Déclaration de M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics, sur la situation des finances publiques locales, à l'Assemblée nationale le 20 octobre 2023.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Débat à l'Assemblée nationale sur les finances locales

Texte intégral

Mme la présidente
L'ordre du jour appelle, en application de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, un débat sur la situation des finances publiques locales.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics
L'Assemblée nationale consacre pour la deuxième année un débat aux finances locales. Ce débat constitue l'une des avancées importantes de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et j'y suis particulièrement attaché. Président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation lorsque j'étais député, élu local, je sais le rôle essentiel joué au quotidien par nos communes, nos intercommunalités, nos départements et nos régions. Nos concitoyens attendent de l'État et des collectivités qu'ils travaillent main dans la main pour organiser les services publics du quotidien, mais aussi pour relever les grands défis auxquels notre pays fait face, en particulier celui de la transition écologique.

Pour ouvrir ce débat, et parce que c'est sa raison d'être, je souhaite rappeler les faits concernant la situation financière de nos collectivités. L'épargne des collectivités territoriales s'améliore : en 2022, elle s'est élevée à 43 milliards d'euros, soit 9 milliards de plus qu'en 2017. La soutenabilité de la dette des collectivités s'améliore également : elles ont désormais la capacité de se désendetter en quatre années et demie, soit un an de moins qu'en 2017, preuve de leur meilleure situation financière. Le nombre de communes en difficulté a par ailleurs baissé de 23% entre 2019 et 2022. Les données publiées par la direction générale des finances publiques (DGFIP) à la fin du mois de septembre 2023 confirment la bonne santé financière du bloc communal.

La situation financière des collectivités est donc globalement satisfaisante – je dis bien globalement. Ce n'est pas moi qui l'affirme, mais la Cour des comptes et la DGFIP, dont chacun peut consulter les chiffres. Je suis souvent surpris de l'écart entre cette situation objective et les propos alarmistes que j'entends parfois sur les finances locales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
En effet !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Cette perception erronée justifie à elle seule notre débat d'aujourd'hui.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Absolument !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Elle s'explique certainement par les différences de situation entre collectivités locales. Si la santé financière des communes et des intercommunalités est bonne, celle des régions et des départements l'est moins. En effet, les départements sont significativement affectés par la baisse des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui devrait être de 20 % en 2023 par rapport à l'année 2022.

S'agissant des communes, il existe aussi de fortes disparités entre elles. Je n'ignore pas que certaines sont confrontées à une situation délicate du fait d'un budget difficile à boucler. Nous devons mieux rendre compte de leur disparité. Je souhaite donc que le rapport sur la situation des finances publiques locales, annexé au projet de loi de finances, s'enrichisse d'une analyse de la diversité des situations locales. Celle-ci nous aidera à partager le même constat et à nous défaire de l'idée selon laquelle les chiffres, en trompe-l'œil, ne refléteraient pas la réalité.

L'État et les collectivités doivent avoir un lieu pour échanger et bâtir un constat partagé. Tel est le sens du Haut Conseil des finances publiques locales (HCFPL) que nous avons créé avec le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Bruno Le Maire, et la ministre chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, Dominique Faure.

Depuis 2017, le Gouvernement et la majorité ont fait preuve d'un engagement sans faille auprès des collectivités afin de leur permettre de conserver une situation financière favorable en dépit des différentes crises. Nous avons compensé à l'euro près les réformes de la fiscalité locale intervenues depuis 2017. Ces compensations nous ont conduits à confier des ressources dynamiques aux collectivités. Nous avons notamment transféré 25% de la TVA aux régions, aux départements et aux intercommunalités.

En 2017, le Parlement a également décidé d'indexer automatiquement les bases locatives sur l'inflation pour garantir aux élus une progression de leurs recettes équivalente à celle de leurs dépenses. En 2022, nous n'avons pas souhaité revenir sur cette règle malgré le niveau très élevé de l'inflation : la taxe foncière doit rester un impôt 100% local. Les associations d'élus elles-mêmes nous demandaient de ne pas plafonner leurs bases locatives, qui contribuent aujourd'hui au dynamisme des recettes des collectivités.

