Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
8h32 et vous êtes bien sûr RMC et BFM TV. Bonjour Catherine VAUTRIN,
CATHERINE VAUTRIN
Bonjour Apolline DE MALHERBE,
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes l'un des poids lourds de ce Gouvernement. Vous êtes ministre du travail, de la santé, des solidarités, des familles. Vous ne serez sans doute plus ministre au-delà du 8 septembre. On va y revenir avec ce vote de confiance convoqué par François BAYROU. On va y revenir aussi sur les conséquences et sur la manière dont vous pouvez peut-être tenter de sauver ce Gouvernement. Mais je voudrais commencer par un chiffre qu'on révèle sur RMC, ce matin, parce que pendant qu'il y a ce chaos politique, cette incertitude, il y a 30 000 chefs d'entreprise en France qui ont perdu leur job depuis le début de l'année. En six mois, c'est 5 % de plus que l'an dernier et de très nombreux d'entre eux qui nous disent leur inquiétude. Je voudrais que vous écoutiez Yann. Yann, il est bouché, artisan bouché dans le Gard. Il m'a appelé ce matin sur RMC. Écoutez sa détresse.
YANN, ARTISAN BOUCHER DANS LE GARD
C'est 30 000 entreprises qui ferment et c'est à ajouter aux 68 000 qui ont fermé l'année dernière. Mais ça n'inquiète absolument personne au niveau de nos hommes politiques et tout ça. Maintenant, c'est qui veut la place et qui aura la place, ce sont des chiens. Depuis que notre cher président a fait sa crise de colère l'année dernière et qu'il a dissous et tout ça, il nous met dans… Notre clientèle est dans un état d'anxiété de folie. Je suis vraiment en colère. Ça fait 40 ans bientôt que je bosse, je suis boucher, fils de boucher. J'en ai marre.
APOLLINE DE MALHERBE
Boucher, fils de boucher. Et il dit, en fait, la situation politique, vous n'en avez pas la mesure. Elle a des conséquences hyper concrètes dans leur vie quotidienne.
CATHERINE VAUTRIN
Alors d'abord, je voudrais dire combien je mesure totalement ce qui se passe, parce que vous savez, avant d'être ministre, moi, je suis une élue locale et je suis élue d'un territoire qui est la ville de Reims et 140 communes autour de Reims. Et je vois bien la situation du quotidien. Et cette situation du quotidien, c'est précisément celle qui nous oblige. Parce que la question qui se pose, et vous avez vu, j'imagine, le papier de Patrick MARTIN ce matin, le patron des patrons qui s'exprime dans le journal Les Échos, que dit-il ? Il dit précisément : "La France n'a pas les moyens d'avoir une crise supplémentaire". Et pourquoi est-ce que nous n'avons pas les moyens d'avoir une crise supplémentaire ? Parce que nous sommes dans un environnement international qui probablement pour la première fois depuis très longtemps, a des vraies conséquences sur notre quotidien. C'est les vendanges en champagne. Vous croyez qu'ils ont le moral à aller couper du raisin quand on va se prendre les taxes qu'on va se prendre avec les États-Unis Voilà des choses concrètes de la réalité.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais j'ai envie de vous dire, Catherine VAUTRIN, à qui la faute ? C'est-à-dire, est-ce qu'on a les moyens d'une crise ou pas ? Mais pourquoi avoir mis une telle crise dans le pays ?
CATHERINE VAUTRIN
Mais la question, Apolline DE MALHERBE, c'est qu'il y a aussi un élément qu'il faut que chacun partage. C'est la situation financière de la France. La France est à la limite du surendettement. Ça fait 50 ans, au sens propre du terme. Dernier budget en équilibre, 1974. On a tous entendu ça. On est, j'oserais dire, presque tous nés dans une France qui était en déficit. La différence, c'est qu'aujourd'hui s'ajoute une crise internationale et s'ajoute un sujet dont on ne parle pas, qui est le sujet de la démographie. Avec, aujourd'hui, des entreprises qui ferment, mais des entreprises qui n'arrivent pas à recruter, des problèmes, aujourd'hui, de nombre d'actifs par rapport au nombre d'inactifs. Et c'est l'ensemble de ces éléments qu'il faut qu'on arrive à…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais alors, attendez, vous venez de dire, crise économique, crise internationale. Franchement, est-ce que c'était le moment de rajouter une crise politique ?
