Interview de M. Frédéric Valletoux, ministre délégué, chargé de la santé et de la prévention, à France 2 le 8 août 2024, sur la prise en charge des soins médicaux des athlètes des Jeux Olympiques et Paralympiques, l'accueil des patients dans les hôpitaux pendant la période estivale, la recrudescence du Covid et les primes allouées aux athlètes médaillés lors des Jeux Olympiques.

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Intervenant(s) : 

Média : France 2

Texte intégral

THOMAS SOTTO
Bonjour et bienvenue dans Les 4V, Frédéric VALLETOUX.

FREDERIC VALLETOUX
Bonjour !

THOMAS SOTTO
Des soins gratuits pour les athlètes. Les athlètes venus des autres pays n'en reviennent pas, et certains l'ont dit sur les réseaux sociaux, comme l'Américaine Ariana RAMSEY, médaille de bronze en rugby A7, et voilà ce qu'elle a posté : « Non seulement au village olympique, nous avons de la nourriture gratuite, nous avons des soins dentaires gratuits, des soins de santé gratuits. Je viens littéralement – Dit-elle – de faire un frottis gratuitement ». Elle devait aussi faire un tour chez l'ophtalmo dans la semaine. Est-ce que c'est bien raisonnable, sans être rabat-joie, dans un pays où on a tant de concitoyens qui n'arrivent pas à se soigner correctement, de faire tout ça gratuitement pour les athlètes ?

FREDERIC VALLETOUX
D'abord, je pense que cette athlète, ça devait être ses premier JO, parce que ça fait partie de la charte olympique, ça fait partie du cahier des charges, et dans chaque olympiade, il y a des soins gratuits pour les athlètes qui sont accueillis par le pays.

THOMAS SOTTO
Donc ce n'est pas une spécificité française ?

FREDERIC VALLETOUX
Ce n'est pas une spécificité française. Je le redis, ça fait partie de la solidarité qui prévaut dans les chartes olympiques et dans l'esprit olympique. Ça, c'est la première chose. La deuxième chose, c'est que c'est le Comité d'organisation qui prend en charge le financement, ce n'est pas l'Assurance maladie.

THOMAS SOTTO
Ce n'est pas la France ?

FREDERIC VALLETOUX
Non. Ce sont des médecins et des soignants de l'Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, principalement, qui animent, qui tiennent, qui accueille les patients dans cette polyclinique, mais ce sont des soins qui sont financés, donc remboursés à l'APHP, à part…

THOMAS SOTTO
Donc ça ne coûte pas 1 € à l'argent public, ni à l'Assurance maladie ?

FREDERIC VALLETOUX
Ça ne coûte pas 1 €… non, à la sécurité sociale, puisqu'effectivement, c'est à l'Euro près le remboursement.

THOMAS SOTTO
Alors on entend un hélicoptère parce qu'en ce moment, il y a la nage libre dans la Seine. 10 Km pour les femmes ce matin. Il y a eu une athlète qui a eu besoin de soins, c'est la triathlète belge Claire MICHEL. Est-ce qu'elle est vraiment tombée malade à cause de l'eau de la Seine ? Parce qu'on est un peu perdu entre les Fake news, les rumeurs et les fuites.

FREDERIC VALLETOUX
Alors il y a eu des rumeurs, il y a eu des Fake news, et puis surtout, il y a eu ce qu'elle a dit, elle, et elle a dit qu'elle n'avait jamais été hospitalisée, qu'elle n'avait pas été touchée par cette bactérie E. Coli dont on surveille le taux dès qu'on fait des prélèvements dans la Seine.

THOMAS SOTTO
Et qu'on peut attraper par ailleurs.

FREDERIC VALLETOUX
Et qu'on peut attraper par ailleurs, bien sûr. Et donc à partir de là, c'est vrai que c'est la responsabilité, le choix à la fois de l'organisateur, donc de Paris… du COJO, mais aussi de la fédération concernée, de dire si, au vu des résultats, ils maintiennent ou ils alignent les compétitions.

THOMAS SOTTO
Donc là, quand elle nage ce matin, vous n'êtes pas inquiet, Monsieur le ministre ?

FREDERIC VALLETOUX
Ben non, je ne suis pas inquiet. Ça veut dire qu'il y a des prélèvements qui ont été faits. Et les fois où on a été inquiets, on a vu les taux se relever, rappelez-vous, il y a eu des entraînements, ou même des compétitions, qui ont été reportés, annulés pour permettre effectivement de rester dans les normes qui soient acceptables.

THOMAS SOTTO
Comment ils se passent, ces JO, pour notre système de santé, sachant qu'il est quand même très sollicité ?

