Texte intégral
ALIX BOUILHAGUET
Bonjour Marie GUEVENOUX. Je le disais à l'instant, la tension monte en Nouvelle-Calédonie. L'archipel connaît depuis plusieurs jours des tensions, alors que la réforme constitutionnelle est examinée aujourd'hui et demain à l'Assemblée nationale. Emmanuel MACRON a invité toutes les parties prenantes à venir à Paris. Est-ce que ça veut dire qu'il y a une situation d'urgence ?
MARIE GUEVENOUX
Ecoutez, peut-être redire pour les auditeurs qui nous écoutent un peu la situation globale en Nouvelle-Calédonie. En Nouvelle-Calédonie... Vous savez que la Nouvelle-Calédonie, elle a fait part trois fois récemment le choix de rester française, suite à trois référendums.
ALIX BOUILHAGUET
On ne peut pas refaire... Je vous coupe tout de suite. On ne va pas tout refaire. Là, effectivement, ça porte sur l'élargissement du corps électoral qui est gelé depuis 1998.
MARIE GUEVENOUX
Tout à fait. C'est donc une logique en fait ; le projet de loi du Gouvernement prévoit en fait de permettre à 25 000 électeurs qui sont aujourd'hui écartés de la possibilité de voter…
ALIX BOUILHAGUET
De pouvoir voter aux élections provinciales de la fin 2024.
MARIE GUEVENOUX
Exactement. Et donc, il s'agit de 25 000 personnes. Certains sont nés en Nouvelle-Calédonie en 1999, en 2000 ; donc il y a quand même un certain temps. D'autres sont résidents en Nouvelle-Calédonie depuis plus de dix ans et ils sont privés de droit de vote donc il faut corriger cette situation. Mais il faut corriger cette situation en le faisant dans le dialogue et c'est toujours ce qu'a privilégié…
ALIX BOUILHAGUET
Mais sur place, il y a de la crispation en ce moment, il y a beaucoup de tensions, notamment parce qu'on va bouger ce corps électoral.
MARIE GUEVENOUX
Bien sûr, mais parce qu'effectivement, il y a des indépendantistes qui sont, au fond, contre cette proposition, en tout cas contre une proposition qu'ils jugeraient trop extrême de leur point de vue. Et puis, les loyalistes qui sont, eux, peut-être plus... qui ont envie d'avoir un corps électoral encore plus élargi.
ALIX BOUILHAGUET
Mais si Emmanuel MACRON appelle toutes les parties prenantes à venir à Paris ; ça veut dire qu'il y a une situation d'urgence.
MARIE GUEVENOUX
Mais ça veut dire qu'il y a une situation qui nécessite que les parties prenantes, les loyalistes, les indépendantistes, se retrouvent autour de la table et puissent converger autour d'un accord. Mais je tiens à...
ALIX BOUILHAGUET
Mais est-ce que ça peut faire capoter le texte qui est dans les tuyaux ?
MARIE GUEVENOUX
Non, je ne crois pas. Je crois que l'Assemblée nationale va examiner le texte aujourd'hui. Elle va l'examiner, elle va faire le travail qu'elle doit et qu'elle doit faire ; probablement le voter. Enfin, je suis sûr qu'elle va le voter ; après, dans quelles conditions ? On va voir. Mais non, Il y a... Depuis le départ, le Gouvernement, le ministre de l'Intérieur Gérald DARMANIN a toujours privilégié la possibilité d'un accord. Il a toujours été dit que si un accord était trouvé, on pouvait retirer le texte…
ALIX BOUILHAGUET
Donc ça ira jusqu'au bout quoiqu'il arrive ?
MARIE GUEVENOUX
Et faire en sorte que l'accord politique local puisse remplacer ce texte. Et au fond, la proposition du Président de la République aujourd'hui, c'est de redire cette proposition et dire voilà, " s'il y a un accord, si le texte est voté à l'Assemblée nationale, de toute façon, je ferai en sorte que les parties prenantes puissent venir à Paris et que les discussions puissent avoir lieu. " Donc en fait, c'est une poursuite de la discussion depuis son terme initial, on veut privilégier l'accord politique entre loyalistes et indépendantistes de Nouvelle-Calédonie.
ALIX BOUILHAGUET
La semaine dernière, une enfant de trois ans est morte à Mayotte après avoir contracté le choléra. Cette épidémie a touché 65 personnes dans l'archipel. Est-ce que vous pouvez nous dire qu'aujourd'hui, cette épidémie est sous contrôle ?