CATHERINE VAUTRIN
La volonté du Premier ministre, ça a été de dire : "Chacun doit, un, mesurer, et deux, surtout, chacun doit se dire qu'on est tous acteurs". Ça veut dire que, quelque part, il faut qu'on freine la dépense de la Maison France. Pour freiner la dépense de la Maison France, ce n'est pas de se dire : "C'est mon voisin, c'est-à-dire c'est le riche qui va payer des impôts, ou c'est l'étranger qu'on va mettre dehors". La question, elle n'est pas là. La question, elle est, comment vous, moi, votre voisin, votre frère, votre sœur, comment chacun se dit : "Moi, voilà ce que je fais, voilà quelle est la dépense publique que je diminue". Et c'est ça que François BAYROU a voulu faire partager. C'est cette notion qui est que cette crise, chacun a une partie de la réponse.
APOLLINE DE MALHERBE
Catherine VAUTRIN, je le disais, vous êtes ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités, des Familles. Vous êtes une élue depuis de longues dates. Vous avez présidé, non seulement la ville de Reims, mais aussi la métropole. Vous vous y attendiez, là ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, moi, ce que je vois arriver clairement, c'est un sujet qui monte petit à petit, qui est celui de, est-ce que la France veut toujours son modèle social ? Est-ce que la France a encore les moyens de se payer ce modèle-là ? Et si on veut le garder et si on veut se le payer, comment on fait pour le payer ?
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous n'avez pas répondu à ma question. Mais, Catherine VAUTRIN, est-ce que vous vous y attendiez ? Quand vous étiez là, au premier rang, que vous avez François BAYROU, le Premier ministre, qui annonce en direct qu'il joue la peau de votre Gouvernement avec ce vote de confiance, est-ce que vous étiez au courant ? Est-ce que vous vous y attendiez ? Est-ce que c'est un scénario que vous aviez imaginé ?
CATHERINE VAUTRIN
Je n'étais pas au courant et aucun membre du Gouvernement à ma connaissance n'était au courant. Derrière cela, nous avons vu comment, au mois de juillet, nous avons travaillé sur le sujet. Et ce que l'on a vu, c'est, dès le 15 juillet, les premières réactions sur les éléments du budget. Moi, ma stratégie aujourd'hui, c'est évidemment de dire, il y a un projet de budget sur la table, il y a une volonté d'économie. Moi, je suis prête à discuter de chaque économie.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous y croyez encore ?
CATHERINE VAUTRIN
Tout est toujours possible dès lors que nous nous mettons d'accord sur deux éléments.
APOLLINE DE MALHERBE
Moi, je me souviens de Michel BARNIER qui, à ce micro, disait la même chose. Il disait : "Tout est possible", encore quelques heures avant le sauté.
CATHERINE VAUTRIN
Je vais vous dire deux choses. La première, c'est, un, que chacun dise, oui, effectivement, il y a un sujet de modèle et il faut qu'on en soit conscient. L'addiction à la dépense publique n'est plus possible. La deuxième chose, c'est celle-là qu'on doit mettre en avant, c'est rassembler. Ce n'est pas forcément de la confiance. C'est tout le problème, d'ailleurs, du 49-1, c'est que les gens ne veulent pas voter la confiance. Ce qu'on leur demande, ce n'est pas de voter une confiance, c'est de voter la prise de conscience de la situation. C'est de dire : "On est d'accord sur le constat". À partir du moment où on est d'accord sur le constat, la question qui vient immédiatement après, c'est : "Comment on se met autour d'une table pour trouver les solutions".
APOLLINE DE MALHERBE
Vous les avez d'ailleurs convoqués les uns et les autres.