S'agissant de la dotation globale de fonctionnement (DGF), après cinq années de baisse sous le quinquennat Hollande, nous l'avons stabilisée dès 2017, augmentée en 2023 – ce n'était pas arrivé depuis treize ans –, et nous l'augmenterons de nouveau en 2024. La DGF aura ainsi bénéficié d'une hausse de 540 millions entre 2022 et 2024.

Nous n'avons jamais laissé les collectivités affronter seules les crises. Pendant la crise sanitaire, 10 milliards leur ont été accordés sous diverses formes. Face à la crise de l'énergie, l'État a renoncé à la fiscalité sur l'électricité pour alléger les factures des Français, mais aussi celles des collectivités. Les plus petites communes qui bénéficient du tarif réglementé ont été protégées grâce au bouclier tarifaire et les autres grâce à l'amortisseur. À travers ce dernier, l'État prendra en charge près de 1 milliard de factures d'électricité des collectivités et de leurs syndicats en 2023. En 2024, l'amortisseur sera prolongé pour les collectivités qui ont signé un contrat pour plusieurs années à des prix très élevés, conformément à la demande de nombreux élus locaux.

En 2022, nous avons aussi instauré le filet de sécurité inflation : 405 millions sont consacrés au soutien des communes, des intercommunalités et des syndicats bénéficiaires. À cet égard, je rappelle qu'un amendement de Christine Pires-Beaune visant à cibler l'aide sur les collectivités les plus touchées – lesquelles devaient notamment afficher une perte d'épargne brute de plus de 25% sur l'année 2022 – avait été adopté à l'unanimité dans l'hémicycle. Un certain nombre de collectivités ont perçu un acompte, mais n'ont finalement pas droit au filet, leur situation financière étant meilleure que prévue. Cette reprise d'acompte est une mauvaise surprise, je le conçois. Dans plus de 80% des cas, il s'agit de très petits montants. Toutefois, j'ai demandé à la DGFIP d'être attentive aux collectivités les plus fragiles. Nous suivons de près la situation.

J'en viens aux perspectives des finances locales. Le chemin tracé par notre trajectoire des finances publiques est la baisse progressive du déficit public. L'objectif est un déficit inférieur à 3% du produit intérieur brut (PIB) d'ici à 2027, comme avant la crise du covid. Je serai clair : les collectivités devront contribuer à cet effort collectif partagé. Leur participation est légitime car l'État a massivement protégé depuis 2020 et s'est endetté au bénéfice de tous – salariés, entreprises, associations, collectivités. L'effort doit aujourd'hui être partagé. Pour les collectivités, il ne nécessite pas de couper dans les dépenses, comme je l'entends parfois, mais de modérer la progression des dépenses de fonctionnement. Celles-ci doivent progresser un peu moins vite que l'inflation afin que les investissements indispensables puissent se poursuivre.

Je l'ai déjà dit : pour mettre en œuvre cette trajectoire, il n'y aura pas de nouveaux contrats de Cahors, pas d'approche unilatérale assortie de sanctions. C'est pourquoi nous devons inventer une nouvelle méthode : une méthode partenariale, à laquelle je suis personnellement attaché. Nous pouvons identifier ensemble les économies à réaliser, qui bénéficieront à tous, à l'État et aux collectivités. Les élus locaux le disent : ils sont les premiers à souffrir de la complexité de nos organisations. Cette complexité leur coûte cher, nous coûte cher.

Les collectivités affirment qu'elles peuvent suivre une trajectoire financière vertueuse à condition d'avoir de la visibilité. Elles nous en font la demande dans le cadre des nombreuses concertations que nous menons avec Dominique Faure. La forme et la méthode restent à définir, mais le rapport sur la situation des finances publiques locales pourrait s'enrichir d'une partie prospective qui donnerait aux élus locaux une visibilité sur la trajectoire de leurs ressources, leur permettant de se projeter davantage.