MARIE GUEVENOUX
D'abord, évidemment, il faut avoir une pensée pour les familles de cette petite fille. Et puis au-delà de la famille aussi, tout l'entourage du quartier qui a été touché. La mort d'une enfant, c'est un drame absolument affreux. Depuis le départ de la crise.... D'abord, on a observé des cas de choléra dans la zone géographique.
ALIX BOUILHAGUET
Dites-moi juste... Répondons rapidement à la question ; on a tellement de sujets à avoir. Donc est-ce qu'aujourd'hui, vous pouvez me dire que cette épidémie est sous contrôle ?
MARIE GUEVENOUX
Aujourd'hui, l'épidémie est cantonnée à un quartier dans la commune de Koungou. Donc on a aujourd'hui 72 cas qui ont été référencés depuis le début de la crise. Depuis janvier, 72 cas. L'idée, c'est d'agir par cercles concentriques. On voit un malade, on le vaccine, on prend contact avec les cas contacts, on les vaccine 3 600 vaccins aujourd'hui donnés. Et puis on isole ce quartier et donc, aujourd'hui…
ALIX BOUILHAGUET
Donc un seul foyer, une vaccination pour les proches, ça veut dire qu'on ne va pas vacciner tous les Mahorais ?
MARIE GUEVENOUX
Non. Pour les personnels de première ligne également, puisque l'idée, c'est vraiment d'agir par cercles concentriques, là où il y a des zones de façon à isoler la maladie.
ALIX BOUILHAGUET
On sait que le choléra se transmet notamment par des eaux contaminées. On sait aussi que l'archipel fait face à un cruel manque d'eau. Est-ce que c'est cette situation sanitaire qui est responsable de cette épidémie ?
MARIE GUEVENOUX
Non. La situation sanitaire sur l'île, elle est extrêmement précaire. Le quartier de Koungou, c'est un quartier de bidonville avec de l'eau insalubre, des gens qui boivent à même un cours d'eau et donc, il faut rappeler au fonds des règles simples de boire de l'eau à la bouteille décontaminée par les pastilles de chlore qui sont distribuées par les services de santé l'eau avant de la boire. Donc, la situation sanitaire est... Elle est le fruit. Elle peut permettre le développement de certaines maladies…
ALIX BOUILHAGUET
Et c'est ça qui a été la cause du déclenchement de cette épidémie ?
MARIE GUEVENOUX
Non, non, l'arrêté, c'est le cas de choléra ont été des cas importés et qui ensuite se sont…
ALIX BOUILHAGUET
Des Comores
MARIE GUEVENOUX
… Autochtones, aux Comores.
ALIX BOUILHAGUET
En fait, c'est aux Comores où l'épidémie a commencé le 18 mars ?
MARIE GUEVENOUX
Effectivement, qui est très puissante aux Comores et qui a pu entraîner des cas à Mayotte.
ALIX BOUILHAGUET
Est-ce que vous faites le lien un lien direct entre cette épidémie, et donc, l'immigration comorienne ?
MARIE GUEVENOUX
Non, je ne fais pas de lien direct entre l'immigration comorienne et l'épidémie de choléra. Il y a d'autres immigrations à Mayotte, d'autres pays qui pourraient être touchés par le choléra. Et donc, je ne fais pas de lien direct. Après, un des objectifs prioritaires du Gouvernement, c'est lutter contre l'immigration clandestine à Mayotte, qu'elle vienne des Comores ou qu'elle vienne des pays d'Afrique, c'est un objectif prioritaire pour ces raisons et pour d'autres.
ALIX BOUILHAGUET
Et c'est pour cette raison que Gérald DARMANIN a promis la suppression du droit du sol à Mayotte. On va évoquer le calendrier parlementaire, mais sur le fond, pourquoi est-ce que pour vous, il est essentiel de supprimer ce droit du sol à Mayotte ?
MARIE GUEVENOUX
Parce que vous avez aujourd'hui une attractivité de Mayotte qui est extrêmement forte et cette attractivité est aussi liée à l'acquisition de la nationalité française pour des enfants et à l'acquisition de titres de séjour de vie familiale pour les parents de ces enfants. Je m'explique. Vous avez aujourd'hui quinze-mille titres de séjour délivrés annuellement à Mayotte, 15 600 sont du fait de la vie familiale. Vous avez 75 % des 11 000 enfants qui naissent à Mayotte chaque année, qui sont de mères étrangères. Et donc, vous avez bien une attractivité de l'île pour avoir un enfant qui se voit plus tard reconnaître la nationalité française et que de ce fait, votre famille puisse bénéficier de titres de séjour.
ALIX BOUILHAGUET
Pourquoi est-ce que vous me dites, là, vos petits camarades de l'aile gauche de la majorité ne l'entendent pas ? Pourquoi est-ce qu'ils sont contre cette suppression du droit du sol ?