CATHERINE VAUTRIN
Invité.
APOLLINE DE MALHERBE
Invité, c'était d'ailleurs avant cette annonce de François BAYROU. Est-ce que ces rendez-vous sont pris, est-ce qu'ils sont toujours d'actualité ? Est-ce que les différents groupes parlementaires que vous aviez invités à vous rencontrer viennent ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors moi, pour l'instant, j'ai rencontré depuis lundi, plutôt les gens du Bloc central qui sont évidemment…
APOLLINE DE MALHERBE
Ce n'est pas ceux-là qu'il y avait besoin de rencontrer.
CATHERINE VAUTRIN
C'est pour ça que je vous réponds qu'ils sont évidemment tous venus. Normalement, je vois les oppositions, et notamment le Parti socialiste, la semaine prochaine, la semaine d'après, parce qu'ils avaient la proposition.
APOLLINE DE MALHERBE
La semaine prochaine, la semaine d'après ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez pourquoi ? Parce qu'ils avaient le 11 septembre leur entrée. C'était un calendrier partagé. Moi, je suis évidemment à disposition. Tant que je serai là, je suis à disposition.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous avez tenté d'avancer le calendrier, de leur dire : "On se voit aujourd'hui, on se voit demain, on se voit ce soir ?"
CATHERINE VAUTRIN
Mais on se voit en sortant de chez vous. Le sujet, il est là aujourd'hui. C'est-à-dire que la capacité, elle est de travailler dès qu'ils le souhaitent.
APOLLINE DE MALHERBE
Catherine VAUTRIN, hier matin, à ce même micro, c'était le patron des socialistes à l'Assemblée nationale, Boris VALLAUD. Je lui ai dit : "Mais est-ce que cet été, le ministre de l'économie, qui est celui en plus avec lequel ils ont le plus d'affinité, spontanément, il vient de la gauche, Éric LOMBARD, est-ce que vous vous êtes parlé ?" Il me dit : "Oui, il m'a appelé pour me dire on se parlera après le 11 septembre". Mais est-ce que vous aviez mesuré que ce budget, si vous ne l'écriviez pas ensemble, ça ne passerait pas ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, j'ai, cet été, rencontré plutôt les socialistes qui s'occupent de la partie sociale, eu égard aux responsabilités qui sont les miennes. On a commencé à ébaucher des scénarii, et l'idée était effectivement de travailler ensemble. Maintenant, pourquoi ? Parce que vous savez que la copie, on la rend le 30 septembre.
APOLLINE DE MALHERBE
Il n'y avait pas d'autre solution, là ? Quand je vous écoute, je me dis, mais en fait, quelle folie d'avoir tout d'un coup joué…
CATHERINE VAUTRIN
Je crois que la volonté du Premier ministre, très concrètement, c'était deux étapes. La première, c'est on est d'accord sur le constat. La deuxième, on bâtit ensemble une solution.
APOLLINE DE MALHERBE
Entre temps, il rajoute, paf, le 8 septembre.
CATHERINE VAUTRIN
Oui, mais nous sommes le 27 août, 28 je crois. On était lundi 25, mardi 27.
APOLLINE DE MALHERBE
On est le 27, mercredi 27.
CATHERINE VAUTRIN
Mercredi 27, la copie doit être donnée telle que les textes le prévoient. Le premier mardi d'octobre, c'est le 7 octobre. Nous, on avait prévu de le donner le 30 septembre. Bon là, tout va dépendre évidemment de ce qui va se passer le 8 septembre. Mais en tout cas, la volonté à travailler, et vous avez entendu le Premier ministre disant : "Je me battrai jusqu'à la dernière heure comme un chien et qui essaie d'avancer des propositions."
APOLLINE DE MALHERBE
Alors, parmi les propositions, il y a l'idée de demander un effort spécifique au plus haut revenu. Est-ce que vous partagez cette idée ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je pense que l'effort doit être fait par tout le monde. Et c'est un élément très important. Parce que quand vous écoutez l'inquiétude des Français, je reprends le boucher que vous citiez tout à l'heure, Yann, c'est quelqu'un qui bossait.