Avec le projet de loi de finances (PLF) pour 2024, nous avons l'ambition de franchir une première étape de réduction du déficit et de maîtrise des dépenses. Ce PLF restera néanmoins très favorable aux collectivités territoriales. Le texte initial comportait déjà de nombreuses mesures en leur faveur : un fonds Vert pérennisé et renforcé, doté de 2,5 milliards d'euros ;…

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Excellent !

M. Jocelyn Dessigny
Ne soyez pas trop optimiste, monsieur le rapporteur général !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…un plan France ruralités doté de 90 millions, qui prévoit le recrutement de 100 chefs de projet ingénierie pour accompagner les territoires ruraux ;…

M. Nicolas Sansu
Insuffisant !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…une augmentation de plus de 1 milliard des concours financiers aux collectivités ; une DGF dotée de 220 millions ; la dotation biodiversité portée à 100 millions ; le fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) en hausse de 400 millions, qui inclut désormais les dépenses d'aménagement de terrains – soit une demande d'un grand nombre d'entre vous.

À la suite de l'examen du PLF en commission des finances, plusieurs amendements ont été retenus et permettront des avancées majeures pour les collectivités. Je pense notamment à la garantie socle pour la compensation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) des départements, défendue par les groupes Socialistes et apparentés et Les Républicains, ainsi que par M. le rapporteur général.

Je pense également à la nouvelle dotation pour les communes nouvelles, issue des conclusions de la mission flash sur ces communes, menée par les députés Stella Dupont et Stéphane Delautrette.

Je pense à une évolution très importante en matière de règles de lien proposée par le groupe Horizons : la taxe d'habitation sur les résidences secondaires pourra désormais être augmentée indépendamment des évolutions de la taxe foncière.

M. Frédéric Valletoux
Très bien !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Cette évolution était très attendue par les élus, qui demandent des leviers d'action adaptés.

Le texte continuera d'évoluer et de s'enrichir. Ainsi, nous suivons attentivement la situation financière des départements, affectée par la baisse des DMTO en 2023. Pour les plus fragiles d'entre eux, nous devons réfléchir collectivement à la mobilisation du fonds de sauvegarde. Nous devrons aussi préciser le calendrier en matière de révision des valeurs locatives, aussi bien pour les locaux professionnels que pour les locaux d'habitation. Les travaux sur ce sujet avec les associations d'élus sont en cours.

Au-delà de la trajectoire financière, des chantiers structurels sont devant nous. Nous le savons, il faudra remettre sur le métier une réforme plus globale du financement des collectivités, en particulier de la DGF : c'est une demande forte des collectivités et des parlementaires, mais la question est complexe et sensible.

Par ailleurs, on ne peut engager le débat sur les finances locales sans évoquer l'autonomie financière et l'autonomie fiscale. À ce titre, je salue l'important travail conduit par le rapporteur général du budget, qui distingue les deux notions : l'autonomie financière est la garantie de la libre administration des collectivités locales ; elle progresse, contrairement à l'autonomie fiscale, qui renvoie à d'autres considérations.

Enfin, un chantier doit nous rassembler : celui de la transition écologique. Le rapport sur les incidences économiques de l'action pour le climat de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, fréquemment cité, nous éclaire sur le volume d'investissements supplémentaires nécessaires à l'horizon 2030 – je dis bien à l'horizon 2030 ! L'État prend sa part dans ce chantier en 2024, la planification écologique bénéficiant d'une hausse inédite de crédits. Toutefois, les collectivités ont aussi leur rôle à jouer, grâce aux dotations de l'État, qui couvrent environ 20 % de l'investissement local, et grâce à leurs leviers propres.

