour apporter une réponse rapide à la crise du logement en accélérant la libération du foncier, un abattement exceptionnel et temporaire pour les plus-values immobilières foncières est porté par le groupe Démocrate et le président Mattei.
Pour donner de nouvelles libertés aux collectivités, pour qu'elles puissent faire face en cas de difficultés ou de besoins d'investissement, l'assouplissement des règles de lien pour la THRS est proposé par le groupe Horizons et par la député Lise Magnier. Je sais que cet assouplissement est appelé de leurs voeux par nombre d'élus locaux.
Des convergences encore pour soutenir certaines filières comme la filière équine, la TVA à taux réduits pour les centres équestres est proposée par le groupe LR et par Véronique Louwagie. C'est une mesure attendue de longue date par la filière.
Pour lutter contre la fraude fiscale, la généralisation des aviseurs fiscaux, portée par le groupe Socialiste et par Christine Pires-Beaune, viendra compléter ce projet de loi de finances qui est un véritable projet de loi anti fraudes avec plus de moyens et de sécurité pour les équipes de contrôles, de nouveaux outils adaptés au numérique et, surtout, plus de capacités pour sanctionner les fraudeurs.
Pour financer la mission d'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, dont est chargée l'ANSES, l'indexation sur l'inflation de la taxe relative aux produits phytopharmaceutiques est portée par le groupe Écologiste et Eva Sas.
Pour soutenir les fondations et associations, la proposition du groupe GDR et de Fabien Roussel est d'exonérer de taxe d'habitation sur les résidences secondaires les fondations et associations reconnues d'utilité publique.
Convergence enfin, pour soutenir les territoires d'outre-mer, l'exonération de la redevance sur la consommation d'eau potable pour la population de Mayotte est portée par le groupe LIOT et Estelle Youssouffa.
Ces initiatives, que nous allons soutenir, sont autant d'illustrations du travail accompli ensemble. Elles vont enrichir le texte, tout en veillant, et c'est ma responsabilité, à garantir les grands équilibres de ce budget.
Ce projet de loi de finances pour 2024 est le résultat d'une méthode, celle du dialogue mais aussi d'un esprit, celui de la responsabilité, et d'une boussole, celle de l'avenir.
Je vous remercie pour votre attention.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 18 octobre 2023