APOLLINE DE MALHERBE
Il avait trois salariés, il n'en a plus aucun.
CATHERINE VAUTRIN
Et je pense que Yann, son sujet aujourd'hui, c'est de dire : "Moi concrètement, j'ai toujours travaillé, j'ai toujours bossé. Je ne vois pas pourquoi il n'y aurait que moi qui participerais". Donc notre travail, il est que chacun participe. Et quand je dis chacun participe…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça veut dire quoi ?
CATHERINE VAUTRIN
Je vais entrer dans le détail.
APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce qu'il faut un effort spécifique ? Spécifique, ça ne veut pas dire le même effort que les autres. C'est-à-dire spécifique, singulier, davantage, à très haut revenu.
CATHERINE VAUTRIN
Apolline DE MALHERBE, vous ne réglerez pas le problème uniquement avec les très hauts revenus.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais ce n'est pas moi, c'est François BAYROU qui dit : "Je suis prêt à demander un effort spécifique au plus haut revenu".
CATHERINE VAUTRIN
C'est un des éléments de la copie, mais ce n'est pas le seul. Et c'est d'autant moins seul que l'on sait tous que les revenus, au bout d'un moment, ils ont une flexibilité, une capacité à bouger. Et donc, pourquoi ne pas quitter le pays, qui est important. Donc oui, il est logique que les plus hauts revenus participent et qu'ils soient appelés à participer spécifiquement. Pour autant, il ne peut pas y avoir que les hauts revenus. Parce que vous avez tous ces Français qui se lèvent tous les matins et qui travaillent, et qui eux, attendent quoi ? Eux, ce qu'ils attendent, c'est qu'y compris celles et ceux qui n'ont pas ou pas beaucoup de revenus, qui sont des gens qui, aujourd'hui, ne travaillent pas forcément, qui sont des gens qui, comme tous les Français, consomment. Et eux, qu'est-ce qu'on peut faire dans ces cas-là ? Je vous donne un exemple très simple, et je reviens sur le champ dont j'ai la responsabilité, qui est celui de la santé. Quand on demande aux Français, par exemple, de faire de la prévention, quand on envoie aux Français des demandes pour qu'ils fassent des dépistages, je vous donne un exemple. Les trois dépistages contre le cancer, il n'y a pas 60 % des Français qui le font. Vous n'allez pas me dire que ça, c'est une question de revenus. C'est juste une question d'être citoyen, je peux être soigné gratuit.
APOLLINE DE MALHERBE
En fait, vous dites que ce n'est pas seulement pour leur santé, c'est aussi pour la dépense publique.
CATHERINE VAUTRIN
Mais bien sûr, c'est un engagement. Et ça, ça ne coûte rien, et c'est un pays responsable. Je suis citoyen, je respecte ça.
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a une irresponsabilité des Français ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je considère qu'à partir du moment où on vous demande gratuitement, j'insiste là-dessus, gratuitement, d'aller faire un dépistage et que vous ne le faites pas, je suis désolée, mais là, vous avez un sujet.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc, non seulement on met sa vie en danger, mais on génère du coup... En danger, la question des arrêts maladie, j'entends sur les antennes de RMC ou de BFM TV, votre campagne de pub lancée par le Gouvernement où on entend ces Français qui disent : "Je vais me mettre en arrêt". Ils disent : "Mais attends, c'est quoi cette histoire ? Ce n'est pas toi qui te mets en arrêt". Là, vous avez décidé de taper fort.
CATHERINE VAUTRIN
Mais clairement, parce qu'aujourd'hui, je ne peux pas accepter l'idée de : "J'ai eu un différend ce matin avec mon patron, je me mets en arrêt". Et le schéma qui est : "Je vais voir mon médecin, j'ai un arrêt de travail, et puis, l'arrêt est renouvelé". Il y a des pathologies. L'arrêt de travail, par définition, ça s'appelle un arrêt-maladie. Donc, le fait générateur, c'est que j'ai une pathologie qui nécessite que je ne travaille pas parce que je suis malade et je dois être soignée. La force de la France, c'est : "Effectivement je peux être soignée". En revanche, si vous dévoyez le système, vous tuez le système.