Pour réussir cette transition, nous avons besoin de boussoles communes : après avoir longuement échangé avec les associations d'élus, je crois que nous sommes désormais prêts à généraliser les budgets verts dans les collectivités, au-delà d'un certain seuil, comme le propose le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, David Valence. Il ne s'agit pas de faire peser sur les élus une obligation de plus, mais simplement de les accompagner pour qu'ils puissent indiquer la part des dépenses vertes dans leurs investissements totaux.

M. Jocelyn Dessigny
Ce n'est pas ce qui se passe sur le terrain !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Ces budgets verts pourraient aussi préciser la part de la dette verte des collectivités, car on ne doit plus juger les gestionnaires locaux uniquement en fonction de leurs ratios financiers, mais aussi en fonction de leur capacité à concilier la transition écologique et la maîtrise des dépenses. Je salue l'engagement du rapporteur général et du député Pierre Cazeneuve sur ce sujet.

Le travail commun des collectivités et de l'État est un levier puissant pour réussir la transition écologique. Ils ont en partage non seulement les finances publiques, mais la transition écologique. Nous ne gagnons jamais à opposer l'État et les collectivités territoriales. Que ce soit pour redresser les finances publiques ou pour relever le défi de la transition écologique, il n'existe qu'une seule méthode, le dialogue, car c'est la seule qui marche. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et HOR, ainsi que sur les bancs des commissions.)

(…)

Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Je vais essayer de répondre de manière synthétique aux différentes interventions en commençant par la vôtre, monsieur le président Coquerel. Rien n'est plus faux que de dire que nous sous-traitons l'austérité aux collectivités territoriales. Je rappelle que l'effort demandé sur les dépenses de l'État est trois fois supérieur à celui attendu des collectivités. Je vous renvoie sur ce point à la loi de programmation des finances publiques : les chiffres sont transparents. Le Gouvernement ne demande pas aux collectivités de baisser leurs dépenses, mais que leurs dépenses de fonctionnement progressent un peu moins vite que l'inflation. Voilà la réalité de l'effort que nous leur demandons. Vous dites par ailleurs que nous ne nous inscrivons pas dans la trajectoire permettant d'atteindre les objectifs fixés par le rapport Pisani-Ferry. Mais nous mettons 7 milliards d'euros de plus !

M. Yoann Gillet
On ferme des écoles !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Vous rétorquez que ce sont 30 milliards de plus qu'il faudrait pour le secteur public, mais vous omettez une dimension très importante de la question, à savoir que 70 % de l'investissement public civil provient des collectivités.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Nous n'allons pas nous substituer aux collectivités – qui, d'ailleurs, nous le reprocheraient. Politique de transport, de rénovation, de réseaux d'eau : c'est dans le respect du champ de nos responsabilités respectives que nous inscrivons notre trajectoire pluriannuelle.

Par ailleurs, vous semblez regretter la fin de la CVAE, qui écornerait l'autonomie fiscale des collectivités ; je rappelle pourtant que s'agissant de la CVAE, les collectivités n'étaient pas maîtresses des taux. La TVA, pour sa part, a toujours été considérée comme une recette dynamique et les régions, qui se sont vu retirer la CVAE au profit d'une fraction de TVA, ne regrettent pas cette évolution.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Cela représente 1 milliard en cinq ans !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
M. Valletoux n'est plus dans l'hémicycle, mais je tiens à lui dire que nous sommes à sa disposition pour travailler sur l'approfondissement des dispositifs de solidarité entre les collectivités – un travail engagé par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation.

Monsieur Gillet, vous parlez de l'agonie, de la casse des collectivités territoriales –…

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Mensonge !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…autant de termes qui ne permettent pas un débat serein et apaisé.

M. Yoann Gillet
Excusez-moi de me faire le porte-parole des élus !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Rien n'est plus faux : les chiffres sont formels.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Vous mentez, tout simplement ! (Mme Laure Lavalette et M. Frédéric Boccaletti s'exclament.)