FREDERIC VALLETOUX
Ils se passent bien.

THOMAS SOTTO
Il y a beaucoup de monde en France et à Paris notamment aujourd'hui.

FREDERIC VALLETOUX
Non, mais ils se passent très bien, d'abord parce que ça avait été anticipé, il y a eu un gros travail. Et moi, je veux saluer vraiment tous les soignants qui ont organisé leurs vacances pour les prendre avant, qui les prendront peut-être après, mais qui en tous les cas sont au rendez-vous. Parce que l'équipe de France des soignants, elle est là, que ce soit dans les 12 hôpitaux qui, aux côtés de l'APHP, ce grand hôpital parisien qui fait notre fierté, se sont mobilisés, où les 80 services de l'APHP qui aujourd'hui sont à plein en effectifs et pourraient prendre en charge s'il y avait besoin. Mais on voit que les besoins ne sont pas complètement au rendez-vous, et tant mieux. Mais on s'était préparé, on pourrait prendre en charge des niveaux de patients plus importants. Et finalement, il y a eu aujourd'hui 14 000 interventions tout compris.

THOMAS SOTTO
C'est quoi par rapport à d'habitude ?

FREDERIC VALLETOUX
Bon, c'est des coups de chaleur, c'est des gens qui vont dans les postes de soins, qui sont proches des enceintes sportives parce qu'eux, ils se sont foulé la cheville, parce qu'ils ont un coup de chaleur. Il y a eu très peu d'hospitalisations.

THOMAS SOTTO
Mais en volume ? En volume, c'est plus que d'habitude ?

FREDERIC VALLETOUX
Je vais vous donner un chiffre. Par exemple, hier, il y a à peu près 55 000 hospitalisations aux urgences en France, c'est à peu près le chiffre, 50 000. Il y a eu, je pense, une dizaine, une quinzaine peut-être d'hospitalisations liées aux JO, c'est-à-dire des touristes, des spectateurs. Je ne parle même pas d'athlètes. Et puis il y a effectivement cette polyclinique qui fonctionne, parce que c'est normal.

THOMAS SOTTO
Donc Il n'y a pas de saturation de nos service hospitaliers ?

FREDERIC VALLETOUX
Il n'y a pas de saturation, et tant mieux. On s'y était préparé. Et quand bien même ce niveau augmenterait, puisqu'il reste encore quatre jours, on pourrait de toute façon, de manière tout à fait sereine, absorber cette prise en charge.

THOMAS SOTTO
Et pourtant, le week-end a été bien compliqué dans les hôpitaux de l'APHP que vous évoquez, avec une panne informatique géante qui, grosso modo, a duré de samedi midi à lundi matin 7 h. 38 hôpitaux ont été durement impactés. Il paraît que vous n'étiez même pas au courant, vous. Tous les fils de médecins qui vous ont dit : « Tiens, il y a un problème. »

FREDERIC VALLETOUX
On l'a appris par des boucles de médecins qui, très vite, se sont émus de la situation. Mais d'abord, de rappeler que la direction de l'APHP a très vite réagi. La première cellule de crise avait lieu moins d'une heure après le constat qu'il y avait une panne technique. Très vite, on a su aussi que ça n'était qu'une panne technique. C'est toujours plus rassurant…

THOMAS SOTTO
Avec quand même pas mal de conséquences.

FREDERIC VALLETOUX
Une cyber-attaque.

THOMAS SOTTO
Le Canard les a ciblés, les sorties anticipées des programmes…

FREDERIC VALLETOUX
Non, mais bien sûr !

THOMAS SOTTO
On a frôlé la cata dans certains services pédiatriques. Le Canard dit que des soignants ont dû renoter de tête les prescriptions de tous les enfants venus.

FREDERIC VALLETOUX
Ben quand vous n'avez plus…

THOMAS SOTTO
Les labos ne pouvaient plus communiquer les résultats. Mardi encore, les applications qui permettaient la chimiothérapie, la mise en oeuvre des chimio, n'étaient pas restaurées. Ça met quand même en lumière la vulnérabilité…

FREDERIC VALLETOUX
Ben effectivement, le fait que l'informatique aujourd'hui est partout, et elle est nécessaire, elle est utile, et que quand on n'a plus accès à son ordinateur, aux bases de données, évidemment, on perd un certain nombre d'informations. Mais néanmoins, moi, je veux saluer la réaction des personnels soignants d'abord qui étaient sur le terrain. Heureusement que c'est arrivé peut-être en période où effectivement les services étaient pleins. On attend les prochains jours pour en être certain, mais on n'a pas eu d'incidents majeurs. Tant mieux. Mais ça, on le doit à l'engagement, à la réactivité, et puis peut-être aussi parce que l'APHP s'était beaucoup préparé à des exercices de cyberattaques, ils ont anticipé les différents types d'attaques.