APOLLINE DE MALHERBE
Catherine VAUTRIN, la suppression des deux jours fériés, ça pénalise précisément ceux qui travaillent. Ça pénalise les entreprises. Les Français n'en veulent pas, les patrons n'en veulent pas. Est-ce que ça aussi, vous vous dites c'était une connerie, c'était une erreur ? On n'a pas mesuré et on est prêt à les retirer.
CATHERINE VAUTRIN
Le Premier ministre a dit clairement lundi que nous étions prêts à travailler sur l'ensemble de notre copie dès lors que nous trouvions un rendement qui soit un rendement qui permette de baisser la dépense. Rappelez-vous, ce budget présente 40 milliards d'économies sur plus de 1 700 milliards de dépenses. C'est-à-dire qu'on demande un effort à 2,5 %. L'idée, c'est de dire : "Si vous avez d'autres éléments, faites-les". Maintenant, l'idée de dire qu'il faut effectivement travailler plus si on veut garder le modèle français tel qu'il existe conduit à plusieurs choses. Effectivement, la notion du nombre d'heures travaillées mais conduit aussi à avoir plus de monde qui travaille. Et ça, c'est le travail…
APOLLINE DE MALHERBE
Je vais être honnête, Catherine VAUTRIN. On est là, on fait cette interview, vous parlez de ce qu'il faut faire, pas faire, des mains tendues aux uns et aux autres, du dialogue, des rendez-vous que vous avez pris. Mais en fait, on sait, vous comme moi, que tout ça est un peu illusoire. En fait, vous n'y êtes déjà plus vraiment.
CATHERINE VAUTRIN
Mais vous n'avez pas le choix. Eu égard à la situation de la France…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous faites semblant. Je ne dis pas que vous faites semblant là, mais vous comprenez ce que je veux dire.
CATHERINE VAUTRIN
Mais je comprends. Quand on est... Vous êtes une femme engagée dans la responsabilité professionnelle qui est la vôtre, comme moi, je suis une élue engagée. Aujourd'hui, moi, ma responsabilité, c'est celle de l'avenir du pays.
APOLLINE DE MALHERBE
Qu'est-ce que vous dites ? Je me battrai jusqu'au bout ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je me battrai jusqu'au bout parce que je suis convaincue que les pays qui s'en sont sortis, aujourd'hui, s'en sont sortis parce qu'ils ont eu capacité à mobiliser tout le monde.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous me faites penser à ces personnages dans les dessins animés, dans les bandes dessinées, qui courent, qui sont au-dessus de la falaise et qui continuent à courir pensant qu'ils sont loin du sol, qui s'est en réalité dérobé sous leurs pieds.
CATHERINE VAUTRIN
Mais Apolline DE MALHERBE, comment ont fait les Espagnols ? Comment ont fait les Portugais ? Comment ont fait les Suédois ?
APOLLINE DE MALHERBE
Oui mais le temps où ils étaient encore sur la montagne. Pas quand ils étaient dans le vide.
CATHERINE VAUTRIN
Non, la Grèce était dans le vide.
APOLLINE DE MALHERBE
La Grèce, oui, mais le Portugal non, l'Italie.
CATHERINE VAUTRIN
La Grèce était dans le vide, l'Italie est encore derrière nous, en termes de taux. Pas pour longtemps, mais elle l'est encore au moment où on se parle. Donc, il y a deux options. Soit vous vous dites : "Moi, après tout, je rentre chez moi et tout va bien". Soit vous vous dites : "Je ne me suis pas engagée pour mon pays pour laisser faire", et vous y croyez encore et vous vous dites que la capacité... Parce que d'un côté, il y a cette menace de chaos. Quand vous regardez, et je reviens à Yann, le Boucher, vous croyez qu'il a envie qu'on laisse le pays avec un chaos ? Vous voyez le coup des manifestations les unes derrière les autres, le coup pour le pays, le retard que la France va encore prendre ? Moi, je me refuse à ça. Et c'est pour ça que je pense qu'il faut qu'on continue, qu'on mobilise et qu'on essaie de rassembler tous ceux qui croient dans la capacité de transformation du modèle.