Mme Julie Lechanteux
Tous les maires mentent ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Permettez-moi de vous répondre. L'immense majorité des élus locaux, heureusement, ne tiennent pas de tels propos, et ils ont raison : ce sont des gestionnaires responsables,…

M. Yoann Gillet
Le Comité des finances locales, par exemple ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…qui ont compris qu'il nous fallait redresser, collectivement, nos finances publiques.

Vous avez raison, monsieur Gillet, de rappeler la règle d'or qui empêche les collectivités de s'endetter pour leurs dépenses de fonctionnement. C'est une bonne règle. Quant à la dette de l'État, son augmentation résulte de notre réponse aux crises successives, qui nous a permis de protéger les citoyens comme les collectivités.

M. Yoann Gillet
Les collectivités, protégées ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Est-il anormal, maintenant que nous voulons revenir à un déficit inférieur à 3% du PIB, de leur demander de partager l'effort ? Je pense que c'est légitime, vu qu'elles ont bénéficié de cette protection, tout comme nos associations, nos commerçants et nos salariés. Vous vous posez en protecteurs des collectivités territoriales ; mais je vous renvoie à l'amendement que vous avez déposé et voté – avec La France insoumise –, qui visait à plafonner l'évolution des bases de la taxe foncière à 3,5%. Cela aurait représenté 2 milliards de recettes en moins pour les collectivités territoriales.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général et Mme Marina Ferrari, rapporteure spéciale
Eh oui !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Il n'est pas cohérent de nous accuser d'étrangler les collectivités tout en défendant un resserrement de leurs ressources de cette ampleur – bien supérieure, d'ailleurs, à l'effet qu'aurait eu l'indexation de la dotation globale de fonctionnement que vous souhaitez.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Ils ne savent pas compter ! (Mme Laure Lavalette et M. Frédéric Boccaletti s'exclament.)

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Monsieur Ruffin, vous avez raison de souligner l'importance des maires : leur engagement doit être salué. Cependant, il faut aussi rappeler les chiffres. Entre 2019 et 2022, le nombre des communes en difficulté a baissé de plus de 25%. La réalité que vous décrivez n'est donc pas majoritaire, et elle a tendance à se faire moins présente. La direction générale des finances publiques constate d'ailleurs, dans sa publication du mois de septembre, que la situation financière du bloc communal est globalement meilleure que l'année dernière, mais aussi meilleure qu'avant la crise du covid. Voilà la réalité des chiffres.

De même, s'agissant de la taxe foncière, vous renvoyez aux propos du Président de la République, mais je redis qu'il s'agit d'un impôt 100% local. Ne nous lançons pas dans un débat sur la taxe foncière : celle-ci obéit à une règle d'indexation automatique, et les élus font leur choix, en toute responsabilité : ne pas toucher au taux – ce fut le cas de 85 % des communes –, l'augmenter, voire le baisser. En effet, certains maires ont choisi de baisser le taux de la taxe foncière pour éviter d'amputer le pouvoir d'achat de leurs administrés. En tout état de cause, c'est un débat purement local.

Madame Louwagie, merci de reconnaître l'avancée que représente la prise en charge, à compter du 1er janvier 2024, des dépenses d'aménagement des terrains grâce au FCTVA – une proposition que vous défendiez, comme de nombreux autres députés. Pour le budget de l'État, c'est un effort de 250 millions d'euros. Si nous avions rendu cette mesure rétroactive, en retenant les trois dernières années, cela aurait porté cet effort à 750 millions. Dans une période de redressement des finances publiques, on ne peut pas se permettre un tel niveau de dépense, même si pareille décision aurait pu se justifier par ailleurs. Il s'agit de partager l'effort. Reconnaissez néanmoins que 250 millions d'euros supplémentaires au titre du FCTVA, ce n'est pas rien.

Quant à la révision générale des valeurs locatives, nous continuons à y travailler avec les associations d'élus. Nous avons mené un travail technique sur les effets de transfert entre les commerces de centre-ville et ceux de périphérie ; nous poursuivrons la concertation avec les associations d'élus et, en fonction de leur position, nous verrons s'il nous faut revenir devant la représentation nationale pour avancer sur ce point. Je reste à votre disposition si vous souhaitez plus d'informations ou si vous désirez participer à ces travaux.

