Texte intégral
Je suis ravi d'être parmi vous à Villetaneuse, pour ce qui s'apparente à un voyage au centre de la terre.
Hier, nous allions y chercher du pétrole, du gaz et du charbon.
Aujourd'hui, nous y puisons de l'énergie décarbonée et des matériaux essentiels à la transition écologique.
C'est la meilleure illustration de notre capacité à nous réinventer pour proposer un nouveau modèle au XXIème siècle.
Nous sommes déterminés à accélérer dans cette voie.
1. Ce qui fait l'efficacité de la transition écologique, c'est son moment et son rythme
La planète vient de connaître un réchauffement de 1,58°C sur les douze derniers mois. C'est un record absolu.
Si nous voulons garder la maîtrise du climat, et donc la maîtrise de notre avenir, nous devons apporter une réponse à la hauteur de l'enjeu.
Les scientifiques sont unanimes : plus la transition écologique est menée tôt, plus son impact sur le climat est significatif, et plus elle est efficace.
Il ne s'agit pas simplement de faire les choses. Il faut les faire au bon moment et au bon rythme.
De ce point de vue, nous avons un horizon clair : la France doit sortir des énergies fossiles et atteindre la neutralité carbone en 2050.
Cela nous laisse un quart de siècle pour changer nos modes de production et nos usages.
C'est une course contre la montre.
La question est : comment gagner du temps ?
Il y a deux solutions :
- Nous devons utiliser toutes les ressources à notre disposition : le nucléaire, l'éolien, l'hydroélectricité, la biomasse, l'énergie solaire, mais aussi les ressources de notre sous-sol et la géothermie, qui nous occupent aujourd'hui ;
- Nous devons simplifier les procédures pour accélérer le recours à ces ressources.
2. Notre sous-sol regorge de richesses pour mener la transition climatique
En France, on n'a pas de pétrole, mais on a d'autres ressources, bien meilleures pour la planète, bien plus intéressantes pour l'avenir.
Pour les trouver, il faut aussi explorer notre sous-sol.
Je sais que cela suscite certaines réticences.
Notre pays reste marqué par l'image de ses mines de charbon. Il cultive la mémoire de ses « gueules noires » et de leur travail mené dans des conditions extrêmes, sous la menace des coups de grisou.
Cette histoire fait partie de notre patrimoine. Mais elle ne peut pas conditionner notre avenir.
Pour entrer pleinement dans le XXIème siècle et mener la transition écologique, il faut nous réconcilier avec notre sous-sol.
Il y a d'abord la géothermie.
La captation et la valorisation de l'énergie thermique du sous-sol et des nappes d'eau souterraines représente une énergie décarbonée, renouvelable, stable et souveraine.
Elle sert principalement à chauffer des bâtiments, à l'image de ce site de Villetaneuse qui alimentera à terme 10 000 logements ainsi que l'université Paris 13.
Nous devons la développer en profondeur et en surface avec :
- Un objectif de 6 TWh de consommation finale de chaleur renouvelable à partir de géothermie profonde d'ici 2028 (contre 2 TWh en 2022) ;
- Un objectif de 10 TWh en 2030 de consommation finale de chaleur renouvelable à partir de pompes à chaleur géothermiques, contre 3,2 TWh en 2022.
Il y a ensuite les minéraux industriels pour fabriquer les objets du quotidien.
Les 500 carrières en activité en France permettent d'extraire du kaolin pour la céramique, de la silice pour le verre, du talc pour les peintures, de l'andalousite pour la fonderie, et d'autres minéraux.
Tout cela représente 20 000 emplois directs pour alimenter des activités industrielles qui sont moins polluantes lorsqu'elles sont faites en France qu'à l'étranger, car je rappelle que nous avons une énergie décarbonée et des normes de contrôle parmi les plus strictes au monde.
Enfin, il y a les métaux essentiels à la transition écologique, comme le lithium et le cuivre.
Concernant le lithium, la France aura besoin de 10 à 15 kilotonnes par an pour la mobilité électrique à horizon 2035. Cette ressource est présente dans notre sous-sol, avec des projets d'extraction en cours de développement qui pourraient satisfaire jusqu'à 2/3 de nos besoins.
Concernant le cuivre, la France est absente de l'extraction depuis plus de vingt ans, alors même que ses réserves sont estimées à 850 kilotonnes. D'ici 2040, nous aurons besoin de 42 kilotonnes de cuivre par an pour atteindre nos objectifs de déploiement d'éoliennes, de panneaux solaires et de réseaux électriques.
Le lithium et le cuivre sont les nouveaux " ors noirs ". La France en regorge.
Ils représentent des atouts considérables pour mener la réindustrialisation verte du pays et réussir dans la compétition mondiale pour la production des biens stratégiques de demain.
Ils sont bien sûr extraits dans des mines. Mais ces mines du XXIème siècle n'ont plus rien à voir avec les mines que nous avons connues. Elles sont sûres, très encadrées et exemplaires du point du vue social et environnemental.