APOLLINE DE MALHERBE
Si ça saute, dissolution ?
CATHERINE VAUTRIN
Le président de la République, moi, je lis ce que dit le président, dit à ce stade, pas de dissolution. Qu'est-ce qu'apporte une dissolution ?
APOLLINE DE MALHERBE
Vous pourriez y aller, vous ? Est-ce qu'on sait, on se souvient, que vous aviez été évoqué pour aller à Matignon ? C'est un job difficile.
CATHERINE VAUTRIN
Le sujet, ce n'est pas le sort de telle ou telle personne. Le sujet, c'est le sort de la France aujourd'hui. Et la question, c'est qui est capable de fédérer ?
APOLLINE DE MALHERBE
Mais si on vous le demande, vous le ferez ?
CATHERINE VAUTRIN
La question aujourd'hui, Apolline DE MALHERBE, c'est qui est capable de fédérer ? Parce que le vrai sujet, c'est comment on est capable de rassembler, et on voit bien à qui on tend la main, c'est du PS à LR avec lesquels il faut qu'on arrive à rassembler. Et pour autant, j'écoute tout le monde, y compris, je le dis franchement, j'écoute tout le monde, y compris le Rassemblement national. Vous savez, moi, j'ai porté un débat à l'Assemblée nationale au printemps. Le débat sur un sujet très polémique qui était celui de la fin de vie. On a été en capacité de travailler avec tout le monde dans l'hémicycle.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous seriez prêts là à parler avec eux ?
CATHERINE VAUTRIN
Le débat, ce n'est pas…
APOLLINE DE MALHERBE
À les voir, à les rencontrer, vous les avez invités ?
CATHERINE VAUTRIN
Le débat s'est passé, de très grande qualité. J'ai, pour le budget 2025, j'ai invité tout le monde, j'ai rencontré tout le monde. Les seuls qui n'ont pas voulu venir, c'est LFI. Moi, j'avais invité tout le monde. Parce que je pense que dès lors que vous êtes parlementaire, vous êtes détenteur du vote de vos concitoyens dans votre circonscription. Et donc, vous êtes 177e, vous devez être entendue si vous le souhaitez.
APOLLINE DE MALHERBE
Catherine VAUTRIN, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles. Encore quelques questions assez précises. L'une sur la GPA, la gestation pour autrui. Gabriel ATTAL veut légaliser la GPA. Vous êtes pour, vous êtes contre ?
CATHERINE VAUTRIN
Je suis contre.
APOLLINE DE MALHERBE
Contre ? Sans discussion ?
CATHERINE VAUTRIN
Sans discussion, je suis contre. Autant, je travaille sur la PMA, qui me paraît un élément extrêmement important.
APOLLINE DE MALHERBE
La procréation médicalement assistée.
CATHERINE VAUTRIN
La procréation médicalement assistée, qui est un enjeu majeur dans le sujet qui est le nôtre aujourd'hui. En revanche, la GPA ne me…
APOLLINE DE MALHERBE
La GPA, c'est non. Hausse de la mortalité infantile. Vous parliez tout à l'heure de la question de la pyramide des âges. Quelle honte pour la France. Qu'est-ce qu'on peut faire ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors, là-dessus, nous avons besoin de savoir de quoi nous parlons. C'est la raison pour laquelle j'ai mis en place ce qu'on appelle le registre, qui va nous permettre de mesurer les raisons de cette mortalité infantile. Elle se passe très concrètement entre le deuxième et le 27e jour. On a des causes qui ne sont pas claires, aujourd'hui. Ça peut venir de la santé des mères. Ça peut venir du sujet d'équipements néonatals dans le pays, des naissances qui se font à des grossesses extrêmement courtes.