M. Geismar a me semble t-il quitté l'hémicycle.

Monsieur Echaniz, vous avez évoqué les propositions que vous partagez, je crois, avec Christine Pires Beaune. La remise à plat de la DGF représente un grand chantier, dont nous avons longuement débattu. Je suis à la disposition de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation si elle souhaite lancer des travaux et partager avec moi les préconisations et les propositions qui en résulteraient. Le rapporteur général du budget entend lui aussi avancer sur ce chantier.

S'agissant des droits de mutation à titre onéreux, je suis favorable à ce qu'on étudie la possibilité d'activer le fonds de secours pour certains départements, qui ont été mis en difficulté par la forte chute des DMTO. La situation des collectivités territoriales n'est pas uniforme, et il faut y répondre au cas par cas.

Je salue le travail du groupe Socialistes et apparentés, en particulier de Mme Pires Beaune, sur le filet de sécurité 2022. Je rappelle à M. Sansu, qui lui trouve maintenant beaucoup de limites, que ce dispositif a été voté à l'unanimité, à l'initiative du groupe SOC.

M. Nicolas Sansu
J'avais déposé un autre amendement.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Nous avons coconstruit ce filet de sécurité.

M. Nicolas Sansu
Non !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Pour ce qui est des acomptes, comme l'a rappelé David Amiel, la situation du bloc communal est aujourd'hui globalement meilleure que l'année dernière ; voilà pourquoi certains acomptes qui ont été versés doivent être repris. C'est plutôt une bonne nouvelle, dont on devrait se féliciter.

M. Nicolas Sansu
Il y a quand même quelques erreurs !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Madame Magnier, merci de reconnaître l'avancée que représente l'évolution de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. Les élus locaux souhaitaient plus de souplesse. C'est une première étape, attendue depuis des années, et je suis ravi que nous ayons pu coconstruire ces dispositions dans le PLF.

Madame Sas, vous dites que ce budget ne donne pas plus de moyens aux collectivités territoriales. C'est faux : les transferts financiers intègrent plus de 1 milliard d'euros supplémentaires. Vous pouvez juger que ce n'est pas assez, mais ne dites pas que nous n'augmentons pas les transferts à destination des collectivités.

M. Yoann Gillet
Il manque 1,3 milliard !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Vous évoquez les 500 millions d'euros du plan de rénovation des écoles, annoncé par le Président de la République, qui s'inscrit dans le fonds Vert, lui-même passé de 2 milliards à 2,5 milliards ; mais ce n'est pas à l'État de financer tous les travaux des écoles de ce pays ! C'est une responsabilité des collectivités territoriales. Par ailleurs, nous avons voté à l'unanimité une loi sur le tiers-financement des programmes de rénovation énergétique, qui nous permettra de trouver d'autres sources de financement.

Monsieur Sansu, vous regrettez la non-indexation de la DGF tout en continuant à défendre le plafonnement de l'évolution des bases de la taxe foncière.

M. Nicolas Sansu
Moi ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Bien sûr : vous avez déposé et voté des amendements en ce sens.

M. Nicolas Sansu
Absolument pas !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Une telle mesure amputerait le budget des collectivités de 2 milliards d'euros.

M. Nicolas Sansu
Je ne l'ai jamais défendue !

M. Yoann Gillet
Il m'a fait le même coup ! Ses fiches sont mal rédigées !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Monsieur Gillet, le groupe Rassemblement national avait bien déposé un amendement tendant à plafonner l'évolution des bases de la taxe foncière à 3,5 %.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Bien sûr ! Le même que l'année dernière !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Assumez vos positions !
Enfin, monsieur Castellani, le rapport sur la situation des finances publiques locales est sorti mardi ; je me ferai un plaisir de vous le remettre. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.)

Mme la présidente
Le débat est clos.


Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 23 octobre 2023