Quand je vois que certains écologistes veulent rouler en voitures électriques mais manifestent contre l'ouverture d'une mine de lithium dans l'Allier, qui est vitale pour alimenter nos gigafactories de batteries électriques, je m'interroge : comment comptent-ils faire ? Préfèrent-ils importer ces ressources de pays moins regardants sur les conditions d'extraction ?
C'est une écologie qui veut des résultats sans s'en donner les moyens, c'est-à-dire une écologie hypocrite, qui se paie de mots.
Pour ma part, j'ai toujours préféré l'écologie des actes à à l'écologie des mots.
J'en suis convaincu : ouvrir des mines de lithium en France, c'est faire de l'écologie.
Une écologie bonne pour la planète. Une écologie bonne pour notre souveraineté, à l'heure où nous relocalisons nos chaînes de valeur et où nous voulons assurer nos approvisionnements. Une écologie bonne pour l'économie, les usines et les emplois.
Quand on veut des résultats en termes d'écologie, de souveraineté, de prospérité, il vaut mieux une mine dans l'Allier que pas de mine du tout ou qu'une mine dans un pays étranger.
C'est pourquoi nous soutenons ces filières depuis plusieurs années, avec :
- Le lancement d'un nouvel inventaire des ressources minérales, le premier depuis les années 90. Il sera réalisé sur 5 ans ;
- L'octroi de permis de recherche pour des minerais critiques bien connus comme pour des ressources nouvelles : hélium, hydrogène blanc ;
- La mise en place d'un fonds d'investissement de 2 Md€ pour investir dans des projets miniers permettant de sécuriser les approvisionnements de notre industrie ;
- La mise en place du crédit d'impôt industrie verte pour financer les projets de matières premières critiques pour la transition énergétique.
Enfin, de la même manière que nous simplifions les ouvertures d'usines avec la loi Industrie Verte pour produire davantage de biens décarbonés sur notre sol, nous souhaitons également simplifier pour les mines et la géothermie.
Simplifier pour accélérer.
Simplifier pour mieux produire.
Simplifier pour accélérer la transition de notre économie.
3. La simplification au service de l'écologie
Je porterai dans les prochaines semaines un projet de loi simplification.
Il concernera l'ensemble de notre vie économique, y compris le secteur des mines et de l'énergie, en accélérant les projets qui portent sur le lithium, le cuivre, le nickel, la géothermie, le stockage du carbone.
Il s'attaquera notamment aux procédures du " Code minier ", dont la longueur et la complexité sont aujourd'hui rédhibitoires pour les porteurs de projets.
Comment accepter qu'il n'existe en 2024 aucune exploitation de lithium en Alsace, alors que les Allemands, qui ont identifié le même gisement au même moment que nous, l'exploitent depuis 2021 ?
Nous allons tout mettre en oeuvre pour réduire ce retard et mieux exploiter notre sous-sol.
Première mesure : nous diviserons de moitié les délais d'instruction des permis exclusifs de recherches pour le minier et la géothermie, pour qu'ils durent de 6 à 9 mois.
Je précise que cette modification de procédure n'aura aucun impact négatif sur l'analyse des impacts environnementaux de la future exploitation.
Concrètement, nous simplifions l'octroi du permis de recherches, mais nous ne touchons pas à l'autorisation de travaux miniers. Or, c'est lors de l'autorisation de travaux miniers que les impacts environnementaux du projet sont évalués.
Deuxième mesure : nous autoriserons la transformation des puits d'hydrocarbures liquides ou gazeux pour procéder à du stockage souterrain de CO2.
Comme l'a rappelé le Haut conseil pour le climat, ces stockages sont indispensables pour atteindre la neutralité carbone.
Ils nous permettront en effet de stocker " en dernier recours " les émissions " résiduelles " de CO2 – c'est-à-dire les émissions qui sont inévitables lors de certains process industriels.
Il s'agit donc d'une mesure simple, de bon sens, pour faciliter la sortie des énergies fossiles tout en permettant une reconversion facile dans des activités stratégiques pour notre transition écologique.
Enfin, nous organiserons d'ici la fin de l'année, à Bercy, avec Roland Lescure, un grand événement dédié aux ressources du sous-sol pour la transition énergétique.
Il réunira les administrations concernées, les représentants des filières, les collectivités locales et les opérateurs.
Il permettra :
- De présenter la politique nationale des ressources et des usages du sous-sol (PRUSS) ;
- De faire un point d'étape sur les mesures du plan d'action géothermie et les mesures minières annoncées ces dernières années ;
- D'annoncer des mesures supplémentaires de simplification et d'accélération.
Conclusion
Vous le voyez, laisser entendre qu'écologie et simplicité sont incompatibles, c'est un postulat idéologique.
Nous n'avons ni le temps pour l'idéologie, ni le temps pour l'écologie de la bureaucratie, qui se perd dans la norme.
C'est une écologie inefficace et même contre-productive, qui décourage les bonnes volontés et entrave l'action.
Vous me trouverez toujours dans le camp de l'écologie du bon sens, qui permet d'apporter des solutions concrètes aux défis immenses auxquels nous faisons face.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 15 avril 2024