THOMAS SOTTO
Nous avons compris ce qui s'était passé ou pas ? On est sûr que ça ne passera pas en septembre ou en octobre, quand il y aura tout le monde ?

FREDERIC VALLETOUX
C'est une panne technique qui peut arriver sur n'importe quel serveur. Ça a grillé, il n'y avait plus l'électricité pendant 2 h 30. Et quand on a rallumé, quand on a remis de l'électricité, eh bien, il y a des processeurs qui ont été grillés, et donc qui ont entraîné un certain nombre de défauts des applications.

THOMAS SOTTO
Ça ne vous inquiète pas plus que ça ?

FREDERIC VALLETOUX
Bah si, c'est toujours dommageable, mais on a évité le pire, ça, je dois le dire, même si effectivement, ça a été difficile pour le personnel hospitalier de l'AP-HP, mais ils ont très bien réagi et je dois dire, la direction a organisé aussi toutes les cellules de crise nécessaires pour accompagner autant que possible et rétablir autant, aussi vite que possible la situation.

THOMAS SOTTO
Frédéric VALLETOUX, dans quelques jours, vous ne serez plus ministre de la Santé. On va se parler franchement, se parler franchement ?

FREDERIC VALLETOUX
Oui, on va se parler franchement, oui.

THOMAS SOTTO
Dans nos hôpitaux, on a un personnel qui fait dix fois plus que ce qu'il faudrait pour que la maison de leur tombe pas sur la tête. On a une sorte de pieuvre, de bureaucratie qui écrase, tous les chefs de service, le disent, le répète depuis des années sans être entendus. Quand et comment va-t-on sauver ce joyau en péril qui s'appelle l'hôpital public français ?

FREDERIC VALLETOUX
C'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur et…

THOMAS SOTTO
Ça nous tient à coeur à tous et pas seulement ceux qui travaillent là-bas.

FREDERIC VALLETOUX
Non, non, mais à tous, je dis bien, aux Français et si c'est un paquebot, l'hôpital public, il y a déjà beaucoup de choses qui ont été faites. Aujourd'hui, on est sur la bonne voie, on forme plus de soignants, tout, tout niveau, des médecins, des paramédicaux, d'infirmiers, infirmières, on forme plus de soignants. Ça va produire ses effets dans quelques années, on investit plus dans l'hôpital, je ne vais pas vous donner les chiffres, ce n'est pas le lieu et le moment, mais on investit dans l'hôpital.

THOMAS SOTTO
Mais est-ce qu'il ne faut pas reprendre l'olympisme plus vite, plus haut et plus fort ? Non mais, est-ce qu'il ne faut pas mettre un plan Marshall. Il ne faut pas que ce soit la priorité des priorités ?

FREDERIC VALLETOUX
On peut décider un plan Marshall, mais ça ne fera pas sortir des pédiatres, ça ne fera pas sortir des radiologues, ça ne fera pas sortir des cardiologues d'un claquement de doigts, donc, il faut remettre le système. Il faut, je le redis, former plus, investir plus, investir dans du matériel, investir dans l'immobilier, investir dans les forces humaines. On rouvre des lits dans les hôpitaux, on ne le dit pas assez, mais aujourd'hui, depuis un moment…

THOMAS SOTTO
En été, on ferme beaucoup dans les services d'urgence aussi notamment.

FREDERIC VALLETOUX
C'est des tensions. On les ferme parce qu'on n'a pas assez de médecins. On aurait les médecins nécessaires, on ne serait pas obligé de les fermer, mais aujourd'hui, dans des CHU, on rouvre des lits, on parlait de l'AP-HP tout à l'heure, 400 lits qui ont été réouverts ces derniers mois, donc dans différents services.

THOMAS SOTTO
Donc, on est sur la bonne voie ?

FREDERIC VALLETOUX
On est sur la bonne voie. Simplement, c'est un chemin qui est long et il faut comprendre que Paquebot, ce système est un paquebot, on a donné des coups de gouvernail, il commence à tourner dans le bon sens, simplement, le mouvement est lent.

