Texte intégral
Le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation a présenté un projet de loi constitutionnelle pour une Corse autonome au sein de la République.
À l'occasion de la commémoration du 80e anniversaire de la Libération de la Corse, le Président de la République s'est exprimé le 28 septembre 2023 devant l'Assemblée de Corse sur l'avenir de l'île au sein de la République. Il a manifesté le souhait que soit tenue en Corse la promesse républicaine, en particulier la sécurité de nos concitoyens, en redonnant confiance à la société corse, à sa jeunesse, et en relançant vigoureusement le développement de l'île. Il a estimé que, pour cela, la Corse, enracinée dans la France et dans la République, avait besoin aujourd'hui de davantage de liberté, de reconnaissance de son identité, de sa singularité insulaire et méditerranéenne. Il a souhaité que cette singularité puisse être reconnue et trouver sa place au sein de notre Constitution.
À cette fin et en application du premier alinéa de l'article 89 de la Constitution, le Premier ministre a proposé au Président de la République le projet de loi constitutionnelle pour une Corse autonome au sein de la République, examiné aujourd'hui en conseil des ministres, sur le rapport du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.
Depuis plusieurs années, et en particulier à la suite de plusieurs élections qui s'y sont tenues, la Collectivité de Corse souhaite bénéficier d'un statut d'autonomie actant sa singularité. En ce sens, la Corse est un territoire dont les spécificités ont des incidences concrètes quotidiennes.
Partant, pour répondre à cette aspiration et rendre possibles la conception et l'adoption d'un cadre juridique prenant en compte les spécificités et intérêts propres de la Corse, la création d'un nouvel article de la Constitution est nécessaire.
L'élaboration de ce projet de loi constitutionnelle s'est faite avec les élus de Corse dans le cadre de négociations politiques qui ont abouti à un accord en mars 2024 sur des écritures constitutionnelles. Le Gouvernement a consulté la collectivité de Corse le 26 mars 2024 sur ce texte. L'Assemblée de Corse a exprimé son adhésion à ces écritures et à ce processus politique inédit à la quasi-unanimité de ses membres. C'est ce texte qui a été présenté en conseil des ministres.
Le présent projet de loi constitutionnelle comporte une disposition unique, insérant au sein du titre XII de la Constitution, un nouvel article 72-5. Ce nouvel article de la Constitution est composé de six alinéas.
Ce projet de loi constitutionnelle reconnaît un statut d'autonomie à la collectivité de Corse et les spécificités de la Corse.
Ces spécificités seront de nature à justifier que les normes applicables en Corse puissent différer du reste du territoire. Ce statut d'autonomie se caractérisera par l'octroi de pouvoirs normatifs d'adaptation et d'édiction des normes, pour que la collectivité de Corse puisse adapter ou fixer les normes en prenant en compte ses spécificités sans méconnaître ni les autres principes constitutionnels, parmi lesquels la souveraineté nationale et l'indivisibilité de la République et le fait que la langue de la République est le français, ni le droit de l'Union européenne.
Forte de ce nouveau pouvoir normatif, la collectivité de Corse ne pourra cependant pas intervenir dans les domaines régaliens relevant de l'État, ni dans les domaines relevant des communes. De même l'adaptation ou la fixation de normes qui lui sont propres ne pourront intervenir lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti.
Le projet de loi constitutionnelle précise également les modalités de contrôle de ces nouveaux pouvoirs, avec l'intervention du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel, en renvoyant à une loi organique le soin de fixer les conditions dans lesquelles seront exercées ces nouvelles compétences normatives et leur champ d'intervention.
Enfin, ce projet de loi constitutionnelle peut permettre la consultation des électeurs inscrits sur les listes électorales de Corse, sur le projet de statut de la Corse fixant les pouvoirs normatifs défini par la loi organique après avis de l'Assemblée de Corse.
Avancée majeure pour la reconnaissance des spécificités de la Corse, fruit d'un processus politique inédit, ce projet de loi constitutionnelle la fait bénéficier d'un régime d'autonomie propre, conforme à sa singularité d'île méditerranéenne, au sein de la République.