MARIE GUEVENOUX
Je ne pourrais pas vous expliquer pourquoi la gauche est contre la suppression du droit du sol, enfin…
ALIX BOUILHAGUET
Quand je dis la gauche, c'est l'aile gauche de la macronie.
MARIE GUEVENOUX
On verra le débat parlementaire. Moi….
ALIX BOUILHAGUET
Vous êtes sûr d'avoir la majorité pour ce texte ? Parce que…
MARIE GUEVENOUX
J'ai emmené des parlementaires avec moi à Mayotte.
ALIX BOUILHAGUET
Ils ont été convaincus ?
MARIE GUEVENOUX
On ne ressort pas… Oui, je le crois, mais le mieux, ce serait de leur demander. Mais oui, je le crois sincèrement. Il y avait le président de groupe, Sylvain MAILLARD, Christophe NAEGELEN, qui est un président de groupe d'opposition, Blandine BROCARD, qui vient du MoDem, qui est une famille centriste. Je crois pouvoir dire en leur nom que oui, ils ont été convaincus de la situation extrêmement dramatique que vit Mayotte et de la nécessité d'y apporter des réponses, dont l'abrogation du droit du sol.
ALIX BOUILHAGUET
Ce texte, il devait être présenté en Conseil des ministres le 22 mai, finalement, ce sera en juillet, c'est mal parti. Il y aura vraiment un texte quoi qu'il arrive ?
MARIE GUEVENOUX
Ce texte, il sera présenté vendredi à l'occasion d'une réunion avec le président de la République.
ALIX BOUILHAGUET
Non mais en Conseil des ministres, ce sera quand ?
MARIE GUEVENOUX
Il sera déposé au Conseil des ministres en juillet, mais le texte, les grandes orientations du texte seront présentées vendredi 17 mai et elles permettront ensuite au Conseil départemental de Mayotte d'avoir pendant un mois la possibilité de réagir sur le texte et de donner son avis. Et à l'issue de ce mois, il sera déposé au Conseil des ministres, donc, en juillet.
ALIX BOUILHAGUET
Ce texte, après, il faudra donc faire une révision de la Constitution, cela veut dire les 3/5, une majorité aux 3/5. Vous l'aurez ? Vous serez encore une fois un peu dans la main aussi des Républicains, On voit qu'ils ne sont parfois pas tout à fait coopératifs.
MARIE GUEVENOUX
Il faudra que l'ensemble des parlementaires reprenne ses responsabilités. Moi, je vous ai dit très clairement ce qui se passe à Mayotte. À Mayotte, vous avez une situation où la démographie explose, elle a quadruplé…
ALIX BOUILHAGUET
Oui, mais que vous aurez une majorité ? Si je peux refaire ma question…
MARIE GUEVENOUX
Moi, je ferai en sorte, oui, de m'engager au maximum pour avoir cette majorité. Et oui, je pense que nous aurons cette majorité parce que la situation de Mayotte le nécessite.
ALIX BOUILHAGUET
Un dernier mot sur Mayotte, l'opération « Mayotte place nette » a été lancée il y a un mois. Est-ce que vous avez déjà des résultats chiffrés concernant ce premier mois ?
MARIE GUEVENOUX
Oui. Alors sur ... « Mayotte place nette » mobilise 700 policiers et gendarmes pendant 11 semaines, donc c'est une très grosse opération. Nous avions comme objectif la destruction de 1 300 habitats indignes, bangas ; nous en avons détruit 250.
ALIX BOUILHAGUET
Avec des problèmes de relogement…
MARIE GUEVENOUX
Ce sont des destructions... Oui, les relogements sont faits. Donc on a des relogements qui sont fait en urgence, donc en situation d'hébergement d'urgence. Et puis, une fois que ces quartiers sont déconstruits, ils sont ensuite libres pour des projets fonciers portés par les collectivités locales et donc permettre du logement durable. Deuxième objectif de place nette, c'est l'arrestation de délinquants. On a 60 au chef de bande qui ont été visés, profilés, en lien avec le parquet. On en a 30 aujourd'hui qui ont été interpellés.
ALIX BOUILHAGUET
Et le dernier objectif ? C'est tout ? C'étaient les deux objectifs ?
MARIE GUEVENOUX
Non. Ensuite, troisième objectif : l'immigration clandestine. On a 1 500 étrangers en situation irrégulière qui ont été interpellés, 1 350 qui ont été reconduits.
ALIX BOUILHAGUET
Merci beaucoup pour ces précisions, Marie GUEVENOUX. Bonne journée à vous.
MARIE GUEVENOUX
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 mai 2024