THOMAS SOTTO
On commence à réentendre parler du Covid, Frédéric VALLETOUX, déjà…

FREDERIC VALLETOUX
Un petit peu, mais il n'a jamais disparu le Covid …

THOMAS SOTTO
Il y a une quarantaine d'athlètes ont été touchés. Est-ce qu'il y a…

FREDERIC VALLETOUX
Pas quarantaine d'athlètes qui ont été touchés, c'est l'OMS qui a dit ce chiffre, il s'est excusé quelques heures après il a dit que c'était des infections…

THOMAS SOTTO
Ah, c'est combien alors ?

FREDERIC VALLETOUX
Non, non, c'est… Les chiffres du Covid, je ne l'ai pas, mais quand bien même, quarante athlètes ont eu le Covid, sur les 10 714 athlètes qui sont accueillis aujourd'hui, vous voyez, on est à moins de zéro, donc, c'est 0,3 ou 0,4…

THOMAS SOTTO
Donc, ce n'est pas inquiétant ? Il n'y a pas un retour inquiétant du Covid ?

FREDERIC VALLETOUX
Non, pas du tout, ce n'est pas un retour du Covid. Le Covid est toujours là. Aujourd'hui, on a des hospitalisations pour Covid tous les jours qui sont très faibles en France, mais qui ne sont pas du tout au niveau qu'on a connu évidemment…

THOMAS SOTTO
Ça ne justifie pas de dispositif particulier pour la rentrée ?

FREDERIC VALLETOUX
Non, c'est moins de 1 % des hospitalisations, le Covid, donc vous voyez, c'est vraiment minimal, c'est l'épaisseur du trait, mais c'est toujours là, le Covid est toujours là.

THOMAS SOTTO
Vous dites qu'il faut qu'on remette le masque, ou ce n'est pas nécessaire ?

FREDERIC VALLETOUX
Non, il ne faut pas. Après, ce sont les fédérations qui le décident. Certaines équipes ont voulu se protéger parce qu'ils avaient un ou deux cas de Covid et donc, elles ont demandé à tout le staff de mettre le masque, mais ça, c'est les décisions des fédérations, en tout cas au niveau national, certainement pas.

THOMAS SOTTO
Vous avez Conseil des ministres lundi ou pas ?

FREDERIC VALLETOUX
Je n'ai pas été informé encore, je ne sais pas.

THOMAS SOTTO
Vous ne savez pas ?

FREDERIC VALLETOUX
Et en off, on vous dit quoi ? Il y a Conseil des ministres ou pas ?

THOMAS SOTTO
On ne me dit rien en off parce que pour l'instant, le président de la République n'a pas fait des choix qui lui incombait, mais il a renvoyé un certain nombre de rendez-vous après les J.O. On est encore dans les JO, il y a encore trois jours de compétition et de la cérémonie de clôture.

THOMAS SOTTO
Et à propos de compétition, vous êtes pour la défiscalisation des primes pour les médaillés d'or, d'argent et de bronze ou pas ?

FREDERIC VALLETOUX
Ce débat-là, je le trouve étonnant parce que s'il y a… Ce Gouvernement a quand même sacrément augmenté les primes. On est passé de 65 000 euros pour une médaille d'or à 80 000 euros, on a augmenté pour tous, on a donné des primes pour la première fois dans ces J.O., des primes vont être données au staff, pas simplement aux sportifs qui gagnent, qui sont sur le podium, mais aussi au staff qui les encadre. Et donc, il y a un travail d'accompagnement et il ne faut pas oublier que toutes les politiques ont été mises en place depuis quelques années, en préparation de ces JO, ont permis d'accompagner près de 600 athlètes de haut niveau. Je parle vraiment…

THOMAS SOTTO
Donc, c'est un mauvais procès ?

FREDERIC VALLETOUX
Oui, c'est un mauvais procès et quelque part, c'est une question d'équité. Tout le monde doit être soumis à l'impôt et ces primes, à partir du moment où elles ont été sacrément augmentées, il n'est pas illogique qu'ils soient soumis aussi à l'impôt, c'est une question d'équité, l'accompagnement financier en tout cas, était là. Enfin, un jour, on fera le lien entre toutes les médailles qu'on a gagné et la politique sportive d'accompagnement des athlètes de haut niveau qui a été mise en place depuis des années.

THOMAS SOTTO
C'est sûr que ça ne tombe pas du ciel.

FREDERIC VALLETOUX
Ça ne tombe pas du ciel ces trucs-là.

THOMAS SOTTO
Merci beaucoup, Frédéric VALLETOUX, d'être venu dans les 4V. Merci également à Nathalie BATON pour la traduction en langue des signes. A suivre, il y a du chaos dans l'air, figurez-vous, puisque Inès HIRIGOYEN a décidé de tout miser sur la boxe ce matin. À tout de suite, Inès.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 août 2024