APOLLINE DE MALHERBE
Tardive ?
CATHERINE VAUTRIN
Non, alors, deux choses. Il y a d'un côté, l'âge de la mère, mais il y a de l'autre côté, des naissances à un nombre de semaines extrêmement limité. Donc, tout ça a besoin d'être mesuré. C'est ce que nous faisons pour, derrière, apporter des réponses.
APOLLINE DE MALHERBE
Christine Lagarde qui dit, hier : "On a besoin de travailleurs étrangers". Vous partagez ou pas ?
CATHERINE VAUTRIN
Mais c'est tout le sujet des métiers en tension. Bien sûr que oui. C'est là où on a besoin d'une régulation sur les métiers en tension parce qu'aujourd'hui, vous avez des professionnels qui vous expliquent qu'ils n'ont pas capacité à trouver les personnels dont ils ont besoin. Donc, oui, dans ce contexte des métiers en tension.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez entendu le témoignage de la maman d'Esteban. Esteban qui a appelé les urgences et qui est mort faute de soins, faute d'avoir été vraiment suffisamment diagnostiqué, pris au sérieux.
CATHERINE VAUTRIN
Alors, il y a dans notre pays, les SAMU et le Service médical d'urgence avec une régulation qui est faite. Je ne me prononcerai pas, ce matin, sur un cas précis dont je n'ai pas les éléments. Ce que je tiens à dire aux Français qui est extrêmement important, on appelle le 15, il y a une régulation et l'objectif, c'est précisément que cette régulation réponde aux situations. Évidemment, je ne peux que dire que cette situation est dramatique et qu'elle doit être analysée de façon entière et évidemment, toutes les leçons.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est vrai que vous avez demandé aux hôpitaux de se préparer en cas de guerre à accueillir des milliers de soldats blessés ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, Apolline DE MALHERBE, les hôpitaux sont tout le temps en train de préparer des épidémies, des accueils.
APOLLINE DE MALHERBE
Ce n'est pas nouveau, ce n'est pas spécifique ? Je précise que ce sont mes confrères du Canard Enchaîné qui disent avoir consulté des documents internes qui demandent aux agences régionales de santé de se préparer, je cite : "Préparer les soignants à un possible engagement majeur".
CATHERINE VAUTRIN
Mais ça fait partie de l'anticipation comme les stocks stratégiques, comme les épidémies. Souvenez-vous, je n'étais pas en responsabilité au moment du Covid. Souvenez-vous, il n'y avait pas de mots assez durs sur l'impréparation du pays. Donc, il est tout à fait normal que le pays anticipe les crises, les conséquences de ce qui se passe. Ça fait partie de la responsabilité des administrations centrales et heureusement.
APOLLINE DE MALHERBE
Catherine VAUTRIN, si vous pouviez revenir un peu en arrière, lundi, vous vous dites qu'il y a des choses et que, quand même, peut-être, ça aurait été bien d'éviter ça.
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, moi, je crois que ce qui est important, ce n'est pas de regarder derrière, c'est de se projeter. Moi, mon sujet aujourd'hui, il est de se dire : "Comment on arrive à partager deux choses avec les Français. Le premier, c'est le surendettement. C'est mortifère pour la souveraineté du pays. Le deuxième, c'est comment on arrive à se mettre d'accord, peut-être sur 5-6 objectifs, pas 50, et comment on fait de 26, une année utile".
APOLLINE DE MALHERBE
Dans quelques heures, ce sera le Conseil des ministres, le premier après cette annonce. Vous l'imaginez comment, ce Conseil des ministres ?
CATHERINE VAUTRIN
Comme tous les Conseils des ministres, trois parties, A, B, C, des textes, des mesures d'ordre individuel et un point sur la situation internationale.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous me donnez le menu, mais sur les visages des uns et des autres ?
CATHERINE VAUTRIN
Je ne vous laisse pas choisir parce qu'on ne choisit pas.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 septembre 2025